Crash de la Germanwings: la justice française met fin à l'enquête sans poursuites

Une femme se tient le 29 septembre 2017 au-dessus de la ville au sud-est de Seyne-Les-Alpes, à côté de "La porte du soleil" à un point de vue surplombant le mémorial "Sonnenkugel"( qui signifie "Orbe solaire"), érigé sur le site du crash du Airbus A320 de Germanwings qui a tué les 150 personnes à bord le 24 mars 2015, dans la pire catastrophe aérienne en France depuis quatre décennies. BORIS HORVAT / AFP
Une femme se tient le 29 septembre 2017 au-dessus de la ville au sud-est de Seyne-Les-Alpes, à côté de "La porte du soleil" à un point de vue surplombant le mémorial "Sonnenkugel"( qui signifie "Orbe solaire"), érigé sur le site du crash du Airbus A320 de Germanwings qui a tué les 150 personnes à bord le 24 mars 2015, dans la pire catastrophe aérienne en France depuis quatre décennies. BORIS HORVAT / AFP
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Publié le Mardi 08 mars 2022

Crash de la Germanwings: la justice française met fin à l'enquête sans poursuites

  • Le crash avait provoqué la mort des 144 passagers originaires de 19 pays, en majorité des Allemands (72) et des Espagnols (50), et de six membres d'équipage dont M. Lubitz
  • Depuis 2016, les familles peuvent monter à pied au col de Mariaud, à 1 500 mètres d'altitude, et se recueillir en face du site du crash sur une plateforme, où a été dressée une sépulture de cinq mètres de diamètre

MARSEILLE: Sept ans après le crash d'un avion de la compagnie allemande Germanwings dans les Alpes, qui avait fait 150 morts, la justice française a clôturé l'enquête sans lancer de poursuite, considérant le geste "suicidaire" du copilote comme imprévisible.

Le 24 mars 2015, à bord du vol 4U9525 reliant Barcelone (nord-est de l'Espagne) à Düsseldorf (ouest de l'Allemagne), Andreas Lubitz, copilote de 27 ans sous antidépresseurs, avait profité de l'absence momentanée dans le cockpit du commandant de bord pour projeter l'Airbus A320 contre une montagne des Hautes-Alpes.

Le crash avait provoqué la mort des 144 passagers originaires de 19 pays, en majorité des Allemands (72) et des Espagnols (50), et de six membres d'équipage dont M. Lubitz.

L'enquête qui avait été ouverte contre X pour "homicides involontaires par personne physique et par personne morale" vient d'être clôturée, a-t-on appris mardi auprès du parquet de Marseille. 

Conformément aux réquisitions, un non-lieu a été rendu le 21 février par les "vice-présidents chargés de l'instruction du pôle accidents collectifs du tribunal judiciaire de Marseille", selon l'ordonnance consultée par l'AFP.

Les juges ont en effet considéré que "le geste d'Andreas Lubitz n'était pas prévisible, en ce que son intention suicidaire n'était connue de personne. Dès lors, personne ne pouvait agir en amont afin d'éviter l'acte du 24 mars 2015", a expliqué le parquet de Marseille à la presse. 

"Aucune faute caractérisée, ni aucune violation délibérée d'une obligation de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement ne pouvait être reprochée à la Germanwings, à la Lufthansa (maison mère de Germanwings) ou à ses dirigeants ou employés", écrivent les juges dans leur ordonnance. Ni même aux médecins ayant pu connaître la situation médicale d'Andreas Lubitz dans les mois qui ont précédé le crash.

"Si Andreas Lubitz a pu multiplier les arrêts de travail dans les mois qui ont précédé le crash, les motifs n'étaient pas portés à la connaissance de l'employeur et les deux derniers arrêts de travail qui couvraient la date du crash, n'ont pas été transmis par Andreas Lubitz à son employeur, d'où sa présence dans le cockpit", peut-on encore lire dans l'ordonnance.

