Algérie: Six figures féminines qui ont marqué l’Histoire

Photographie de Djamila Bouhired (Photo, fournie).
Photographie de Djamila Bouhired (Photo, fournie).
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Publié le Vendredi 08 mars 2024

Algérie: Six figures féminines qui ont marqué l’Histoire

  • À l’occasion de la Journée de la femme, Arab News en français dresse le portrait de six Algériennes qui ont marqué les esprits: Djamila Bouhired, la Kahina, Cheikha Remitti, Assia Djebbar, Yasmine Belkaid et Baya
  • Djamila Bouhired symbolise le militantisme, Cheikha Remitti incarne le talent musical et l'émancipation féminine, Assia Djebar porte la voix littéraire des femmes algériennes, Baya Mahieddine représente le génie artistique et Yasmine Belkadi incarne l'int

LE CAIRE: Vendredi 8 mars, les femmes célèbrent leur fête universelle. L’occasion pour Arab News en français  d’explorer ou plutôt de survoler l’Histoire ancienne et contemporaine de l’Algérie en proposant un parcours jalonné de stations illuminées par des femmes exceptionnelles. Elles ont laissé, chacune dans leur domaine, une empreinte indélébile et un héritage unique pour les générations à venir.

Des milliers d’Algériennes auraient mérité d’être mises en lumière, mais parmi celles dont l’étoffe, l’envergure, le talent et le charisme sont connus et reconnus, Arab News en français en a retenu six au destin hors du commun : Djamila Bouhired, la Kahina, Cheikha Remitti, Assia Djebbar, Yasmine Belkaid et l’incontournable Baya.

La Kahina, Reine des Amazighs

Dihya, plus communément connue sous le nom de «la Kahina» («prophétesse») est une reine berbère qui a marqué son temps par sa vaillance et par sa participation active aux combats contre les conquérants musulmans venus de la péninsule Arabique. 

Fille d’un chef guerrier de la tribu des Djeraouia, la jeune femme marche dans les pas de son père et remporte plusieurs batailles contre les envahisseurs musulmans arrivés en Afrique du Nord au VIIe siècle. 

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Peinture de Émile Vernet représentant la Kahina (Photo, fournie).
 

Stratège militaire hors pair et oracle respectée de tous, la reine amazigh s’est imposée, du haut de sa forteresse dans les montagnes des Aurès, comme cheffe de guerre et de la résistance pendant plusieurs années avant de mourir vaillamment sur le champ de bataille. 

Des siècles après sa mort, Dihya est devenue un symbole de féminisme, de détermination, de résilience et de courage pour les femmes d’Afrique du nord, mais également une icône de la cause amazigh.

Cheikha Remitti, la pionnière du Raï

Avançons maintenant de plusieurs siècles. Cheikha Remitti, de son vrai nom Saadia el-Ghilizania, est un monument de la chanson raï.

Bien qu’ayant eu un début de vie difficile, l’orpheline qui errait de village en village est devenuela «mamie du raï». Elle a révolutionné la musique traditionnelle algérienne en y insufflant un vent de renouveau, en fusionnant les airs de flûtes de gasba traditionnelles à des percussions plus modernes auxquelles viennent s’ajouter des paroles perçues par certains comme «indécentes». 

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Photographie de Cheikha Remitti (Photo, Fournie). 

Considérée comme un personnage polémique, elle défend de façon systématique par le biais de ses chansons, clamant la liberté de la femme à disposer de son corps. 

Extrêmement indépendante, Remitti avait pour habitude de dire qu’elle était sa propre cheffe. Bien qu’analphabète, elle composait ses propres chansons. «Personne ne me dicte les paroles que je chante, elles représentent mon propre vécu», expliquait-elle.

Grâce à son caractère, sa voix atypique, son diadème, ses perles et ses mains agrémentées de dessins au henné, la chanteuse et musicienne a grandement contribué au rayonnement de ce genre musical sur la scène Internationale.

Djamila Bouhired, figure de la résistance 

Djamila Bouhired a été le symbole féminin absolu de la résistance algérienne lors de la lutte indépendantiste. 

En 1954, tout juste sortie de l’adolescence, la jeune algéroise rejoint le Front de libération national (FLN). Organisation au sein de laquelle elle portera la double casquette de «poseuse de bombes» et d’agent de recrutement de femmes combattantes, ces dernières étant moins susceptibles d’être appréhendées par les autorités coloniales.

