Débat d'entre-deux tours: Macron et Le Pen opposent leurs visions

Cette photo montre le plateau qui accueillera le débat de l'entre-deux-tours de la présidentielle, qui opposera Emmanuel Macron à Marine Le Pen. (Photo, AFP)
Cette photo montre le plateau qui accueillera le débat de l'entre-deux-tours de la présidentielle, qui opposera Emmanuel Macron à Marine Le Pen. (Photo, AFP)
Short Url
Publié le Jeudi 21 avril 2022

Débat d'entre-deux tours: Macron et Le Pen opposent leurs visions

  • Le débat, orchestré par Léa Salamé et Gilles Bouleau, dure 2h30 et est retransmis en direct sur TF1 et France 2
  • Il s'agit du premier débat d'Emmanuel Macron depuis son entrée en campagne

PARIS : Des millions de Français scrutent le grand débat de l'entre-deux-tours qui oppose le président candidat, Emmanuel Macron, à la candidate du Rassemblement national, Marine Le Pen.

Le débat, orchestré par Léa Salamé et Gilles Bouleau, dure 2h30 et est retransmis en direct sur TF1 et France 2. Cette confrontation finale se déroule à La Plaine-Saint-Denis, un quartier de Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) proche du stade de France, au sein du plateau n°5 des studios de Lendit. Il s'agit d'un plateau de plus de 1 000 m². 

Il s'agit par ailleurs du premier débat d'Emmanuel Macron depuis son entrée en campagne. 

C'est Marine Le Pen, tirée au sort, qui entame ce débat. «Je serai la présidente du régalien, des protections collectives, des libertés, de la souveraineté et de la sécurité. La présidente du quotidien, du pouvoir d'achat, de l'école, de la santé partout et pour tous, de l'assimilation républicaine. Je serai la présidente de la concorde, de la justice, de la fraternité civile, de la paix civile» affirme-t-elle en guise d'introduction.

img 4
Cette photo montre un écran de télévision montrant Marine Le Pen, candidate à la présidence du parti d'extrême droite français Rassemblement national (RN), lors d'un débat télévisé en direct avec le président français et candidat du parti La République en marche (LREM) à la réélection d'Emmanuel Macron. (Photo, AFP)

Pour sa part, Emmanuel Macron introduit son propos en évoquant son projet pour la France :  «Nous pouvons et nous devons rendre notre pays plus fort, nous pouvons et devons améliorer la vie du quotidien. Je crois que notre France sera plus forte si elle sait se saisir de la question écologique et devenir une grande puissance écologique».

img 4
Cette photo montre un écran de télévision montrant le président français et candidat du parti La République en marche (LREM) à la réélection Emmanuel Macron lors d'un débat télévisé en direct avec le parti d'extrême droite français Rassemblement national (RN) candidat à la présidentielle Marine Le Pen. (Photo, AFP)

Le pouvoir d'achat

Marine Le Pen  présente trois leviers d'actions : «agir de manière pérenne et non pas avec des chèques temporaires», «défendre la valeur travail» et intervenir sur les personnes vulnérables qui ont été "particulièrement maltraitées" durant le quinquennat selon elle.

De son côtéEmmanuel Macron veut maintenir le bouclier contre la hausse des prix de l'énergie, une mesure qu'il juge «deux fois plus efficace que la baisse de la TVA» défendue par Marine Le Pen. Il affirme que cette mesure protectrice n'est pas pérenne mais bien une «mesure de crise» instaurée pour aider les Français.

Le débat se poursuit sur l’augmentation des salaires, que Marine Le Pen ambitionne de remonter de manière pérenne, alors qu’Emmanuel Macron revendique l’utilisation de prime pour le faire dans son programme. «Vous n’allez pas faire les salaires, Mme Le Pen, et vous ne ferez pas non plus des primes !», lui rétorque Emmanuel Macron.

Passe d'armes Macron-Le Pen autour du voile

Emmanuel Macron et Marine Le Pen ont eu une rude passe d'armes autour du voile et de la laïcité mercredi lors de leur débat d'entre deux tours, le chef de l'Etat accusant son adversaire de "trahir l'esprit français et de la République".