 "Inconcevable" 

Il était "rapidement" apparu que le copilote souffrait, "depuis les années 2008-2009 de troubles psychiatriques qui avaient notamment entraîné la suspension de sa formation de pilote de ligne", mais le suivi médical avait conclu à une rémission en 2009 et Andreas Lubitz avait pu achever sa formation, rappellent les juges qui ont mené l'enquête.

"Cette décision est extrêmement décevante mais malheureusement entérine ce qui a été dit depuis le début, y compris par la Lufthansa, que son geste était imprévisible", a déploré auprès de l'AFP Me Sophie Thonon-Wesfreid, avocate de familles de victimes.

"Il est inconcevable pour les familles qu'une personne aussi atteinte, n'ait pas attiré l'attention de la Lufthansa", a ajouté l'avocate pointant la lourde responsabilité des pilotes qui "tiennent entre leurs mains la vie de centaines de personnes". "A partir du moment où on a un doute, on doit mettre la personne en retrait".

Persuadé qu'il était en train de perdre la vue, ce que les analyses n'ont en rien confirmé, il avait consulté 41 médecins dans les cinq années précédentes, dont plusieurs psychiatres.

La justice allemande avait elle clôturé son enquête dès janvier 2017 et renoncé également à engager des poursuites en écartant notamment les soupçons de négligence des médecins qui l'avaient examiné et qui n'auraient pas fait part de ses troubles dépressifs à son employeur.

Depuis 2016,  les familles peuvent monter à pied au col de Mariaud, à 1.500 mètres d'altitude, et se recueillir en face du site du crash sur une plateforme, où a été dressée une sépulture de cinq mètres de diamètre, renfermant des souvenirs personnels des familles.


Madagascar: le président contesté écarte toute démission

Le président malgache, Andry Rajoelina, a écarté lundi soir toute démission en appelant à "respecter la Constitution", dans sa première prise de parole depuis un lieu inconnu, après le ralliement ce weekend des militaires à la contestation qui agite le pays. (AFP)
Le président malgache, Andry Rajoelina, a écarté lundi soir toute démission en appelant à "respecter la Constitution", dans sa première prise de parole depuis un lieu inconnu, après le ralliement ce weekend des militaires à la contestation qui agite le pays. (AFP)
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  • Elu en 2018, puis réélu en 2023 pour un mandat de cinq ans lors d'un scrutin boycotté par l'opposition, M. Rajoelina n'a pu faire diffuser son allocution par la télévision publique TVM après l'arrivée d'un "groupe de soldats armés" au siège de la chaîne
  • D'après RFI, il a embarqué dimanche "à bord d'un avion militaire français pour La Réunion, avant de partir vers une autre destination avec sa famille"

ANTANANARIVO: Le président malgache, Andry Rajoelina, a écarté lundi soir toute démission en appelant à "respecter la Constitution", dans sa première prise de parole depuis un lieu inconnu, après le ralliement ce weekend des militaires à la contestation qui agite le pays.

Lors de ce direct diffusé sur les réseaux sociaux mais pas à la télévision publique malgache, M. Rajoelina s'est dit dans un "lieu sûr" après une "tentative de meurtre", sans plus de précisions sur sa localisation.

Est-il encore dans le pays, ou parti à l'étranger, comme l'a indiqué lundi la radio française RFI? Cette incertitude nourrit la confusion sur cette île très pauvre de l'Océan indien où de nouvelles scènes de joie ont eu lieu lundi dans la capitale Antananarivo entre militaires et des milliers de manifestants appelant à son départ.

"Il n'y a qu'une seule issue pour résoudre ces problèmes, c'est de respecter la Constitution en vigueur dans le pays", a affirmé le président de 51 ans, rejetant de fait les appels à la démission du mouvement de contestation né le 25 septembre.

