Quand la pop orientale unit Palestiniens et Israéliens... le temps d'une chanson

Mike Sharif, aujourd'hui la quarantaine, est devenu célèbre avec ses morceaux de pop mizrahi (orientale) dans les années 90, en Israël, mais aussi en Cisjordanie, à Gaza, et dans des pays arabes. (Photo, AFP)
Mike Sharif, aujourd'hui la quarantaine, est devenu célèbre avec ses morceaux de pop mizrahi (orientale) dans les années 90, en Israël, mais aussi en Cisjordanie, à Gaza, et dans des pays arabes. (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 11 mars 2022

Quand la pop orientale unit Palestiniens et Israéliens... le temps d'une chanson

  • Dès les débuts de la pop mizrahi, influencée par les cultures juives du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord, un jeu d'influences réciproques s'est établi avec la musique des territoires arabes voisins
  • À l'inverse, les grands noms de la musique arabe – Oum Kalthoum, Fairouz ou Farid al-Atrache – sont depuis longtemps populaires parmi les Israéliens

DALIAT AL-CARMEL : Yalla, Yalla, levez vos mains!", lance en arabe le chanteur druze israélien Mike Sharif à la foule de Palestiniens qui se trémoussent sur l'un de ses hits en hébreu, dont ils entonnent le refrain, lors d'un mariage en Cisjordanie occupée.

La scène, d'autant plus insolite qu'elle s'est déroulée il y a quelques mois à Yatta, un village palestinien situé près d'Hébron, dans une zone de friction fréquente entre armée, colons israéliens et Palestiniens, a fait le buzz sur les réseaux sociaux et dans les médias locaux.

"J'avais préparé trois heures de spectacle uniquement en arabe. Au bout d'une demi-heure, tout le monde – les familles des mariés, les invités – m'a demandé de chanter en hébreu", explique le chanteur druze à Daliat al-Carmel, dans le nord d'Israël.

Les Druzes, minorité arabophone professant une foi issue d'un islam hétérodoxe, comptent environ 140 000 en Israël et sur le plateau du Golan occupé.

Surnommé "le Druze prodige" après avoir remporté un concours télévisé à l'âge de 12 ans, Mike Sharif, aujourd'hui la quarantaine, est devenu célèbre avec ses morceaux de pop mizrahi (orientale) dans les années 90, en Israël, mais aussi en Cisjordanie, à Gaza, et dans des pays arabes.

"J'ai toujours appartenu à tout le monde", dit celui qui s'auto-proclame "ambassadeur de la paix" entre Israéliens et Palestiniens.

«En hébreu à Hébron, en arabe à Tel-Aviv»

Dès les débuts de la pop mizrahi, influencée par les cultures juives du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord, un jeu d'influences réciproques s'est établi avec la musique des territoires arabes voisins.

Aujourd'hui, des chanteurs comme Eyal Golan, le plus populaire en Israël, ou Eden Ben Zaken, comptent des fans chez les Palestiniens. À l'inverse, les grands noms de la musique arabe – Oum Kalthoum, Fairouz ou Farid al-Atrache – sont depuis longtemps populaires parmi les Israéliens.

Une proximité musicale qui, selon Mike Sharif, devrait permettre "d'unir tout le monde" et de contribuer à mettre fin aux conflits. "Je chante en hébreu à Hébron, en arabe à Tel-Aviv. Je chante dans les deux langues et tout le monde chante des deux côtés. La musique peut contribuer à la paix. La politique ne permet pas de rassembler les gens de cette façon", estime-t-il.

Mais sa prestation à Yatta a été suivie de critiques, voire de menaces de part et d'autre, certains Palestiniens et Israéliens le qualifiant de "traître", les premiers pour avoir chanté en hébreu en Cisjordanie – territoire occupé par Israël –, les seconds pour s'être produit dans un mariage palestinien.