"Je suis pour l'interdiction du voile dans l'espace public, je l'ai dit de la manière la plus claire" car "le voile est un uniforme imposé par les islamistes" et "une grande partie des jeunes femmes qui le mettent ne peuvent pas faire autrement en réalité", a assuré la candidate du Rassemblement national vers la fin de ce débat.

"Il faut libérer l'ensemble de ces femmes, il faut faire reculer les islamistes et pour cela, je le crois, il faut interdire le voile dans l'espace public", a-t-elle martelé.

"Ce que vous proposez est une trahison de l'esprit français et de la République", a rétorqué M. Macron en accusant son adversaire: "vous allez créer la guerre civile si vous faites ça".

"Mme Le Pen, on parle de religion, (...) vous ne pouvez pas expliquer qu'une loi qui interdit le voile dans l'espace public est une loi contre l'islamisme radical", a lancé M. Macron. "Eh bien si", a répliqué son adversaire. "Les bras m'en tombent", a lancé Emmanuel Macron.

Politique internationale et la guerre en Ukraine

Le débat se poursuit, cette fois, c'est la politique internationale et notamment la guerre en Ukraine qui est sur la table.

«Une Europe forte est importante» a lancé Emmanuel Macron. Il estime que la France occupe une place centrale en Europe, «nous ne sommes les vassaux de personne».  Marine Le Pen a commencé par défendre ses positions sur les sanctions prises à l'Union européenne contre la Russie. Elle dit être favorable à toutes les sanctions prises, toutes sauf une : «La seule sanction contre lequel avec laquelle je suis en désaccord, c'est le blocage de l'importation du gaz et du pétrole russe. Ce n'est pas ce qui fera du mal, en réalité, à la Russie. Et surtout, cela va faire énormément de mal au peuple français. Et que les conséquences de ce blocage, auraient des conséquences cataclysmiques sur les entreprises».

Accusée de complaisance envers Vladimir Poutine, Marine Le Pen est attaquée sur ce point par Emmanuel Macron. Le président sortant a lancé à sa rivale : «Vous dépendez du pouvoir russe et du pouvoir de M. Poutine. Parce que vous avez contracté un prêt auprès d'une banque russe. Vous ne parlez pas à votre dirigeant quand vous parlez de la Russie, vous parlez à votre banquier». Cette dernière se défend en affirmant qu'elle a été obligée de contracter un prêt à l'étranger en 2015, puisque les banques françaises ne lui ont pas accordé de prêt. 

L'Union Européenne 

Sur la question de l'Europe,  Marine Le Pen défend une "Europe des Nations" et par une "primauté du droit français sur le droit européen". "Votre projet, si on le remet brique par brique, c'est un projet qui ne dit pas son nom, mais qui consiste à sortir de l'Union européenne", rétorque Emmanuel Macron avant d'ajouter, "Vous mentez sur la marchandise".

"C'est faux, tout le monde sait que ce que je souhaite, c'est l'Europe des nations (...) Vous avez une vision rabougrie de la France, la France est une puissance mondiale et non continentale", a répondu Marine Le Pen.

"Je ne souhaite pas sortir de l’Union européenne", réaffirme Marine Le Pen qui défend tout de même la primauté du droit national et la préférence nationale. "Je souhaite que la Commission européenne respecte les nations souveraines, respecte le choix des Français, y compris leurs choix de société, répond la candidate RN.

Retraites

Le débat se poursuit sur l'un des sujets récurrents de la campagne présidentielle, à savoir les retraites. "Plus on travaille tôt et plus on travaille du, plus on doit partir tôt", estime Marine Le Pen, qui juge le projet d'Emmanuel Macron de la retraite à 65 ans serait une "injustice insupportable". De son côté, la candidate RN veut accorder la retraite à 60 ans avec 40 annuités, réservée aux Français entrés dans la vie active avant l'âge de 20 ans; et la retraite entre 60,75 ans et 62 ans pour les Français entrés dans la vie active entre 20 ans et 24,5 ans, système inchangé au-delà de 25 ans.

