Azzedine Taïbi, le maire de Stains, reçoit des menaces de mort

Azzedine Taïbi dénonce: «Quand un élu de la République est menacé de mort, c’est la démocratie qui est menacée, et c’est l’ensemble de la classe politique qui doit se lever pour refuser de tels agissements.» (Fournie)
Azzedine Taïbi dénonce: «Quand un élu de la République est menacé de mort, c’est la démocratie qui est menacée, et c’est l’ensemble de la classe politique qui doit se lever pour refuser de tels agissements.» (Fournie)
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Publié le Samedi 10 octobre 2020

Azzedine Taïbi, le maire de Stains, reçoit des menaces de mort

  • «Regarde bien sur les côtés, en haut et en bas, car on va venir te crever quand tu ne t’y attendras pas»: c’est l’un des messages reçus par l’élu de la République
  • Des élus, des militants politiques, syndicaux, associatifs et de nombreux Stanois se sont rassemblés pour dénoncer les menaces et les injures racistes adressées au maire de la ville

PARIS: Azzedine Taïbi, le maire communiste de Stains, une ville de 40 000 habitants située dans le département de la Seine-Saint-Denis, a essuyé des insultes et reçu des menaces de mort. «En 2014, lors de ma première élection, je recevais de temps en temps un courrier raciste ou menaçant. Je n’y prêtais pas attention. On sait qu’il y a des racistes… Cela me passait au-dessus», explique le maire de Stains dans une déclaration publique.

Mais, face à la recrudescence des insultes – «bougnoule», «profiteur», «sale race», «parasite», «terroriste» – et des menaces, le maire a décidé de saisir le procureur de la République. «Regarde bien sur les côtés, en haut et en bas, car on va venir te crever quand tu ne t’y attendras pas»: c’est l’un des messages reçus par l’élu de la République à la fin du mois d’août dernier.

Facteur déclenchant

Ces menaces se sont multipliées depuis l’inauguration, en présence du maire de la ville de Stains, de la fresque en hommage à George Floyd et Adama Traoré, le 18 juin dernier.

Surmontée de la formule «contre le racisme et les violences policières», la fresque a été vandalisée par des inconnus le 4 juillet dernier; elle a été restaurée depuis.

«Les violences policières sont une réalité réaffirmée dans de nombreux rapports officiels d’Amnesty International, de la Ligue des droites de l’homme (LDH) ou bien du Défenseur des droits», avait expliqué Azzedine Taïbi. «Les gardiens de la paix, dans la grande majorité, exercent leurs missions de service public avec dévouement et sacrifice.» Mais, ajoute-t-il, «passer sous silence le tabou des violences policières ne rend service à personne, ni à la population, ni aux policiers».

Le maire affirme qu’avec ces prises de positions il ne fait que défendre «la démocratie, nos institutions et les valeurs de la République», en précisant que cela «n’incrimine pas l’ensemble des policiers, n’en déplaise à certains responsables politiques et à un syndicat de police placé très à droite», martèle-t-il dans une déclaration à la presse.

Réaction de l’État?

Stupéfait devant l’absence de réactions des politiques, Azzedine Taïbi dénonce: «Quand un élu de la République est menacé de mort, c’est la démocratie qui est menacée, et c’est l’ensemble de la classe politique qui doit se lever pour refuser de tels agissements.» Déterminé à se faire entendre, le maire, qui a saisi la justice, a déclaré: «Aucune tentative d’intimidation ne me fera taire. Je poursuivrai toutes mes batailles, comme je l’ai toujours fait, car il s’agit de combats justes et légitimes.»

Le maire déclare avoir remis une «très importante quantité de messages, courriers, [documents] audio» à la justice. «Je fais cela pour me protéger, mais pas seulement. À travers moi, ces insultes racistes, où l'on demande à des Français de quitter le pays parce qu'ils ont une couleur de peau différente, ce sont tous les quartiers populaires que l'on attaque», souligne Azzedine Taïbi dans les colonnes du journal Le Parisien.

De son côté, le ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti, avait publié en septembre dernier une circulaire pour défendre les maires victimes d’outrages. «Une réponse pénale systématique et rapide doit être apportée par les parquets qui éviteront les simples rappels à la loi», précise le document adressé aux procureurs.

