Comment les images satellites privées façonnent le conflit ukrainien

Cette image satellite publiée par Maxar Technologies montre un bâtiment d'usine détruit à la périphérie ouest de Chernihiv, en Ukraine, le 28 février 2022. (Photo, AFP / Maxar Technologies)
Cette image satellite publiée par Maxar Technologies montre un bâtiment d'usine détruit à la périphérie ouest de Chernihiv, en Ukraine, le 28 février 2022. (Photo, AFP / Maxar Technologies)
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Publié le Vendredi 04 mars 2022

Comment les images satellites privées façonnent le conflit ukrainien

  • Comparé à de précédents conflits, comme l'annexion de la Crimée en 2014, le volume d'images prises aujourd'hui est bien plus important et le délai de traitement bien plus rapide
  • Au-delà de contribuer à façonner le récit, les images visent surtout à aider les forces ukrainiennes sur le terrain

WASHINGTON : Un immense convoi militaire en route vers Kiev, les dégâts de tirs de missiles ou les mouvements de réfugiés: dans le conflit ukrainien, les images satellites de compagnies privées sont utilisées comme jamais auparavant, permettant au grand public d'avoir accès à un domaine autrefois réservé aux agences de renseignement.

Ces technologies, qui peuvent percer les nuages et opérer la nuit, sont passées au premier plan, permettant à une légion d'analystes d'offrir quasiment en temps réel leur interprétation des développements sur le champ de bataille.

"Les gouvernements ne sont plus les seuls à produire des données satellites de haute précision", a souligné auprès de l'AFP Craig Nazareth, un ancien agent de renseignement enseignant aujourd'hui à l'Université de l'Arizona.

Comparé à de précédents conflits, comme l'annexion de la Crimée en 2014, le volume d'images prises aujourd'hui est bien plus important et le délai de traitement bien plus rapide.

La plupart des nations occidentales disposent de leurs propres satellites, mais ces informations sont classifiées, contrairement à celles des entreprises privées.

Ces images tierces aident à crédibiliser les affirmations des gouvernements, notamment américain et britannique, qui inspirent une méfiance accrue depuis la guerre en Irak en 2003.

Les responsables politiques peuvent dire: "regardez, ce n'est pas que nous, c'est bien ce qui est en train de se passer, on n'invente rien", explique Craig Nazareth.

Au-delà de contribuer à façonner le récit, les images visent surtout à aider les forces ukrainiennes sur le terrain.

"Capella Space travaille directement avec les gouvernements américain et ukrainien (...) pour fournir des données actualisées et de l'aide dans le conflit en cours", a déclaré le patron de cette entreprise, Payam Banazadeh.

Par tout temps

Les images prises par cette start-up basée à San Francisco ont permis à un groupe de chercheurs indépendants de réaliser que l'invasion de l'Ukraine avait été lancée, plusieurs heures avant qu'une "opération militaire" ne soit annoncée par le président russe Vladimir Poutine.

Le 23 février, Jeffrey Lewis, de l'Institut Middlebury en Californie, pointait un bouchon sur Google Maps, là où le convoi militaire avait été repéré par Capella Space. Selon lui, il s'agissait probablement des civils bloqués par les barrages routiers mis en place pour laisser passer le convoi.

Si la plupart des satellites d'imagerie requièrent qu'il fasse jour et un ciel clair, ceux de Capella Space fonctionnent par tout temps, grâce à une technologie nommée RSO (radar à synthèse d'ouverture).

Celle-ci "pénètre les nuages et la fumée, même lors de grosses tempêtes ou de feux, donc nous pouvons prendre des images claires et précises dans quasiment toutes les conditions", selon Dan Getman, vice-président en charge des produits de l'entreprise.

La technologie existe depuis le milieu du 20ème siècle, mais n'a été introduite dans le secteur privé que très récemment.

Une autre entreprise dont les images ont été très utilisées est BlackSky. L'une d'elles montre ce qui pourrait avoir été l'une des premières attaques dans cette guerre: sur une centrale de la ville de Lougansk peu après 16H00 locales le 23 février.

