Présidentielle et dossier corse: le candidat Macron sous le feu des critiques

Le président français Emmanuel Macron, à Paris le 21 mars 2022 (Photo, AFP).
Le président français Emmanuel Macron, à Paris le 21 mars 2022 (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 23 mars 2022

Présidentielle et dossier corse: le candidat Macron sous le feu des critiques

  • Le calme sur l'île est un préalable posé par Emmanuel Macron avant une discussion entre Etat et élus locaux
  • L'agression le 2 mars dans la prison d'Arles du militant Avait provoqué des manifestations violentes

PARIS : Sujet brûlant de cette fin de campagne, le dossier corse, avec la mort d'Yvan Colonna et l'ouverture prochaine de pourparlers avec les élus locaux, a mis mardi le président-candidat Macron sous le feu des critiques des autres prétendants à l'Elysée.

A 19 jours du premier tour, le chef de l'Etat sortant a appelé sur France Bleu "au calme et à la responsabilité" en Corse, parce que "dans ce contexte, le plus important est que le calme se maintienne, que les discussions se poursuivent", a-t-il souligné.

L'agression le 2 mars dans la prison d'Arles du militant condamné à la perpétuité pour l'assassinat du préfet Erignac avait provoqué des manifestations parfois violentes, et poussé le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin à se rendre sur l'île. Yvan Colonna est décédé lundi soir après trois semaines de coma.

Le calme est depuis revenu, mais l'exécutif surveille la situation comme le lait sur le feu. Et Matignon a fait un geste d'apaisement mardi en autorisant le transfèrement d'Alain Ferrandi et Pierre Alessandri, complices d'Yvan Colonna, "d'ici la mi-avril" dans la prison de Borgo en Corse. 

Le calme sur l'île est un préalable posé par Emmanuel Macron avant une discussion entre Etat et élus locaux qui s'ouvrira début avril.

«Clarifier» rapidement 

Les concurrents d'Emmanuel Macron dans la course à la présidence ont trouvé dans le toujours très sensible dossier corse l'occasion de tirer à boulets rouges sur Emmanuel Macron, grand favori du scrutin, l'accusant d'électoralisme, de faiblesse face à la violence et d'inaction depuis cinq ans.

"Le gouvernement doit s’expliquer" sur les "très nombreuses questions" posées par "les circonstances" de l'agression, a exhorté la candidate RN Marine Le Pen.

La mort d'Yvan Colonna signifie que "le jihad continue même en prison" et que "l’Etat d’Emmanuel Macron ne tient rien, ne maîtrise rien", a accusé l'autre candidat d'extrême droite, Eric Zemmour (Reconquête!).

La candidate LR Valérie Pécresse pose elle aussi le préalable du "retour à l'ordre" et se montre ouverte à la piste de l'autonomie, sous certaines conditions: "si on donne de l'autonomie, il faut que ce soit avec des obligations de résultat".

"Appel au calme" également de l'écologiste Yannick Jadot, qui dénonce encore la "responsabilité" d'Emmanuel Macron pour avoir laissé "traîner" les discussions et prône une "autonomie de plein exercice, de plein droit, de la Corse".

"Le groupe de la France insoumise à l'Assemblée nationale est favorable" à la création d'une commission d'enquête "pour déterminer la réalité des événements et créer une situation d'apaisement", a expliqué pour sa part Manuel Bompard, directeur de la campagne de Jean-Luc Mélenchon (LFI).

Hidalgo pilonne l'idée d'un «vote utile» pour Mélenchon

La candidate socialiste Anne Hidalgo a pilonné mardi l'idée d'un "vote utile" en faveur de Jean-Luc Mélenchon, le mieux placé à gauche dans les sondages pour la course à l'Elysée, en étrillant en particulier ses positions sur le conflit en Ukraine.

"La gauche de M. Mélenchon (.) c'est l'impasse, c'est le vote le moins utile du monde", a-t-elle lancé en soirée lors d'un meeting à Limoges avec l'ancien président François Hollande.

Une domination de la gauche par le leader de la France Insoumise signifierait "la fin de tout espoir d'avoir un gouvernement de gauche dans ce pays", a-t-elle poursuivi.

Le "soi-disant vote utile" émane "de ceux qui veulent que la gauche ne gouverne pas", a-t-elle ajouté.

"Le vote utile, c'est le vote de la gauche qui se coltine le réel pour aller vers l'idéal", a répliqué la socialiste devant les quelque 400 à 500 personnes venues au meeting de la candidate.

«Quoi qu'il en coûte sur l'essence»

Accusé de fuir le débat, Emmanuel Macron a défendu son bilan et répondu mardi aux questions des auditeurs de France Bleu pendant une heure. Sur le pouvoir d'achat, il a rappelé les mesures du gouvernement pour absorber la flambée des prix de l'énergie, vantant "un quoi qu'il en coûte sur l'essence".

