D'abord l'eau, puis le pain: à Marioupol, «on ne vit pas, on survit»

Des manifestations contre l'agression et la guerre de la Russie en Ukraine, devant la basilique Saint-Étienne à Budapest le 30 avril 2022 (Photo, AFP).
Des manifestations contre l'agression et la guerre de la Russie en Ukraine, devant la basilique Saint-Étienne à Budapest le 30 avril 2022 (Photo, AFP).
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Publié le Mardi 03 mai 2022

D'abord l'eau, puis le pain: à Marioupol, «on ne vit pas, on survit»

  • Le siège de Marioupol, qui a duré près de deux mois, s'est soldé mi-avril par la prise de contrôle quasi-totale par les forces de Moscou et les séparatistes prorusses
  • Après avoir vécu pendant des semaines dans des abris souterrains ou cloîtrés chez eux, les habitants sont ressortis, pour découvrir leur ville portuaire, autrefois vibrionnante, en ruines

MARIOUPOL: Dans une autre vie pas si lointaine, Inna était coiffeuse. Aujourd'hui, le quotidien de cette habitante de Marioupol, grande ville du sud-est de l'Ukraine récemment prise par les forces russes, se résume à "courir" après l'eau et la nourriture.

"Tu cours pour trouver un point de distribution d'eau. Après, là où ils donnent du pain. Ensuite, il faut faire la queue pour obtenir des rations", explique cette quinquagénaire sportive, deux bidons vides à la main. "Tu cours tout le temps".

Le siège de Marioupol, qui a duré près de deux mois, s'est soldé mi-avril par la prise de contrôle quasi-totale par les forces de Moscou et les séparatistes prorusses.

L'AFP, qui s'y est rendue vendredi dans le cadre d'un voyage organisé par l'armée russe, n'a constaté aucun signe d'affrontement, hormis le grondement étouffé d'explosions provenant régulièrement du complexe métallurgique d'Azovstal, où les dernières forces ukrainiennes sont retranchées.

Après avoir vécu pendant des semaines dans des abris souterrains ou cloîtrés chez eux, les habitants sont ressortis, pour découvrir leur ville portuaire, autrefois vibrionnante, en ruines.

Dans ce quartier de l'est, aucune des barres d'immeubles soviétiques de neuf étages n'est intacte: des façades sont calcinées ou éventrées par les obus, certains bâtiments sont écroulés. Les magasins ont été pillés. Plusieurs sépultures sont visibles sur une allée d'herbe au milieu d'un boulevard.

Pour les rescapés, aux destructions s'ajoutent les pénuries qui ont ramené leur quotidien à l'âge de pierre: pas d'eau, ni d'électricité, de gaz ou de réseau mobile et Internet.

«Partir, mais où ?»

Alors, à la peur des bombardements s'est substituée la quête obsessionnelle d'eau et de nourriture. Ce jour-là, les séparatistes prorusses, nouveaux maîtres de la ville, ont organisé une distribution devant une école aux murs grêlés d'impacts et aux vitres explosées.

Environ 200 personnes se massent derrière un camion militaire où des volontaires leur tendent des colis alimentaires – pâtes, huile, quelques conserves – siglés de la lettre "Z", symbole de soutien à l'offensive russe en Ukraine. Plus loin, deux camions-citernes distribuent de l'eau potable.

Un vieil homme aux yeux rusés repart en poussant un landau brinquebalant rempli à ras bord de bidons et de colis.

Devant des barres d'immeubles voisines, des groupes d'habitants s'agglutinent autour de réchauds improvisés: quatre parpaings encadrant un feu qui dégage une odeur âcre, pour chauffer qui une marmite, qui une grosse théière.

A côté, des vêtements macèrent dans deux grosses barriques bleues, des lave-linges de fortune.

Ici, "on ne vit pas, on survit", résume Irina, une développeuse de jeux vidéo âgée de 30 ans qui flotte dans un sweatshirt gris et porte un sac à dos d'où dépasse la frimousse d'un Yorkshire terrier aux yeux ronds comme des billes.

Dans ces conditions, pourquoi rester ? De nombreux habitants de cette ville qui en comptait quelque 450.000 avant le conflit sont partis via des couloirs humanitaires ces dernières semaines.

