Pakistan: le Premier ministre échappe à la chute et obtient des élections anticipées

Le Premier ministre pakistanais Imran Khan a perdu sa majorité au parlement (Photo, AFP).
Le Premier ministre pakistanais Imran Khan a perdu sa majorité au parlement (Photo, AFP).
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Publié le Dimanche 03 avril 2022

Pakistan: le Premier ministre échappe à la chute et obtient des élections anticipées

  • La nouvelle a été accueillie avec rage et stupéfaction par les députés d'opposition, dont beaucoup ont refusé de quitter l'hémicycle
  • Imran Khan avait appelé samedi ses partisans à manifester pacifiquement devant le parlement et laissé entendre qu'il avait encore une carte à jouer

ISLAMABAD: Le Premier ministre pakistanais Imran Khan a obtenu dimanche la dissolution du parlement et la convocation d'élections anticipées dans les trois mois, après avoir échappé à une motion de censure de l'opposition pour le renverser.

Ce coup de théâtre survient alors qu'Imran Khan avait perdu il y a quelques jours la majorité parlementaire nécessaire pour surmonter la motion de censure déposée par l'opposition qui l'accuse de mauvaise gestion économique et de maladresses en politique étrangère.

Mais dimanche, à l'ouverture de la séance au cours de laquelle cette motion devait être examinée, le vice-président de l'Assemblée nationale, Qasim Suri, un fidèle de M. Khan, a créé la surprise en annonçant qu'il refusait de la soumettre au vote, la jugeant "contraire à la Constitution".

La nouvelle a été accueillie avec rage et stupéfaction par les députés d'opposition, dont beaucoup ont refusé de quitter l'hémicycle.

"On se souviendra de cette date comme celle d'un jour noir dans l'histoire constitutionnelle du Pakistan", a déploré Shehbaz Sharif, le chef de la Ligue musulmane du Pakistan (PML-N), le favori pour remplacer Imran Khan en cas de succès de la motion de censure.

Dans un discours à la télévision d'Etat prononcé quelques minutes après avoir sauvé son fauteuil, Imran Khan a dénoncé les "ingérences étrangères" à l'origine, selon lui, des tentatives pour le chasser du pouvoir et annoncé qu'il demandait au président du Pakistan de dissoudre l'Assemblée nationale.

Cour suprême

Une demande à laquelle le président Arif Alvi, dont les fonctions sont honorifiques, a accédé dans la foulée, entraînant des législatives anticipées sous 90 jours.

"Nous ferons appel au public, organiserons des élections et laisserons la nation décider", a déclaré Imran Khan.

Le parti de l'ancienne gloire nationale de cricket, le Pakistan Tehreek-e-Insaf (PTI, Mouvement du Pakistan pour la justice), avait perdu sa majorité parlementaire la semaine dernière, quand un parti allié avait fait savoir que ses sept députés allaient voter avec l'opposition. Plus d'une douzaine de députés du PTI avaient également changé de camp.

L'opposition et le gouvernement ont immédiatement déposé une série de pétitions et la Cour suprême a annoncé qu'elle allait se réunir lundi pour entendre les arguments relatifs à la dissolution du parlement.

"Il est de la plus haute importance que les partis politiques et les fonctionnaires de l'État agissent conformément à la loi et s'abstiennent de prendre des mesures anticonstitutionnelles", a déclaré le juge suprême Umar Ata Bandial.

Imran Khan a été élu en 2018 au Pakistan, où aucun Premier ministre n'est jamais allé au bout de son mandat.

Accusations d'ingérence

Plus tôt cette semaine, il avait accusé les Etats-Unis d'ingérence dans les affaires pakistanaises. Selon les médias locaux, il a reçu un rapport de l'ambassadeur pakistanais à Washington, qui a enregistré les propos d'un haut fonctionnaire américain disant que les relations entre les deux pays seraient meilleures si le Premier ministre quittait ses fonctions. Washington a nié.

Imran Khan a de nouveau accusé dimanche les Etats-Unis de vouloir "changer le régime" au Pakistan en raison de son refus de s'aligner sur les positions américaines concernant la Russie et la Chine. "Cette trahison se déroulait sous les yeux de tout le pays, les traîtres étaient assis là et planifiaient leur complot", a-t-il lancé en référence à l'opposition.