"Nous avons une constellation de petits satellites qui peuvent voir de l'aube jusqu'au crépuscule", a dit à l'AFP le PDG Brian O'Toole.

Ceux-ci volent dans le sens inverse de la rotation du globe, afin de pouvoir repasser au-dessus d'une zone à une haute fréquence.

Les images sont envoyées aux clients dans les 90 minutes et des logiciels utilisant l'intelligence artificielle permettent d'aider à les interpréter.

Inquiétudes éthiques?

L'une des images les plus emblématiques jusqu'ici est probablement celle d'un immense convoi militaire russe, s'étirant sur plus de 60 kilomètres au nord-ouest de Kiev.

Elle a été prise par l'entreprise Maxar, "l'ancêtre dans cette industrie", selon l'analyste Chris Quilty.

Autre acteur ayant publié des images, dont certaines montrant des comparaisons avant/après des frappes: Planet, qui dit travailler avec des gouvernements, des organisations intergouvernementales et des médias.

"Des ponts effondrés. Des avions détruits. Nous continuerons à dévoiler cela au grand jour", a tweeté jeudi Will Marshall, co-fondateur et PDG de Planet.

Le gouvernement américain est l'un des principaux clients de Maxar et décide ainsi des zones à observer. Ce qui explique que beaucoup de temps soit passé au-dessus de l'Ukraine aujourd'hui.

Mais la publication sélective des images prises pourrait aussi poser certaines questions éthiques. 

Maxar et les autres "capturent aussi inévitablement des images des mouvements des forces ukrainiennes et de leurs positions défensives, mais cette information n'est pas publiée", relève Chris Quilty.

Ainsi, selon lui, "il y a sans aucun doute une capacité à influencer le récit, en fonction des images rendues disponibles."


Ukraine: l'aide européenne compense le désengagement américain, selon le Kiel Institute

Gabriel Felbermayr, économiste autrichien et président de l'Institut de Kiel pour l'économie mondiale, participe à une conférence de presse le 11 mars 2020 à Berlin afin de commenter l'impact économique et politique de l'épidémie du nouveau coronavirus. (Photo de Tobias SCHWARZ / AFP)
Gabriel Felbermayr, économiste autrichien et président de l'Institut de Kiel pour l'économie mondiale, participe à une conférence de presse le 11 mars 2020 à Berlin afin de commenter l'impact économique et politique de l'épidémie du nouveau coronavirus. (Photo de Tobias SCHWARZ / AFP)
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  • « L'Europe comble largement le retrait de l'aide américaine », écrit l'institut dans un communiqué, qui recense l'aide militaire, financière et humanitaire promise et livrée à l'Ukraine depuis l'invasion russe du 24 février 2022.
  • Début 2025, les données du Kiel Institute montrent que « la récente augmentation de l'aide européenne a été tirée par un petit groupe de pays », au premier rang desquels se trouvent « les pays nordiques et le Royaume-Uni ».

PARIS : Selon l'institut de recherche allemand Kiel Institute, une hausse de l'aide des pays européens à l'Ukraine a permis début 2025 de combler le vide laissé par le désengagement de la nouvelle administration américaine de Donald Trump.

« L'Europe comble largement le retrait de l'aide américaine », écrit l'institut dans un communiqué, qui recense l'aide militaire, financière et humanitaire promise et livrée à l'Ukraine depuis l'invasion russe du 24 février 2022.

Alors que « les États-Unis, qui étaient auparavant le plus gros donateur à l'Ukraine, n'ont pas annoncé de nouvelle enveloppe depuis début janvier », l'Ukraine a tout de même reçu plus d'aide de janvier à avril 2025 qu'en moyenne les années précédentes sur la même période. 

« Reste à savoir s'il s'agit d'une hausse temporaire ou du début d'une évolution plus durable du rôle de l'Europe en tant que principal soutien de l'Ukraine », a déclaré Christoph Trebesch, qui dirige l'équipe du Kiel Institute chargée de suivre les engagements en faveur de l'Ukraine, cité dans le communiqué.