Et après avoir affirmé qu'il voulait être "le premier chanteur israélien à se produire dans la bande de Gaza", territoire sous contrôle du mouvement islamiste Hamas et interdit d'entrée aux Israéliens, il a abandonné l'idée "en raison des tensions", dit-il, sans détailler.

«Expérience émotionnelle»

Pour Oded Erez, spécialiste de musique populaire à l'université Bar-Ilan près de Tel-Aviv, la musique comme pont entre Israéliens et Palestiniens appartient aux "années d'Oslo", celles du début des années 90 suivant la signature des accords intérimaires sur l'autonomie dans les territoires occupés, quand des chanteuses juives comme Zehava Ben ou Sarit Hadad se produisaient en arabe avec des chansons de Oum Kalthoum dans des villes palestiniennes.

Mais, aujourd'hui, selon le musicologue, "un investissement partagé dans une musique, un style musical, un son commun n'est pas à lui seul une plateforme pour un changement politique ou une réconciliation (...) il doit être explicitement mobilisé au niveau politique".

Et la proximité musicale entre Palestiniens et Israéliens est réduite à "une expérience physique et émotionnelle" et non politique, dit-il.

La demande du public palestinien lors de la prestation de Mike Sharif n'était ainsi pas une demande "pour l'hébreu en tant que tel, mais pour ses hits des années 90, chantés en hébreu, et entrés dans les canons du répertoire des mariages palestiniens", explique-t-il.

Il en va de même pour le titre "Le son de la poudre à feu", composé en 2018 en l'honneur d'un chef de gang d'un camp de réfugiés près de Naplouse en Cisjordanie, joué en boucle en arabe dans des mariages israéliens, ajoute le musicologue.

"Quand il y a de la musique, les gens se déconnectent de toutes les guerres, de la politique, des différences d'opinion", conclut Mike Sharif. "Ils oublient tout, ils sont juste concentrés sur la musique".


Des récits de quinze pays arabes pour le Festival du film Safar en Grande-Bretagne

Le programme de cette année est organisé par Rabih el-Khoury, collaborateur de longue date de Safar et de l’Arab British Center. (Safar)
Le programme de cette année est organisé par Rabih el-Khoury, collaborateur de longue date de Safar et de l’Arab British Center. (Safar)
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  • Le festival Safar, qui fête sa 9e édition, est considéré comme la principale plate-forme de présentation du cinéma arabe au Royaume-Uni
  • Le programme comprend des nouveautés, des classiques, des films d’archives et des projections familiales

LONDRES: Le Festival du film Safar de cette année se tiendra du 18 au 30 juin dans neuf villes britanniques. C’est l’événement cinématographique arabe le plus important et le plus ancien du Royaume-Uni, selon l’Arab British Center.

Organisé par Rabih el-Khoury, collaborateur de longue date de Safar et de l’Arab British Center, le programme 2024 explorera les thèmes des rêves, des espoirs et des réalités à travers des histoires en provenance de quinze pays arabes.

Le programme du festival propose soixante projections et événements dans quatre salles londoniennes, ainsi que dans des cinémas de Birmingham, Cardiff, Glasgow, Hull, Liverpool, Manchester, Oxford et Plymouth.

M. El-Khoury confie que le festival inclut le cinéma soudanais et palestinien, ce qui promet au public «des thèmes couvrant les rapports familiaux, la perte, l’amour, la migration et les dures vérités de la guerre et de la politique».

Il ajoute: «À travers ces histoires et grâce à un cinéma stimulant et captivant, nous visons à faciliter l’échange, la réflexion et à partager la force dans la solidarité.»

Le festival Safar, qui fête sa 9e édition, est considéré comme la principale plate-forme de présentation du cinéma arabe au Royaume-Uni.

Le programme comprend des nouveautés, des classiques, des films d’archives et des projections familiales.

