Dans la Corne de l'Afrique, la sécheresse menace 20 millions de personnes

Près de 40% de la population de la Somalie, soit six millions de personnes, fait face à des niveaux extrêmes d'insécurité alimentaire et certaines zones connaissent probablement déjà la famine (Photo, AFP).
Près de 40% de la population de la Somalie, soit six millions de personnes, fait face à des niveaux extrêmes d'insécurité alimentaire et certaines zones connaissent probablement déjà la famine (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 04 mai 2022

Dans la Corne de l'Afrique, la sécheresse menace 20 millions de personnes

  • Au Kenya, réputé pour ses réserves et parcs naturels, la faune sauvage est aussi menacée
  • Il arrive aussi que les animaux désertent leur zone d'habitat habituel en quête d'eau ou de nourriture

NAIROBI: Du sud de l'Ethiopie au nord du Kenya en passant par la Somalie, la Corne de l'Afrique fait face à une sécheresse qui alarme les organisations humanitaires, avec près de 20 millions de personnes menacées par la faim.

Dans ces régions où la population vit majoritairement d'élevage et d'agriculture, les trois dernières saisons des pluies depuis fin 2020 ont été marquées par de faibles précipitations, venant s'ajouter à une invasion de criquets qui a ravagé les cultures entre 2019 et 2021.

Un mois après le début théorique de la saison des pluies, "le nombre de personnes qui ont faim en raison de la sécheresse pourrait monter en flèche, passant de l'estimation actuelle de 14 millions à 20 millions en 2022", déclarait en avril le Programme alimentaire mondial (PAM).

Près de 40% de la population de la Somalie, soit six millions de personnes, fait face à des niveaux extrêmes d'insécurité alimentaire et certaines zones connaissent probablement déjà la famine, selon l'agence de coordination humanitaire de l'ONU, Ocha.

En Ethiopie, 6,5 millions de personnes font face à une "insécurité alimentaire sévère", de même que 3,5 millions de personnes au Kenya, selon l'agence. 

A travers la région, un million de personnes ont dû quitter leur foyer en raison du manque d'eau et de pâturages, et au moins 3 millions de têtes de bétail ont péri, ajoute Ocha.

"Nous devons agir maintenant (...) si nous voulons prévenir une catastrophe humanitaire", a déclaré de son côté lors d'un briefing à Genève Chimimba David Phiri, le représentant de la FAO auprès de l'Union africaine. 

La situation est aggravée par le conflit en Ukraine, qui a contribué à l'augmentation des prix alimentaires et du carburant et a perturbé les chaînes d'approvisionnement, souligne l'ONU.

Enfants en danger

Selon Catherine Russell, directrice exécutive de l'Unicef, 10 millions d'enfants à Djibouti, en Ethiopie, en Somalie et au Kenya ont besoin d'une assistance vitale.

"Plus de 1,7 million d'enfants sont sévèrement malnourris à travers la région", a-t-elle déclaré dans un communiqué publié après une visite de quatre jours en Ethiopie la semaine dernière.

Selon Mme Russell, le manque d'eau potable augmente le risque de maladies parmi les enfants, tandis que des centaines de milliers d'entre eux ont arrêté l'école, étant forcés de marcher de longues heures pour trouver de l'eau et de la nourriture.   

En 2017, une mobilisation humanitaire précoce avait permis d'éviter une famine en Somalie, contrairement à 2011 où 260 000 personnes - dont la moitié d'enfants de moins de six ans - étaient mortes de faim ou de troubles liés à la faim.

Au-delà des conséquences mortelles directes, la pénurie d'eau et la raréfaction des pâturages sont également sources de conflits, notamment entre bergers.

Au Kenya, réputé pour ses réserves et parcs naturels, la faune sauvage est aussi menacée.

De nombreux cas d'animaux sauvages (girafes, antilopes...), morts faute d'eau et de nourriture, ont été recensés.

Il arrive aussi que les animaux désertent leur zone d'habitat habituel en quête d'eau ou de nourriture.

