Visite de Bolsonaro en Russie: un «très mauvais» timing

Le 14 novembre 2019, le président russe Vladimir Poutine) salue le président brésilien Jair Bolsonaro avant le 11e sommet des BRICS au palais Itamaraty à Brasilia (AFP)
Le 14 novembre 2019, le président russe Vladimir Poutine) salue le président brésilien Jair Bolsonaro avant le 11e sommet des BRICS au palais Itamaraty à Brasilia (AFP)
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Publié le Dimanche 13 février 2022

Visite de Bolsonaro en Russie: un «très mauvais» timing

  • Jair Bolsonaro pourrait aussi trouver en Vladimir Poutine un précieux allié pour une élection qui s'annonce tendue: il a averti qu'il contesterait toute défaite en octobre
  • Une annulation de la visite aurait envoyé le signal que le Brésil est une marionnette des Etats-Unis. Et le président russe Vladimir Poutine, soucieux de montrer qu'il n'est pas isolé, « aurait été furieux»

RIO DE JANEIRO: Le président brésilien Jair Bolsonaro est attendu en Russie mardi, une visite que Washington n'a pas pu empêcher et qui sème une grande perplexité en pleine crise russo-occidentale autour de l'Ukraine.

Pour les analystes, le voyage du Brésilien -qui doit se rendre jeudi dans la Hongrie de son allié Viktor Orban- ne pouvait guère tomber à un pire moment, et répond à des préoccupations de politique intérieure.

"Le timing est très mauvais", relève Guilherme Casaroes, analyste politique à la Fondation Getulio Vargas (FGV).

"Les Etats-Unis ont exercé beaucoup de pressions pour que cette visite soit annulée", souligne Felipe Loureiro, professeur de relations internationales à l'Université de Sao Paulo (USP). Plusieurs ministres avaient aussi plaidé contre ce déplacement. 

Mais une annulation "aurait envoyé le signal que le Brésil est une marionnette des Etats-Unis", ajoute-t-il.

Et le président russe Vladimir Poutine, soucieux de montrer qu'il n'est pas isolé, "aurait été furieux". 

L'invitation lancée par Moscou fin novembre, alors que les tensions s'installaient déjà, va donc être honorée en dépit du spectre de guerre: le président brésilien d'extrême droite devrait être reçu au Kremlin mercredi par son homologue russe, un "homme fort" qu'il admire.

Jair Bolsonaro a déclaré aller à Moscou pour "améliorer les relations commerciales", tout en étant "au courant des problèmes qu'ont quelques pays avec la Russie".

La première puissance d'Amérique latine ne souhaite pas être embarquée dans ce conflit et prône "le dialogue".

Aucun grand accord n'étant attendu, la motivation de Jair Bolsonaro, auquel les sondages prédisent unanimement une défaite cinglante face à l'ex-président Lula à la présidentielle d'octobre, est "électoraliste", pour M. Casaroes, de la FGV.

« Un dernier coup diplomatique »

Ce président très affaibli "n'a pratiquement rien à son actif après trois ans de mandat. Aller en Russie, c'est pour lui un signe de grandeur".

Bolsonaro "s'est mis à dos les Etats-Unis, la Chine, l'Europe", poursuit l'analyste, qui qualifie de "sans précédent" l'isolement diplomatique du Brésil.

Le président brésilien vise donc "un dernier coup diplomatique". "Il a besoin de flatter" son électorat radical en allant chez des dirigeants autoritaires tels que Poutine et Orban, tout en satisfaisant le puissant lobby de l'agronégoce.

Mais Bolsonaro pourrait aussi trouver en Poutine un précieux allié pour une élection qui s'annonce tendue: il a averti qu'il contesterait toute défaite en octobre. 

"L'objectif principal de cette visite pour Bolsonaro est antidémocratique", avance, comme d'autres analystes, Felipe Loureiro. 

"Il est totalement lié à son souhait de faire dérailler l'élection brésilienne. Et la Russie est friande de cyber-attaques et de désinformation", avance l'expert.

De source diplomatique brésilienne, les discussions porteront sur les investissements russes dans les hydrocarbures et infrastructures au Brésil et les échanges commerciaux, encore modestes. 

La Russie fournit essentiellement des engrais à ce grand producteur agricole, auquel elle achète viande bovine, volailles, soja, café et arachide -- mais sans représenter plus que 0,74% des exportations brésiliennes. 

Le Brésil, membre avec la Russie des Brics (Inde, Chine, Afrique du Sud) est devenu, pour deux ans, membre non-permanent du Conseil de sécurité de l'ONU, où il pourrait éventuellement se ranger du côté de Poutine sur l'Ukraine, après avoir soutenu les Etats-Unis il y a une semaine.

« Canaux bouchés »

Si l'Ukraine arrive à la table des discussions, cette visite risque de tourner au cauchemar diplomatique pour un Bolsonaro soucieux de ne pas s'écarter du bilatéral.

"Il est imprévisible et s'il dit quelque chose qui ressemble à un appui à Poutine cela apportera beaucoup de problèmes au Brésil, particulièrement avec les Etats-Unis", estime M. Loureiro.

La relation bilatérale est froide depuis le départ de la Maison blanche du républicain Donald Trump, et son successeur démocrate Joe Biden n'a toujours pas parlé à Jair Bolsonaro. "Leurs canaux de communication sont bouchés", relève M. Casaroes.

Grâce à sa proximité avec Trump, le Brésil de Bolsonaro était devenu en 2019 "allié majeur non-membre de l'Otan". 

