Poutine ordonne à son armée d'entrer dans les territoires prorusses d'Ukraine

Vladimir Poutine a décidé lundi de reconnaître l'indépendance des séparatistes prorusses d'Ukraine (AFP)
Vladimir Poutine a décidé lundi de reconnaître l'indépendance des séparatistes prorusses d'Ukraine (AFP)
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Publié le Mardi 22 février 2022

Poutine ordonne à son armée d'entrer dans les territoires prorusses d'Ukraine

  • Le président russe a intimé dans la foulée à l'Ukraine de cesser immédiatement « ses opérations militaires » contre les séparatistes ou d'assumer « la responsabilité de la poursuite de l'effusion de sang »
  • Dans son discours long de 65 minutes, Vladimir Poutine a passé en revue l'histoire des relations russo-ukrainiennes depuis des siècles et exposé une thèse selon laquelle l'Ukraine est une nation créée de toute pièce à l'époque soviétique

MOSCOU: Vladimir Poutine a ordonné lundi à son armée d'entrer dans les territoires séparatistes de l'Est de l'Ukraine après avoir reconnu leur indépendance, une décision qui pourrait entraîner une guerre avec Kiev.


Deux décrets du président russe, signés après une allocution télévisée, reconnaissent les "républiques populaires" de Donetsk et Lougansk et demandent au ministère de la Défense que "les forces armées de la Russie (y assument) les fonctions de maintien de la paix".


De ce déploiement militaire, ni calendrier ni informations sur son éventuelle ampleur n'ont été précisés dans ces documents. 


Dans une longue adresse télévisée, dans laquelle il a laissé apparaître des moments de colère, M. Poutine a intimé à l'Ukraine de cesser immédiatement "ses opérations militaires" contre les séparatistes, au risque d'assumer "la responsabilité de la poursuite de l'effusion de sang".


La Russie a quelque 150 000 soldats aux frontières de l'Ukraine selon l'Occident, laissant craindre une invasion d'ampleur. 


Deux accords d'entraide entre Moscou et les sécessionnistes, d'une durée de dix ans, doivent être ratifiés par le Parlement russe mardi. Ils prévoient le déploiement "des unités militaires russes nécessaires au maintien de la paix dans la région et d'assurer une sécurité durable aux parties".

Les diplomates américains en Ukraine déplacés en Pologne pour des «raisons de sécurité»

Les diplomates américains encore en Ukraine sont déplacés en Pologne pour des "raisons de sécurité", a annoncé le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken, quelques heures après l'annonce par la Russie de l'envoi de ses troupes dans les régions séparatistes pro-russes d'Ukraine.


"Pour des raisons de sécurité, le personnel du département d'Etat actuellement à Lviv passera la nuit en Pologne", a annoncé le secrétaire d'État Antony Blinken dans un communiqué.


Le chef du Kremlin a reconnu l'indépendance des deux territoires séparatistes de Donetsk et de Lougansk dans l'Est de l'Ukraine et a demandé par décret au ministère de la Défense que "les forces armées de la Russie (y assument) les fonctions de maintien de la paix". 


Cette décision intervient un peu plus d'une semaine après que les États-Unis ont transféré leur ambassade de Kiev à Lviv, dans l'ouest de l'Ukraine, invoquant "l'accélération spectaculaire" du renforcement des forces russes à la frontière. 


Le personnel de l'ambassade des États-Unis à Kiev avait déjà été considérablement réduit après que les États-Unis ont ordonné le départ de la plupart des diplomates.

Effrayant 
"L'Ukraine qualifie les derniers actes de la Russie de violation de la souveraineté et de l'intégrité territoriale de notre Etat", a réagi le président ukrainien Volodymyr Zelensky dans une adresse à la Nation, assurant que Kiev ne cèderait pas "une parcelle" du pays et n'avait peur "de rien ni personne".


Il a également appelé ses partenaires occidentaux à un soutien "clair" et "efficace". 


"Je suis choqué, j'ai beaucoup de famille à l'Est, je suis de Donetsk et je suis à Kiev depuis huit ans, et c'est l'information la plus effrayante en huit ans", a réagi auprès de l'AFP un habitant de la capitale ukrainienne, Artem Ivachenko, cuisinier de 22 ans.  