Dans le centre du pays, des félins s'en sont pris à des troupeaux, des éléphants ou des buffles sont venus paître dans des fermes, suscitant la colère des habitants. 

En Ethiopie, la pire sécheresse «jamais vécue» ravage les vies des nomades somali

GODE: Quasiment pas une goutte de pluie depuis 18 mois. A Hargududo, village de la région Somali en Ethiopie, les habitants montrent à l'AFP les cadavres desséchés de chèvres, vaches ou ânes, éparpillés non loin des modestes huttes aux toits de chaume.     

En ce mois d'avril, théoriquement l'un des plus arrosés de l'année, l'air est brûlant et sec et la terre poussiéreuse et stérile.

Une grande partie des bêtes des quelque 200 familles semi-nomades du village ont péri: "Ceux qui avaient disons 300 chèvres avant la sécheresse n'en ont plus que 50 à 60, chez certains (...) aucune n'a survécu", explique l'un des villageois, Hussein Habil, 52 ans.

Depuis fin 2020, ici, comme dans d'autres régions du sud du pays, en Somalie ou au Kenya voisins, il n'a pratiquement pas plu. En Ethiopie, cette catastrophe humanitaire s'ajoute à celle engendrée dans le nord par le conflit dans la région du Tigré.

Le bureau des Affaires humanitaires de l'ONU (Ocha) estime qu'en Ethiopie, entre 5,5 et 6,5 millions de personnes (soit entre 5 et 6% de la population) sont en grave insécurité alimentaire en raison de la sécheresse.

Selon l'Ocha, la sécheresse actuelle a tué près de 1,5 million de têtes de bétail dans ce pays, dont près des deux tiers en région Somali, "et l'état physique des animaux survivants s'est gravement détérioré, diminuant leur valeur sur le marché".

Aux populations nomades ou semi-nomades de cette région aride et hostile, le bétail procure nourriture et revenus, mais il constitue aussi toutes leurs économies.

"Nous étions de purs nomades avant cette sécheresse: on dépendait des animaux pour la viande, le lait et on les vendait", se souvient Tarik Mohamed, 50 ans, éleveuse d'Hargududo, situé à une cinquantaine de km de Gode, la grande ville de la zone administrative de Shabelle.

"Mais de nos jours, la plupart d'entre nous" se sédentarisent, "il n'y a plus d'avenir dans le pastoralisme, parce qu'il n'y a plus de troupeaux", poursuit-elle amèrement, "notre vie nomade est terminée".

En asséchant les puits et en raréfiant les pâturages, ce que ces éleveurs de la région somali décrivent comme la "pire sécheresse jamais vécue" anéantit le bétail, pivot de leur mode de vie désormais menacé.

Et c'est tout une société qui se délite: des villages qu'il faut quitter pour la ville, des familles qui éclatent, des enfants qui sont négligés parce qu'il faut sauver ce qu'il reste des bêtes, indispensables à la survie.

Dromadaires sans bosse

L'alternance de saisons sèches et de saisons des pluies - la petite en mars-avril, la grande entre juin et août - a toujours rythmé la vie de ces éleveurs.

"Avant cette sécheresse catastrophique, nous survivions en cas de sécheresse grâce aux restes de pâturages laissés par les pluies précédentes", raconte Tarik Muhamad.

Mais aucune des trois dernières saisons des pluies n'a été au rendez-vous. Et la quatrième, attendue depuis mars, semble vouloir faire elle aussi faux bond.

Dans la région, "les sécheresses sont un phénomène cyclique (...) mais elles sont désormais de plus en plus fréquentes", constate Ali Nur Mohamed, 38 ans, un responsable de l'ONG Save the Children.

En Afrique de l'Est, "depuis 2005, la fréquence des sécheresses a doublé, passant de tous les six à tous les trois ans" et "il y a eu plusieurs épisodes de sécheresse prolongée surtout dans les zones arides et semi-arides de la région depuis 30 ans", écrit le Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (Giec) de l'ONU dans son dernier rapport.

