Ukraine: Moscou accentue la pression à Kharkiv, Kiev revendique des succès tactiques

Des membres d'une équipe de déminage du Service national d'urgence d'Ukraine le 28 avril 2022 (Photo, AFP).
Des membres d'une équipe de déminage du Service national d'urgence d'Ukraine le 28 avril 2022 (Photo, AFP).
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Publié le Samedi 30 avril 2022

Ukraine: Moscou accentue la pression à Kharkiv, Kiev revendique des succès tactiques

  • De violentes explosions ont été entendues dans la nuit de vendredi à samedi à Kharkiv, deuxième ville du pays, pilonnée depuis des semaines par l'artillerie russe
  • «Nous avons eu deux nuits qui ont été effrayantes, comme l'enfer... L'avant-dernière nuit, nous pensions que le ciel brûlait, que tout le village brûlait», a raconté Svitlana Perepilitsa, 23 ans.

KHARKIV: Les forces russes maintenaient samedi leur pression sur les régions de l'est et du sud de l'Ukraine, particulièrement autour de Kharkiv au nord-est, où elles tentent coûte que coûte d'accentuer leur contrôle, en dépit, selon Kiev, de revers sur le terrain.


De violentes explosions ont été entendues dans la nuit de vendredi à samedi à Kharkiv, deuxième ville du pays, pilonnée depuis des semaines par l'artillerie russe.


Vendredi, ces bombardements ont fait au moins un mort et plusieurs blessés, selon l'administration militaire régionale de Kharkiv.


Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a reconnu que la situation dans cette région du nord-est, où les forces russes ont recentré leur offensive, était "difficile". "Mais nos militaires obtiennent des succès tactiques", a-t-il affirmé, en dépit de déclarations contraires faites par le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov.


"L'opération militaire spéciale qui a débuté le 24 février se poursuit conformément au plan", assure-t-il ainsi dans un entretien avec l'agence officielle chinoise Chine nouvelle publié samedi. Et, ajoute-t-il, tous ses objectifs "seront atteints en dépit de l'obstruction de nos adversaires".


Le ministre russe appelle en outre les alliés occidentaux de l'Ukraine à cesser leurs livraisons d'armes.


"Si les Etats-Unis et l'OTAN sont vraiment intéressés à résoudre la crise en ukraine, alors en tout premier lieu, ils devraient se réveiller et cesser d'approvisionner le régime de Kiev en armes et munitions", déclare M. Lavov à Chine nouvelle.


L'aide militaire apportée au gouvernement ukrainien s'est fortement renforcée depuis le début du conflit.


Le président américain Joe Biden a en outre demandé cette semaine au Congrès une rallonge budgétaire de 33 milliards de dollars pour encore augmenter ces livraisons d'armes.


Et les effets commencent à se voir sur le terrain où les forces russes sont parfois en difficulté.


C'est notamment le cas à Rouska Lozova, un village repris par les Ukrainiens au nord de Kharkiv, d'où les forces russes pilonnaient selon eux la ville. Le village a été libéré après d'intenses combats, et plus de 600 habitants évacués, selon le ministère ukrainien de la Défense. 

Des réfugiés ukrainiens hébergés par un Russe à Prague

Coincé entre un supermarché miteux et un casino dans le nord de Prague, un ancien magasin vietnamien voué à la démolition est devenu une maison de l'espoir pour les réfugiés ukrainiens. Et ce à l'initiative d'un photographe d'origine russe.


Celui-ci, Pavel Oskine, a fait appel à quelques amis pour l'aider à transformer cet espace en un lieu qui abrite désormais 16 Ukrainiens et qui est capable d'en accueillir des dizaines d'autres.


"Je peux prendre des photos et je pourrais aller à la guerre, mais je serai plus utile ici", explique à l'AFP cet homme tatoué de 48 ans amateur de Harley Davidson. 