Parmi les recrues, on retiendra le nom de deux autres figures de la lutte: Djamila Bouazza et Zoulikha.

Samia Lakhdari, Zohra Drif, Djamila Bouhired , Hassiba Ben Bouali
De droite à gauche Samia Lakhdari,Zohra Drif, Djamila Bouhired et Hassiba ben Bouali (Photo, fournie).
 

Djamila Bouhired représente les milliers de femmes algériennes combattantes, mais aussi celles qui ont pris part à la lutte de façon plus discrète, en cachant des armes ou encore en nourrissant les résistants.  

Elle demeure jusqu’à ce jour une référence de grâce, de dignité, symbole de l’engagement et de la détermination de la femme algérienne.

Assia Djebar, la voix des femmes algériennes 

Assia Djebar est une femme de lettres algérienne. Autrice de nombreux romans, nouvelles, poèmes, elle est considérée comme une des écrivaines les plus importantes du Maghreb. La romancière fait partie des premières écrivaines de littérature maghrébine d’expression française, une littérature qui a été pendant un temps une littérature de militantisme et a porté une idéologie indépendantiste. 

La particularité de la plume de Djebar est d’avoir dressé à travers son oeuvre des portraits majoritairement féminins. Ainsi, les thèmes traités par cette dernière sont principalement centrés sur la condition de la femme dans la société maghrébine dans les périodes pré et postcoloniales. 

C’est l’une des premières voix féminines à avoir conté l’Algérie. Son oeuvre vise à inscrire la femme dans cette lutte pour l’indépendance, que ça soit dans le roman L’Amour, La Fantasia, dont la trame se déroule en 1830, à l’arrivée de la France en Algérie ou dans Les Alouettes naïves, qui se déroule en pleine guerre d’Algérie.

L'écrivaine avait comme mission de donner, par ses écrits, une voix aux femmes de son pays de naissance.

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L'écrivaine algérienne Assia Djebar lors d'une conférence au Salon du livre de Francfort, le 8 octobre 2004 (Photo, AFP).

En 1954, dans un contexte de tension entre l’Algérie et la France, elle est la première Algérienne à intégrer l'École normale supérieure de jeunes filles de Sèvres en France.

Deux ans plus tard, elle se joint au mouvement de grève de l’Union générale des étudiants musulmans algériens (Ugema) et refuse de passer ses examens. Cette décision lui vaudra d’être exclue de l'école. Le Général de Gaulle interviendra en faveur de celle qu’il qualifie de «petit génie littéraire», et demandera sa réintégration dans l’École en 1959.  

En 2005, elle est élue à l'Académie française et devient la première écrivaine nord-africaine à en être membre.

Yasmine Belkaid, la femme de sciences

S’il est actuellement une femme qui marque l’histoire des femmes et pas uniquement d’Algérie, c’est bien Yasmine Belkaid.

Éminente scientifique, elle a assumé la direction de l'Institut Pasteur en janvier 2024, succédant au professeur Stewart Cole. Cette nomination historique fait d'elle la 17ᵉ directrice de l'Institut et seulement la deuxième femme à occuper ce poste en cent trente-cinq ans.

Née à Alger et formée à l’université des sciences et de la technologie Houari-Boumédiène (USTHB) de Bab Ezzouar, la femme de 56 ans a obtenu un doctorat en immunologie à l'Institut Pasteur. 

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La scientifique Yasmine Belkaid (Photo, Institut Pasteur).

Sa carrière exceptionnelle aux États-Unis, notamment au National Institute of Health (NIH) et à l’Insitut américain des allergies et des maladies infectieuses (NIAD), a été marquée par des contributions majeures dans le domaine de l'immunité, de l’infection et de la nutrition,récompensées par des distinctions prestigieuses. Elle a publié plus de 220 articles dans des revues renommées.

L'Institut Pasteur, mondialement reconnu, place de grandes attentes sur Yasmine Belkaid, qui a déclaré aspirer à faire de l'Institut «l'un des principaux centres de recherche en sciences du vivant, démontrant ainsi son engagement envers l'avancement de la recherche et de la formation».

Baya, cheffe de file de l’art moderne algérien 

Baya Mahieddine a contribué de manière significative à la scène artistique, et son héritage artistique perdure, témoignant de son empreinte indélébile dans le domaine de l'art en Algérie et au-delà.