Ces décisions signent la fin d'un processus de paix sous médiation franco-allemande qui, bien que régulièrement violé, avait permis de stopper les affrontements les plus violents de ce conflit ayant fait plus de 14.000 morts depuis son déclenchement en 2014, après l'annexion de la Crimée par Moscou.


Par ailleurs, les Etats-Unis ont estimé à plusieurs reprises que Moscou pouvait lancer une opération de conquête pour prendre Kiev par la force.

Ukraine: l'UE va sanctionner des intérêts russes

L'UE a qualifié la reconnaissance de l'indépendance des régions séparatistes par Moscou de "violation flagrante du droit international" et va sanctionner "ceux qui sont impliqués" dans cette décision, ont annoncé lundi les chefs de l'UE.


Vladimir Poutine a décidé lundi de reconnaître les territoires de Donetsk et de Lougansk en Ukraine en tant qu'entités indépendantes.


"Cette mesure constitue une violation flagrante du droit international ainsi que des accords de Minsk. L'Union réagira par des sanctions à l'encontre des personnes impliquées dans cet acte illégal", ont déclaré dans un communiqué commun le président du Conseil européen Charles Michel et la présidente de la Commission Ursula von der Leyen.


Les ambassadeurs des Vingt-Sept à Bruxelles vont se réunir mardi matin pour "lancer le processus de préparation des sanctions ciblées annoncées" qui devront être adoptées par les ministres des  Affaires étrangères, a annoncé la présidence française du Conseil de l'UE.
"Nous viserons un certain nombre d'activités localisées dans le Donbass et directement liées aux intérêts russes", a précisé l'Elysée.


Les sanction ciblées européennes visent des personnes ou des entités. Elles consistent en une interdiction de voyager et un gel des avoirs dans l'UE.


L'Otan a également condamné la reconnaissance des deux territoires séparatistes prorusses et a appelé Vladimir Poutine à "choisir la voie de la diplomatie" et à "retirer les forces déployées aux frontières de l'Ukraine et en Ukraine".


Vladimir Poutine a au contraire ordonné dans la soirée à l'armée russe d'entrer dans les territoires séparatistes pour y assurer "les fonctions de maintien de la paix".


Le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell a qualifié cette "soi-disant mission de maintien de la paix" de "nouvelle agression directe contre l'Ukraine, une violation de son intégrité territoriale et de sa souveraineté". 


Concernant les sanctions de l'UE, "il y a différentes mesures et le degré de leur mise en œuvre dépend du niveau d'agression", a-t-il expliqué. Elles devront être décidées à l'unanimité des pays membres, mais "l'unanimité sur le dossier de l'Ukraine est garantie", a-t-il soutenu.


La convocation d'un sommet européen extraordinaire est envisagée en cas d'agression militaire russe en Ukraine.


"Si Vladimir Poutine déclenche une guerre, nous répondrons avec le levier le plus puissant dont nous disposons: des sanctions économiques et financières, car l'économie est le point faible de la Russie", avait déclaré dimanche Ursula von der Leyen. "Les sanctions financières signifieraient que la Russie serait pratiquement coupée des marchés financiers internationaux", avait-elle précisé.

Large condamnation à l'ONU des décisions et actions russes sur l'Ukraine

L'ONU et une majorité de membres du Conseil de sécurité, Etats-Unis en tête, ont dénoncé lundi lors d'une réunion d'urgence à New York la décision de la Russie de reconnaître l'indépendance des républiques sécessionnistes de l'est de l'Ukraine, comme celle de "déployer des troupes russes" dans cette région.


La désignation de l'armée russe, par le président Vladimir Poutine, en "force de maintien de la paix" pour justifier son entrée dans les territoires séparatistes de l'est de l'Ukraine, est "un non-sens", a déclaré l'ambassadrice des Etats-Unis aux Nations Unies Linda Thomas-Greenfield.


Le président Poutine "a annoncé depuis qu'il allait déployer des troupes russes dans ces régions. Ils les appellent des forces de maintien de la paix. C'est un non-sens. Nous savons ce qu'elles sont vraiment", a fustigé la diplomate américaine.