"Tant que (le président russe Vladimir) Poutine continuera à se battre, je le combattrai de cette façon (...). C'est ma guerre", poursuit-il, son téléphone sonnant sans discontinuer.


Ce photographe paysagiste, qui parcourt le monde dans le but d'enseigner son art, est parti de Russie pour s'installer à Prague en 2008. 


"Ma fille avait six ans et Poutine était déjà au pouvoir. J'ai compris qu'il n'y avait pas d'avenir là-bas", lâche-t-il.


Après le début de l'invasion de l'Ukraine par la Russie le 24 février, il a collecté via Facebook environ 20.000 dollars (19.000 euros) pour son projet de centre d'accueil.

Le Wifi: «Gloire à l'Ukraine!»
Après que l'organisation locale House of Good eut également apporté sa contribution, Pavel Oskine a disposé de suffisamment d'argent pour financer la rénovation de l'ancien magasin. 


"Nous avons deux cuisines, dix douches et dix toilettes", raconte-t-il dans le hall d'entrée où des habitants de la capitale tchèque offrent des objets, en particulier des vélos et des scooters pour les enfants. 


Le hall est divisé en une salle de jeux pour les enfants - avec un baby-foot et un équipement permettant de faire de l'escalade - et un coin salon pour les adultes. 


Le réseau Wifi local est Slava_Ukrajine (Gloire à l'Ukraine), tandis que le mot de passe est GerojamSlava! (Gloire aux héros!), une classique formule patriotique.


Maïa Kisselevitch, originaire d'Odessa, dans le sud de l'Ukraine, a conduit pendant une semaine pour emmener ses deux fils et sa sœur à Prague, passant par la Moldavie, la Roumanie, la Hongrie et la Slovaquie. 


"Nous sommes très reconnaissants à tout le monde", dit-elle à l'AFP. 


"Quand les roquettes ont commencé à tomber, ça a été terrible et vraiment dur psychologiquement de résister. Alors nous avons décidé de fuir. Ca a été particulièrement difficile pour les enfants".

Aider à trouver un emploi 
Faisant partie des quelque 300.000 Ukrainiens qui ont trouvé refuge en République tchèque depuis le déclenchement de l'invasion russe, le 24 février, Maïa Kisselevitch y est arrivée le 9 mars et a séjourné dans un autre établissement de la capitale avant de s'installer cette semaine dans ces nouveaux locaux.


"Les enfants peuvent jouer dans la salle de jeux. Tout est neuf ici, les matelas, les lits, tout ce qu'il faut pour que nous puissions avoir une vie à part entière", s'exclame-t-elle.


Pavel Oskine, qui a hébergé 15 autres réfugiés ainsi que deux chats et un chien dans son studio, cherche maintenant le moyen de trouver un emploi aux réfugiés. 


"Leur première question n'est pas de savoir où ils vont pouvoir rester, mais ce qu'ils vont faire", souligne-t-il. 


Maïa Kisselevitch, qui formait de futurs employés dans l'hôtellerie et dans des restaurants en Ukraine, assure ainsi qu'elle est prête à faire n'importe quel travail, de la distribution d'affichettes au nettoyage. 


"Il est clair que nous ne pouvons pas vivre ici gratuitement pour toujours (...). Nous sommes prêts à travailler en échange." 


Pavel Oskine a chargé les développeurs et les concepteurs qui l'aident pour son application photo d'en produire une autre spécialement en vue d'aider ces réfugiés sur le marché de l'emploi local.


"Cela fonctionnera comme Uber. Il sera super facile pour les Tchèques de trouver une femme de ménage." 


"Vous mettrez l'heure et vous recevrez un message disant 'Tatiana arrive', accompagné d'une photo. Ces gens doivent vivre ici d'une manière ou d'une autre", conclut le photographe.

«Comme l'enfer»
"Nous avons eu deux nuits qui ont été effrayantes, comme l'enfer... L'avant-dernière nuit, nous pensions que le ciel brûlait, que tout le village brûlait", a raconté Svitlana Perepilitsa, 23 ans.