Baya Mahieddine (1931-1998) est une artiste algérienne née à Bordj el-Kiffan, près d'Alger. 

Elle est surtout connue sous le nom de «Baya». Son talent artistique a été découvert à l'adolescence par le peintre français André Breton, qui fut impressionné par ses créations.

Son histoire commence à la Galerie Maeght à Paris: la jeune fille âgée de 16 ans en 1947, originaire d'Algérie et qualifiée de «jeune indigène musulmane», expose ses créations devant un public parisien qui n’en revient pas.

Parmi les spectateurs figurent la femme du président Vincent Auriol, accompagnée de personnalités artistiques éminentes de l'époque comme Albert Camus, Jean Dubuffet, et même Pablo Picasso.

Cette exposition parisienne a marqué le début de sa reconnaissance internationale. Elle a continué à exposer ses oeuvres dans diverses galeries à travers le monde. Baya a principalement travaillé dans les domaines de la peinture et de la sculpture.

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Une des œuvres les plus connues de Baya, Dame à l’oiseau, circa 1975 (Photo, Baya). 

Ses œuvres sont caractérisées par un style unique qui fusionne des éléments de l'art moderne occidental avec des influences de l'art traditionnel algérien.

Ses compositions colorées et poétiques continuent à captiver autant le public que les critiques d'art. La particularité de son art réside dans sa capacité à incorporer des thèmes de la culture algérienne tout en explorant des formes artistiques novatrices.

En explorant l'histoire de l'Algérie à travers ses monuments et ceux en devenir, nous découvrons un patrimoine diversifié et inspirant qui résonne au-delà des frontières, particulièrement pour les femmes maghrébines. 

Djamila Bouhired symbolise la résistance et le militantisme, Cheikha Remitti incarne le talent musical et l'émancipation féminine, Assia Djebar porte la voix littéraire des femmes algériennes, Baya Mahieddine représente le génie artistique, tandis que Yasmine Belkadi incarne l'intellect. 

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Baya, à 16 ans, au moment de ses débuts (Photo, Arik Nepo).

Ces portraits, aussi différents soient-ils, forment une mosaïque reflétant l'essence de la femme nord-africaine. À toutes celles qui se sentent un jour égarées, que ces femmes servent de repères et d’inspiration pour rappeler le potentiel qui sommeille en chacune.


Israël frappe à nouveau le sud du Liban, un an après le cessez-le-feu

L'armée israélienne a déclaré avoir mené jeudi une série de frappes contre le Hezbollah dans le sud du Liban, la dernière en date malgré le cessez-le-feu conclu il y a un an avec le groupe militant. (X/@fadwa_aliahmad)
L'armée israélienne a déclaré avoir mené jeudi une série de frappes contre le Hezbollah dans le sud du Liban, la dernière en date malgré le cessez-le-feu conclu il y a un an avec le groupe militant. (X/@fadwa_aliahmad)
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  • L’armée israélienne a mené de nouvelles frappes dans le sud du Liban, ciblant des infrastructures et des sites d’armes du Hezbollah, malgré un cessez-le-feu en vigueur depuis un an
  • Le gouvernement libanais est accusé par Israël et les États-Unis de tarder à démanteler la présence militaire du Hezbollah dans la zone frontalière, tandis que Beyrouth dément toute faute et rejette les accusations israéliennes

JERUSALEM: L'armée israélienne a annoncé jeudi avoir mené de nouvelles frappes contre le Hezbollah dans le sud du Liban, au moment où elle intensifie ses attaques sur le territoire libanais malgré un cessez-le-feu avec le mouvement pro-iranien qu'elle accuse de chercher à se réarmer.

"Il y a peu, l'armée israélienne a frappé et démantelé des infrastructures terroristes du Hezbollah dans plusieurs zones dans le sud du Liban", écrit l'armée dans un communiqué.

"Dans le cadre de ces frappes, l'armée a visé plusieurs sites de lancement où des armes du Hezbollah étaient stockées", ajoute le communiqué, qui précise que les frappes ont également touché des "postes militaires utilisés par des membres du Hezbollah pour mener des attaques terroristes".

L'agence de presse d'Etat libanaise ANI a annoncé une série de "raids aériens israéliens sur Al-Mahmoudiya et Al-Jarmak dans la région de Jezzine."

