La police intervient pour évacuer les contestataires des rues d'Ottawa, 70 arrestations

Les manifestants tiennent bon devant les forces de l'ordre à Ottawa, Canada, le 18 février 2022 (Photo, AFP).
Les manifestants tiennent bon devant les forces de l'ordre à Ottawa, Canada, le 18 février 2022 (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Samedi 19 février 2022

La police intervient pour évacuer les contestataires des rues d'Ottawa, 70 arrestations

  • La plupart des meneurs de la contestation ont été arrêtés. Le militant d'extrême droite Pat King a été interpellé vendredi en début d'après-midi alors qu'il quittait la ville. Son arrestation s'est faite en direct sur Facebook Live
  • Dans certaines artères recouvertes de neige fraîche, de premiers véhicules ont également été remorqués. Les autorités continuent d'avertir les manifestants qu'ils doivent quitter la zone s'ils ne veulent pas être interpellés

OTTAWA: Un face-à-face tendu mais pas de heurts: la police canadienne a arrêté 70 personnes vendredi dans le cadre de son intervention visant à déloger les camionneurs et manifestants qui font le blocus du centre d'Ottawa depuis trois semaines pour protester contre les mesures sanitaires.

"A 15H00 (20H00 GMT), nous avons interpellé 70 personnes accusées de multiples infractions", a déclaré le chef par intérim de la police d'Ottawa Steve Bell.

Il a ajouté que l'opération se déroulait "comme prévu" mais qu'elle prendrait "du temps". "Nous continuons de gagner du terrain pour libérer les rues", a-t-il dit, précisant qu'il n'y avait pas eu de blessés jusqu'ici.

Des centaines de policiers étaient déployés dans les rues de la capitale fédérale face à des manifestants qui refusent de quitter les lieux malgré les nombreux avertissements et la proclamation de l'état d'urgence. 

Les forces de l'ordre, qui ont encerclé toute la zone de la manifestation, resserraient lentement leur étau sur les contestataires mais n'étaient pas encore parvenues jusqu'à l'avenue principale, qui longe le parlement. 

Dans certaines artères recouvertes de neige fraîche, de premiers véhicules ont également été remorqués. Les autorités continuent d'avertir les manifestants qu'ils doivent quitter la zone s'ils ne veulent pas être interpellés.

"Vous devez partir. Vous devez cesser toute activité illégale et retirer immédiatement votre véhicule et/ou vos biens de tous les sites de protestation illégaux. Toute personne se trouvant sur le site d'une manifestation illégale peut être arrêtée", a tweeté la police.

« Comme César »

La plupart des meneurs de la contestation ont été arrêtés. Le militant d'extrême droite Pat King a été interpellé vendredi en début d'après-midi alors qu'il quittait la ville. Son arrestation s'est faite en direct sur Facebook Live. Peu après, c'était au tour de l'ancien policier Daniel Bulford.

Deux autres leaders, Tamara Lich et Chris Barber, avaient été arrêtés jeudi soir et devaient comparaître devant la justice vendredi.

Minimisé au départ par les autorités, ce mouvement, qui a débuté fin janvier, est parti de camionneurs protestant contre l'obligation d'être vaccinés pour passer la frontière entre le Canada et les Etats-Unis.

Mais les revendications se sont étendues à un refus de l'ensemble des mesures sanitaires et, pour de nombreux manifestants, à un rejet du gouvernement de Justin Trudeau. Ce dernier a dit jeudi que cette contestation n'avait plus rien de "pacifique".

Certains manifestants avaient juré avant l'intervention policière de tenir jusqu'au bout. Installé depuis le premier jour, Csaba Vizis s'est dit prêt à "rentrer chez lui glorieux comme César ou dans un sac mortuaire". "Je n'ai rien à perdre, je gagne ça ou je meurs", affirme ce camionneur de 50 ans.

Sur son compte Twitter, le mouvement tentait encore vendredi de rallier: "Si vous n'êtes pas d'accord avec les excès illégaux et sans précédent du gouvernement, abandonnez tout ce que vous faites et venez faire entendre votre voix! Canadiens, votre pays a besoin de vous".

« Menace financée par l'étranger »

Pour la première fois depuis le début de cette contestation qui se déroule sous les fenêtres du Parlement fédéral, ce dernier est resté fermé vendredi. "La séance d'aujourd'hui est annulée" pour des raisons de sécurité, a annoncé Anthony Rota, le président de la Chambre des communes.

La chambre examine depuis jeudi la mise en œuvre de la loi sur les mesures d'urgence invoquée lundi par Justin Trudeau pour mettre un terme aux blocages "illégaux" en cours dans le pays. 

C'est seulement la deuxième fois que cette disposition est utilisée en temps de paix, la dernière fois remontant à la crise de 1970 quand Pierre Elliott Trudeau, le père de l'actuel Premier ministre, était au pouvoir. Elle est très contestée par l'opposition conservatrice.

"Notre économie et notre démocratie font face à une menace sérieuse et financée par l'étranger", a estimé vendredi la vice-Première ministre Chrystia Freeland. 

"On ne peut permettre à ces blocus et occupations illégaux d'usurper l'autorité de gouvernements démocratiquement élus", a-t-elle ajouté. La veille, elle avait indiqué que des comptes bancaires de personnes ou d'entreprises liées à la manifestation avaient été gelés. 

Selon le gouvernement, les blocus aux frontières de la part de manifestants ont coûté des "milliards de dollars à l'économie canadienne". Ce sont ces blocages et notamment celui pendant sept jours du pont Ambassador, qui relie l'Ontario à la ville américaine de Detroit, qui ont poussé Washington à intervenir auprès du gouvernement de Justin Trudeau. 

La ville d'Ottawa, la province de l'Ontario et le Canada dans son ensemble ont été placés en état d'urgence en raison de ce mouvement de contestation sans précédent. 


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Short Url
  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Short Url
  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Short Url
  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.