Mais aujourd'hui, la mission des Etats-Unis à Brasilia n'a pas d'ambassadeur depuis la mi-2021.

Les Etats-Unis, comme l'Europe, n'attendent plus grand chose de Brasilia avant l'installation d'un nouveau pouvoir en janvier 2023, selon les analystes.


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.


Ouragan Melissa: près de 50 morts dans les Caraïbes, l'aide afflue

Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
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  • L’ouragan Melissa, le plus puissant à frapper la Jamaïque en près de 90 ans, a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque, laissant derrière lui des destructions massives et des centaines de milliers de sinistrés
  • L’aide internationale afflue vers les Caraïbes, avec des secours venus des États-Unis, du Venezuela, de la France et du Royaume-Uni, alors que les experts rappellent le rôle du réchauffement climatique dans l’intensification de ces catastrophes

CUBA: L'aide internationale afflue vendredi vers les Caraïbes dévastées par le passage de l'ouragan Melissa qui a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque.

Habitations en ruines, quartiers inondés et communications coupées... L'heure est à l'évaluation des dégâts causés par Melissa qui devrait désormais faiblir au dessus dans l'Atlantique nord après avoir passé les Bermudes.

Selon le Centre national américain des ouragans (NHC), les inondations devraient s'atténuer aux Bahamas, mais les crues pourraient demeurer à un niveau élevé à Cuba, en Jamaïque, en Haïti et en République dominicaine voisine.

Rendu plus destructeur par le réchauffement climatique, l'ouragan a été le plus puissant à toucher terre en 90 ans lorsqu'il a frappé la Jamaïque mardi en catégorie 5, la plus élevée sur l'échelle Saffir-Simpson, avec des vents d'environ 300 km/h.

"Le bilan confirmé est désormais de 19 morts" dont neuf à l'extrémité ouest de l'île, a déclaré jeudi soir la ministre jamaïcaine de l'Information Dana Morris Dixon, citée par les médias locaux.

De nombreux habitants n'ont toujours pas pu contacter leurs proches, ont expliqué les autorités. L'armée jamaïcaine s'emploie à dégager les routes bloquées, selon le gouvernement.

"Il y a eu une destruction immense, sans précédent, des infrastructures, des propriétés, des routes, des réseaux de communication et d'énergie", a déclaré depuis Kingston Dennis Zulu, coordinateur pour l'ONU dans plusieurs pays des Caraïbes. "Nos évaluations préliminaires montrent que le pays a été dévasté à des niveaux jamais vus auparavant".

- Melissa "nous a tués" -

A Haïti, pas directement touché par l'ouragan mais victime de fortes pluies, au moins 30 personnes, dont dix enfants, sont mortes, et 20 portées disparues, selon le dernier bilan des autorités communiqué jeudi. Vingt-trois de ces décès sont dus à la crue d'une rivière dans le sud-ouest du pays.

A Cuba, les communications téléphoniques et routières restent largement erratiques.

A El Cobre, dans le sud-ouest de l'île communiste, le son des marteaux résonne sous le soleil revenu: ceux dont le toit s'est envolé s'efforcent de réparer avec l'aide d'amis et de voisins, a constaté l'AFP.

Melissa "nous a tués, en nous laissant ainsi dévastés", a déclaré à l'AFP Felicia Correa, qui vit dans le sud de Cuba, près d'El Cobre. "Nous traversions déjà d'énormes difficultés. Maintenant, évidement, notre situation est bien pire."

Quelques 735.000 personnes avaient été évacuées, selon les autorités cubaines.

- Secouristes -

L'aide promise à l'internationale s'achemine dans la zone dévastée.

Les États-Unis ont mobilisé des équipes de secours en République dominicaine, en Jamaïque et aux Bahamas, selon un responsable du département d'État. Des équipes étaient également en route vers Haïti.

Le secrétaire d'État Marco Rubio a également indiqué que Cuba, ennemi idéologique, est inclus dans le dispositif américain.

Le Venezuela a envoyé 26.000 tonnes d'aide humanitaire à son allié cubain.

Le président du Salvador Nayib Bukele a annoncé sur X envoyer vendredi "trois avions d'aide humanitaire en Jamaïque" avec "plus de 300 secouristes" et "50 tonnes" de produits vitaux.

Kits de première nécessité, unités de traitement de l'eau: la France prévoit de livrer "dans les prochains jours" par voie maritime une cargaison d'aide humanitaire d'urgence en Jamaïque, selon le ministère des Affaires étrangères.

Le Royaume-Uni a débloqué une aide financière d'urgence de 2,5 millions de livres (2,8 millions d'euros) pour les pays touchés.

Le changement climatique causé par les activités humaines a rendu l'ouragan plus puissant et destructeur, selon une étude publiée mardi par des climatologues de l'Imperial College de Londres.

"Chaque désastre climatique est un rappel tragique de l'urgence de limiter chaque fraction de degré de réchauffement, principalement causé par la combustion de quantités excessives de charbon, de pétrole et de gaz", a déclaré Simon Stiell, secrétaire exécutif de l'ONU chargé du changement climatique, alors que la grande conférence climatique des Nations unies COP30 s'ouvre dans quelques jours au Brésil.

Avec le réchauffement de la surface des océans, la fréquence des cyclones (ou ouragans ou typhons), les plus intenses augmente, mais pas leur nombre total, selon le groupe d'experts du climat mandatés par l'ONU, le Giec.