A Roubijné, dans le face à face entre troupes russes et ukrainiennes

Après un mois de frappes, les troupes russes ont pris pied dans la partie nord de la ville (Photo, AFP).
Après un mois de frappes, les troupes russes ont pris pied dans la partie nord de la ville (Photo, AFP).
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Publié le Dimanche 24 avril 2022

A Roubijné, dans le face à face entre troupes russes et ukrainiennes

  • Kremina, la ville voisine sur le front du Donbass, dans l'est de l'Ukraine, est tombée il y a cinq jours
  • Roubijné est sur le fil, alors que l'armée russe a lancé ces derniers jours une offensive pour s'emparer du Donbass

ROUBIJNE: "On ne peut pas mourir deux fois", dit Mikhaïlo, qui a tout perdu et fume sa cigarette dans les ruines de Roubijné, en attendant que la guerre passe ou qu'il meure sous l'un des obus qui pleuvent en continu sur la ville en pleine bataille.

Kremina, la ville voisine sur le front du Donbass, dans l'est de l'Ukraine, est tombée il y a cinq jours. Roubijné est sur le fil, alors que l'armée russe a lancé ces derniers jours une offensive pour s'emparer du Donbass.

Après un mois de frappes, les troupes russes ont pris pied dans la partie nord de la ville, le sud est encore en grande partie tenu par les forces ukrainiennes, ont constaté samedi des journalistes de l'AFP.

L'artillerie ukrainienne réussit pour l'instant à contenir leur progression. Ses frappes font monter dans le ciel des panaches de fumée plus au-dessus de la plus haute cheminée de l'usine chimique de la ville. Les barres d'immeubles désertées par les familles ouvrières disparaissent dans la nuée.  

Pour accéder à Roubijné, ville de 60 000 habitants avant la guerre, il faut passer une série de checkpoints gardés par des soldats dispersés et laisser passer les blindés "Kozak", qui foncent renforcer les lignes.  

A l'intérieur, apparaît une cité en miettes. Chaque bâtiment, sans exception, porte les stigmates des coups reçus: aucune vitre n'a résisté au déluge de tirs croisés. Les rues sont des champs de débris perforées de cratères. 

Les immeubles sont soit endommagés, soit calcinés, soit éventrés. On en voit ouverts par le toit ou bien en deux sur la façade, comme des maisons de poupées.

«Je veux ma maison»

Et les derniers à vouloir rester, sont comme dans chaque ville du front, les plus fragiles.

A la hauteur du seul rond-point du sud de Roubijné, ils ne sont plus que 12 habitants dans une cave à survivre sous le tapis des bombes. Mikhaïlo traîne dans ses sandales abîmées jusqu'à l'abri.

Sur le seuil, un groupe d'hommes, les uns assis, les autres debout, fait tourner une cigarette en laissant s'éteindre le réchaud à bois. Les escaliers mènent à un dédale de pièces plongées dans le noir. Une première alcôve est éclairée d'une mèche qui trempe dans une conserve remplie d'huile.

A côté de la flamme vacillante, un poste de radio fait crépiter la chanson américaine "You're in the army now" du groupe anglais Status Quo, devenue un classique de toutes les jeunesses enrôlées du monde.

Dans la pièce d'à côté, un cierge éclaire le visage de six vieillards allongés sur des lits de camps.

Lioudmila, 63 ans, qui vit dans cette cave depuis le 15 mars, indique que "ceux qui sont restés sont ceux qui n'avaient nulle part où aller en Ukraine".

"Ma mère aura 90 ans en août, je ne peux pas la porter de mes propres mains et l'amener à la voiture", dit-elle.

"Que tous ceux qui ont commencé cette guerre se rassemblent dans notre sous-sol pour venir y faire leurs négociations. Qu'ils viennent écouter les bombardements et s'asseoir à la lueur des bougies. Et alors ils prendront enfin une décision", lance Lioudmila, en tentant d'apaiser les râles de sa mère.

"Je veux ma maison", l'interrompt sa mère enroulée comme une momie dans une couverture.

La vieille femme refuse de monter jusqu'aux escaliers de l'abri. Elle a "trop peur" et aussi trop de souvenirs qui remontent, "de la Seconde Guerre mondiale, de la faim" qu'elle revit depuis sa cave et sa nuit ininterrompue.

«Tout est irréel»

Le témoin historique de la ville, le somptueux Palais de la culture, pilonné, ne tient plus que par la façade. A l'intérieur, l'écran de la salle de cinéma désuète est en lambeaux, les strapontins écroulés comme des dominos. 