Emmanuel Macron promet d’augmenter la pension minimale à taux plein à 1100 euros par mois, y compris pour les retraités actuels. "Ce que vous proposez n'est pas juste puisque vous proposer la même retraite pour quelqu'un qui n'a jamais travaillé de sa vie et quelqu'un qui a une vie de labeur. Dans les deux cas, vous leur proposer 1000 euros", rétorque Emmanuel Macron à Marine Le Pen. 

Marine Le Pen défend le fait que les Français partiront à la retraite « entre 60 et 62 ans pour avoir une retraite pleine. Il leur faudra entre 40 et 42 annuités », si elle est élue. Selon la candidate du Rassemblement national, « la retraite à 65 ans est une injustice absolument insupportable ».

Durant l’entre-deux-tours, Emmanuel Macron a proposé de fixer l’âge de départ à la retraite à 65 ans en 2027.

Salaires et chômage

La candidate du Rassemblement national s’en prend au bilan du quinquennat Macron. Marine Le Pen n'a pas manqué de critiquer les actions du président sortant et de leurs conséquences : "Les chômeurs A, B, C étaient 5,5 millions quand vous avez été élu et aujourd’hui ils sont 5,4 millions. Des gens qui cherchent activement un emploi, il y en avait 5,5 millions quand vous avez été élu et aujourd’hui, ils sont 5,4 millions.

"En matière de succès sur le chômage, permettez-moi d’être dubitative" tance Marine Le Pen, avant de poursuivre "Il y a 400 000 pauvres supplémentaires dans le pays et ça aussi, c'est votre résultat. Il y a 85 milliards de déficit de la balance commercial, on ne peut pas pipeauter ce chiffre, c’est un record absolu. Et peut-être le chiffre le plus cruel pour vous, c'est le chiffre de la productivité: il décroche à compter de votre élection. L'augmentation de la productivité est de 0,1% en France, alors qu’elle est de 1,8% pour le reste des pays européens. Le Mozart de la finance a un bilan économique qui est très mauvais. J’ai oublié les 14 500 emplois industriels perdus".

A ce bilan, Marine Le Pen ajoute le montant de la dette liée à la Covid-19. "Vous êtes le président qui a créé 600 milliards d’euros de dette supplémentaire, dont deux tiers n’ont strictement rien à voir avec la Covid. Ce sont les chiffres de vos propres ministères. Vos ministères évoquent 145 milliards pour la Covid." Ce à quoi Emmanuel Macron rétorque : "Ne confondez pas tout, lâche Emmanuel Macron. Les 600 milliards de dette, c’est 200 milliards de la partie Etat et le reste, c'est la Sécurité sociale, les collectivités locales. Pourquoi? Parce que comme les gens ne pouvaient plus travailler, on n'a pas prélevé leurs cotisations. Le quoiqu’il en coûte, vous avez voté contre mais vous auriez fait quoi pendant la crise covid ?"

Hôpital et santé 

Le débat bifurque sur la thématique de la santé et des déserts médicaux. Emmanuel Macron défend ses actions : "J'ai mis fin à la baisse de ce qu'on appelle le tarif hospitalier, j'ai mis fin à ce qu'on appelle le numerus clausus, on ne formait pas assez de médecins", il ne manque pas de rappeler son investissement de plus de 19 milliards d'euros dans les hôpitaux et la revalorisation salariale de 183 euros par mois. Il reconnaît qu'il reste encore à faire : "Je sais la situation très dure, je sais le manque de soignants et de médecins. Je sais que les conditions de travail sont dures. On va continuer à investir dans le système de santé pour redresser l'hôpital et réembaucher".

Le candidat est critiqué par Marine Le Pen qui l'accuse d'avoir attendu la crise pour se mobiliser pour l'hôpital. "Vous n'avez pas fait preuve de beaucoup d'empathie à l'égard du personnel soignant quand vous avez licencié 15 000 soignants, du jour au lendemain parce que vous refusiez qu'ils puissent se tester avant de venir travailler et que vous voulez à tout prix qu'ils soient vaccinés. Ce n'était pas bien de faire ça. Je les réintégrerai, en ce qui concerne", tacle Marine Le Pen.