En vertu de l'accord de cessez-le-feu, signé il y a un an jour pour jour, l'armée libanaise doit démanteler la présence militaire du Hezbollah sur une bande d'une trentaine de kilomètres entre la frontière avec Israël et le fleuve Litani, plus au nord.

L'armée a soumis un plan au gouvernement, dans lequel elle s'engage à accomplir cette tâche titanesque, avant de procéder par étapes sur le reste du territoire libanais. Mais les Etats-Unis et Israël accusent les autorités libanaises de tarder, face à la ferme opposition du Hezbollah.

Mercredi, le ministre israélien de la Défense Israël Katz avait averti qu'il n'y aura "pas de calme" au Liban sans sécurité pour son pays.

"Nous ne permettrons aucune menace contre les habitants du nord, et une pression maximale continuera à être exercée et même s'intensifiera", a déclaré M. Katz lors d'une intervention devant le parlement israélien, avançant pour preuve "l'élimination" dimanche à Beyrouth du chef militaire du Hezbollah.

La Présidence libanaise a publié mercredi une déclaration du président Joseph Aoun qui "a rejeté les allégations israéliennes qui portent atteinte au rôle de l'armée et remettent en question son travail sur le terrain, notant que ces allégations ne reposent sur aucune preuve tangible."


Un an après le cessez-le-feu au Liban, la paix reste fragile alors que les violations israéliennes se multiplient

Cette frappe est la cinquième opération israélienne visant la banlieue sud depuis le 27 novembre 2024, et la deuxième à avoir lieu sans avertissement préalable. (Photo d'archive: AFP)
Cette frappe est la cinquième opération israélienne visant la banlieue sud depuis le 27 novembre 2024, et la deuxième à avoir lieu sans avertissement préalable. (Photo d'archive: AFP)
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  • Le cessez-le-feu demeure extrêmement fragile : plus de 5 000 violations israéliennes, une frappe majeure à Beyrouth et un risque réel d’escalade malgré les appels internationaux à la retenue
  • Le Sud-Liban vit une crise humanitaire profonde, avec des villages détruits, jusqu’à 70 000 déplacés et une population abandonnée entre l’État libanais et le Hezbollah

BEYROUTH : Alors que le cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah s'apprête à entrer dans sa deuxième année vendredi, les signaux d'alarme retentissent plus fort que jamais quant au risque d’une reprise du conflit au Liban.

L’assassinat dimanche dernier de Haytham Ali Tabatabai, chef militaire du Hezbollah et deuxième figure la plus puissante du mouvement après le secrétaire général Naim Qassem, lors d’une attaque audacieuse dans la banlieue sud de Beyrouth, a brisé les espoirs d’une stabilité durable.

La réponse du Hezbollah — qu’elle prenne la forme d’une action militaire ou d’un simple blâme diplomatique, comme certains cadres l’ont laissé entendre — pourrait déterminer si le cessez-le-feu survivra.

Cette frappe représente la cinquième opération israélienne visant la banlieue sud depuis le 27 novembre 2024, et la deuxième menée sans avertissement préalable.

Les registres officiels font état de 5 350 violations israéliennes du cessez-le-feu en douze mois. Ces violations ont coûté la vie à plus de 340 personnes — principalement des combattants et commandants du Hezbollah, mais aussi des civils, dont des enfants et des femmes — et ont blessé plus de 650 autres.

Dans une escalade notable, les forces israéliennes ont frappé pour la première fois Aïn Al-Héloué, un camp de réfugiés palestiniens.

Les violations répertoriées comprennent 2 198 incursions terrestres, 2 983 opérations aériennes et 169 violations maritimes.

Les forces de maintien de la paix de l’ONU dressent un tableau encore plus sombre, rapportant plus de 7 500 violations aériennes et environ 2 500 violations terrestres au nord de la Ligne bleue depuis l’accord de l’an dernier, ainsi que la découverte et la saisie de plus de 360 caches d’armes abandonnées, remises à l’armée libanaise.

La stratégie d’Israël s’apparente à une campagne d’usure progressive contre le Hezbollah, visant à réduire systématiquement ses capacités tandis que l’armée libanaise s’emploie à désarmer le groupe au sud du fleuve Litani.