"Nous sommes restés dans les sous-sols sans nourriture pendant deux mois, nous mangions ce que nous avions", a expliqué de son côté Sviatoslav, 40 ans, les yeux rougis de fatigue, refusant de donner son nom de famille.


Plus au sud et à l'est, dans la région du Donbass que le Kremlin s'est fixé pour objectif de reprendre entièrement, "les occupants font tout pour détruire toute vie", a affirmé Volodymyr Zelensky, estimant que "les bombardements constants sur les infrastructures et les zones habitées montrent que la Russie veut rendre cette zone inhabitée".


Dans la région de Donetsk et Lougansk, 14 attaques lancées par les forces russes ont été repoussées au cours des dernières 24 heures, a affirmé samedi l'état-major des forces ukrainiennes.


Et pour Washington, l'offensive russe accuse du retard. Selon un haut-responsable du Pentagone, les forces russes "sont loin d'avoir fait la jonction" des troupes entrées par la région de Kharkhiv, au nord du Donbass, avec celles venues du sud du pays, un des objectifs de l'armée russe pour prendre en tenaille les forces ukrainiennes déployées sur la ligne de front autour des zones séparatistes de Donetsk et Lougansk.


Mais "nous pensons qu'ils continuent de créer les conditions d'une offensive soutenue, plus vaste et plus longue", a-t-il ajouté.


Et pour mieux affirmer leur détermination, les forces russes ont clairement assumé vendredi avoir bombardé la veille la capitale Kiev, au moment précis où s'y trouvait le secrétaire-général de l'ONU Antonio Guterres.


Ce bombardement a fait dix blessés et au moins un mort: Vira Ghyrytch, journaliste ukrainienne de Radio Liberty, un média financé depuis l'époque de la Guerre froide par le Congrès américain en Europe de l'Est. Le corps de la journaliste a été retrouvé dans les décombres de son immeuble. 


L'attaque s'est produite au moment où le chef des Nations unies, qui effectuait mercredi et jeudi son premier déplacement en Ukraine depuis le début de l'invasion russe le 24 février, se trouvait à Kiev.

«Humiliation brutale»
L'Allemagne et la France ont vivement condamné, Berlin soulignant que ces frappes montraient une fois de plus "que (Vladimir) Poutine et son régime n'ont aucun respect pour le droit international".


M. Zelensky, a regretté dans une adresse vidéo vendredi soir, "qu'une humiliation aussi brutale et délibérée des Nations Unies soit restée sans réponse".


Washington a de son côté accusé vendredi le président Vladimir Poutine de "dépravation" et de "cruaté" pour la façon dont les forces russes se comportent en Ukraine. "Il est difficile de regarder certaines images et d'imaginer qu'un dirigeant sérieux puisse faire ça", a déclaré le porte-parole du pentagone John Kirby.


Le secrétaire général de l'ONU est allé jeudi à Boutcha et dans d'autres lieux proches de Kiev théâtres d'exactions imputées par l'Ukraine aux forces russes et a exhorté Moscou à "coopérer" avec l'enquête de la Cour pénale internationale sur de possibles crimes de guerre.


Parallèlement, les services de la procureure générale d'Ukraine Iryna Venediktova ont révélé que dix soldats russes ont été mis en examen pour des crimes de guerre présumés à Boutcha.


C'est la première mesure de ce type prise depuis que les corps de vingt personnes portant des vêtements civils ont été découverts le 2 avril par l'AFP gisant dans une rue de cette localité, suscitant condamnation et émoi à travers le monde. 


Les Ukrainiens ont accusé les Russes, mais Moscou a démenti toute responsabilité et parlé d'une "mise en scène" de Kiev.


"Plus de 8 000 cas" présumés de crimes de guerre ont au total été identifiés en Ukraine, a affirmé la procureure.