"J'aimerais partir. Mais où ?", demande Kristina Bourdiouk, une pharmacienne âgée de 25 ans, en rentrant chez elle avec ses deux fillettes qui tiennent chacune une grosse miche de pain qu'elles serrent précieusement contre elles.

Ailleurs en Ukraine ? "Il n'en reste rien". En Pologne voisine ? "Il y a déjà tellement" d'Ukrainiens là-bas. Quant à la Russie, c'est exclu.

Surtout, elle dit avoir vu des voitures "avec des familles, des enfants" être criblées de balles alors qu'elles tentaient de quitter la ville au début du siège. Elle dit ignorer qui a tiré, mais reste marquée.

Alors, elle préfère rester chez elle, avec son mari, sa mère et sa grand-mère. Et envisage désormais de travailler pour les nouvelles autorités qui, dit-elle, proposent de déblayer les ruines, ramasser les corps ou déminer la ville pour un salaire payé en roubles.

"Aujourd'hui, je suis prête à tout", souffle-t-elle.

Frustration et colère

En l'absence d'Internet et de réseau téléphonique, depuis début mars, Irina, la développeuse, ne peut ni travailler, ni contacter ses proches, notamment sa sœur jumelle qui, aux dernières nouvelles, se trouvait à Kiev.

Ses seules sources d'information sont le petit transistor radio à piles d'un voisin, qui capte une station prorusse, et le bouche-à-oreille qui propage plus de rumeurs que de vraies nouvelles.

Le manque d'informations fiables et l'incertitude engendrent aussi frustration et colère.

En pleine distribution de l'aide alimentaire, un responsable de la nouvelle administration, en treillis et casquette militaire, est apostrophé par une femme. En quelques secondes, un attroupement se forme autour d'eux et les questions fusent.

"Quand va-t-on toucher nos retraites ?" "Quand est-ce que les écoles vont rouvrir ?" "Et les magasins ?"

"Nous faisons de notre mieux", tente de rassurer le responsable en s'épongeant le front. "La priorité est d'assurer la sécurité et de déblayer", insiste-t-il. 

Malgré la présence de nombreux militaires armés, un jeune homme éclate de colère: "On vous a posé des questions concrètes, répondez de façon concrète !"

Sur place, Denis Pouchiline, dirigeant de l'autoproclamée république de Donetsk à laquelle les séparatistes veulent intégrer Marioupol, promet une reconstruction "très bientôt" avec le soutien de Moscou. Et indique que le nombre de civils tués n'est pas connu, car "beaucoup de gens sont sous les décombres".

Les bras lestés d'eau et de nourriture, Irina est prête à rentrer chez elle. Elle veut croire que "le pire est passé" et veut "tenir encore quelques semaines, quelques mois, jusqu'à ce que la situation s'améliore".

Elle n'a qu'une hâte, que les communications soient rétablies pour donner enfin des nouvelles à sa jumelle. "Je veux lui dire: +Je suis vivante. Ta soeur est vivante+".


La CPI rejette un appel d'Israël contestant sa compétence

La CPI, qui siège à La Haye, a émis en novembre 2024 des mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant. (AFP)
La CPI, qui siège à La Haye, a émis en novembre 2024 des mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant. (AFP)
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  • Dans un document de 44 pages publié lundi, les juges ont maintenu leur décision d'enquêter sur des faits survenus dans le territoire palestinien après l'attaque meurtrière du 7 octobre 2023, perpétrée contre Israël par le groupe militant palestinien Hamas
  • Le porte-parole de la diplomatie israélienne Oren Marmorstein a indiqué, dans un message sur X, rejeter la décision, accusant la CPI de "politisation" et de "mépris flagrant des droits souverains des Etats non parties"

LA HAYE: La Cour pénale internationale a rejeté lundi une demande en appel d'Israël qui contestait sa compétence pour enquêter sur des crimes présumés dans la bande de Gaza depuis le début de la guerre contre le Hamas.

La CPI, qui siège à La Haye, a émis en novembre 2024 des mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant.

Ils sont soupçonnés de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité à Gaza. Famine, meurtre et persécution font partie des chefs d'accusation.