L’armée affirme avoir rempli plus de 80 % de ce mandat, avec une échéance fixée à la fin de l’année avant que les opérations ne s’étendent vers le nord — une zone dans laquelle le Hezbollah refuse catégoriquement de rendre ses armes, estimant que la décision revient aux dirigeants politiques libanais.

Le conflit lui-même a porté de lourds coups au Hezbollah, décimant ses rangs et infligeant des pertes catastrophiques à ses stocks d’armement. Mais le plus inquiétant est peut-être l’empiètement physique d’Israël sur le territoire libanais.

Les observateurs de l’ONU ont documenté la construction par l’armée israélienne de murs en T en béton près de la Ligne bleue. Des relevés confirment que ces barrières s’enfoncent dans le territoire libanais au sud-ouest de Yaroun, isolant plus de 4 000 m² de terres libanaises. Des constructions similaires sont apparues au sud-est de la même ville ces dernières semaines.

Plus largement, les forces israéliennes contrôlent cinq positions réparties sur 135 km de territoire libanais — des Fermes de Chebaa à Ras Al-Naqoura — situées 500 à 1 000 mètres au-delà de la Ligne bleue.

L’ONU a exigé des enquêtes rapides et impartiales sur les opérations militaires israéliennes, en particulier la frappe contre le camp de réfugiés palestiniens, évoquant des violations potentielles du droit international humanitaire et appelant à la reddition de comptes.

Vingt ressortissants libanais croupissent dans les prisons israéliennes, principalement à Ofer, parmi lesquels dix membres du Hezbollah capturés lors de combats près d’Aïta Al-Chaab, un officier de marine enlevé lors d’un raid commando, et neuf civils. Leurs familles n’ont reçu aucune information officielle du Comité international de la Croix-Rouge sur leurs conditions ou leur état de santé.

Une source officielle libanaise a estimé que « la libération des détenus fait partie des termes de l’accord de cessez-le-feu, tout comme le retrait des territoires occupés, et le Liban ne détient aucun prisonnier israélien en échange. »

La politique de la terre brûlée menée par Israël dans les villages frontaliers s’est poursuivie, les attaques visant toute tentative de reconstruction. La Banque mondiale estime le coût des travaux à environ 11 milliards de dollars.

« Entre 10 et 15 villages ont été complètement rayés de la carte », affirme Tarek Mazraani, ingénieur à Houla et coordinateur du « Rassemblement des villages frontaliers du Sud ».

Mazraani estime que 65 000 à 70 000 personnes restent déplacées de leurs maisons et de leurs villages détruits.

« Ceux qui sont revenus sont ceux qui ne peuvent littéralement aller nulle part ailleurs, principalement des personnes âgées vivant au milieu des décombres, exposées quotidiennement à l’horreur des bombardements et aux couvre-feux, sans aucun hôpital pour les soigner », a-t-il déclaré à Arab News.

Toute personne souhaitant enterrer un proche doit obtenir l’autorisation de la FINUL, qui informe ensuite Israël pour permettre l’inhumation.

« Malgré cela, l’armée israélienne bombarde à chaque fois les abords du cortège funéraire », ajoute Mazraani.

Il précise que les déplacés ont loué des logements à Nabatiyé, Tyr, Saïda, Iqlim Al-Kharroub, dans la banlieue sud de Beyrouth et au Mont-Liban. La plupart sont agriculteurs, mais on compte aussi des enseignants, des ingénieurs, des travailleurs indépendants et des membres des forces de sécurité.

« Depuis la fin de la guerre, ces gens sont laissés sans aucun soutien officiel ou partisan. L’un des habitants les plus riches de la région, qui a tout perdu, travaille désormais comme livreur », dit-il.

Les personnes déplacées sont prises entre l'État parallèle du Hezbollah et l'État libanais : « Tout le monde exploite leur tragédie, même au sein de notre propre communauté du sud. Les loyers sont extrêmement élevés et nous ne nous sentons jamais chez nous. »

L’un d’eux, qui souhaite rester anonyme, explique : « Ceux qui ne sont affiliés à aucun parti sont loin de la politique. Notre seule préoccupation est d’assurer notre subsistance et une couverture financière en cas d’hospitalisation. Nous nous sentons orphelins et abandonnés, surtout quand une institution du Hezbollah nous dit qu’elle n’a plus d’argent. »

Il ajoute : « Les habitants des zones détruites paient le prix fort. Certains en veulent au Hezbollah pour la guerre et les milliers de morts qu’elle a entraînés, tandis que d’autres craignent que l’autre camp se réjouisse de notre malheur sans jamais nous rassurer. »

Les attentes libanaises face aux menaces israéliennes de relancer la guerre — sapant l’accord de cessez-le-feu négocié par la France et les États-Unis et dont les termes ressemblent fortement aux points principaux de la résolution 1701 — restent contradictoires.