La secrétaire générale adjointe de l'ONU pour les Affaires politiques, Rosemary DiCarlo, avait au préalable vivement "regretté" les décisions et actions de la Russie.


"Les prochaines heures et jours seront critiques. Le risque de conflit majeur est réel et doit être évité à tout prix", a-t-elle réclamé lors de la réunion organisée à la demande notamment des Occidentaux.


Plusieurs membres du Conseil de sécurité ont fait part de leur condamnation des derniers développements.


"Qui est le prochain" à devoir être envahi, a demandé l'ambassadeur albanais, Ferit Hoxha, en condamnant ""une rupture du droit international".


Son homologue indien, T.S. Tirumurti, a fait part "de sa profonde inquiétude" et a appelé "à la retenue de toutes les parties", tandis que l'ambassadrice britannique, Barbara Woodward, exigeait de la Russie qu'elle fasse "marche arrière" et que le Brésil demandait "un cessez-le-feu immédiat" dans l'est de l'Ukraine.


Deux décrets du président russe, signés après une allocution télévisée, reconnaissent les "républiques populaires" de Donetsk et Lougansk et demandent au ministère de la Défense que "les forces armées de la Russie (y assument) les fonctions de maintien de la paix".

«Violation flagrante»
Les Etats-Unis, l'Union européenne, comme l'Otan et Londres, ont dénoncé la décision du président russe et évoqué des sanctions.


Le président Joe Biden a réaffirmé à son homologue ukrainien "l'engagement des Etats-Unis" au respect de "l'intégrité territoriale de l'Ukraine" et promis des mesures "rapides" et "résolues".


La présidence française a annoncé des sanctions prochaines de l'UE visant des entités et des individus russes. Et le Premier ministre britannique Boris Johnson veut décider mardi d'un "important paquet de sanctions".


Les membres occidentaux du Conseil de sécurité de l'ONU ont demandé une réunion d'urgence lundi soir de cette instance. La session se tiendra à 21H00 locales (02H00 GMT mardi).


L'Europe et les Etats-Unis ont menacé ces dernières semaines Moscou de lourdes sanctions en cas d'agression militaire.


Les annonces de M. Poutine interviennent à l'issue d'une journée qui a vu Moscou multiplier les accusations contre l'Ukraine, comme la destruction d'un poste-frontalier par l'artillerie ukrainienne ou l'infiltration d'une équipe de "saboteurs" donc cinq membres auraient été tués.


Kiev a démenti en bloc ces affirmations qui, pour les Occidentaux, font partie des efforts de Moscou visant à créer un prétexte à une intervention militaire.

Poutine, le «paranoïaque-
Dans sa longue allocution télévisée, M. Poutine a réitéré ses accusations infondées de "génocide" des Russes et russophones d'Ukraine.


Sur un ton professoral, il a donné une leçon d'Histoire revisitée par le Kremlin, présentant l'Ukraine comme un pays artificiel et indissociable de la Russie.


La présidence française a dénoncé la "dérive idéologique" et le "discours paranoïaque" de Vladimir Poutine.


Jusqu'au bout, les Européens ont essayé de le dissuader de passer à l'action.


Emmanuel Macron avait tenté encore dimanche soir de désamorcer la crise, espérant encore avoir arraché un sommet de la désescalade entre MM. Biden et Poutine. Le Kremlin a douché l'espoir lundi matin.

Ukraine: appels à la fermeté à gauche, Le Pen pour «retrouver la voie du dialogue»

Plusieurs candidats de gauche à la présidentielle ont appelé à la fermeté, après la décision de Vladimir Poutine de reconnaître l'indépendance des régions séparatistes prorusses de l'Ukraine, Marine Le Pen souhaitant, elle, que tout soit fait "pour retrouver la voie du dialogue" et Eric Zemmour appelant à "éviter une nouvelle guerre".


Pour la socialiste Anne Hidalgo, "la décision unilatérale de Vladimir Poutine constitue une violation du droit international et de la souveraineté de l'Ukraine". "La France et l’Europe doivent être solidaires, unies et fermes face à cette menace contre la paix en Europe", a-t-elle affirmé sur Twitter.