Elu en 2018, puis réélu en 2023 pour un mandat de cinq ans lors d'un scrutin boycotté par l'opposition, M. Rajoelina n'a pu faire diffuser son allocution par la télévision publique TVM après l'arrivée d'un "groupe de soldats armés" au siège de la chaîne.

D'après RFI, il a embarqué dimanche "à bord d'un avion militaire français pour La Réunion, avant de partir vers une autre destination avec sa famille". "Je ne confirme rien aujourd'hui", a répondu à ce sujet depuis l'Egypte le président français, Emmanuel Macron, disant sa "grande préoccupation" pour Madagascar.

Des remises de peine ont été accordées lundi par décret présidentiel à une série de personnes parmi lesquelles le Franco-Malgache Paul Maillot Rafanoharana, emprisonné depuis 2021 pour tentative de coup d'Etat, et point de crispation entre les deux pays.

Ce weekend, une unité militaire, le Capsat, qui avait joué un rôle majeur dans le coup d'État en 2009 qui a porté au pouvoir M. Rajoelina, à la suite déjà d'une mobilisation populaire, a appelé les forces de sécurité à "refuser de tirer" sur les manifestants, avant de rejoindre ces derniers dans le centre de la capitale.

"Plus de dinosaures" 

"C'est tout bizarre, vu qu'on était habitués à toujours être pourchassés et bombardés par des gaz lacrymogènes", a témoigné auprès de l'AFP Finaritra Manitra Andrianamelasoa, 24 ans. Cet étudiant en droit figurait parmi les milliers de manifestants ayant rejoint lundi la place du 13-mai dans une ambiance de fête.

Marchant au rythme d'une fanfare, le cortège a enflé à mesure qu'il approchait de ce lieu symbolique de l'histoire politique malgache, baptisé en hommage aux tués d'un soulèvement populaire en 1972 ayant conduit au départ du premier président.

"Au tout début, ce qu'on demandait, c'était l'électricité, la liberté de s'exprimer, mais on attend actuellement sa démission", a asséné Steven Mandimbiarivong Rasolonjanahary, 19 ans, un autre étudiant en droit.

"On attend sa démission mais le connaissant, je ne crois pas qu'il va dire ça", pronostiquait avec succès Rotsinasandratra Lucas Hantamalala, étudiante de 20 ans. "Plus de dinosaures politiques s'il vous plaît, on en a assez vus", exhorte-t-elle.

Des soldats ont accompagné samedi dans le centre-ville de la capitale malgache des milliers de manifestants, les rejoignant à nouveau dimanche pour un rassemblement en hommage aux personnes tuées au cours des plus de deux semaines de manifestations.

Départ du président du Sénat 

Le mouvement de contestation, qui dénonçait au départ les coupures incessantes d'eau et d'électricité, s'est mué depuis en une contestation plus large du président Rajoelina et de son clan.

Le Conseil sécurité de l'Union africaine "rejette catégoriquement toute tentative de changement anticonstitutionnel du gouvernement dans le pays", a-t-il averti lundi dans un communiqué qui "exhorte toutes les unités des forces armées malgaches à "s'abstenir de toute ingérence dans les affaires politiques".

Les manifestants ont obtenu ce weekend le départ du décrié président du Sénat Richard Ravalomanana, ancien commandant de gendarmerie.

Surnommé "Général Bomba" pour son recours généreux aux grenades lacrymogènes lors de la crise de 2009, Richard Ravalomanana était accusé par les contestataires d'être un des principaux acteurs de la répression des manifestations ces dernières semaines.

Quant au troisième homme vilipendé par la rue, l'homme d'affaires et proche du chef de l'Etat Maminiaina Ravatomanga, il a fui dimanche matin à l'île Maurice voisine, comme l'a confirmé le gouvernement mauricien.

Au moins 22 personnes ont été tuées au début des manifestations et plus d'une centaine blessées, d'après un bilan des Nations unies.

Madagascar, île à la population très démunie, a une longue histoire de soulèvements populaires suivis par la mise en place de gouvernements militaires de transition.