Certains observateurs politiques jugent ces menaces « exagérées », tandis que d’autres estiment qu’« une frappe est inévitable mais n’aboutira pas à une guerre totale ; elle vise à pousser le Liban à négocier ».

Plus tôt ce mois-ci, le président libanais Joseph Aoun a déclaré : « Le Liban n’a pas d’autre choix que de négocier, et le langage de la négociation est plus important que celui de la guerre. »

Le Premier ministre Nawaf Salam l’a confirmé, exprimant son espoir d’un « soutien américain à une solution diplomatique ».

Pour l’heure, cependant, des négociations directes entre le Liban et Israël restent totalement exclues.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Israël: le ministre de la Défense avertit qu'il n'y aura "pas de calme" au Liban sans sécurité pour son pays

Un an après le cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne maintient toujours cinq positions dans le sud du Liban, avec des fortifications et des voies d'accès élargies, selon des images satellites analysées par l'AFP. (AFP)
Un an après le cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne maintient toujours cinq positions dans le sud du Liban, avec des fortifications et des voies d'accès élargies, selon des images satellites analysées par l'AFP. (AFP)
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  • Israël avertit qu’aucun calme ne reviendra au Liban tant que sa propre sécurité ne sera pas garantie, intensifiant ses frappes malgré la trêve et affirmant vouloir désarmer le Hezbollah
  • L’Égypte tente de désamorcer les tensions, tandis que l’application du cessez-le-feu reste bloquée : l’armée libanaise dit vouloir démanteler les positions du Hezbollah, mais Israël et les États-Unis accusent Beyrouth de traîner

JERUSALEM: Le ministre de la Défense israélien a averti mercredi qu'il n'y aura "pas de calme" au Liban sans sécurité pour son pays, alors qu'Israël a intensifié ses opérations militaires au Liban ces dernières semaines, en dépit d'un accord de cessez-le-feu.

"Nous ne permettrons aucune menace contre les habitants du nord, et une pression maximale continuera à être exercée et même s'intensifiera", a déclaré Israël Katz lors d'une intervention devant le parlement israélien, avançant pour preuve "l'élimination" dimanche à Beyrouth du chef militaire du Hezbollah.

"Il n'y aura pas de calme à Beyrouth ni d'ordre et de stabilité au Liban tant que la sécurité de l'Etat d'Israël ne sera pas garantie", a ajouté M. Katz en affirmant que son pays allait désarmer le Hezbollah.

Le ministre égyptien des Affaires étrangères a déclaré mercredi que son pays oeuvrait à la désescalade des tensions entre Israël et le mouvement armé libanais soutenu par l'Iran.

"Nous craignons toute escalade et nous sommes inquiets pour la sécurité et la stabilité du Liban", a déclaré ce ministre, Badr Abdel Ati, après sa rencontre avec le président libanais Joseph Aoun à Beyrouth mercredi.

"Nous engageons des efforts considérables pour épargner au Liban tout risque, ou toute atteinte, concernant sa sécurité", a-t-il ajouté.

Israël a frappé le Liban à plusieurs reprises malgré la trêve, affirmant régulièrement cibler les membres et les infrastructures du Hezbollah pour empêcher le groupe de se réarmer, ce qu'il nie être en train de faire.

En vertu de l'accord de cessez-le-feu, l'armée libanaise doit démanteler la présence militaire du Hezbollah sur une bande d'une trentaine de kilomètres entre la frontière avec Israël et le fleuve Litani, plus au nord.

L'armée a soumis un plan au gouvernement, dans lequel elle s'engage à accomplir cette tâche titanesque, avant de procéder par étapes sur le reste du territoire libanais. Mais les Etats-Unis et Israël accusent les autorités libanaises de tarder, face à la ferme opposition du Hezbollah.

Ce dernier invoque notamment le maintien par Israël de cinq postes dans le sud du Liban, dont l'accord de cessez-le-feu stipule pourtant que l'armée israélienne doit se retirer.