"La reconnaissance des entités séparatistes par Poutine porte atteinte à l'intégrité territoriale et à la démocratie de l'Ukraine. Aucune complaisance! J'en appelle à une réponse française et européenne ferme et unie", a réagi l'écologiste Yannick Jadot sur le même réseau social.


Pour Jean-Luc Mélenchon, "une ligne est franchie" et "quoiqu’on pense des arrière-pensées ou des logiques de situation, il n'empêche que c’est bien la Russie qui a pris la responsabilité de cet épisode". Dans un long communiqué, le candidat LFI évoque "le bilan navrant de Macron dans cet épisode" et demande que le Premier ministre s'explique "dans les heures qui viennent" devant l'Assemblée nationale.


Le communiste Fabien Roussel a fustigé dans un tweet "une décision extrêmement grave et dangereuse", affirmant que "tout doit être fait pour désamorcer cette guerre qui menace aux portes de l’Europe".


Pour Christiane Taubira, s'exprimant elle aussi sur Twitter, "la Russie choisit la force et le fait accompli. (...) La solidarité des États européens avec l’Ukraine ne doit pas faillir. Même si la diplomatie doit continuer d'œuvrer". 


La candidate du Rassemblement national Marine Le Pen a de son côté jugé que la décision de M. Poutine était "un acte éminemment regrettable", mais que "tout doit être fait pour retrouver la voie du dialogue afin d’assurer la paix en Europe".


"Désormais, la solution passe probablement par l’organisation d’une conférence réunissant les Etats-Unis, la Russie, la France, l’Allemagne, le Royaume-Uni ainsi que la Pologne, la Roumanie, la Hongrie et la Slovaquie, Etats frontaliers de l’Ukraine", a estimé Mme Le Pen dans un communiqué.


Appelant à éviter "absolument une nouvelle guerre", le candidat d'extrême droite Eric Zemmour estime d'ores et déjà que les futures sanctions que prendront les Etats-Unis et l'UE seront "inefficaces" et iront "à l'encontre de nos intérêts économiques". Il propose ainsi "un traité consacrant la fin de l'expansion de l'Otan".


Emmanuel Macron, qui a multiplié les entretiens ces derniers jours pour éviter la guerre en Ukraine, a condamné la décision du président russe et réclamé des "sanctions européennes ciblées" à l'encontre de Moscou, selon un communiqué de l'Elysée.

Les tensions, qui n'ont cessé de croître ces derniers mois, se sont encore aggravées depuis trois jours avec la recrudescence des heurts dans l'est de l'Ukraine entre forces de Kiev et les séparatistes.


Les observateurs de l'OSCE ont enregistré en 48 heures plus de 3 200 nouvelles violations de la trêve censée être en vigueur.


Lundi, Kiev a fait état de deux soldats et un civil ukrainiens tués.


Les rebelles ont compté trois civils ayant péri dans des bombardements ces dernières 24 heures.


La Russie a assuré lundi qu'au moins 61 000 personnes avaient été "évacuées" des zones séparatistes vers son territoire.


"C'est la guerre, la vraie", estime Tatiana Nikoulina, 64 ans, qui fait partie de ces personnes acheminées de la région de Donetsk vers la ville russe de Taganrog.


M. Poutine a aussi de nouveau incriminé les pays occidentaux, leur reprochant d'"utiliser l'Ukraine", ce qui "représente une menace sérieuse, très grande pour nous".


Les Russes se sont défendus de tout projet d'invasion de l'Ukraine, réclamant l'assurance que Kiev ne rejoindra jamais l'Otan et le retrait de l'Alliance d'Europe de l'Est.


L'écrivain israélien David Grossman qualifie de "génocide" la situation à Gaza

Des Palestiniens reçoivent de la soupe de lentilles dans un point de distribution de nourriture dans la ville de Gaza, le 1er août 2025. (AFP)
Des Palestiniens reçoivent de la soupe de lentilles dans un point de distribution de nourriture dans la ville de Gaza, le 1er août 2025. (AFP)
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  • Le célèbre écrivain israélien David Grossman a qualifié de "génocide" la manière dont son pays mène la guerre dans la bande de Gaza
  • Allant à contre-courant du gouvernement israélien, M. Grossman affirme rester "désespérément fidèle" à l'idée de deux Etats, la Palestine et Israël

ROME: Le célèbre écrivain israélien David Grossman a qualifié de "génocide" la manière dont son pays mène la guerre dans la bande de Gaza, affirmant en avoir "le cœur brisé", dans une interview publiée vendredi dans le quotidien italien La Repubblica.