Des enquêteurs vont à cet égard être envoyés par le Royaume-Uni pour aider leurs confrères ukrainiens, a déclaré vendredi la ministre britannique des Affaires étrangères, Liz Truss.


A Marioupol, ville portuaire dans le sud de l'ukraine, une opération d'évacuation était prévue vendredi. La coordinatrice des Nations unies en Ukraine, Osnat Lubrani, avait dit jeudi partir dans le sud préparer cette nouvelle tentative d'évacuation, M. Guterres assurant que l'ONU faisait "tout son possible" pour en extraire les civils pris dans "l'apocalypse".


Plusieurs centaines de militaires et de civils ukrainiens sont retranchés dans des galeries souterraines datant de l'époque soviétique dans l'immense complexe métallurgique d'Azovstal.


L'AFP a pu entendre vendredi matin et jusqu'au milieu de l'après-midi des bombardements nourris à Azovstal, lors d'un voyage de presse organisé à Marioupol par l'armée russe.


En début d'après-midi, les explosions n'étaient espacées que de quelques secondes, certaines paraissant particulièrement puissantes. Des colonnes de fumée grise s'élevaient parfois dans le ciel de la zone industrielle.


Sur le front diplomatique, alors que le président russe a été invité comme son homologue ukrainien au sommet du G20 prévu en novembre en Indonésie, les Etats-Unis ont dit refuser de traiter avec Vladimir Poutine "comme si de rien n'était".


Trump impose des restrictions d'entrée à sept autres pays et aux Palestiniens

Des personnes arrivent à l'aéroport international John F. Kennedy de New York, le 9 juin 2025. (AFP)
Des personnes arrivent à l'aéroport international John F. Kennedy de New York, le 9 juin 2025. (AFP)
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  • Donald Trump élargit les interdictions d’entrée aux États-Unis à sept pays supplémentaires, dont la Syrie, et inclut les Palestiniens munis de documents de l’Autorité palestinienne
  • La Maison Blanche invoque la sécurité nationale, tout en prévoyant des exceptions limitées, dans le cadre d’un durcissement général de la politique migratoire

WASHINGTON: Donald Trump a étendu mardi les interdictions d'entrée aux Etats-Unis aux ressortissants de sept pays, dont la Syrie, ainsi qu'aux Palestiniens.

Le président américain a signé une proclamation "restreignant et limitant davantage l'entrée des ressortissants étrangers afin de protéger la sécurité des Etats-Unis", a indiqué la Maison Blanche.

Les nouveaux pays concernés par cette mesure sont le Burkina Faso, le Niger, le Mali, le Soudan du Sud et la Syrie, tandis que le Laos et la Sierra Leone passent de restrictions partielles à totales.

Les Palestiniens disposant de documents de voyage émis par l'Autorité palestinienne sont également visés.

L'administration Trump avait déjà imposé des restrictions totales visant les ressortissants de douze pays et des dizaines d'autres pays se sont vus imposer des restrictions partielles.

S'agissant de la Syrie, la mesure intervient quelques jours après une attaque meurtrière contre des soldats américains dans le centre de ce pays.

L'administration Trump dit avoir identifié des pays où les vérifications sont "tellement insuffisantes qu'elles justifiaient une suspension totale ou partielle de l'admission des ressortissants de ces pays".

La proclamation prévoit cependant des exceptions pour les résidents permanents légaux, les titulaires de visas existants, certaines catégories de visas comme les athlètes et les diplomates, et les personnes dont "l'entrée sert les intérêts nationaux des Etats-Unis".

Depuis son retour au pouvoir en janvier, Donald Trump mène une vaste campagne contre l'immigration illégale et a considérablement durci les conditions d'entrée aux Etats-Unis et l'octroi de visas, arguant de la protection de la sécurité nationale.

Ces mesures visent ainsi à interdire l'entrée sur le territoire américain aux étrangers qui "ont l'intention de menacer" les Américains, selon la Maison Blanche.