Parmi les œuvres phares, on compte le documentaire Life is BeautifulLa Vie est belle») de Mohamed Jalaby, qui évoque la solidarité européenne et la rigidité des frontières, tant physiques que bureaucratiques, à la lumière de la guerre à Gaza en 2014.

Parmi les autres œuvres figurent Bye Bye Tiberias, de Lina Soualem, une galerie magnifique de quatre générations de femmes palestiniennes, The Burdened, du réalisateur yéménite Amr Gamal, qui suit Isra’a et Ahmed dans leur combat pour élever leurs trois jeunes enfants, et Inshallah a Boy, d’Amjad al-Rasheed.

«Le festival constitue un élément clé de notre travail. Il a pour but de mieux comprendre le monde arabe au Royaume-Uni», indique Nadia el-Sebai, directrice exécutive de l’Arab British Center.

«Cette année, nous avons le privilège de travailler une fois de plus avec Rabih el-Khoury, ainsi qu’avec nos commissaires invités et nos partenaires à travers le Royaume-Uni pour présenter notre festival le plus impressionnant à ce jour.»

«Malgré les réalités difficiles auxquelles se trouve confrontée la région, Safar nous invite à nous rassembler et à trouver du réconfort, des espoirs et des rêves, dans le langage universel du cinéma», conclut-elle.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Retour en Suisse triomphal pour l'interprète Nemo après son sacre à l'Eurovision

Le chanteur suisse gagnant Nemo représentant la Suisse avec la chanson "The Code" célèbre après la finale du 68e Concours Eurovision de la chanson (ESC) 2024, le 11 mai 2024 à la Malmo Arena de Malmö, en Suède (Photo, AFP).
Le chanteur suisse gagnant Nemo représentant la Suisse avec la chanson "The Code" célèbre après la finale du 68e Concours Eurovision de la chanson (ESC) 2024, le 11 mai 2024 à la Malmo Arena de Malmö, en Suède (Photo, AFP).
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  • Avec sa veste à plumes roses et rouges et sa jupe satinée rose, Nemo a recueilli 591 points
  • Il s'agit de la troisième victoire de la Suisse au concours de l'Eurovision depuis sa création en 1956

MALMÖ: Nemo a regagné la Suisse dimanche sous les acclamations après sa victoire au concours de l'Eurovision 2024, une édition marquée par la controverse sur la participation d'Israël, en pleine guerre dans la bande de Gaza.

"Félicitations +honey pie+ (surnom affectueux en anglais) !", s'est exclamé un admirateur de l'artiste non-binaire de 24 ans, en lui tendant un bouquet de fleurs, à son arrivée à l'aéroport de Zurich en provenance de Copenhague.

D'autres brandissaient des drapeaux arborant en anglais le message: "Nous existons, nous insistons, nous persistons", en référence à la lutte des personnes non-binaires pour la reconnaissance de leur identité.

Une autre banderole clamait "Femme, homme, humain" en allemand.

Nemo Mettler, qui demande à être désigné par des pronoms non-genrés, a remporté la compétition avec "The Code", un titre hautement personnel racontant son cheminement vers la réalisation de son identité de genre.

La Suisse a devancé la Croatie, l'Ukraine, la France, menée par le chanteur Slimane, et Israël, représenté par Eden Golan. La présence d'une candidate d'Israël a suscité une vive controverse alors que son pays a lancé une offensive meurtrière contre le Hamas à Gaza, après une attaque sanglante du groupe palestinien le 7 octobre en Israël.

L'Union européenne de radio-télévision, qui organise l'événement, a estimé que plus de 160 millions de personnes avaient regardé le concours 2024, diffusé en direct dans les 37 pays participant à la finale et sur YouTube.

Des fans massés derrière des barrières avaient attendu Nemo patiemment en reprenant sa chanson.

Les applaudissements ont commencé à retentir à l'apparition de l'interprète, qui y a répondu par deux pouces en l'air avant de prendre des selfies et de signer des autographes.