Rassemblement de solidarité

Pour soutenir Azzedine Taïbi, la maire adjointe déléguée au centre-ville de Stains, Aziza Taarkoubte, a appelé à un rassemblement citoyen devant la mairie de Stains le 26 septembre dernier à 11 heures. «Tout est parti d’une pétition initiée par des citoyens, explique l’élue. Ils ont lancé ce mot d’ordre: “Ne touche pas à mon maire.”» Les habitants de la ville ont souhaité organiser un rassemblement en soutien au maire. «En tentant d’atteindre notre maire par leurs menaces, c’est toute la population de Stains que ces lâches attaquent», explique-t-elle.

Des élus – dont le président PS du département, Stéphane Troussel, les communistes Stéphane Peu, Marie-George Buffet, Pierre Laurent et Fabien Gay, ainsi que les Insoumis Clémentine Autain, Éric Coquerel, Alexis Corbière et Danièle Obono –, des militants politiques, syndicaux, associatifs, et de nombreux Stanois se sont rassemblés pour dénoncer les menaces et les injures racistes adressées au maire de la ville.

Lors du rassemblement, de nombreux témoignages de solidarité ont été exprimés. «Ceux qui tentent de nous diviser veulent en profiter pour mieux nous exploiter. Ce rassemblement, c’est aussi celui du combat pour le progrès social, l’émancipation humaine», explique Marie-George Buffet, députée de la circonscription. Quant à Stéphane Troussel, président du conseil départemental de Seine-Saint-Denis, il déclare: «Le racisme est un délit, il est urgent qu’il soit sanctionné comme tel; ces actes ne doivent pas rester impunis.»

«Notre République, c’est la liberté, la fraternité, la solidarité, la dignité des quartiers populaires», affirme de son côté Azzedine Taïbi lors du rassemblement; des paroles saluées par des applaudissements. Solidaire des autres élus de la République, le maire de Stains ajoute: «J’ai une pensée pour les autres victimes de ces injures, nous sommes nombreux à être concernés.»

 

 


La cour d'assises de Paris se dit bien compétente pour juger un ex-rebelle salafiste syrien

La cour d'assises de Paris a rejeté mercredi la demande des avocats d'un ancien rebelle syrien qui voulaient qu'elle se déclare incompétente pour le juger pour complicité de crimes de guerre. (AFP)
La cour d'assises de Paris a rejeté mercredi la demande des avocats d'un ancien rebelle syrien qui voulaient qu'elle se déclare incompétente pour le juger pour complicité de crimes de guerre. (AFP)
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  • Mes Romain Ruiz et Raphaël Kempf arguaient notamment que la chute du régime de Bachar al-Assad, survenue en décembre 2024, changeait la donne, et appelaient à ce que leur client soit jugé par la justice de transition en Syrie
  • La cour d'assises a rejeté cette demande, se disant "régulièrement saisie" et "compétente pour connaître des faits reprochés à Majdi Nema", permettant ainsi au procès de se poursuivre

PARIS: La cour d'assises de Paris a rejeté mercredi la demande des avocats d'un ancien rebelle syrien qui voulaient qu'elle se déclare incompétente pour le juger pour complicité de crimes de guerre.

La défense de Majdi Nema, un ancien membre du groupe salafiste syrien Jaysh al-Islam (JAI, Armée de l'islam) arrêté en France en 2020, a contesté mardi, au premier jour du procès, le principe de compétence universelle permettant à la justice française de juger un étranger pour des crimes commis à l'étranger sur des étrangers.

Mes Romain Ruiz et Raphaël Kempf arguaient notamment que la chute du régime de Bachar al-Assad, survenue en décembre 2024, changeait la donne, et appelaient à ce que leur client soit jugé par la justice de transition en Syrie.

La cour d'assises a rejeté cette demande, se disant "régulièrement saisie" et "compétente pour connaître des faits reprochés à Majdi Nema", permettant ainsi au procès de se poursuivre.

Cet homme de 36 ans comparaît pour complicité de crimes de guerre, soupçonné notamment d'avoir aidé à enrôler et à former à l'action armée des mineurs, et pour entente en vue de la préparation de crimes de guerre, des faits pour lesquels il encourt 20 ans de réclusion criminelle.

Il conteste les accusations, affirmant n'avoir eu qu'un "rôle limité" dans JAI, un groupe prônant la charia et qui combattait le régime syrien, qu'il dit avoir quitté en 2016.