De même, pour les étrangers qui "pourraient nuire à la culture, au gouvernement, aux institutions ou aux principes fondateurs" des Etats-Unis.

Le président américain s'en est récemment pris avec virulence aux Somaliens, disant qu'il "ne voulait pas d'eux chez nous".

En juin, il avait annoncé des interdictions d'entrée sur le territoire américain aux ressortissants de douze pays, principalement en Afrique et au Moyen-Orient (Afghanistan, Birmanie, Tchad, Congo-Brazzaville, Guinée équatoriale, Erythrée, Haïti, Iran, Libye, Somalie, Soudan, Yémen).

En revanche, le Turkménistan, pays qui figure parmi les plus reclus au monde, se voit accorder un satisfécit, la Maison Blanche évoquant mardi des "progrès significatifs" dans cet Etat d'Asie centrale.

Du coup, les ressortissants de ce pays pourront à nouveau obtenir des visas américains, mais uniquement en tant que non-immigrants.

Lors de son premier mandat (2017-2021), Donald Trump s'en était pris de façon similaire à certains pays, ciblant principalement des pays musulmans.


Australie: la communauté juive, bouleversée et en colère, enterre «le Rabbin de Bondi»

Dans un pays considéré depuis longtemps comme un refuge, et qui abrite environ 2.500 survivants de la Shoah, le massacre de dimanche a instillé le doute quant à la politique de Canberra contre l'antisémitisme. (AFP)
Dans un pays considéré depuis longtemps comme un refuge, et qui abrite environ 2.500 survivants de la Shoah, le massacre de dimanche a instillé le doute quant à la politique de Canberra contre l'antisémitisme. (AFP)
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  • Celui qui était connu sous le nom de "Rabbin de Bondi" a été abattu dimanche sur la plage du même nom, lors de l'attentat le plus meurtrier en Australie depuis des décennies
  • Les proches et les membres de la communauté ont laissé échapper des sanglots quand le corbillard transportant le corps de M. Schlanger, 41 ans, est arrivé et que son cercueil, recouvert d'un velours noir orné de l'étoile de David, a été déposé

SYDNEY: Dans une synagogue bondée, emplie de cris et de larmes, la communauté juive de Sydney traumatisée a rendu hommage mercredi au rabbin Eli Schlanger, première victime de l'attentat antisémite de la plage de Bondi a être mise en terre.

Celui qui était connu sous le nom de "Rabbin de Bondi" a été abattu dimanche sur la plage du même nom, lors de l'attentat le plus meurtrier en Australie depuis des décennies.

Les proches et les membres de la communauté ont laissé échapper des sanglots quand le corbillard transportant le corps de M. Schlanger, 41 ans, est arrivé et que son cercueil, recouvert d'un velours noir orné de l'étoile de David, a été déposé.

David Deitz, homme d'affaires de 69 ans, qui connaissait M. Schlanger "depuis très, très longtemps", explique à l'AFP que le rabbin a eu "une influence positive sur beaucoup de gens".

"C'est un choc pour l'Australie de voir un tel événement se produire ici. Ce n'est pas dans la nature des Australiens", poursuit-il.

Une forte présence sécuritaire a été mobilisée lors des obsèques, avec des policiers alignés dans la rue fermée au public.

Dans un pays considéré depuis longtemps comme un refuge, et qui abrite environ 2.500 survivants de la Shoah, le massacre de dimanche a instillé le doute quant à la politique de Canberra contre l'antisémitisme.

En 2021, le nombre de juifs australiens était estimé à 117.000.

"Ils auraient pu nous écouter" 

Jillian Segal, la responsable de la lutte contre l'antisémitisme en Australie, a fustigé cette semaine des préjugés antijuifs "qui s’insinuent dans la société depuis de nombreuses années et contre lesquels nous ne nous sommes pas suffisamment élevés".

Mme Segal a été la première nommée à ce poste après une série d'attaques antisémites à Melbourne et à Sydney, au début de la guerre d'Israël dans la bande de Gaza.