Dans un document de 44 pages publié lundi, les juges ont maintenu leur décision d'enquêter sur des faits survenus dans le territoire palestinien après l'attaque meurtrière du 7 octobre 2023, perpétrée contre Israël par le groupe militant palestinien Hamas.

Le porte-parole de la diplomatie israélienne Oren Marmorstein a indiqué, dans un message sur X, rejeter la décision, accusant la CPI de "politisation" et de "mépris flagrant des droits souverains des Etats non parties".

La Cour examine actuellement une autre contestation israélienne de sa compétence, en plus d'une demande de récusation du procureur Karim Khan.

Elle a dit non en juillet à une demande d'Israël de rejet des mandats d'arrêts, ainsi qu'à l'appel de cette décision en octobre.

Créée en 2002, la CPI poursuit des individus accusés des pires atrocités tels que les crimes de guerre, les crimes contre l'humanité et le génocide.

Israël n'adhère pas au traité de Rome ayant institué la CPI, ce qui ne les empêche pas d'introduire des contestations juridiques auprès de la Cour.

La Cour avait déjà statué en 2021 que sa compétence territoriale s'étendait à Gaza.

Les accusations de génocide commis par Israël envers les Palestiniens dans la bande de Gaza se sont multipliées depuis le début de la guerre, le 7 octobre 2023, après l'attaque du Hamas contre Israël ayant coûté la vie à 1.221 personnes côté israélien, principalement des civils, selon un décompte de l'AFP établi à partir de données officielles.

Les représailles israéliennes à Gaza ont depuis fait plus de 70.000 morts, selon les chiffres du ministère de la Santé du territoire palestinien contrôlé par le Hamas, que l'ONU considère comme fiables.

Sous fortes pressions américaines, une trêve fragile est en vigueur depuis le 10 octobre.

 


Un pilote de ligne dit avoir évité une collision avec un avion militaire américain au large du Venezuela

Cette capture d'écran tirée d'une vidéo publiée par la procureure générale américaine Pam Bondi sur son compte X le 10 décembre 2025 montre ce que Mme Bondi décrit comme l'exécution d'un « mandat de saisie d'un pétrolier utilisé pour transporter du pétrole sanctionné provenant du Venezuela et d'Iran » au large des côtes vénézuéliennes le 10 décembre. Photo d'illustration. (AFP)
Cette capture d'écran tirée d'une vidéo publiée par la procureure générale américaine Pam Bondi sur son compte X le 10 décembre 2025 montre ce que Mme Bondi décrit comme l'exécution d'un « mandat de saisie d'un pétrolier utilisé pour transporter du pétrole sanctionné provenant du Venezuela et d'Iran » au large des côtes vénézuéliennes le 10 décembre. Photo d'illustration. (AFP)
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  • Ce signalement intervient sur fond de tensions entre les Etats-Unis et le Venezuela, l'armée américaine ayant mobilisé d'importantes forces aux alentours de la République bolivarienne
  • Le gouvernement américain reproche notamment au président vénézuélien, Nicolas Maduro, réélu en 2024 à l'issue d'un scrutin aux résultats contestés par la communauté internationale, de contrôler un vaste trafic de stupéfiants

NEW YORK: La compagnie américaine JetBlue a annoncé lundi avoir fait état aux autorités d'un incident en vol, l'un de ses pilotes ayant affirmé avoir dû modifier sa trajectoire pour éviter une collision avec un avion ravitailleur de l'armée américaine, au large du Venezuela.

Ce signalement intervient sur fond de tensions entre les Etats-Unis et le Venezuela, l'armée américaine ayant mobilisé d'importantes forces aux alentours de la République bolivarienne.

Le gouvernement américain reproche notamment au président vénézuélien, Nicolas Maduro, réélu en 2024 à l'issue d'un scrutin aux résultats contestés par la communauté internationale, de contrôler un vaste trafic de stupéfiants.

Le dirigeant a toujours réfuté ces allégations, affirmant que Washington s'en servait comme d'un prétexte pour le renverser et mettre la main sur les immenses réserves de pétrole du pays.

Vendredi, l'un des pilotes d'un vol JetBlue assurant la liaison entre l'île caribéenne de Curaçao et New York, a signalé, par radio au contrôle aérien, avoir dû interrompre son ascension après détection d'un avion ravitailleur de l'US Air Force.