Environnement et énergie nucléaire

"J'arrête l'hypocrisie qui consiste à refuser de voir que c'est le modèle économique sur le libre-échange qui est responsable d'une grande partie des émissions de gaz à effet de serre en France", commence Marine Le Pen.

 "Quand vous parlez de remettre en cause le système de nos importations", attaque Emmanuel Macron. "En termes de bilan carbone, c'est notre dépendance aux hydrocarbures et vous avez proposé la plus grosse subvention aux hydrocarbures possible puisque vous baissez la TVA sur ces derniers. Je dis juste que votre programme n'a ni queue ni tête à cet égard."

Le président-candidat veut implanter 50 parcs éoliens en mer d’ici à 2050 après “concertations”, tandis que Marine Le Pen veut arrêter les projets éoliens et démanteler progressivement les parcs existants, en commençant par ceux qui arrivent en fin de vie, et en stoppant les subventions.
La candidate RN veut prononcer un moratoire pour toute nouvelle installation éolienne, ainsi que pour le solaire, avec de possibles exceptions dans le sud de la France ou en outre-mer et assure qu'elle commencera par démanteler les parcs éoliens qui causent du trouble au voisinage, tout en ajoutant vouloir le proposer par voie de référendum. 

L'attractivité de la France

"Comment faire pour avoir demain un Steve Jobs français ?", demande Léa Salam, abordant l'économie numérique et la technologie. "Autant l'Union européenne se mêle d'absolument tout […] , autant le Google européen, cela fait des années qu'il aurait dû être lancé", attaque d'emblée Marine Le Pen. La candidate souhaite créer des initiatives technologiques européennes.

Les proposition d'Emmanuel Macron et de Marine Le Pen  sur l’école

Emmanuel Macron promet d’« investir sur l’école », s’il est réélu. Le président candidat défend le sport à l’école, il veut « développer l’éducation artistique et culturelle », un projet « essentiel » à ses yeux. Il veut également « réformer le lycée professionnel » et proposer une réforme de l’université « en ouvrant des filières et des débouchés plus clairs ». Enfin, le président sortant prône une revalorisation des salaires des enseignants.

Marine Le Pen affirme que « la jeunesse française a tellement souffert ces deux dernières années » que, pour elle, « c’était une évidence de faire de la jeunesse sa priorité ». Elle souhaite augmenter les apprentis « de 200 à 300 euros par mois en fonction de leur âge ». Selon Marine Le Pen, « le baccalauréat est dévalorisé ».

Marine Le Pen s'est montrée offensive sur ce sujet durant ce débat de second tour."La réforme que vous proposez est une réforme qui consiste à payer les professeurs en fonction des résultats de leurs élèves. Je ne sais pas si c’est McKinsey qui a proposé ça", a-t-elle lancé. "Ce que vous souhaitez, c’est en réalité les payer en fonction des résultats donnés, en fonction de ce qu’ils seraient capables de faire. A côté, d’ailleurs, moi, je souhaite les revaloriser", a-t-elle dit

Insécurité

"Nous sommes confrontés à une vraie barbarie, un ensauvagement. Les gens me disent on est cernés par l'insécurité, dans les villes et dans les campagnes. Je le dis très clairement l'immigration anarchique engendre un problème d'insécurité chez nous."  

« Il faut de la fermeté », a affirmé Marine Le Pen. Elle défend la présomption de légitime défense pour les policiers et les gendarmes.

Sur la même question que celle posée à Mme Le Pen pour lutter contre l’insécurité, Emmanuel Macron a plaidé en faveur du bilan du quinquennat. Il a cité la création de « 10 000 postes de policiers et de gendarmes », la hausse des moyens de la justice.