Au moins 80% des 32 millions d'habitants de Madagascar vivent avec moins de 15.000 ariary par jour (2,80 euros), le seuil de pauvreté de la Banque mondiale.


Au sommet sur Gaza, Trump proclame un «jour formidable pour le Moyen-Orient»

Donald Trump a proclamé lundi un "jour formidable pour le Moyen-Orient" lors d'un sommet sur Gaza en Egypte et a cosigné une déclaration visant à cimenter le cessez-le-feu dans le territoire palestinien, après un échange d'otages et de détenus entre Israël et le Hamas. (AFP)
Donald Trump a proclamé lundi un "jour formidable pour le Moyen-Orient" lors d'un sommet sur Gaza en Egypte et a cosigné une déclaration visant à cimenter le cessez-le-feu dans le territoire palestinien, après un échange d'otages et de détenus entre Israël et le Hamas. (AFP)
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  • A l'origine du plan sur un cessez-le-feu à Gaza, M. Trump a coprésidé le sommet à Charm el-Cheikh avec le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, en présence de nombreux dirigeants internationaux
  • M. Trump a accueilli les dirigeants sur un tapis rouge, souriant et serrant la main de chacun. Derrière une inscription géante "PEACE 2025", il a levé plusieurs fois le pouce devant les caméras

CHARM EL-CHEIKH: Donald Trump a proclamé lundi un "jour formidable pour le Moyen-Orient" lors d'un sommet sur Gaza en Egypte et a cosigné une déclaration visant à cimenter le cessez-le-feu dans le territoire palestinien, après un échange d'otages et de détenus entre Israël et le Hamas.

Plus tôt, lors d'une visite éclair à Jérusalem, le président américain a annoncé devant le Parlement israélien la fin d'un "long cauchemar" pour Israël et les Palestiniens. "Ce n'est pas seulement la fin d'une guerre, c'est la fin d'une ère de terreur et de mort", a-t-il dit, appelant les Palestiniens à "se détourner pour toujours de la voie du terrorisme".

Au quatrième jour du cessez-le-feu dans la bande de Gaza dévastée par deux ans de guerre, le mouvement islamiste Hamas a libéré les 20 derniers otages vivants qu'il retenait, en échange de 1.968 prisonniers palestiniens relâchés par Israël.

Sur la place des Otages à Tel-Aviv, des scènes de liesse ont accueilli la libération des otages enlevés le 7 octobre 2023 lors de l'attaque sans précédent du Hamas en Israël, qui a déclenché la guerre.

"C'est superbe et bouleversant que cela arrive enfin" a déclaré Shelly Bar Nir, 34 ans. "Nos otages rentrent enfin chez eux."

"Ma vie, tu es ma vie... tu es un héros", s'exclame Einav Zangauker en serrant dans ses bras son fils Matan, tout sourire, après sa libération, selon une vidéo diffusée par l'armée israélienne.

A Ramallah, en Cisjordanie occupée, une explosion de joie a accompagné l'arrivée des cars transportant des prisonniers palestiniens libérés. "C'est une renaissance", a dit Mahdi Ramadan après sa libération. D'autres bus ont gagné la bande de Gaza, accueillis par des milliers de personnes agitant le drapeau palestinien et celui du Hamas.

"PEACE 2025" 

A l'origine du plan sur un cessez-le-feu à Gaza, M. Trump a coprésidé le sommet à Charm el-Cheikh avec le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, en présence de nombreux dirigeants internationaux, mais sans le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, ni le Hamas.

M. Trump a accueilli les dirigeants sur un tapis rouge, souriant et serrant la main de chacun. Derrière une inscription géante "PEACE 2025", il a levé plusieurs fois le pouce devant les caméras.