Toujours selon le pilote, dont la conversation avec les contrôleurs a été enregistrée et est disponible sur le site LiveATC.net, l'appareil militaire n'avait pas activé son transpondeur, l'émetteur-récepteur qui permet au trafic aérien de le repérer.

"On a failli avoir une collision", explique le pilote. "C'est scandaleux."

"Scandaleux", lui répond le contrôleur aérien. "Vous avez tout à fait raison."

Sollicité par l'AFP, JetBlue a salué l'initiative de l'équipage ayant "rapporté promptement cet incident" à sa hiérarchie, qui en a fait état "aux autorités fédérales". La compagnie américaine "contribuera à toute enquête" sur les circonstances de ce chassé-croisé.

Le commandement militaire américain dédié à cette région, l'US Southern Command, a expliqué à l'AFP "étudier" le dossier, tout en rappelant que "la sécurité (demeurait sa) priorité absolue".

Fin novembre, l'Agence de régulation de l'aviation civile, la FAA, avait demandé aux vols opérant dans la région où se trouve le Venezuela de "faire preuve de prudence".

Elle avait justifié cet avis par "une détérioration des conditions de sécurité et du renforcement de l'activité militaire au Venezuela et dans ses environs".

La FAA avait évoqué des "menaces qui pourraient présenter un risque pour les appareils (commerciaux) à toutes altitudes, que ce soit en vol, à l'atterrissage et au décollage".

 


Le réalisateur hollywoodien Rob Reiner et sa femme retrouvés morts à leur domicile

Le réalisateur américain Rob Reiner et son épouse Michele Singer ont été retrouvés morts à leur domicile dans le sud de la Californie, ont rapporté dimanche les médias américains NBC et CNN. (AFP)
Le réalisateur américain Rob Reiner et son épouse Michele Singer ont été retrouvés morts à leur domicile dans le sud de la Californie, ont rapporté dimanche les médias américains NBC et CNN. (AFP)
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  • D'abord acteur dans des séries télévisées dans les années 1970, Bob Reiner a commencé sa carrière comme réalisateur en 1984 avec le film "Spinal Tap" sur un groupe de rock imaginaire
  • Il restera l'auteur de nombreux films cultes, notamment "Quand Harry rencontre Sally" mais aussi "Stand by me" ou encore "Misery"

LOS ANGELES: Le réalisateur américain Rob Reiner et son épouse Michele Singer ont été retrouvés morts à leur domicile dans le sud de la Californie, ont rapporté dimanche les médias américains NBC et CNN.

La police de Los Angeles a fait état de deux personnes retrouvées mortes dans la maison du réalisateur du film "Quand Harry rencontre Sally", mais n'a pas confirmé publiquement leur identité, lors d’une conférence de presse dimanche soir.

Selon la chaîne NBC, le couple serait mort des suites de coups de couteau.

Rob Reiner était âgé de 78 ans.

D'abord acteur dans des séries télévisées dans les années 1970, Bob Reiner a commencé sa carrière comme réalisateur en 1984 avec le film "Spinal Tap" sur un groupe de rock imaginaire. Il restera l'auteur de nombreux films cultes, notamment "Quand Harry rencontre Sally" mais aussi "Stand by me" ou encore "Misery".

Retrouvant parfois son rôle de comédien, il était apparu récemment dans la série "The Bear".

"C'est avec une profonde tristesse que nous annonçons le décès tragique de Michele et Rob Reiner. Nous sommes bouleversés par cette perte soudaine et nous demandons le respect de notre vie privée en cette période incroyablement difficile", a annoncé la famille du couple dans un communiqué cité par la revue Variety.

"C'est une perte immense pour notre ville et notre pays. L'héritage de Rob Reiner est profondément ancré dans la culture et la société américaines", a déclaré la maire de Los Angeles, Karen Bass sur son compte X.

Elle a salué "son oeuvre créative ainsi que son engagement pour la justice sociale et économique" qui "ont transformé la vie d'innombrables personnes".

"Acteur, réalisateur, producteur, scénariste et militant politique engagé, il a toujours mis ses talents au service des autres", a ajouté Mme Bass.