"J'ai refusé pendant des années d'utiliser ce terme: "génocide". Mais maintenant je ne peux pas m'empêcher de l'utiliser, après ce que j'ai lu dans les journaux, après les images que j'ai vu et après avoir parlé avec des personnes qui y ont été", dit-il.

"Je veux parler comme une personne qui a fait tout ce qu'elle pouvait pour ne pas en arriver à qualifier Israël d'Etat génocidaire", assure-t-il.

"Et maintenant, avec une douleur immense et le cœur brisé, je dois constater ce c'est ce qui se passe devant mes yeux. "Génocide". C'est un mot avalanche: une fois que tu l'as prononcé, il ne fait que grossir, comme une avalanche. Et il apporte encore plus de destruction et de souffrance", ajoute M. Grossman dont les œuvres ont été traduites en de nombreuses langues, dont le français, l'anglais ou l'italien.

Interrogé sur ce qu'il pensait en lisant les chiffres sur les morts à Gaza, il a répondu: "je me sens mal".

"Mettre ensemble les mots +Israël+ et +famine+, le faire en partant de notre histoire, de notre supposée sensibilité aux souffrances de l'humanité, de la responsabilité morale que nous avons toujours dit avoir envers chaque être humain et non seulement envers les juifs... tout ça c'est dévastateur", poursuit M. Grossman.

Allant à contre-courant du gouvernement israélien, M. Grossman affirme rester "désespérément fidèle" à l'idée de deux Etats, la Palestine et Israël, "principalement parce que je ne vois pas d'alternative", saluant dans ce contexte la volonté du président français Emmanuel Macron de reconnaître en septembre l'Etat palestinien.

"Je pense que c'est une bonne idée et je ne comprends pas l'hystérie avec laquelle elle a été accueillie en Israël", dit-il.

"Il est clair qu'il faudra avoir des conditions précises: pas d'armes. Et la garantie d'élections transparentes dont sera exclu quiconque pense à utiliser la violence contre Israël", a conclu l'écrivain.


L'émissaire de Trump promet davantage d'aides humanitaires après une visite à Gaza

Des Palestiniens de Jabalia, dans le nord de la bande de Gaza, se précipitent vers un avion effectuant un largage d'aide au-dessus du territoire palestinien assiégé par Israël, le 1er août 2025. (AFP)
Des Palestiniens de Jabalia, dans le nord de la bande de Gaza, se précipitent vers un avion effectuant un largage d'aide au-dessus du territoire palestinien assiégé par Israël, le 1er août 2025. (AFP)
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  • L'émissaire américain Steve Witkoff a effectué vendredi une visite dans la bande de Gaza dévastée par la guerre, promettant d'y augmenter l'aide humanitaire
  • L'ONG Human Rights Watch (HRW) a fustigé le système de distribution d'aide mis en place par Israël et les Etats-Unis via la Fondation humanitaire à Gaza (GHF), devenu selon elle un "piège mortel" pour les Gazaouis

Gaza, Territoires palestiniens: L'émissaire américain Steve Witkoff a effectué vendredi une visite dans la bande de Gaza dévastée par la guerre, promettant d'y augmenter l'aide humanitaire, au moment où la pression s'accentue sur Israël face aux pertes humaines dans le territoire palestinien affamé.

En amont de cette visite de l'émissaire du président Donald Trump, l'ONG Human Rights Watch (HRW) a fustigé le système de distribution d'aide mis en place par Israël et les Etats-Unis via la Fondation humanitaire à Gaza (GHF), devenu selon elle un "piège mortel" pour les Gazaouis.

Après près de 22 mois d'une guerre dévastatrice déclenchée par une attaque sanglante du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023, la bande de Gaza assiégée par Israël est menacée d'une "famine généralisée" selon l'ONU et est totalement dépendante de l'aide humanitaire.