Avec les dirigeants d'Egypte, du Qatar et de Turquie, il a ensuite signé une déclaration sur Gaza dans laquelle ils engagent à "poursuivre une vision de paix" au Moyen-Orient. Ce document, publié en fin de journée par la Maison Blanche, s'en tient néanmoins à des termes vagues sur le besoin de parvenir à une "paix durable" entre Israël et ses voisins, dont les Palestiniens.

Donald Trump a, dans l'avion de retour à Washington, évacué la question de la solution à deux Etats. "Je ne parle pas d'un seul Etat, de double Etat ou de deux Etats. Nous parlons de la reconstruction de Gaza."

Avant de partir d'Egype, le président américain a assuré avoir "réussi ensemble ce que tout le monde pensait impossible. Enfin, nous avons la paix au Moyen-Orient."

M. Sissi a, lui, annoncé que son pays allait accueillir une conférence sur la reconstruction de Gaza, sans donner de date.

Dans la journée, 20 otages ont été remis en deux phases au Comité international de la Croix-Rouge (CICR), dont les voitures ont pris la direction d'Israël sous l'œil de combattants armés du Hamas.

La majorité des 251 personnes enlevées lors de l'attaque du 7-Octobre avaient été libérées lors de deux précédentes trêves à Gaza.

"Libération totale" 

L'attaque du Hamas a entraîné côté israélien la mort de 1.219 personnes, en majorité des civils, selon un bilan établi par l'AFP à partir de données officielles.

En riposte, Israël a lancé une offensive qui a ravagé la bande de Gaza, provoqué un désastre humanitaire et fait 67.869 morts, en majorité des civils, selon les données du ministère de la Santé du Hamas.

"Il est temps de laisser entrer l'aide humanitaire à grande échelle, notamment par l'intermédiaire de l'Unrwa", a réagi lundi le directeur général de l'agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens (Unrwa), Philippe Lazzarini, dans un communiqué.

La première phase du plan américain prévoit outre le cessez-le-feu et un retrait israélien de certains secteurs de Gaza, le retour dans les 72 heures des 47 derniers otages retenus à Gaza, dont 27 sont morts.

Mais l'armée israélienne a annoncé la remise de seulement quatre corps d'otages via le CICR lundi: "Le Hamas est tenu de respecter l'accord et de prendre les mesures nécessaires pour le retour de tous les otages décédés".

Le Hamas a salué "la libération des prisonniers palestiniens des prisons de l'occupation" comme "un succès national sur le chemin de la libération totale".

Le plan Trump prévoit dans une phase ultérieure le désarmement du Hamas et son exclusion de la gouvernance du territoire, où le mouvement a pris le pouvoir en 2007.

Le mouvement islamiste ne s'est pas prononcé sur son désarmement et exige un retrait total israélien de la bande de Gaza. L'armée israélienne contrôle aujourd'hui 53% du territoire.

Un responsable du Hamas a dit prévoir une deuxième phase "difficile" des négociations.

 

 


Le traité sur la pollution plastique n'est pas mort, affirme la cheffe de l'environnement de l'ONU

Un homme marche sur un pont près de la vallée de Vjosa, récemment désignée comme site de l'UNESCO, à Tepelene, en Albanie. (Reuters)
Un homme marche sur un pont près de la vallée de Vjosa, récemment désignée comme site de l'UNESCO, à Tepelene, en Albanie. (Reuters)
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  • Malgré l’échec de deux cycles de négociations et la démission du président du comité, la cheffe du PNUE Inger Andersen reste optimiste : un traité mondial contre la pollution plastique est encore possible
  • Alors que la production de plastique pourrait tripler d’ici 2060, les négociations patinent entre pays favorables à une réduction de la production et ceux qui préfèrent miser sur la gestion des déchets

GENEVE: Un traité mondial historique sur la lutte contre la pollution plastique reste à portée de main, assure la cheffe de l'agence de l'ONU pour l'environnement, malgré l'échec cuisant de deux rounds de négociations successifs et la démission soudaine du président du comité des négociations cette semaine.