Le débat entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen regardé en France

ae
Dans une brasserie de Lyon, en France, le mercredi 20 avril (Photo, AFP).
Dans une brasserie de Lyon, en France, le mercredi 20 avril (Photo, AFP).
Une femme regarde le débat à la télévision dans la commune de Cognocoli-Monticchi en Corse, le mercredi 20 avril 2022 (Photo, AFP).
a
Un chat est assis dans un fauteuil, le 20 avril 2022, à Givors, près de Lyon, alors qu'un écran de télévision affiche le débat télévisé en direct entre  Emmanuel Macron et Marine Le Pen (Photo, AFP).

Marine Le Pen veut un référendum sur l'immigration

Marine Le Pen veut organiser un référendum sur un projet de loi révisant la Constitution pour y inscrire la "maîtrise" de l'immigration, la "priorité nationale" et la primauté du droit national sur le droit international et européen.

"Il y aura l'expulsion des criminels et des délinquants étrangers, il y aura le droit du sol, parce que je pense que la nationalité française s'hérite ou se mérite, il y aura la priorité nationale au logement social, il y aura l'interdiction de la régularisation des clandestins, il y aura la modification du droit d'asile", liste-t-elle.

En matière d'immigration, Emmanuel Macron souhaie faire la distinction entre les immigrations et la défense du droit d'asile. Il mise sur une réforme de l'espace Schengen "On doit réussir à mieux protéger nos frontières. Il faut renforcer nos protections intérieures et la coopération entre Etats européens parce que nous ne sommes pas le point d'arrivée", poursuit-il, citant l'Espagne, l'Italie, la Grèce, en conséquence il souhaite une meilleure coopération européenne sur le sujet.

Fin du débat

Neuf thèmes ont été programmé lors de ce débat qui a duré 2h 50mn.Les échanges étaient courtois mais tendus. 

Pour sa carte blanche finale : Emmanuel Macron a défend l’idée que cette élection « est un référendum » sur l’Union européenne, l’écologie et l’avenir du pays.

De son côté, Marine Le Pen conclut à son tour en ayant le dernier mot du débat. Elle déplore la "fatigue et la lassitude" des Français après "cinq années de confrontation permanente, de dégradation niveau de vie, de privations, y compris de liberté, individuelle et de liberté collective, aspire, je crois, à la tranquillité".


Des socialistes au RN, Lecornu reçoit ses opposants avant une grande journée d'action

Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu (C) participe à une réunion lors de sa visite au centre départemental de santé de Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025.  (AFP)
Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu (C) participe à une réunion lors de sa visite au centre départemental de santé de Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025. (AFP)
Short Url
  • Le Premier ministre Sébastien Lecornu entame une série de réunions avec les oppositions avant une grande journée de mobilisation, dans un climat tendu marqué par les revendications sociales et les divergences sur le plan de redressement budgétaire

PARIS: Sébastien Lecornu reçoit mercredi ses opposants politiques, à la veille d'une journée importante de mobilisation sociale, sans grande marge de manœuvre pour discuter, au vu des lignes rouges qu'ils posent et des menaces de censure.

Tous les dirigeants de gauche - à l'exception de La France insoumise qui a refusé l'invitation -  ainsi que ceux du Rassemblement national vont défiler dans le bureau du nouveau Premier ministre, à commencer par les socialistes à 09H30.

Sébastien Lecornu a déjà échangé la semaine dernière avec les responsables du "socle commun" de la droite et du centre, ainsi que les syndicats et le patronat.

"Le premier qui doit bouger, c'est le gouvernement", a estimé pour sa part le président du groupe des députés Liot Laurent Panifous, reçu mardi, ajoutant que "le sujet des retraites ne peut pas être renvoyé uniquement à 2027".

François Bayrou avait obtenu la mansuétude du PS sur le budget 2025 en ouvrant un "conclave" sur la réforme des retraites, qui s'est soldé par un échec. Puis il a présenté à la mi-juillet un sévère plan de redressement des finances publiques qui a fait hurler toutes les oppositions.

Mercredi, "ça va être un round d'observation. La veille des grosses manifs, on sera dur, exigeant. Ce qui se joue ce n'est pas au premier chef un sujet budgétaire", mais un "sujet démocratique" car ce sont les "battus qui gouvernent", anticipe un responsable socialiste.