Le candidat a rappelé sa promesse d'"un chèque alimentaire pour aider les ménages les plus modestes et les classes moyennes".

Mais au sein d'une gauche divisée, l'ascension dans les sondages du candidat insoumis, qui s'est hissé à la troisième place, est mal vécue.

«Reconstruire la gauche»

Une "initiative devra être prise pour reconstruire la gauche de responsabilité", a-t-il lancé. "J'y prendrai toute ma part".

Dans cette drôle de campagne, d'abord éclipsée par le Covid puis maintenant rythmée par la guerre en Ukraine, le président ukrainien Volodymyr Zelensky interviendra mercredi à 15H00 en direct par vidéo devant les députés et sénateurs français.

Emmanuel Macron a dénoncé mardi l'usage par la Russie "d'armes explosives dans des zones densément peuplées", estimant que "tout, dans l’agression de l’Ukraine par la Russie, est inacceptable".

Il s'est de nouveau entretenu mardi pendant une heure avec Vladimir Poutine - le 8ème entretien téléphonique entre les deux hommes depuis l'offensive russe le 24 février - , sans que se dégage toutefois un accord pour le cessez-le-feu réclamé par le président français.


Le PDG de CMA CGM assure «ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale» des médias qu'il possède

Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
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  • "Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media
  • Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique"

PARIS: Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC.

"Les journaux ou chaînes de télévision qu'on a rachetés ont une indépendance, ce sont des journaux qui sont nuancés, qui offrent le pluralisme. Je ne m'immisce pas dans la ligne éditoriale de ces journaux", a-t-il déclaré lors d'une audition devant la commission des affaires économiques de l'Assemblée.

Il répondait au député France insoumise René Pilato qui suggérait une "grande loi de séparation des entreprises et des médias".

"Si des investisseurs comme le groupe CMA CGM ne viennent pas, ces médias malheureusement tombent", a ajouté M. Saadé, rappelant que le secteur des médias est "très sinistré".

"Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media.

Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique".

"Dans un monde traversé par les +fake news+, je crois que les industriels ont un rôle à jouer pour défendre le pluralisme, l'indépendance et la qualité de l'information. Si nous voulons continuer à produire de l'information en France et résister à la domination des grandes plateformes, nous devons garantir des groupes de médias solides capables de créer des contenus de qualité et de les diffuser sur tous les supports", a-t-il défendu.

Outre BFMTV, RMC, et désormais Brut, CMA Media possède les journaux La Tribune et La Tribune Dimanche, La Provence et Corse Matin. Le groupe vient également de racheter la chaîne télé Chérie 25 (NRJ Group).

Vendredi, les Sociétés des journalistes (SDJ) de BFMTV, RMC et La Tribune avaient déploré qu'"une prise de position de Rodolphe Saadé sur l'actualité politique et sociale du pays (ait) été diffusée à l'antenne de BFMTV" jeudi.

Il s'agissait d'extraits écrits tirés d'une tribune publiée dans La Provence après le mouvement "Bloquons tout" du 10 septembre. "Les entreprises ne sont pas des adversaires, elles sont des partenaires de la Nation", y écrivait notamment M. Saadé.

 


Faure «sur sa faim» après son entretien avec Lecornu, resté «très flou» sur ses intentions

Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
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  • Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu
  • Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland

PARIS: Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions".

"Pour l'instant, nous sommes restés sur notre faim et nous verrons bien ce qu'il a à nous dire dans les prochains jours", a déclaré le premier secrétaire du PS, à l'issue de sa première rencontre à Matignon, qui a duré près de deux heures.

Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu à la veille d'une importante journée de mobilisation syndicale.

Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland.

A propos de la journée d'actions de jeudi, il a expliqué que ces manifestations seraient "aussi un élément du rapport de force que nous devons installer avec un exécutif qui, jusqu'ici, n'a pas fait la démonstration de sa capacité à comprendre la colère et même l'exaspération des Français".

Olivier Faure a également dit qu'il ne souhaitait pas "voir revenir sur la table une loi immigration", estimant que le Premier ministre macroniste était "tiraillé par une droite qui lorgne de plus en plus vers l'extrême droite" et avait  "beaucoup de problèmes dans son propre socle commun".

"Nous ne cherchons pas la censure, nous ne cherchons pas la dissolution, nous ne cherchons pas la destitution. Nous cherchons à ce que les Français soient entendus", a-t-il plaidé, en citant un sondage Ifop commandé par le parti montrant que les Français, quelles que soient leurs sensibilités, plébiscitent les mesures poussées par le PS.

"Il y a des mesures qui sont très majoritaires dans le pays, pour la taxe Zucman" sur les hauts patrimoines, "pour en finir" avec la réforme des retraites, pour "rendre du pouvoir d'achat", notamment à travers "un taux différentiel de CSG", a-t-il détaillé.