Accusé par ses détracteurs de mauvaise gestion économique - inflation galopante, roupie faible et dette écrasante -, et de maladresses en politique étrangère, Imran Khan, 69 ans, surmonte ainsi, du moins pour le moment, sa plus grave crise politique depuis son élection.

Les deux principales formations de l'opposition, le Parti du peuple pakistanais (PPP) et la Ligue musulmane du Pakistan, ont dominé la politique nationale pendant des décennies, avec des périodes de pouvoir ponctuées de coups d'Etat militaires, jusqu'à ce qu'Imran Khan forge une coalition en promettant notamment aux électeurs de balayer des décennies de corruption.

Certains analystes estimaient qu'Imran Khan avait perdu le soutien crucial de l'armée, clef du pouvoir politique pakistanais. Mais il paraît improbable que son spectaculaire rétablissement de dimanche ait pu se produire sans que les militaires aient été au courant, voire aient donné leur bénédiction.

"La meilleure option dans cette situation, ce sont de nouvelles élections pour permettre au nouveau gouvernement de faire face aux problèmes économiques, politiques et extérieurs", a estimé Talat Masood, un ancien général devenu analyste politique.

Depuis l'indépendance en 1947, le Pakistan a connu quatre putschs militaires réussis et au moins autant de tentatives de coups d'Etat, et le pays a passé plus de trois décennies sous un régime militaire.


A l'ONU, l'enquêtrice en chef sur Gaza a encore espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés

Navi Pillay, la présidente de la commission d'enquête indépendante de l'ONU qui a accusé cette semaine Israël de commettre un génocide à Gaza, ne perd pas espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés. (AFP)
Navi Pillay, la présidente de la commission d'enquête indépendante de l'ONU qui a accusé cette semaine Israël de commettre un génocide à Gaza, ne perd pas espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés. (AFP)
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  • Selon les enquêteurs, le président israélien, Isaac Herzog, le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, ont "incité à commettre un génocide"
  • Israël a "rejeté catégoriquement" ce "rapport biaisé et mensonger"

GENEVE: Navi Pillay, la présidente de la commission d'enquête indépendante de l'ONU qui a accusé cette semaine Israël de commettre un génocide à Gaza, ne perd pas espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés.

"La justice est lente", a affirmé l'ancienne juge sud-africaine, dans un entretien à l'AFP.

Mais "comme l'a dit (Nelson) Mandela, cela semble toujours impossible, jusqu'à ce qu'on le fasse. Je considère qu'il n'est donc pas impossible qu'il y ait des arrestations et des procès" à l'avenir, a-t-elle ajouté.

La commission d'enquête, qui ne s'exprime pas au nom de l'ONU, a établi qu'Israël commet un génocide à Gaza depuis le début de la guerre déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas du 7-Octobre.

Selon les enquêteurs, le président israélien, Isaac Herzog, le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, ont "incité à commettre un génocide".

Israël a "rejeté catégoriquement" ce "rapport biaisé et mensonger".

La Cour pénale internationale (CPI) avait déjà émis des mandats d'arrêt contre MM. Netanyahu et Gallant.

Mme Pillay reconnaît que la CPI dépend des Etats pour la mise en œuvre des mandats d'arrêt car elle n'a "ni shérif, ni forces de police".

Mais elle veut y croire, faisant une comparaison : "Je n'aurais jamais pensé que l'apartheid prendrait fin de mon vivant".

"Tellement douloureux" 

Jeune avocate d'origine indienne dans l'Afrique du Sud de l'apartheid, devenue juge et Haute-Commissaire aux droits de l'homme à l'ONU (2008-2014), Mme Pillay, 83 ans, a l'art de traiter des dossiers difficiles.

Sa carrière l'a menée des cours sud-africaines, où elle a défendu les activistes anti-apartheid et obtenu des droits cruciaux pour les prisonniers politiques, au Tribunal pénal international pour le Rwanda, en passant par la CPI.

Sa mission est des plus ardues depuis qu'elle préside, depuis sa création en 2021, la commission chargée par le Conseil des droits de l'homme de l'ONU d'enquêter sur les atteintes aux droits dans les territoires palestiniens et en Israël.