Entretemps, les bombardements et tirs israéliens ont continué dans le territoire palestinien, où la Défense civile a fait état de 22 Palestiniens tués, dont huit qui attendaient de l'aide.

"Qu'ont fait nos fils et nos filles? Qu'ont fait les enfants pour mériter cette famine? Ayez pitié de nous!", se lamente la sexagénaire Yasmine al-Farra à l'hôpital Nasser de Khan Younès (sud), où elle pleure son fils tué.

Steve Witkoff et l'ambassadeur américain en Israël, Mike Huckabee, ont visité dans la matinée un centre de la GHF "afin de connaître la vérité sur les sites d'aide", a indiqué M. Huckabee.

- "Nourrir les gens" -

M. Witkoff a ensuite précisé sur X que leur visite, de "plus de cinq heures", avait pour but "de fournir à @POTUS (le président Trump) une compréhension claire de la situation humanitaire et d'élaborer un plan visant à livrer de la nourriture et une aide médicale aux habitants de Gaza".

Selon le site américain Axios, M. Trump a déclaré travailler sur un plan à Gaza "pour nourrir les gens".

La GHF a lancé ses opérations fin mai, après près de trois mois de total blocus humanitaire imposé par Israël, écartant le système d'aide mis en place par l'ONU.

Depuis, 1.373 Palestiniens qui attendaient de l'aide ont été tués à Gaza, dont 859 près des sites de la GHF, une organisation au financement opaque, "la plupart" par l'armée israélienne, a affirmé l'ONU.

Dans un rapport, HRW a dénoncé un système humanitaire "militarisé" qui a provoqué selon l'ONG des "bains de sang". Elle a qualifié de "crimes de guerre" les "meurtres de Palestiniens en quête de nourriture, par les forces israéliennes".

L'armée israélienne, sollicitée par l'AFP, a dit examiner les rapports faisant état de victimes civiles près des zones de distribution d'aides.

Depuis une semaine, des avions de plusieurs pays ont largué des vivres à Gaza. Les autorités israéliennes ont annoncé que plus de 200 camions d'aide avaient été distribués jeudi par les organisations internationales.

Les agences internationales jugent ces aides insuffisantes et selon l'ONU 6.000 camions attendent le feu vert israélien pour entrer à Gaza.

- Vidéo d'un otage -

M. Witkoff, qui s'était rendu à Gaza en janvier, a rencontré jeudi le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, sous pression à la fois en Israël pour tenir ses engagements à détruire le Hamas et libérer les Israéliens kidnappés le 7-Octobre, et à l'étranger pour faire taire les armes à Gaza.

L'attaque du 7-Octobre a entraîné côté israélien la mort de 1.219 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de données officielles. Sur les 251 personnes enlevées ce jour-là, 49 sont toujours otages à Gaza, dont 27 ont été déclarées mortes par l'armée.

L'offensive de représailles lancée par Israël à Gaza, a fait au moins 60.249 morts, en majorité des civils, d'après les données du ministère de la Santé à Gaza, jugées fiables par l'ONU.

Vendredi, le Hamas a diffusé une vidéo d'un otage israélien, identifié par les médias israéliens comme Evyatar David, 24 ans. L'otage y apparaît amaigri et visiblement affaibli, détenu dans un tunnel.

L'AFP n'a pas pu déterminer l'authenticité de la vidéo, ni la date de son enregistrement.

Dans un rapport d'enquête publié vendredi, la chaîne publique britannique BBC a affirmé avoir recueilli des témoignages de membres du personnel médical, de groupes de défense des droits humains et de témoins sur plus de 160 enfants touchés par balle pendant la guerre à Gaza. Elle a ajouté que 95 avaient été touchés à la tête ou à la poitrine et que, selon des témoins, 57 d'entre eux auraient été visés par l'armée israélienne.

Interrogée à ce sujet, l'armée israélienne a déclaré que "toute atteinte intentionnelle aux civils, et en particulier aux enfants, est strictement interdite" par l'armée israélienne et le droit international.