Début 2025, les données du Kiel Institute montrent que « la récente augmentation de l'aide européenne a été tirée par un petit groupe de pays », au premier rang desquels se trouvent « les pays nordiques et le Royaume-Uni ».

En revanche, « il est frappant de constater le peu d'aide allemande allouée ces derniers mois », a-t-il commenté. « Au lieu d'augmenter son soutien après l'arrivée de Trump au pouvoir, nous observons une forte baisse de l'aide allemande par rapport aux années précédentes. »

« La tendance est la même pour l'Italie et l'Espagne », a-t-il précisé. 

Au 30 avril 2025, 294 milliards d'euros au total ont été alloués à des dépenses précises en faveur de l'Ukraine (sur 405 milliards promis), selon les derniers chiffres du Kiel Institute. Les 111 milliards restants ont été promis à long terme, mais pas encore alloués.

Sur la somme déjà donnée, 140 milliards d'euros correspondent à de l'aide militaire, 133 milliards à de l'aide financière et 21 milliards à de l'aide humanitaire.

Les principaux donateurs sont l'Union européenne et ses membres (131 milliards d'euros donnés ou alloués), les États-Unis (115 milliards) et le Royaume-Uni (19 milliards).

En matière d'aide militaire, l'Europe, le Royaume-Uni compris, « dépasse pour la première fois depuis juin 2022 les États-Unis », selon le Kiel Institute. Les Européens ont déjà donné ou alloué 72 milliards d'euros d'aide militaire à l'Ukraine depuis le début de la guerre, contre 65 milliards pour les États-Unis. 


Les dirigeants du G7, dont Trump, se rejoignent au Canada tandis qu'un conflit oppose l'Iran et Israël

Le logo du G7 2025 est visible sur la pelouse devant le centre des médias de Banff, à l'approche du sommet du Groupe des Sept (G7) qui se tiendra à Kananaskis, dans la province canadienne de l'Alberta, le 16 juin 2025. (Photo : Ben Sheppard / AFP)
Le logo du G7 2025 est visible sur la pelouse devant le centre des médias de Banff, à l'approche du sommet du Groupe des Sept (G7) qui se tiendra à Kananaskis, dans la province canadienne de l'Alberta, le 16 juin 2025. (Photo : Ben Sheppard / AFP)
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  • Les pays du G7 ont entamé dimanche des négociations dans l'espoir de trouver un langage commun concernant le conflit entre l'Iran et Israël.
  • La priorité absolue pour tous sera d'éviter les drames, malgré les nombreux sujets de frictions, des droits de douane imposés par Donald Trump à la guerre en Ukraine, ou encore à celle du Moyen-Orient.

KANANASKIS, CANADA : Les pays du G7 ont entamé dimanche des négociations dans l'espoir de trouver un langage commun concernant le conflit entre l'Iran et Israël, alors que leurs dirigeants, dont le président américain, se retrouvent pour un sommet sous tension dans les Rocheuses canadiennes.

Il s'agit du premier grand sommet depuis que Donald Trump est revenu au pouvoir en janvier, ce qui a fragilisé l'unité du club des grandes démocraties industrialisées (Allemagne, Royaume-Uni, Canada, États-Unis, France, Italie et Japon).

Le président américain, qui n'a cessé de menacer le Canada ces derniers mois, est arrivé en fin de journée dans ce pays, avec sur la tête une casquette blanche portant son slogan « Make America Great Again » (« Rendre sa grandeur à l'Amérique »).

Pour cette réunion qui se déroule à Kananaskis, dans le parc national de Banff, dans l'ouest du Canada, il retrouvera ses alliés du G7 ainsi que les dirigeants de nombreux autres pays invités : l'Inde, l'Ukraine, le Mexique, l'Afrique du Sud et l'Australie seront notamment présents.

La priorité absolue pour tous sera d'éviter les drames, malgré les nombreux sujets de frictions, des droits de douane imposés par Donald Trump à la guerre en Ukraine, ou encore à celle du Moyen-Orient.

Mais parviendront-ils à parler d'une voix commune, notamment sur cette région du monde ?

Israël a stupéfié le monde vendredi en ouvrant un nouveau front avec une campagne militaire surprise et massive contre l'Iran.