Alors qu'une plainte avait été déposée en France contre JAI en 2019, il avait été arrêté en janvier 2020 à Marseille, où il se trouvait pour un séjour d'études de quelques mois. Il avait été mis en examen et écroué par un juge du pôle crimes contre l'humanité du tribunal de Paris.


Proportionnelle: Bayrou consulte mais les avis divergent

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  • Le Premier ministre recevra chacun des chefs de partis et des présidents de groupes parlementaires représentés à l'Assemblée nationale, suivant un ordre lié à leur importance numérique
  • François Bayrou défend un scrutin à la proportionnelle intégrale, dans tous les départements, pour les élections législatives, alors que depuis l'instauration de la Ve République, les députés sont élus au scrutin uninominal majoritaire à deux tours

PARIS: François Bayrou entame mercredi avec le Rassemblement national une série de consultations des forces politiques sur la proportionnelle, que lui-même réclame depuis longtemps mais sur laquelle les désaccords restent nombreux.

Le Premier ministre recevra chacun des chefs de partis et des présidents de groupes parlementaires représentés à l'Assemblée nationale, suivant un ordre lié à leur importance numérique.

La cheffe de file des députés RN Marine Le Pen, qui forment le groupe le plus important à l'Assemblée, et le président du parti à la flamme Jordan Bardella seront ainsi reçus en premier à 10H00.

Suivra un entretien jeudi 1er mai à 17H00 avec le président du groupe macroniste et du parti Renaissance Gabriel Attal. Il sera accompagné par le député Pierre Cazeneuve, qui a mené une analyse comparative des différents modes de scrutin.

François Bayrou défend un scrutin à la proportionnelle intégrale, dans tous les départements, pour les élections législatives, alors que depuis l'instauration de la Ve République - à l'exception des législatives de 1986 -, les députés sont élus au scrutin uninominal majoritaire à deux tours.

Le RN réclame lui aussi la proportionnelle, mais avec une prime majoritaire pour la liste arrivée en tête. "La tripolarisation de la vie politique entraîne une absence de majorité", a soutenu mardi Mme Le Pen, qui "n'imagine pas que le Premier ministre (...) puisse reculer sur ce sujet".

"Moins pire" 

En discutant de cette revendication commune avec le RN, François Bayrou espère sans doute faire baisser la tension avec l'extrême droite, qui fait planer la menace d'une motion de censure contre son gouvernement.

Le RN dénonce l'absence de perspectives législatives sur la proportionnelle, sur l'immigration ainsi que sur la feuille de route énergétique (programmation pluriannuelle de l'énergie, PPE). François Bayrou l'a à cet égard ménagé lundi en reportant la date de publication d'un décret sur la PPE.

Mais le Premier ministre n'est pas assuré d'avoir cette fois le soutien des macronistes, traversés par moult "interrogations", selon Pierre Cazeneuve.

En 2018, le président Emmanuel Macron avait souhaité l'instauration d'un système mixte avec 15% des députés élus à la proportionnelle, puis la réforme avait été abandonnée.

Or les députés Renaissance considèrent désormais que le mode de scrutin actuel est "le moins pire", car la "distorsion" entre le nombre de voix et le nombre de députés "n'existe plus" dans l'Assemblée actuelle, et ce changement n'est "pas forcément une priorité" pour les Français au vu du nouveau contexte international, a expliqué M. Cazeneuve lors d'un point presse.

Cumul des mandats 

Gabriel Attal et Pierre Cazeneuve entendent jeudi élargir le débat à la question de "l'efficacité de l'action publique", en reparlant de la réduction du nombre de parlementaires et de la "simplification du millefeuille administratif".

Mais ils jugent "délétère" de proposer la proportionnelle en échange du cumul des mandats, soutenu avec force par François Bayrou.

Le président du parti Horizons Edouard Philippe défend pour sa part le scrutin majoritaire, qui "impose un lien entre un député et les électeurs d'un territoire". Il pourrait soutenir la proportionnelle "si était rétablie la possibilité de cumuler un mandat exécutif local et le mandat parlementaire".

Les indépendants du groupe Liot sont "plutôt largement très défavorables" à réformer le mode de scrutin, selon son président Laurent Panifous.

A droite, Les Républicains (LR) y sont fermement opposés, comme l'a rappelé Laurent Wauquiez.