Dès 2012, une étude de l'agence américaine d'aide au développement (Usaid) constatait que les régions méridionales de l'Ethiopie recevaient de 15 à 20% de pluies en moins que dans les années 1970. Et que se rétrécissaient les zones recevant les 500 mm annuels de précipitations nécessaires à une agriculture et un élevage viables.

"Désormais, à peine les éleveurs tentent-ils de se remettre d'une sécheresse qu'ils sont touchés par une nouvelle", poursuit Ali Nur Mohamed, les sécheresses "sont si rapprochées que ces éleveurs ne peuvent se relever".

Un sujet qui devrait être au menu de la Convention de l'ONU sur la lutte contre la désertification (UNCCD) qui se réunit à Abidjan du 9 au 20 mai.

Tous les éleveurs rencontrés dans la région disent avoir perdu entre 80% et 100% de leur cheptel. Les quelques troupeaux, vaches ou chèvres, croisés çà et là, sont très amaigris. De nombreux dromadaires ont perdu leur bosse, stock de nourriture.

Cinq jours de marche

Pour se nourrir, de nombreux éleveurs ont rejoint les camps qu'ont fait pousser près des localités ceux déplacés par la sécheresse.

Comme à Adlale, non loin de Gode, où, dans la lumière matinale, émergent de la poussière ocre soulevée par le vent les voiles colorés de dizaines de femmes venues chercher l'aide alimentaire d'urgence distribuée par le Programme alimentaire mondial (PAM).

"Tous nos animaux sont morts à cause de la sécheresse" et "nous avons marché cinq jours pour venir" ici, raconte Habiba Hassan Khadid, 47 ans, mère de dix enfants, qui élevait vaches et chameaux.

Mère de sept enfants, Ahado Jees Hussein, 45 ans, a rejoint Adlale en portant son fils de 15 ans, handicapé, sur son dos. "J'avais 100 chèvres, elles sont toutes mortes (...) Je suis venue sans rien. J'avais trois ânes de bât, mais ils sont tous morts", dit cette veuve qui dit n'avoir "jamais vécu une telle sécheresse".

Avec 2.700 autres familles, les deux femmes vivent au camp de Farburo 2, installé depuis trois mois. Des petites huttes de branches supportent un patchwork de tissus qui procurent une ombre salvatrice dans une température avoisinant les 40°C.

"Les conditions de vie sont alarmantes, la plupart des familles vivent de ce qu'elles reçoivent de proches" ou d'habitants de la localité, explique Ali Mohamed Ali, coordinateur du camp.

Lui aussi est pessimiste: "L'élevage nomade ne peut continuer d'exister avec la récurrence des sécheresses".

«Les puits sont vides»

"Avant la sécheresse", Halima Harbi, mère à 40 ans de neuf enfants, faisait "partie des familles vivant bien", "celles qui avaient assez" pour vivre correctement, dans une région où le luxe est inconnu.

"Désormais nous n'avons plus rien", raconte-t-elle, "j'ai utilisé mon dernier âne pour transporter ma famille ici, mais il (...) est mort en chemin".

"Nous n'avons rien emmené - ni de quoi dormir ni ustensiles de cuisine... - on se contentait de tirer nos enfants".

Dans sa minuscule hutte, Abdi Kabe Adan, solide et fier berger de 50 ans, pleure sans retenue: "Aucun de nos animaux n'a été épargné".

"Avant, de la pluie tombait ailleurs dans la région, alors nous bougions avec nos animaux vers les pâturages arrosés, même si ça prenait plusieurs jours. Mais cette fois-ci la sécheresse est partout" et "les puits sont vides".

"Je ne pense pas possible que notre mode de vie continue. J'ai vu des chèvres manger leurs excréments, des dromadaires manger d'autres dromadaires. Je n'avais jamais vu ça de ma vie", sanglote-t-il.

Il y a peu d'hommes dans le camp. Certains sont restés avec les dernières têtes de bétail, à la recherche d'un pâturage miraculeux. Beaucoup sont partis en quête d'un labeur en ville. D'autres ont fui, incapables d'affronter la honte ou les questions des épouses inquiètes de l'avenir.