- Gestes -

Ces entretiens ont lieu sous la pression de la rue, alors qu'une mobilisation massive est attendue jeudi, de l'ordre de celles contre la réforme des retraites en 2023. Les syndicats contestent notamment les mesures budgétaires "brutales" de François Bayrou.

Avant d'entamer les discussions, Sébastien Lecornu a fait plusieurs gestes en direction de la gauche et de l'opinion: retrait de la proposition impopulaire de supprimer deux jours fériés, et promesse de ne pas rouvrir le conclave sur les retraites.

Il a aussi consacré son premier déplacement samedi à l'accès aux soins, avant d'annoncer la suppression très symbolique, dès l'an prochain, des avantages restants octroyés aux ex-Premiers ministres.

Les socialistes ont eux posé leurs conditions dès dimanche face aux offres appuyées de dialogue du Premier ministre.

Ils considèrent que le plan Bayrou "ne doit pas servir de base de discussion", alors que Sébastien Lecornu a l'intention d'en faire un point de départ, puis de mettre les parlementaires devant leur responsabilité pour l'amender.

- "Rupture" -

Mercredi, les socialistes viendront avec en main un sondage Ifop commandé par le parti montrant que les Français, quelles que soient leurs sensibilités, plébiscitent les mesures poussées par le PS.

Parmi elles, la création d'une taxe de 2% sur les patrimoines supérieurs à 100 millions d'euros - la fameuse taxe Zucman, qui enflamme ce débat budgétaire - à laquelle 86% des sondés sont favorables, dont 92% des sympathisants Renaissance et 89% des sympathisants LR.

Le Premier ministre a cependant déjà fermé la porte à cette taxe, tout en reconnaissant que se posaient "des questions de justice fiscale".

La taxe Zucman, "c'est une connerie, mais ils vont la faire quand même parce que ça permet d'obtenir un accord de non-censure" avec la gauche, a de son côté prédit mardi Marine Le Pen, sans pour autant fermer la porte à une mise à contribution des plus fortunés.

"Si la rupture consiste à un retour aux sources socialistes du macronisme, c'est contraire à l'aspiration majoritaire du pays", a également mis en garde la cheffe des députés RN, attendue à 16H00 à Matignon avec Jordan Bardella.

Un avertissement auquel le patron des députés LR Laurent Wauquiez a fait écho mardi en dénonçant "la pression du PS", craignant qu'il "n'y ait plus rien sur l'immigration, la sécurité ou l'assistanat" dans le budget.

Autre point au cœur des discussions, le niveau de freinage des dépenses. La présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet a appelé dimanche à chercher un accord autour "de 35 à 36 milliards" d'euros d'économies, soit moins que les 44 milliards initialement prévus par François Bayrou, mais plus que les 21,7 milliards du PS.

"Les socialistes donnent l'air d'être déterminés et de poser des conditions mais c'est un moyen de rentrer dans les négociations", estime Manuel Bompard, coordinateur de LFI, grinçant sur la politique des "petits pas" du PS, au détriment des "grands soirs".


La France rapatrie treize femmes et enfants depuis les camps en Syrie, une première depuis deux ans

La Française Emilie Konig marche dans le camp Al-Roj, dans le nord-est de la Syrie, le 28 mars 2021, où elle est détenue avec d'autres personnes soupçonnées d'être des proches de membres présumés du groupe Daesh. (AFP)
La Française Emilie Konig marche dans le camp Al-Roj, dans le nord-est de la Syrie, le 28 mars 2021, où elle est détenue avec d'autres personnes soupçonnées d'être des proches de membres présumés du groupe Daesh. (AFP)
Short Url
  • La France a rapatrié dix enfants et trois femmes détenus dans des camps jihadistes en Syrie, marquant la première opération du genre depuis deux ans
  • Deux femmes ont été placées en garde à vue, et une troisième présentée à un juge antiterroriste

PARIS: La France a rapatrié tôt mardi matin dix enfants et trois femmes âgées de 18 à 34 ans qui étaient détenus dans des camps de prisonniers jihadistes dans le nord-est de la Syrie, une première depuis deux ans.