Selon une source gouvernementale citée par l'AFP, les dirigeants du G7 travaillent à une déclaration commune. Reste à décider s'il s'agit d'appeler à la désescalade ou simplement de soutenir Israël en affirmant que le pays a le droit de se défendre. 

Mais cette guerre n'est pas le seule enjeu des discussions à Kananaskis. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky est parmi les invités et doit s'entretenir avec Donald Trump

Le président américain, qui s'est rapproché de façon spectaculaire de Moscou, a de nouveau eu un entretien téléphonique samedi avec le président russe Vladimir Poutine. Ce dernier lui a dit être prêt à un nouveau round de négociations.

De leur côté, les Européens tentent de convaincre Donald Trump de promulguer de nouvelles sanctions contre Moscou, ciblant plus précisément les ventes de pétrole russe. 

Tous les pays souhaitent par ailleurs aborder l'aspect commercial avec le président Trump. En imposant des taxes douanières d'au moins 10 % sur la plupart des produits entrant aux États-Unis, ce dernier a dévié le cours de la mondialisation et menacé l'économie mondiale d'un ralentissement général. 

Ce sommet du G7 est la première visite du président américain sur le sol canadien depuis qu'il a menacé son voisin du nord, estimant qu'il serait préférable qu'il devienne le 51^e État américain.

Le Premier ministre canadien, Mark Carney, et Donald Trump se rencontreront lundi matin lors d'un tête-à-tête. Outre MM. Carney et Zelensky, le dirigeant américain doit aussi rencontrer la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum. 


Donald Trump appelle Iran et Israël à «trouver un accord»

Donald Trump a appelé Israël et l'Iran à "trouver un accord" dimanche, même s'ils vont peut-être devoir se battre auparavant. (AFP)
Donald Trump a appelé Israël et l'Iran à "trouver un accord" dimanche, même s'ils vont peut-être devoir se battre auparavant. (AFP)
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  • Israël a multiplié dimanche ses frappes meurtrières à travers l'Iran, visant la capitale, la ville de Machhad à l'extrémité nord-est du pays ainsi que des installations militaires dans l'ouest, auxquelles Téhéran a riposté par de nouveaux tirs de missiles
  • En fin de journée, avant son départ pour le G7 au Canada, Donald Trump a renouvelé son appel aux deux pays: "Je pense qu'il est temps de conclure un accord et nous verrons ce qui se passera"

WASHINGTON: Donald Trump a appelé Israël et l'Iran à "trouver un accord" dimanche, même s'ils vont peut-être devoir se battre auparavant, a-t-il déclaré au moment où des échanges intenses de tirs entre les deux pays se poursuivent pour la quatrième nuit consécutive.

"L'Iran et Israël devraient trouver un accord, et ils vont trouver un accord", a écrit le président américain sur son réseau Truth Social dimanche matin, ajoutant que "de nombreux appels et rencontres ont lieu en ce moment".

En fin de journée, avant son départ pour le G7 au Canada, Donald Trump a renouvelé son appel aux deux pays: "Je pense qu'il est temps de conclure un accord et nous verrons ce qui se passera. Parfois, ils doivent se battre, mais nous verrons ce qui se passera. Je pense qu'il y a de bonnes chances qu'il y ait un accord", a-t-il déclaré sur le seuil de la Maison Blanche avant d'embarquer dans son hélicoptère Marine One.

Israël a multiplié dimanche ses frappes meurtrières à travers l'Iran, visant la capitale, la ville de Machhad à l'extrémité nord-est du pays ainsi que des installations militaires dans l'ouest, auxquelles Téhéran a riposté par de nouveaux tirs de missiles.

Au troisième jour de l'offensive aérienne israélienne, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a menacé de faire payer à l'Iran "un prix très lourd" après la mort de civils provoquée par les salves de missiles balistiques iraniens tirées en représailles sur Israël, qui ont touché des zones habitées.

L'Iran a de son côté promis dimanche une "réponse dévastatrice" aux attaques israéliennes et affirmé qu'Israël ne serait bientôt "plus habitable".