Car la sécheresse a aussi abîmé l'organisation sociale de ces communautés.

"Avant les hommes avaient pour tâche de traire les vaches", de conduire les troupeaux aux pâturages, "d'acheter nourriture et biens pour la famille: ces rôles ont disparu avec notre bétail", explique Halima Harbi.

Les familles explosent et la solidarité a cédé la place aux rivalités. "Quand les camions de distribution d'eau arrivent, les vieux et les plus vulnérables ne reçoivent rien car la concurrence est rude", déplore-t-elle.

Malnutrition

Les enfants paient le prix fort: submergés par les problèmes, les parents "n'ont même plus le temps de s'occuper, de veiller sur leur progéniture", explique Ali Nur Mohamed de Save The Children.

"Normalement, une mère prend soin de ses enfants. On comprend la gravité, l'amplitude des problèmes, qui sont telles qu'elles lui font oublier d'emmener son enfant à l'hôpital (...) ou l'en empêchent, parce qu'elle est accaparée par ses autres enfants ou occupée à sauver son cheptel", détaille-t-il.

L'ONG effectue notamment des tournées dans les communautés, y repère les enfants en danger et les transporte vers les structures sanitaires, comme l'hôpital de Gode.

Là, dans l'atmosphère étouffante de la salle de l'unité de nutrition, sur des lits de fer, des mères ventilent avec leur voile - qui chasse aussi les mouches - une dizaine d'enfants très amaigris.

Dans la région, habituellement, "nos enfants sont à la limite de la sous-alimentation, donc à la moindre maladie, ils tombent dans la malnutrition", constate le directeur l'hôpital, le Dr Mahamed Shafi Nur.

L'essentiel des enfants est traité en ambulatoire, grâce à des pâtes nutritives à base d'arachide, prêtes à manger. Ceux qui souffrent de complications - environ 15% - sont hospitalisés.

"Les familles sont désorganisées", parfois "le père est parti loin à la recherche de nourriture" pour le bétail, "la mère se retrouve seule avec de nombreux enfants. Du coup (les enfants) arrivent tard" à l'hôpital "et avec des complications", explique le Dr Mahamad Abdi Omar, pédiatre de l'établissement.

Choix terribles

Samiya, le bébé de Rokiya Adan Mahad, 39 ans, avait la diarrhée et vomissait depuis une semaine quand elle l'a enfin amenée.

Le fils de Falis Hassen souffre du foie et d'aphtes depuis deux mois, qui l'empêchent de téter. "Nous sommes pris par la recherche de pâturages et d'eau pour le bétail", explique cette femme de 38 ans, venue sans prévenir son mari: "Il ne m'aurait pas laissée, il y a tant à faire".

Le fils d'Abdullahi Gorane, les cheveux décolorés par la malnutrition, souffrait de diarrhée et vomissait depuis des semaines.

"Je m'occupais du bétail, je n'avais pas le temps pour mon enfant", dit cet homme de 30 ans - seul père présent - qui s'est décidé quand la sécheresse a eu raison de son troupeau: il a perdu deux de ses cinq dromadaires, 80% de ses chèvres et 100% de ses vaches.

L'absence de contraception et d'espacement des naissances, d'allaitement exclusif, ainsi que des conditions d'hygiène médiocres expliquent la sous-alimentation chronique des enfants, dit Ahmed Nur, agent de santé au centre de soins de Kelafo à une centaine de km de Gode.

Mais la situation a été largement "aggravée" par la sécheresse et "tous les mois, le nombre d'enfants mal-nourris augmente".

Comme Ayan Ibrahim Haroun, les parents sont ainsi parfois confrontés à des choix terribles: soigner son enfant, c'est prendre le risque de perdre son bétail.

Toux, œdèmes sur le corps (un possible symptôme de malnutrition sévère): Sabirin Abdi, sa fille de deux ans, était malade depuis un mois déjà quand cette cultivatrice, qui améliore l'ordinaire avec quelques animaux, s'est résolue à l'amener à Kelafo.