Elle déplore d'avoir été qualifiée d'"antisémite" depuis et dénonce les appels sur les réseaux sociaux de ceux qui réclament que les Etats-Unis la sanctionnent, comme Washington l'a fait pour une rapporteure de l'ONU, des juges de la CPI et des ONG palestiniennes.

Mais le plus dur, pour elle et son équipe, est de visionner les vidéos provenant de Gaza.

"Nous nous inquiétons pour notre personnel. Nous les surmenons et c'est traumatisant ces vidéos", dit-elle, citant "des violences sexuelles contre les femmes" et "les médecins qui sont dénudés par l'armée".

"C'est tellement douloureux" à regarder même si "on ne peut pas comparer notre souffrance à celle de ceux qui l'ont vécue", poursuit-elle.

Alors qu'elle présidait le Tribunal pénal international pour le Rwanda, des vidéos de civils abattus ou torturés l'ont aussi "marqué à vie".

Selon elle, la comparaison entre le Rwanda et Gaza ne s'arrête pas là : "Je vois des similitudes. Ce sont les mêmes méthodes".

Du Rwanda à Gaza 

"Dans le cas du Rwanda, c'était le groupe des Tutsi qui était visé. Ici, tous les éléments de preuve montrent que c'est le groupe palestinien qui est visé", dit-elle.

Elle mentionne aussi les propos de dirigeants israéliens qui "déshumanisent" les Palestiniens en les comparant à des "animaux". Comme lors du génocide rwandais, lorsque les Tutsi étaient "traités de cafards", ce qui revient à dire qu'"il est acceptable de les tuer", dénonce-t-elle.

Mme Pillay a indiqué qu'à l'avenir la commission entendait se pencher aussi sur des crimes supposés commis par d'autres "individus", expliquant qu'une grande partie des preuves a été publiée par les soldats israéliens eux-mêmes sur les réseaux sociaux.

Elle déplore toutefois que, faute de financements, la commission n'ait pas pu encore examiner si certains Etats qui fournissent de l'armement à Israël pouvaient être considérés complices.

Un travail qu'elle laisse à son successeur. Elle quitte la commission le 3 novembre en raison de son âge et de problèmes de santé.

Avant cela, elle doit présenter un dernier rapport devant l'Assemblée générale de l'ONU à New York. "J'ai déjà un visa", confie-t-elle.


Gaza: Bruxelles propose de taxer des biens importés d'Israël dans l'UE et de sanctionner deux ministres

La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu.  "Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas. (AFP)
La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu. "Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas. (AFP)
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  • L'exécutif européen avait déjà proposé en août 2024 de sanctionner ces deux ministres. Une tentative vaine, faute d'accord au sein des 27 Etats membres
  • Ces sanctions pour être adoptées requièrent l'unanimité des pays de l'UE

BRUXELLES: La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu.

"Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas.

Les mesures commerciales devraient, si elles étaient adoptées par les pays de l'UE, renchérir de quelque 227 millions d'euros le coût de certaines importations israéliennes, principalement d'origine agricole.

La Commission européenne a également proposé de sanctionner deux ministres israéliens d'extrême droite, Itamar Ben-Gvir, chargé de la Sécurité nationale, et Bezalel Smotrich chargé des Finances, selon un responsable de l'UE.

L'exécutif européen avait déjà proposé en août 2024 de sanctionner ces deux ministres. Une tentative vaine, faute d'accord au sein des 27 Etats membres. Ces sanctions pour être adoptées requièrent l'unanimité des pays de l'UE.

"Tous les États membres conviennent que la situation à Gaza est intenable. La guerre doit cesser", a toutefois plaidé mercredi Mme Kallas. Ces propositions seront sur la table des représentants des 27 Etats membres dès mercredi.

Les sanctions dans le domaine commercial ne nécessitent que la majorité qualifiée des Etats membres. Mais là encore, un accord sera difficile à obtenir, jugent des diplomates à Bruxelles.

Des mesures beaucoup moins ambitieuses, également présentées par la Commission européenne il y a quelques semaines, n'avaient pas trouvé de majorité suffisante pour être adoptées. Avait notamment fait défaut le soutien de pays comme l’Allemagne ou l'Italie.

Les exportations israéliennes vers l'UE, son premier partenaire commercial, ont atteint l'an dernier 15,9 milliards d'euros.