Parmi les femmes, "deux ont été placées en garde à vue, sur commission rogatoire du juge d'instruction", a annoncé le Parquet national antiterroriste (Pnat) dans un communiqué.

"Une autre femme, faisant l'objet d'un mandat d'arrêt, sera présentée à un juge d'instruction dans la journée" en vue d'une possible mise en examen, a-t-il ajouté.

"Les mineurs sont pris en charge dans le cadre de procédures d'assistance éducative sous la responsabilité du parquet" de Versailles, a indiqué le Pnat, qui "assurera le suivi centralisé des mineurs concernés, en lien avec les parquets territoriaux".

"La France remercie les autorités syriennes de transition ainsi que l'administration locale du Nord-Est syrien qui a rendu possible cette opération", a déclaré de son coté le porte-parole du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères.

Cette opération est une première depuis juillet 2023 en France, où ces retours restent une question sensible, dix ans après la vague d'attentats jihadistes sur le sol national.

Au total, 179 enfants et 60 femmes adultes ont été rapatriées depuis 2019, précise une source diplomatique.

Mais ces opérations avaient cessé à l'été 2023, faute de volontaires selon les autorités, et ce malgré des condamnations internationales dont celle de la Cour européenne des droits de l'Homme en 2022.

- "Arbitraire" -

"Pour les familles qui attendaient leurs petits-enfants, neveux et nièces depuis plus de six ans, c'est un immense et indescriptible soulagement", a déclaré l'avocate des femmes rapatriées, Marie Dosé, dans un communiqué transmis à l'AFP.

Mais "la France laisse derrière elle 110 autres enfants français, toujours détenus dans le camp Roj", l'un des camps contrôlés comme d'autres centres et prisons par les forces kurdes, depuis plus de six ans, dénonce-t-elle.

Des dizaines de milliers de personnes, d'une cinquantaine de nationalités et soupçonnées de liens avec l'organisation jihadiste État islamique, sont retenues dans ces camps.

En juin, quelque 120 enfants et une cinquantaine de femmes françaises y étaient encore retenus, selon le Collectif des Familles unies, qui rassemble leurs proches.

Après ce rapatriement nocturne, ce collectif a rediffusé sur X mardi matin son message habituel dénonçant la détention sur place d'enfants "coupables de rien" dans "des conditions indignes".

Car pour ces familles, rien n'est encore réglé. "Une nouvelle fois, la France fait le choix de l'arbitraire", regrette Marie Dosé.

"La France, qui refusait de rapatrier des enfants tant que leurs mères n'avaient pas donné leur accord, refuse aujourd'hui leur retour alors qu'ils sont devenus majeurs. Ce faisant et plus que jamais, la France décide donc de faire payer à ces enfants le choix de leurs parents", estime-t-elle aussi.

Elle dénonce également le sort de femmes sans enfant ou dont les enfants sont décédés, et que la France refuse désormais de rapatrier, ainsi que d'enfants nés en France et "conduits de force en Syrie" avant de pouvoir acquérir la nationalité, ou de jeunes majeurs enfermés dans d'autres lieux de détention syriens.

Pour Matthieu Bagard, responsable du pôle expertise Syrie de l'ONG Avocats sans frontières France, "ce rapatriement démontre une nouvelle fois que la France a la possibilité d'organiser ces opérations". Mais il déplore lui aussi la situation des femmes et jeunes majeurs toujours "illégalement détenus".

En février, l'administration kurde a annoncé, en coordination avec l'ONU, son intention de vider d'ici fin 2025 les camps du nord-est de la Syrie des déplacés syriens et irakiens, y compris les proches présumés de jihadistes.


Après «Bloquons tout» et les promesses de «rupture», les syndicats dans la rue jeudi

"Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées. (AFP)
"Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées. (AFP)
Short Url
  • Après sa rencontre avec Sébastien Lecornu lundi, la cheffe de file de la CGT, Sophie Binet, se montrait plus que jamais déterminée, malgré l'abandon de la suppression de deux jours fériés samedi
  • Dès son arrivée à Matignon, Sébastien Lecornu avait promis des "ruptures sur le fond" et "pas que sur la forme"

PARIS: "Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées.