Au cours des 12 mois suivant l’attaque du Hamas en Israel du 7 octobre 2023 qui a déclenché cette guerre, les incidents de nature antisémite en Australie ont augmenté de 316%, dépassant les 2.000, dit-elle.

"Nous devrions pouvoir être qui nous sommes sans avoir peur", a déclaré Brett Ackerman, un analyste de données âgé de 37 ans.

La colère gagne certains membres de la communauté qui estiment que leur cri d'alarme face à la montée de l'antisémitisme depuis le 7-Octobre n'a pas été pris en compte.

"Ils auraient pu nous écouter" se désole M. Ackerman. Pour lui, l'attaque n'était "pas une surprise".

A côté de lui, le rabbin Yossi Friedman acquiesce. "Le message était clair depuis un peu plus de deux ans", soutient-il. "Est-ce que nous nous sentons en sécurité? Pour être honnête, pas vraiment."

"Nous pensions être en sécurité. Nos grands-parents et arrière-grands-parents étaient des survivants de la Shoah, et beaucoup d’entre eux sont venus ici pour échapper à la haine et au sang versé, aux pogroms, à la persécution (...) et c'est ce qu'on retrouve ici", observe-t-il.

"Problème de société"

Le Premier ministre Anthony Albanese a dénoncé l'attaque de Bondi comme un acte terroriste antisémite de "pure méchanceté" perpétré par des hommes inspirés par l’idéologie jihadiste du groupe État islamique.

Mais il a rejeté les critiques selon lesquelles son gouvernement n'avait pas réagi suffisamment à l'appel de Mme Segal.

Le Premier ministre a souligné que son gouvernement avait pénalisé les discours de haine et interdit le salut nazi et les symboles haineux, entre autres.

Depuis la fusillade, M. Albanese mène une initiative conjointe entre le gouvernement central et les Etats d'Australie en faveur d’un contrôle plus strict des armes à feu. L'assaillant le plus âgé possédait six armes dûment enregistrées.

Mais pour l'écrivain Danny Gingef, 66 ans, "la réforme des armes à feu est une diversion totale par rapport au vrai problème, qui est la haine, il faut identifier la haine là où elle commence".

Au départ du cercueil, les spectateurs ont entonné des chants en hébreu. Submergés par l’émotion, certains se sont effondrés dans les bras de leurs proches, à peine capables de tenir debout.

"Je sens que ces dernières années, les Juifs ont été en état d’alerte maximale", dit M. Gingef. Il se sent triste et en colère, et fait référence aux "marches de la haine" où il a vu des manifestants porter des drapeaux du Hezbollah.

Pour lui, il n’y a pas "beaucoup plus que nous puissions faire" sans le soutien des autorités et d’autres groupes.

"L’antisémitisme n’est pas un problème que les Juifs doivent résoudre, c’est un problème de société".

lec-oho/mjw/lgo/alh/pt

 


La BBC va "se défendre" face à la plainte en diffamation à 10 milliards de dollars de Trump

Des personnes empruntent l'entrée des bureaux de la chaîne britannique BBC à Londres en fin d'après-midi, le 11 novembre 2025. (AFP)
Des personnes empruntent l'entrée des bureaux de la chaîne britannique BBC à Londres en fin d'après-midi, le 11 novembre 2025. (AFP)
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  • Donald Trump poursuit la BBC pour diffamation et pratiques trompeuses, réclamant jusqu’à 10 milliards $ après un montage contesté de son discours du 6 janvier 2021
  • L’affaire secoue l’audiovisuel public britannique : démissions à la tête de la BBC, lettre d’excuses envoyée à Trump, et réexamen annoncé de la charte royale

LONDRES: La BBC a assuré mardi qu'elle allait "se défendre" contre la plainte en diffamation du président américain Donald Trump, qui réclame 10 milliards de dollars au groupe audiovisuel public britannique pour un montage vidéo contesté de l'un de ses discours.

