PARIS: Les investisseurs évitaient toute prise de risques sur les marchés mardi, à l'amorce d'une nouvelle offensive russe sur Kiev, provoquant la baisse des actions et des obligations, et la remontée au-dessus des 100 dollars du baril de pétrole.
Les places européennes étaient ancrées dans le rouge: Paris perdait 2,13%, Francfort 1,83%, Milan 1,94% et Londres 0,56% vers 14H50 GMT.
Aux Etats-Unis, Wall Street résistait mieux mais évoluait tout de même dans le rouge, avec une baisse de 0,48% pour le Dow Jones et de 0,24% pour l'indice élargi S&P500.
La Bourse de Moscou était elle toujours fermée mardi sur décision de la banque centrale russe, et devrait le rester toute la semaine.
Les deux cours du pétrole de référence, le Brent et le WTI, dépassaient tous deux les 100 dollars le baril, prenant plus de 5%.
"L'incertitude quant à l'évolution future dans les régions en guerre, et la spirale des sanctions qui se met en place et qui a des effets économiques négatifs, et pas seulement pour l'économie russe", pèsent sur les investisseurs, commente Jochen Stanzl, pour le courtier CMC Market.
L'armée ukrainienne fait face à une nouvelle offensive des forces russes sur Kiev, Kharkiv, plusieurs villes du pays et le grand port de Marioupol, au lendemain de premiers pourparlers infructueux.
L'armée russe va frapper des infrastructures des services de sécurité ukrainiens à Kiev et a appelé mardi en conséquence les civils vivant à proximité à fuir.
En réaction au conflit, les sanctions occidentales contre l'économie russe se multiplient et visent son "effondrement", selon le ministre français de l'Economie Bruno Le Maire.
Ukraine: le pétrole continue à flamber, le Brent dépasse les 110 dollars
Les prix du pétrole continuaient leur flambée mercredi, le baril de Brent dépassant les 110 dollars pour la première fois depuis 2014, poussés par la guerre en Ukraine et les craintes pour l'approvisionnement mondial.
Le prix du baril de brent de la mer du Nord pour livraison en mai atteignait 110,87 dollars vers 03H00 GMT en Asie, en hausse de 5,6%, tandis que le WTI américain s'envolait de 5,7% à 109,22 dollars.
Les investisseurs craignent un brusque déclin des exportations de pétrole par la Russie en raison des sanctions internationales.
"Les problèmes de la chaîne d'approvisionnement et les pressions inflationnistes restent la première préoccupation de nombreux investisseurs dans le monde", a expliqué Andy McCormick, analyste chez T. Rowe Price.
De nombreuses entreprises ont annoncé se désengager d'entreprises ou projets russes.
A nouveau pris de fortes craintes, les acteurs des marchés délaissaient les actions pour se ruer vers les obligations d'Etat, jugées moins risquées.
Le rendement de la dette allemande à dix ans repassait en négatif, une première depuis fin janvier. Il avait dépassé les 0,30% mi-février. Les bons du Trésor américain à dix ans offraient un taux de rendement de 1,76% vers 14H40 GMT, au plus bas en un mois.
Outre les incertitudes de la guerre, les investisseurs s'attendent à ce que les nouvelles difficultés économiques poussent les banques centrales à plus de prudence dans leur politique de lutte contre l'inflation et donc à une moindre remontée de leurs taux directeurs.
L'or, autre actif plébiscité en temps de crise, prenait 0,63% à 1.921,20 dollars l'once.
Pétrole et gaz s'emballent
Les prix du pétrole et du gaz s'emballaient aussi, les sanctions russes sur les exportations étant "une question de temps et non de probabilité", selon des analystes comme Neil Wilson, de Markets.com.
Le baril de Brent s'échangeait à 103,82 dollars, celui de WTI à 101,40 dollars.
La Russie est le deuxième plus grand exportateur de pétrole brut au monde et représente plus de 40% des importations annuelles de gaz naturel de l'Union européenne.
Sur le marché européen du gaz naturel, le contrat de référence s'envolait de 16,17% à 114,20 euros le mégawattheure. Le prix était monté jusqu'à 143,30 euros le 24 février.
D'autres matières premières, comme l'aluminium ou le nickel, restaient aussi proches de leur record.
Guerre en Ukraine: nouveaux records des cours du maïs et du blé sur le marché européen
Les prix du blé meunier et du maïs ont clôturé mardi à un nouveau record sur le marché européen, respectivement à 351,25 et 340 euros la tonne sur l'échéance de mars 2022, galvanisés par la crise russo-ukrainienne.
Les cours des céréales ont poursuivi leur envolée de la veille, alors que "la crise s'installe": les ports ukrainiens sont toujours bloqués et la demande est forte, avec "des acheteurs qui cherchent des solutions" pour remplacer les cargaisons ukrainiennes sur lesquelles ils espéraient pouvoir compter, a expliqué à l'AFP Damien Vercambre, courtier pour le cabinet Inter-Courtage.
"Rien n'a vraiment changé aujourd'hui, mais les marchés commencent à prendre la mesure de la situation: les exportations totalement à l'arrêt en provenance d'Ukraine et l'urgence de trouver de nouveaux débouchés", a-t-il poursuivi.
L'Egypte, qui cherche depuis trois jours à acheter du blé, "a une nouvelle fois annulé son appel d'offres, jugeant probablement les prix trop élevés", a relevé le cabinet Agritel.
La situation est très tendue sur le maïs: "A ce jour l'Ukraine a exporté 18,7 millions de tonnes de maïs sur un total attendu d'ici la fin de campagne à plus de 33 millions de tonnes", rappelle Agritel.
L'automobile et les banques perdantes
Les valeurs les plus exposées à la Russie, les banques, l'automobile ou encore le secteur aérien, continuaient de dévisser.
A Paris, Renault chutait de 6,64%, soit près de 13% en deux jours. L'énergéticien Engie plongeait de près de 10%.
En Allemagne Commerzbank (-5,59%) ou Deutsche Bank (-5,04%) reculaient aussi nettement.
Airbus (-5,13%) ou encore la compagnie aérienne EasyJet (-6,90%) souffraient également.
A l'inverse, la défense était de nouveau recherchée, notamment Thales (+7,43%) en France, l'allemand Hensoldt (+21,80%) ou l'Italien Leonardo (+3,02%)
Le dollar se renforce
Vers 12H20 GMT, l'euro perdait 0,60% par rapport au dollar, à 1,1151 dollar, le billet vert étant considéré comme une valeur refuge.
Le rouble reculait encore de 2,56% face au dollar, après avoir perdu 30% en raison des sanctions contre la Russie.
Le bitcoin prenait 6,32% à 44.300 dollars, après un bond de 6,7% la veille.