Dans la salle de réception, l'immense lustre d'apparat s'est fracassé sur la moquette rouge. Les costumes des spectacles des enfants pendent dans des armoires renversées. La salle de piano, sans vitre est remplie de plâtre.

Iouri Fomine, 62 ans, ingénieur à la retraite, erre dans les couloirs vides du palais détruit, un roman polonais et son stylo à la main. 

"Tous les jours quand j'étais gamin je venais soit au cinéma, soit emprunter un livre", raconte-t-il. "Une enfance si heureuse, tant de nostalgie..."

"Je n'étais pas préparé mentalement à cette guerre, j'ai l'impression que tout est irréel, que l'on vit dans une dimension parallèle, mais en fait on vit dans la réalité que produit le cerveau malade du président de la Fédération de Russie", lâche-t-il.

Comme souvent dans cette région tordue par le conflit séparatiste, Mikhaïlo, qui tient son bout de banc sous les bombes, estime lui que "peu importe qui gagne, la guerre doit cesser au plus vite".

Et que dira-t-il au premier soldat russe qu'il croisera? "Bonjour, avez-vous une cigarette?", répond-il très content de sa blague. 


« Une grande victoire » : Trump conciliant au sommet de l'OTAN

Le président américain Donald Trump rencontre le secrétaire général de l'OTAN Mark Rutte (non représenté) lors du sommet des chefs d'État et de gouvernement de l'OTAN à La Haye, le 25 juin 2025. (Photo de Piroschka Van De Wouw / POOL / AFP)
Le président américain Donald Trump rencontre le secrétaire général de l'OTAN Mark Rutte (non représenté) lors du sommet des chefs d'État et de gouvernement de l'OTAN à La Haye, le 25 juin 2025. (Photo de Piroschka Van De Wouw / POOL / AFP)
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  • Le président américain a déclaré que la promesse des membres de l'OTAN d'augmenter leurs investissements dans la défense « est une grande victoire pour tout le monde ».
  • Donald Trump, qui a souvent critiqué les « mauvais payeurs » européens, a opté pour un ton conciliant aux côtés du président du Conseil de l'Atlantique, Mark Rutte.

LA HAYE, PAYS-BAS : A son arrivée au sommet de l'OTAN à La Haye, Donald Trump s'est félicité mercredi de la hausse des dépenses militaires des alliés, avant une rencontre très attendue avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky.

Le président américain a déclaré que la promesse des membres de l'OTAN d'augmenter leurs investissements dans la défense « est une grande victoire pour tout le monde ».

Donald Trump, qui a souvent critiqué les « mauvais payeurs » européens, a opté pour un ton conciliant aux côtés du président du Conseil de l'Atlantique, Mark Rutte.

Les Européens et le Canada vont, selon lui, « très bientôt » dépenser autant que les États-Unis. « Je leur demande d'atteindre 5 % depuis des années, et ils y parviennent. C'est énorme (...). L'Otan va devenir très forte avec nous », a-t-il souligné. 

Tout a été fait pour ne pas contrarier l'imprévisible milliardaire lors de ce sommet, qui doit se conclure par un message simple attendu dans une déclaration finale de cinq paragraphes.

Les membres de l'OTAN vont s'engager à augmenter drastiquement leurs dépenses en matière de défense, pour atteindre au moins 5 % de leur PIB à l'horizon 2035, avec 3,5 % de dépenses militaires strictes et 1,5 % supplémentaire pour la sécurité au sens large.

Et dès sa première prise de parole à son arrivée, Mark Rutte a tenté d'apaiser les inquiétudes quant à l'implication des États-Unis au sein de l'OTAN. « Pour moi, il est absolument clair que les États-Unis soutiennent pleinement » les règles de l'Alliance, a-t-il martelé. 

La veille, à bord d'Air Force One, Donald Trump avait pourtant de nouveau déconcerté ses alliés en restant évasif sur l'attitude des États-Unis en cas d'attaque d'un des membres de l'OTAN.

À propos de la pierre angulaire de l'Otan qui pose le principe de défense mutuelle, l'article 5 du traité de l'Alliance Atlantique, il avait lâché que celui-ci pouvait « se définir de plusieurs façons » et que si un pays membre était attaqué, tous les autres se portaient à son secours.

Dans ce contexte, l'état d'esprit du locataire de la Maison Blanche est scruté à la loupe.

« Je l'ai trouvé exceptionnellement détendu et de bonne humeur hier », a assuré le Premier ministre néerlandais Dick Schoof, hôte de ce sommet. « Je suppose donc que s'il a bien dormi au palais et que le petit-déjeuner était bon, il sera également de bonne humeur » pendant le sommet.