La plainte, déposée lundi devant un tribunal fédéral à Miami par le président américain et consultée par l'AFP, demande "des dommages et intérêts d'un montant minimum de 5 milliards de dollars" pour chacun des deux chefs d'accusation: diffamation et violation d'une loi de Floride sur les pratiques commerciales trompeuses et déloyales.

"Ils ont littéralement mis des mots dans ma bouche", s'est plaint le milliardaire de 79 ans, lundi devant la presse.

"Nous allons nous défendre dans cette affaire", a répondu un porte-parole de la BBC mardi matin, sans faire davantage de commentaire sur la procédure.

Le groupe audiovisuel britannique, dont l'audience et la réputation dépassent les frontières du Royaume-Uni, est dans la tourmente depuis des révélations sur son magazine phare d'information "Panorama".

Ce dernier a diffusé, juste avant la présidentielle américaine de 2024, des extraits distincts d'un discours de Donald Trump du 6 janvier 2021, montés de telle façon que le républicain semble appeler explicitement ses partisans à attaquer le Capitole à Washington.

Des centaines de ses partisans, chauffés à blanc par ses accusations sans fondement de fraude électorale, avaient pris d'assaut ce jour-là le sanctuaire de la démocratie américaine, pour tenter d'y empêcher la certification de la victoire de son adversaire démocrate Joe Biden.

"La BBC, autrefois respectée et aujourd'hui discréditée, a diffamé le président Trump en modifiant intentionnellement, malicieusement et de manière trompeuse son discours dans le but flagrant d'interférer dans l'élection présidentielle de 2024", a dénoncé lundi un porte-parole des avocats du républicain contacté par l'AFP.

"La BBC a depuis longtemps l'habitude de tromper son public dans sa couverture du président Trump, au service de son programme politique de gauche", a-t-il ajouté.

- Lettre d'excuses -

Au Royaume-Uni, la controverse a relancé le brûlant débat sur le fonctionnement de l'audiovisuel public et son impartialité, alors que le groupe a déjà été bousculé ces dernières années par plusieurs polémiques et scandales.

L'affaire a poussé à la démission son directeur général Tim Davie et la patronne de BBC News Deborah Turness.

Le président de la BBC Samir Shah a pour sa part envoyé une lettre d'excuses à Donald Trump et la BBC a indiqué "regretter sincèrement la façon dont les images ont été montées" mais contesté "fermement qu'il y ait une base légale pour une plainte en diffamation".

Le groupe audiovisuel a "été très clair sur le fait qu'il n'y a pas matière à répondre à l'accusation de M. Trump en ce qui concerne la diffamation. Je pense qu'il est juste que la BBC reste ferme sur ce point", a soutenu mardi matin le secrétaire d'Etat britannique à la Santé Stephen Kinnock, sur Sky News.

Le gouvernement a également annoncé mardi le début du réexamen de la charte royale de la BBC, un processus qui a lieu tous les dix ans, pour éventuellement faire évoluer sa gouvernance, son financement ou ses obligations envers le public britannique.

La plainte de Donald Trump estime que, malgré ses excuses, la BBC "n'a manifesté ni véritables remords pour ses agissements ni entrepris de réformes institutionnelles significatives afin d'empêcher de futurs abus journalistiques".

Le président américain a lancé ou menacé de lancer des plaintes contre plusieurs groupes de médias aux Etats-Unis, dont certains ont dû verser d'importantes sommes pour mettre fin aux poursuites.

Depuis son retour au pouvoir, il a fait entrer à la Maison Blanche de nombreux créateurs de contenus et influenceurs qui lui sont favorables, tout en multipliant les insultes contre des journalistes issus de médias traditionnels.

L'un de ces nouveaux venus invités par le gouvernement Trump est la chaîne conservatrice britannique GB News, proche du chef du parti anti-immigration Reform UK, Nigel Farage.