Washington cible l'Autorité palestinienne, en plein débat sur la reconnaissance d'un Etat de Palestine

Le président de l'Autorité palestinienne Mahmud Abbas. (File/AFP)
Le président de l'Autorité palestinienne Mahmud Abbas. (File/AFP)
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  • Les Etats-Unis ont annoncé jeudi des sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), en pleine offensive en faveur d'un Etat de Palestine

WASHINGTON: Les Etats-Unis ont annoncé jeudi des sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), en pleine offensive en faveur d'un Etat de Palestine.

L'annonce des sanctions américaines survient en effet au moment où de nombreux Etats, dont la France et le Canada, ont promis de reconnaître un Etat de Palestine en marge de l'Assemblée générale de l'ONU en septembre, provoquant la colère d'Israël et des Etats-Unis qui parlent d'une "récompense" faite au Hamas dans la bande de Gaza.

La France et l'Arabie saoudite ont co-présidé lundi et mardi à l'ONU une conférence internationale, plaidant ainsi pour la solution à deux Etats, israélien et palestinien, seul chemin pour parvenir à la paix au Proche-Orient.

Washington, qui rejette toute reconnaissance unilatérale d'un Etat palestinien, a décrit la conférence comme étant une "insulte" faite aux victimes de l'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023.

Dans un communiqué jeudi, le département d'Etat américain a fait part de sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'OLP, sans les identifier, accusés notamment d'"internationaliser le conflit avec Israël".

Washington reproche aux deux institutions de "soutenir des actions au sein d'organisations internationales qui sapent et contredisent les engagements antérieurs" notamment à travers la Cour internationale de justice (CIJ) et la Cour pénale internationale (CPI).

Washington avait sanctionné en juin quatre magistrates de la CPI, estimant que leurs procédures visant l'exécutif israélien étaient "illégitimes" et "politisées".

Washington, principal allié d'Israël, accuse aussi l'OLP et l'Autorité palestinienne de "continuer à soutenir le terrorisme, y compris par l'incitation et la glorification de la violence" dans les livres scolaires, une accusation de longue date.

Les sanctions consistent en un refus de visa pour des membres des deux institutions.

- "Distorsion morale" -

"Il est dans l'intérêt de notre sécurité nationale d'imposer des sanctions et de tenir l'OLP et l'Autorité palestinienne responsables du non-respect de leurs engagements et de la remise en cause des perspectives de paix", a indiqué le département d'Etat.

Le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar, s'est aussitôt félicité de cette décision, jugeant que "l'Autorité palestinienne doit payer le prix de sa politique actuelle consistant à verser des indemnités aux terroristes et à leurs familles pour les attentats commis et pour l'incitation à la haine contre Israël dans les écoles, les manuels scolaires, les mosquées et les médias palestiniens".

Il a également relevé, sur X, que cette mesure "met en évidence la distorsion morale de certains pays qui se sont empressés de reconnaître un Etat palestinien virtuel tout en fermant les yeux sur le soutien de l'Autorité palestinienne au terrorisme et à l'incitation à la haine".

L'Autorité palestinienne, dont le président est Mahmoud Abbas, administre la Cisjordanie occupée, tandis que l'OLP, créée en 1964, est le mouvement fondateur représentant les Palestiniens, longtemps dirigée par leur leader historique Yasser Arafat.

L'OLP rassemble la majorité des mouvements politiques palestiniens mais pas le mouvement islamiste Hamas, qui s'est emparé du pouvoir à Gaza en 2007.

Des pays arabes et occidentaux voudraient voir l'Autorité palestinienne, très affaiblie, jouer un rôle dans la gouvernance de la bande de Gaza après la guerre qui y fait rage depuis octobre 2023.

Depuis son retour au pouvoir en janvier, le président Donald Trump, qui a accueilli le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu par trois fois à la Maison Blanche, plus qu'aucun autre dirigeant étranger, a apporté un soutien inconditionnel à Israël, tout en oeuvrant sans succès pour un cessez-le-feu à Gaza.

Mais il s'est montré peu disert sur l'Autorité palestinienne, décriée pour le manque de réformes et la corruption.

Parmi ses premiers décrets, le président Trump avait levé des sanctions imposées sous son prédécesseur Joe Biden visant des colons israéliens extrémistes en Cisjordanie, en proie à une recrudescence des violences.