Afin de s'attirer les bonnes grâces du président américain, Mark Rutte lui avait adressé un message flatteur juste avant le sommet, que Donald Trump a ensuite diffusé sur ses réseaux sociaux.

Les bombardements américains en Iran ? Une « action décisive », « vraiment extraordinaire », et que « personne d'autre n'avait osé faire », a-t-il lancé.

Grâce au sommet de La Haye, « l'Europe va payer un prix ENORME » pour financer sa défense « comme elle le devait », a encore écrit Mark Rutte à Trump.

Lors du sommet international, l’attention se concentre sur la rencontre entre Donald Trump et Volodymyr Zelensky, quatre mois après une précédente humiliation de ce dernier.

Trump, aux relations tendues avec le président ukrainien, le décrit comme étant « dans une situation difficile ». Le sommet du G7 au Canada s’était déjà distingué par l’absence d’une déclaration commune sur l’Ukraine, une première depuis Biden. 

À La Haye, Trump a aussi évoqué un cessez-le-feu réussi entre l’Iran et Israël et affirmé que les frappes américaines ont freiné durablement le programme nucléaire iranien.

Le secrétaire général de l’OTAN espère que ces tensions n’éclipseront pas ce sommet, qualifié d’« historique », malgré les critiques espagnoles sur la hausse des dépenses militaires.


Le gouvernement suisse souhaite établir un partenariat de sécurité et de défense avec l'UE

Le drapeau suisse flotte sur les rives du lac Léman le 14 juin 2013, dans le centre de Genève. (AFP)
Le drapeau suisse flotte sur les rives du lac Léman le 14 juin 2013, dans le centre de Genève. (AFP)
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  • Cette annonce intervient deux jours après la signature d'un tel accord entre l'UE et le Canada, et le jour même où un sommet de l'OTAN s'ouvre, organisation dont la Suisse n'est pas membre.
  • « Par le biais de ces partenariats, l'UE offre aux États tiers un cadre permettant de renforcer la collaboration dans ce domaine », explique le Conseil fédéral, qui espère lancer ces discussions avec Bruxelles « dès que possible ».

GENEVE : Le gouvernement suisse a annoncé  mecredi son intention de conclure un partenariat de sécurité et de défense avec l'Union européenne, affirmant que cela n'irait pas à l'encontre de sa neutralité.

Cette annonce intervient deux jours après la signature d'un tel accord entre l'UE et le Canada, et le jour même où un sommet de l'OTAN s'ouvre, organisation dont la Suisse n'est pas membre.

Lors de sa séance du jour, le Conseil fédéral (gouvernement) « a décidé d'entamer des discussions exploratoires avec l'UE au sujet d'un partenariat de sécurité et de défense », a-t-il indiqué dans un communiqué.

« Par le biais de ces partenariats, l'UE offre aux États tiers un cadre permettant de renforcer la collaboration dans ce domaine », explique le Conseil fédéral, qui espère lancer ces discussions avec Bruxelles « dès que possible ».

La Grande-Bretagne a signé un partenariat de défense similaire en mai, et l'Australie et l'UE ont annoncé la semaine dernière qu'elles avaient entamé des négociations en vue d'un autre partenariat. 

Selon le gouvernement suisse, un tel partenariat est « une condition essentielle à la réalisation d'acquisitions communes dans le domaine de l'armement ». Il estime par ailleurs qu'il serait « compatible avec le principe de neutralité de la Suisse et pourrait lui permettre de renforcer ses capacités de défense ».

Située au cœur de l'Europe, la Suisse n'appartient ni à l'UE ni à l'OTAN.

Les tensions géopolitiques mondiales, en particulier la guerre en Ukraine, font naître chez les Suisses le désir d'une coopération plus importante avec l'OTAN, selon un sondage publié le 17 juin par le Département fédéral de la Défense.

Ce sondage révèle également que 53 % des personnes interrogées sont en faveur d'un rapprochement avec l'Otan, tandis que 32 % soutiennent une adhésion de la Suisse à cette organisation. 


Le sommet de l'Otan rentre dans le dur, suspendu à Trump

Tout a été fait pour ne pas contrarier Donald Trump qui participe au sommet de l'Otan à La Haye mercredi. Mais jouera-t-il le jeu? (AFP)
Tout a été fait pour ne pas contrarier Donald Trump qui participe au sommet de l'Otan à La Haye mercredi. Mais jouera-t-il le jeu? (AFP)
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  • La veille, à bord d'Air Force One, Donald Trump avait de nouveau déconcerté ses alliés, en restant évasif sur l'attitude des Etats-Unis en cas d'attaque d'un des membres de l'Alliance
  • L'article 5 du traité de l'Otan peut "se définir de plusieurs façons", avait-il lâché à propos de la pierre angulaire de l'Alliance qui pose le principe de défense mutuelle : si un pays membre est attaqué, tous les autres se portent à son secours

LA HAYE: Tout a été fait pour ne pas contrarier Donald Trump qui participe au sommet de l'Otan à La Haye mercredi. Mais jouera-t-il le jeu?