"La proportionnelle aboutira à ce qu'on va institutionnaliser le chaos politique qu'on connaît en ce moment", a tonné le patron de la droite dimanche, avant de critiquer mardi la "hiérarchie des priorités" du gouvernement dans un pays "qui est ruiné" et "où il y a une telle explosion de l'insécurité et de l'immigration", au vu des "menaces" sur le plan international.

Le gouvernement souhaite pouvoir légiférer à ce sujet "avant la fin de la session parlementaire si le débat est mûr", a précisé mercredi sa porte-parole LR Sophie Primas.

D'autres partis, notamment à gauche, souhaitent une évolution du mode de scrutin.

Mais le PS est divisé. L'ancien président François Hollande est pour, tandis que son Premier secrétaire Olivier Faure est contre à titre personnel.

Le député PS Emmanuel Grégoire a rappelé mardi que "derrière ce mot un peu vague de proportionnelle, se cache une subtilité immense, immense, de déclinaisons pratiques".


Assemblée: la gauche s'insurge contre le refus d'une minute de silence pour la victime de la mosquée du Gard

La députée de La France Insoumise - Nouveau Front Populaire et présidente de la commission parlementaire des affaires économiques, Aurélie Trouve, s'exprime lors d'une déclaration du gouvernement et d'un débat parlementaire sur la souveraineté énergétique de la France à l'Assemblée nationale française, à Paris, le 28 avril 2025. (AFP)
La députée de La France Insoumise - Nouveau Front Populaire et présidente de la commission parlementaire des affaires économiques, Aurélie Trouve, s'exprime lors d'une déclaration du gouvernement et d'un débat parlementaire sur la souveraineté énergétique de la France à l'Assemblée nationale française, à Paris, le 28 avril 2025. (AFP)
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  • La gauche s'est insurgée mardi contre l'absence de minute de silence à l'Assemblée nationale en hommage à Aboubakar Cissé, tué de plusieurs dizaines de coups de couteau vendredi dans une mosquée du Gard
  • Le parti de gauche a annoncé avoir essuyé un refus de Mme Braun-Pivet au motif qu'il "n'y a pas de minute de silence pour des cas individuels", a rapporté Aurélie Trouvé, députée LFI

PARIS: La gauche s'est insurgée mardi contre l'absence de minute de silence à l'Assemblée nationale en hommage à Aboubakar Cissé, tué de plusieurs dizaines de coups de couteau vendredi dans une mosquée du Gard.

La France insoumise, qui appelle à une "mobilisation nationale contre l'islamophobie" le dimanche 11 mai, a demandé à la présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, qu'une minute de silence soit observée mardi en ouverture de la séance des questions au gouvernement.

Le parti de gauche a toutefois annoncé avoir essuyé un refus de Mme Braun-Pivet au motif qu'il "n'y a pas de minute de silence pour des cas individuels", a rapporté Aurélie Trouvé, députée LFI (Seine-Saint-Denis).

La question a été soulevée en conférence des présidents, mais n'a pas recueilli de majorité de voix selon une source parlementaire, qui souligne que cette instance a décidé fin janvier "de ne plus faire de minutes de silence pour des cas individuels".

"On n'est pas sur un cas individuel, on est sur un meurtre islamophobe, sur un climat islamophobe dans le pays, et ne pas rendre hommage à Aboubakar Cissé est une très grave faute politique", a déploré le député LFI Thomas Portes.

Le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, s'est dit sur X "scandalisé par le refus de Yaël Braun-Pivet d'accorder une minute de silence en hommage à Aboubakar Cissé". "Cet hommage républicain doit être rendu dans l'hémicycle", a abondé sur le même réseau social le patron des députés PS Boris Vallaud.

Benjamin Lucas, porte-parole du groupe écologiste, a lui-aussi regretté l'absence de cette minute de silence qui "aurait été un bon signal" envers "nos compatriotes musulmans qui sont insultés, injuriés en permanence".

Une décision également "vivement regrettée" par Stéphane Peu, chef du groupe communiste à l'Assemblée nationale. Son groupe posera mardi après-midi une question au gouvernement sur le meurtre d'Aboubakar Cissé.

Réunis autour de membres de la famille d'Aboubakar Cissé, mardi à l'Assemblée nationale, plusieurs leaders de gauche dont Olivier Faure et l'écologiste Marine Tondelier, ont insisté pour que cette minute de silence puisse avoir lieu.