Seuls 37% de ces importations seraient concernés par ces sanctions, si les 27 devaient donner leur feu vert, essentiellement dans le secteur agro-alimentaire.


Trump s'en prend à des magistrats après l'assassinat de Charlie Kirk

Cette capture d'écran provenant de la diffusion en direct du tribunal de l'Utah montre Tyler Robinson, suspect dans le meurtre du militant politique Charlie Kirk, assistant à une audience à distance depuis sa cellule de prison à Provo, dans l'Utah, le 16 septembre 2025. (AFP)
Cette capture d'écran provenant de la diffusion en direct du tribunal de l'Utah montre Tyler Robinson, suspect dans le meurtre du militant politique Charlie Kirk, assistant à une audience à distance depuis sa cellule de prison à Provo, dans l'Utah, le 16 septembre 2025. (AFP)
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  • Dans le viseur du locataire de la Maison Blanche, sur son réseau Truth, se trouvent deux de ses cibles privilégiées : l'ex-procureur spécial Jack Smith, et le juge Juan Merchan qui avait présidé son procès pour des paiements cachés à une star du X
  • Donald Trump reproche à Jack Smith d'avoir ouvert il y a quelques années une enquête sur Turning Point, le mouvement créé par l'influenceur ultraconservateur américain Charlie Kirk, assassiné le 10 septembre

WASHINGTON: Le président américain Donald Trump a de nouveau stigmatisé mercredi des magistrats qui l'avaient poursuivi et jugé durant le mandat de Joe Biden, prenant prétexte du récent assassinat de l'influenceur ultraconservateur Charlie Kirk.

Dans le viseur du locataire de la Maison Blanche, sur son réseau Truth, se trouvent deux de ses cibles privilégiées : l'ex-procureur spécial Jack Smith, et le juge Juan Merchan qui avait présidé son procès pour des paiements cachés à une star du X.

Donald Trump reproche à Jack Smith d'avoir ouvert il y a quelques années une enquête sur Turning Point, le mouvement créé par l'influenceur ultraconservateur américain Charlie Kirk, assassiné le 10 septembre.

"Pourquoi le merveilleux Turning Point a-t-il été mis sous ENQUÊTE par le +Dérangé+ Jack Smith et l'administration Biden Corrompue et Incompétente ?", s'interroge Donald Trump dans un message sur Truth.

"Ils ont essayé de forcer Charlie, ainsi que de nombreuses autres personnes et mouvements, à cesser leurs activités. Ils ont instrumentalisé le ministère de la Justice contre les opposants politiques de Joe Biden, y compris MOI!", s'offusque-t-il encore.

Jack Smith, lui-même visé par une enquête administrative depuis le retour au pouvoir de Donald Trump, avait été nommé procureur spécial en 2022.

Il avait lancé des poursuites fédérales contre Donald Trump, pour tentatives illégales d'inverser les résultats de l'élection de 2020 et rétention de documents classifiés après son départ de la Maison Blanche.

Les poursuites avaient été abandonnées après la réélection de Trump, en vertu de la tradition consistant à ne pas poursuivre un président en exercice. Jack Smith avait ensuite démissionné du ministère de la Justice.

Sans jamais le citer nommément, le président Trump s'en prend également sur le réseau Truth à Juan Merchan, qui a présidé le procès Stormy Daniels. Le président avait été reconnu coupable de 34 chefs d'accusation, pour des paiements cachés de 130.000 dollars à l'ex-star du X.

Donald Trump exprime le souhait que le juge "corrompu" paie "un jour un prix très élevé pour ses actions illégales".

Depuis l'assassinat de Charlie Kirk, le camp républicain redouble de véhémence contre les démocrates et organisations progressistes, accusés de promouvoir la violence politique.

"La gauche radicale a causé des dégâts énormes au pays", a affirmé le président républicain mardi, avant son départ au Royaume-Uni. "Mais nous y remédions".

Selon le Washington Post, un élu républicain du Wisconsin a déposé une proposition de loi visant à bloquer les fonds fédéraux aux organisations employant des personnes "qui tolèrent et célèbrent la violence politique".

Le New York Times précise pour sa part que sont notamment dans le viseur l'Open Society Foundation du milliardaire George Soros ainsi que la Ford Foundation, qui toutes deux financent des organisations de gauche.