Après sa rencontre avec Sébastien Lecornu lundi, la cheffe de file de la CGT, Sophie Binet, se montrait plus que jamais déterminée, malgré l'abandon de la suppression de deux jours fériés samedi. "(Il) ne s'est engagé à rien du tout. Aucune des mesures catastrophiques du musée des horreurs de M. Bayrou n'est enterrée !", a-t-elle lancé.

Dès son arrivée à Matignon, Sébastien Lecornu avait promis des "ruptures sur le fond" et "pas que sur la forme". Depuis vendredi, il reçoit les syndicats représentatifs - à l'exception de Frédéric Souillot (FO) qui souhaite le rencontrer après le 18. Mais ces derniers maintiennent leur appel à la mobilisation du 18, espérant peser de tout leur poids sur les futures orientations budgétaires.

CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, FSU et Solidaires seront ainsi unis jeudi dans la rue, pour la première fois depuis le 6 juin 2023 - date de la dernière mobilisation contre la réforme des retraites.

Les mesures avancées cet été sont "d'une brutalité sans précédent", dénonçaient-ils fin août dans un communiqué commun, regrettant que l'ancien gouvernement choisisse "encore une fois de faire payer les travailleuses et les travailleurs, les précaires, les retraité·es, les malades".

Ils pointent "des coupes dans les services publics, (...), une énième réforme de l'assurance chômage, le gel des prestations sociales et celui des salaires des fonctionnaires comme des contractuel·les, la désindexation des pensions de retraites, le doublement des franchises médicales, la remise en cause de la 5ème semaine de congés payés…".

L'abandon de la suppression de deux jours fériés, unanimement décriée par le monde syndical, constitue "une première victoire", qui "confirme que nous sommes en position de force", a estimé Sophie Binet.

Même la CFDT, pourtant peu rompue aux cortèges syndicaux, maintient sa participation: vendredi, Marylise Léon a réaffirmé que son syndicat était "plus que jamais motivé pour aller dans la rue", à l'issue de son entrevue avec Sébastien Lecornu.

"Le budget tel qu'il a commencé à être construit n'est pas compatible avec la justice sociale, fiscale et environnementale donc il y a vraiment besoin de le revoir de fond en comble", a-t-elle estimé lundi sur France Inter.

Sur la durée ? 

Sur la taxation des hauts patrimoines, revenue au cœur du débat, Mme Léon a pourtant apprécié que le Premier ministre dise être conscient de la nécessité de "faire quelque chose".

"Le budget, il va se décider dans la rue", insiste Mme Binet. Ainsi, "il faut faire une démonstration de force jeudi prochain et après", laissant entrevoir une mobilisation dans la durée.

Lundi, la CGT annonçait déjà plus de 220 manifestations, un chiffre encore amené à évoluer.

Les organisations syndicales parviendront-elles à dépasser l'affluence du mouvement citoyen "Bloquons tout" - qui a rassemblé près de 200.000 personnes le 10 septembre selon le ministère de l'Intérieur, sans toutefois parvenir à paralyser le pays ? Les manifestants du 10, parfois méfiants vis-à-vis des syndicats, participeront-ils à cette nouvelle journée ?

Aucune inquiétude côté syndical: "Nous avons déjà d'excellents retours sur la mobilisation de jeudi", assure Frédéric Souillot (FO).

"Nous avons l'objectif d'avoir un million de personnes avec nous", avance de son côté Cyril Chabanier (CFTC).

"La colère sociale est toujours là", abonde Julie Ferrua, co-déléguée générale de Solidaires.

De leur côté, les autorités s'attendent à une mobilisation plus importante que le 10 septembre et craignent la présence de plusieurs centaines de manifestants radicaux dans des cortèges. Une cellule de crise sera ouverte dès mardi au ministère de l'Intérieur.

Après le 18, ce sera le tour des agriculteurs de la FNSEA, le 26 septembre, de mener "une grande journée d'actions" autour des échanges internationaux de produits agricoles.