Dans un entretien exclusif accordé à l'AFP, la directrice exécutive du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE), Inger Andersen, estime que les pays ne feront pas marche arrière, malgré leurs profondes divergences sur la lutte contre ce problème croissant, notamment dans les océans.

Un grand bloc de pays souhaite des mesures audacieuses, comme la réduction de la production de plastique, tandis qu'un groupe plus restreint de pays producteurs de pétrole souhaite se concentrer davantage sur la gestion des déchets.

Les négociations censées se terminer en 2024 en Corée du Sud se sont soldées par un échec, et les efforts repris à Genève en août ont également échoué.

Beaucoup de pays ont exprimé leur colère et leur frustration face à l'échec des discussions, mais ont affirmé souhaiter de nouvelles négociations, dans la foulée de six cycles déjà tenus en trois ans sous l'égide du PNUE.

"Le résultat était-il glorieux ? Non. Mais était-ce la fin ? Non", martèle Mme Andersen.

"Nous sommes repartis avec une plus grande lucidité. Et personne n'a quitté la table. Personne n'est reparti en disant: +C'est trop désespéré, on abandonne+. Personne. Et tout cela me donne du courage", assure l'économiste danoise.

Le problème de la pollution plastique est si omniprésent que des microplastiques ont été retrouvés sur les plus hauts sommets, dans les fosses océaniques les plus profondes et dispersés dans presque toutes les parties du corps humain.

Le sujet est d'autant plus urgent que la planète a produit plus de plastique depuis 2000 que durant les 50 années précédentes. Et la tendance s'accélère: si rien n'est fait, la production actuelle, de quelque 450 millions de tonnes par an, devrait tripler d'ici 2060, selon les prévisions de l'OCDE. Moins de 10% est recyclé.

- "Tout à fait faisable" -

À l'heure actuelle, aucun calendrier n'a été fixé pour la tenue de nouvelles négociations, et aucun pays n'a proposé officiellement de les accueillir. Mais Mme Andersen est "absolument" convaincue qu'un accord est à portée de main.

"C'est tout à fait faisable. Il faut juste persévérer", avance-t-elle. "Nous sommes si proches".

Selon elle, l'état d'esprit général est le suivant: "Nous sommes toujours en négociation. Nous ne nous éloignons pas. Nous avons nos lignes rouges, mais nous comprenons mieux celles des autres. Et nous voulons tous" un accord.

La Norvège et le Kenya ont organisé une réunion très suivie lors de l'Assemblée générale des Nations unies à New York le mois dernier, souligne Mme Andersen.

La COP30, qui se tiendra au Brésil en novembre, offrira une nouvelle occasion de sonder les esprits avant l'Assemblée des Nations unies pour l'environnement à Nairobi en décembre.

Mais Luis Vayas Valdivieso, ambassadeur d'Équateur en Grande-Bretagne et président du comité des trois derniers des six cycles de négociations, a jeté l'éponge en annonçant cette semaine sa démission.

"Il a essayé d'écouter attentivement toutes les parties et de proposer des textes", rappelle la cheffe du PNUE, manifestant une "profonde gratitude (...) car il a travaillé d'arrache-pied et a tout donné".

- "Grave allégation" -

Le journal britannique The Guardian a rapporté mardi que des employés du PNUE avaient tenu une réunion secrète la veille à Genève, afin de convaincre des membres de la société civile de faire pression sur M. Vayas pour qu'il démissionne.

"Il s'agit d'une allégation extrêmement grave", a réagi Mme Andersen. "Je n'étais pas au courant et, de toute évidence, je n'avais demandé à personne de faire une telle chose".

Elle a précisé que ce dossier avait été transmis au Bureau des services de contrôle interne des Nations unies.

Quant à la question de savoir si un nouveau président pourrait insuffler un nouvel élan, elle a déclaré : "Comme toujours, lorsqu'il y a un changement, l'ambiance change légèrement", mais, souligne-t-elle "les enjeux resteront les mêmes".