Suspendus aux réactions de l'imprévisible président américain, les pays de l'Alliance atlantique doivent confirmer une augmentation inédite de leurs dépenses militaires à cette occasion.

Dès sa première prise de parole à son arrivée, le secrétaire général de l'Otan Mark Rutte s'est efforcé de balayer les inquiétudes : "Pour moi, il est absolument clair que les Etats-Unis soutiennent pleinement" les règles de l'Alliance, a-t-il martelé.

La veille, à bord d'Air Force One, Donald Trump avait de nouveau déconcerté ses alliés, en restant évasif sur l'attitude des Etats-Unis en cas d'attaque d'un des membres de l'Alliance.

L'article 5 du traité de l'Otan peut "se définir de plusieurs façons", avait-il lâché à propos de la pierre angulaire de l'Alliance qui pose le principe de défense mutuelle : si un pays membre est attaqué, tous les autres se portent à son secours.

"De bonne humeur" 

Dans ce contexte, l'état d'esprit du locataire de la Maison Blanche est scruté à la loupe.

"Je l'ai trouvé exceptionnellement détendu et de bonne humeur hier", a assuré le Premier ministre néerlandais Dick Schoof, hôte de ce sommet. "Je suppose donc que s'il a bien dormi au palais et que le petit-déjeuner était bon, il sera également de bonne humeur" pendant le sommet.

Afin d'éviter les déconvenues, ce court sommet se résume à un message simple, attendu dans une déclaration finale ramassée en cinq paragraphes.

Aiguillonnés par Donald Trump, les membres de l'Otan vont s'engager à augmenter drastiquement leurs dépenses en matière de défense, pour atteindre au moins 5% de leur PIB à l'horizon 2035 - 3,5% de dépenses militaires stricto sensu, et 1,5% supplémentaire pour la sécurité au sens large.

Le patron de l'Otan ne cesse de tirer la sonnette d'alarme sur la menace de la Russie, capable selon lui de "réussir une attaque" contre un pays de l'Alliance dans les trois à cinq ans à venir.

"Ce sera votre victoire" 

Afin de s'attirer les bonnes grâces du président américain, Mark Rutte lui a adressé juste avant le sommet un message dithyrambique, que Donald Trump n'a pas manqué de diffuser sur ses réseaux sociaux.

Les bombardements américains en Iran ? Une "action décisive", "vraiment extraordinaire" et que "personne d'autre n'avait osé faire", a-t-il lancé.

Après le sommet de La Haye, "l'Europe va payer un prix ENORME" pour financer sa défense "comme elle le devait" et "ce sera votre victoire", a encore écrit Mark Rutte à Trump, qui critique si souvent les "mauvais payeurs" européens.

"L'Europe de la défense s'est enfin réveillée", a aussi affirmé la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.

Suffisant pour éviter un coup de semonce du président américain ?

"Trump voudra-t-il un clash ? C'est une inconnue totale", reconnaît Camille Grand, ancien responsable de l'Otan et expert de questions de défense.

Zelensky "dans une situation difficile" 

Au cœur de ce grand raout international, la "probable" rencontre de Donald Trump avec le président ukrainien va focaliser l'attention, quatre mois après l'humiliation subie par Volodymyr Zelensky dans le bureau ovale.

Quel message veut-il lui faire passer ? "Je lui dirai +comment ça va?+. Il est dans une situation difficile, il n'aurait jamais dû se trouver là", a souligné Donald Trump dont les relations avec M. Zelensky sont compliquées.

Au Canada, le récent sommet du G7 - le club des grandes démocraties industrialisées  - avait été marqué par le départ anticipé du locataire de la Maison Blanche et l'absence de déclaration commune dénonçant l'"agression russe" en Ukraine. Contrairement aux années précédentes quand Joe Biden était à la tête des Etats-Unis.

En quittant la Maison Blanche mardi, Donald Trump s'est en outre montré très en colère après la rupture du cessez-le-feu entre l'Iran et Israël.

Le secrétaire général de l'Alliance, Mark Rutte, espère néanmoins que la situation au Moyen-Orient ne chamboulera pas complètement la chorégraphie du sommet qu'il a déjà qualifié d'"historique", grâce aux investissements promis en matière de défense.

En dépit des critiques de l'Espagne qui juge "déraisonnable" cette hausse des dépenses militaires.