Nemo a rejoint un groupe de fans qui chantaient "Nous avons cassé les codes", "nous existons".

«Pas réel»

En conférence de presse après ce retour triomphal, Nemo a indiqué vouloir prendre du repos dans son jardin. "Je vais m'allonger et essayer de me calmer un petit peu", a dit l'artiste. "On dirait que ce n'est pas réel".

"J'ai cassé les codes. J'ai cassé le trophée", a répété Nemo, après l'avoir littéralement brisé dans un geste d'enthousiasme lorsqu'il a reçu son prix.

L'accueil des fans à l'aéroport a été "extrêmement beau (...) cela m'a montré à quel point c'est bon de faire partie d'une communauté".

Nemo Mettler, qui vit actuellement à Berlin, est originaire de Bienne, ville bilingue allemand-français du nord de la Suisse, où une réception publique est prévue pour congratuler l'enfant du pays.

"Ce sera certainement une grande fête dans la ville, avec le public, les fans", a prédit le maire de Bienne Erich Fehr, interrogé à l'aéroport par l'agence de presse suisse Keystone-ATS.

"C'est dingue, c'est une incroyable histoire que Nemo de Bienne ait remporté ce titre. Le plus important concours de musique au monde. Nous sommes vraiment fiers et heureux", a-t-il ajouté.

Le chef de la Corporation des diffuseurs suisses, Gilles Marchand, a lui aussi souligné l'"immense succès" de Nemo.

Il s'agit de la troisième victoire de la Suisse au concours de l'Eurovision depuis sa création en 1956. Comme le veut la tradition, le pays sera l'hôte de la prochaine édition.

"Même si la diffusion du concours de l'Eurovision est un défi majeur pour toutes les chaînes de télévision en termes de ressources et de finances, nous sommes malgré tout ravis de savoir que notre pays accueillera en 2025 cet événement très apprécié", a poursuivi M. Marchand.


Le Louvre Abu Dhabi exposera des œuvres de Van Gogh

L’œuvre « Chambre à Arles » représente la chambre de van Gogh dans sa maison jaune à Arles (Photo, Fournie).
L’œuvre « Chambre à Arles » représente la chambre de van Gogh dans sa maison jaune à Arles (Photo, Fournie).
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  • L’exposition abordera la période dite de post-impressionnisme, en se concentrant spécifiquement sur les années 1886 à 1905
  • Les pièces phares du monde arabe incluent deux chefs-d’œuvre de l’artiste franco-égyptien Georges Hanna Sabbagh: L’artiste et sa famille à La Clarté (1920) et Les Sabbagh à Paris (1921)

DUBAÏ: Le Louvre Abu Dhabi s’apprête à exposer une œuvre du peintre néerlandais Vincent van Gogh lors de l’exposition Post-impressionnisme: au-delà des apparences, qui se tiendra du 16 octobre au 9 février de l’année prochaine.

L’œuvre Chambre à Arles représente la chambre de Van Gogh dans sa maison jaune à Arles, où il installa son atelier et vécut à partir de septembre 1888.

L’exposition sera organisée par Jean-Rémi Touzet, conservateur des peintures au musée d’Orsay, et Jérôme Farigoule, conservateur en chef du Louvre Abu Dhabi, avec le soutien d’Aisha Alahmadi, assistante de conservation au Louvre Abu Dhabi.

1886 à 1905

Elle abordera la période dite de post-impressionnisme, en se concentrant spécifiquement sur les années 1886 à 1905. «Ces deux décennies furent une période d’immense innovation et expérimentation artistique, marquant la transition de l’impressionnisme à l’émergence explosive des ‘Fauves’ au Salon d’Automne», peut-on lire dans un communiqué.

Les pièces phares du monde arabe incluent deux chefs-d’œuvre de l’artiste franco-égyptien Georges Hanna Sabbagh: L’artiste et sa famille à La Clarté (1920) et Les Sabbagh à Paris (1921).

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com