Des socialistes au RN, Lecornu reçoit ses opposants avant une grande journée d'action

Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu (C) participe à une réunion lors de sa visite au centre départemental de santé de Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025.  (AFP)
Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu (C) participe à une réunion lors de sa visite au centre départemental de santé de Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025. (AFP)
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  • Le Premier ministre Sébastien Lecornu entame une série de réunions avec les oppositions avant une grande journée de mobilisation, dans un climat tendu marqué par les revendications sociales et les divergences sur le plan de redressement budgétaire

PARIS: Sébastien Lecornu reçoit mercredi ses opposants politiques, à la veille d'une journée importante de mobilisation sociale, sans grande marge de manœuvre pour discuter, au vu des lignes rouges qu'ils posent et des menaces de censure.

Tous les dirigeants de gauche - à l'exception de La France insoumise qui a refusé l'invitation -  ainsi que ceux du Rassemblement national vont défiler dans le bureau du nouveau Premier ministre, à commencer par les socialistes à 09H30.

Sébastien Lecornu a déjà échangé la semaine dernière avec les responsables du "socle commun" de la droite et du centre, ainsi que les syndicats et le patronat.

"Le premier qui doit bouger, c'est le gouvernement", a estimé pour sa part le président du groupe des députés Liot Laurent Panifous, reçu mardi, ajoutant que "le sujet des retraites ne peut pas être renvoyé uniquement à 2027".

François Bayrou avait obtenu la mansuétude du PS sur le budget 2025 en ouvrant un "conclave" sur la réforme des retraites, qui s'est soldé par un échec. Puis il a présenté à la mi-juillet un sévère plan de redressement des finances publiques qui a fait hurler toutes les oppositions.

Mercredi, "ça va être un round d'observation. La veille des grosses manifs, on sera dur, exigeant. Ce qui se joue ce n'est pas au premier chef un sujet budgétaire", mais un "sujet démocratique" car ce sont les "battus qui gouvernent", anticipe un responsable socialiste.

- Gestes -

Ces entretiens ont lieu sous la pression de la rue, alors qu'une mobilisation massive est attendue jeudi, de l'ordre de celles contre la réforme des retraites en 2023. Les syndicats contestent notamment les mesures budgétaires "brutales" de François Bayrou.

Avant d'entamer les discussions, Sébastien Lecornu a fait plusieurs gestes en direction de la gauche et de l'opinion: retrait de la proposition impopulaire de supprimer deux jours fériés, et promesse de ne pas rouvrir le conclave sur les retraites.

Il a aussi consacré son premier déplacement samedi à l'accès aux soins, avant d'annoncer la suppression très symbolique, dès l'an prochain, des avantages restants octroyés aux ex-Premiers ministres.

Les socialistes ont eux posé leurs conditions dès dimanche face aux offres appuyées de dialogue du Premier ministre.

Ils considèrent que le plan Bayrou "ne doit pas servir de base de discussion", alors que Sébastien Lecornu a l'intention d'en faire un point de départ, puis de mettre les parlementaires devant leur responsabilité pour l'amender.

- "Rupture" -

Mercredi, les socialistes viendront avec en main un sondage Ifop commandé par le parti montrant que les Français, quelles que soient leurs sensibilités, plébiscitent les mesures poussées par le PS.

Parmi elles, la création d'une taxe de 2% sur les patrimoines supérieurs à 100 millions d'euros - la fameuse taxe Zucman, qui enflamme ce débat budgétaire - à laquelle 86% des sondés sont favorables, dont 92% des sympathisants Renaissance et 89% des sympathisants LR.

Le Premier ministre a cependant déjà fermé la porte à cette taxe, tout en reconnaissant que se posaient "des questions de justice fiscale".

La taxe Zucman, "c'est une connerie, mais ils vont la faire quand même parce que ça permet d'obtenir un accord de non-censure" avec la gauche, a de son côté prédit mardi Marine Le Pen, sans pour autant fermer la porte à une mise à contribution des plus fortunés.

"Si la rupture consiste à un retour aux sources socialistes du macronisme, c'est contraire à l'aspiration majoritaire du pays", a également mis en garde la cheffe des députés RN, attendue à 16H00 à Matignon avec Jordan Bardella.

Un avertissement auquel le patron des députés LR Laurent Wauquiez a fait écho mardi en dénonçant "la pression du PS", craignant qu'il "n'y ait plus rien sur l'immigration, la sécurité ou l'assistanat" dans le budget.

Autre point au cœur des discussions, le niveau de freinage des dépenses. La présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet a appelé dimanche à chercher un accord autour "de 35 à 36 milliards" d'euros d'économies, soit moins que les 44 milliards initialement prévus par François Bayrou, mais plus que les 21,7 milliards du PS.

"Les socialistes donnent l'air d'être déterminés et de poser des conditions mais c'est un moyen de rentrer dans les négociations", estime Manuel Bompard, coordinateur de LFI, grinçant sur la politique des "petits pas" du PS, au détriment des "grands soirs".