"Nous n'avons pas eu de récolte cette année", explique-t-elle, "j'avais dix chèvres, "quatre sont mortes au cours des 11 jours que j'ai passés à l'hôpital" avec Sabirin.


Gaza: une commission de l'ONU accuse Israël de «génocide»

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  • La commission, qui ne s'exprime pas au nom de l'ONU, est arrivée "à la conclusion qu'un génocide se produi(sai)t à Gaza et continu(ait) de se produire" dans ce territoire palestinien,
  • "La responsabilité incombe à l'État d'Israël", a-t-elle ajouté en présentant un nouveau rapport

GENEVE: Une commission d'enquête internationale indépendante de l'ONU a accusé mardi Israël de commettre un "génocide" à Gaza depuis octobre 2023 avec l'intention de "détruire" les Palestiniens, mettant en cause le Premier ministre et d'autres responsables israéliens.

La commission, qui ne s'exprime pas au nom de l'ONU, est arrivée "à la conclusion qu'un génocide se produi(sai)t à Gaza et continu(ait) de se produire" dans ce territoire palestinien, a déclaré à l'AFP sa présidente, Navi Pillay.

"La responsabilité incombe à l'État d'Israël", a-t-elle ajouté en présentant un nouveau rapport.

Israël a "rejeté catégoriquement" ce "rapport biaisé et mensonger et appelle à la dissolution immédiate" de la commission, a réagi son ministère des Affaires étrangères.

Sa publication intervient près de deux ans après le début de la guerre, déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas le 7 octobre 2023 en Israël. Depuis, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a juré de détruire le mouvement islamiste qui a pris le pouvoir en 2007 à Gaza.

La commission d'enquête a conclu que les autorités et les forces de sécurité israéliennes avaient commis "quatre des cinq actes génocidaires" définis par la Convention de 1948 pour la prévention et la répression du crime du génocide.

A savoir: "meurtre de membres du groupe; atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale de membres du groupe; soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle; et mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe".

Cette commission a conclu que le président israélien, Isaac Herzog, le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, avaient "incité à commettre un génocide et que les autorités israéliennes (n'avaient) pas pris de mesures" pour les en empêcher.

"Intention de détruire" 

"Il est clair qu'il existe une intention de détruire les Palestiniens à Gaza par des actes répondant aux critères énoncés dans la Convention sur le génocide", a relevé dans un communiqué Mme Pillay, qui fut présidente du Tribunal pénal international pour le Rwanda et juge à la Cour pénale internationale (CPI).

Les plus hauts dirigeants israéliens "ont orchestré une campagne génocidaire", a ajouté la Sud-Africaine de 83 ans, ancienne Haute-Commissaire de l'ONU aux droits de l'homme.

La commission n'est pas une instance juridique mais ses rapports peuvent accroître la pression diplomatique et servent à recueillir des preuves que les tribunaux peuvent utiliser.

La commission a conclu un accord de coopération avec la Cour pénale internationale (CPI) avec laquelle "nous avons partagé des milliers d'informations", a expliqué Mme Pillay à l'AFP.

"La communauté internationale ne peut rester silencieuse face à la campagne génocidaire lancée par Israël contre le peuple palestinien à Gaza. Lorsque des signes et des preuves manifestes de génocide apparaissent, l'absence d'action pour y mettre fin équivaut à une complicité", a souligné Mme Pillay.

La campagne de représailles militaires dans le territoire palestinien a fait près de 65.000 morts, selon des données du ministère de la Santé de la bande de Gaza, placé sous l'autorité du Hamas, données jugées fiables par l'ONU.

Depuis le début de la guerre, Israël a été accusé à plusieurs reprises de commettre un génocide à Gaza, par diverses ONG, des experts indépendants de l'ONU, et jusque devant la justice internationale, à l'initiative de l'Afrique du Sud.

Les autorités israéliennes ont toujours vigoureusement rejeté ces accusations.

L'ONU n'a pas qualifié la situation de génocide, mais le chef des opérations humanitaires a exhorté à la mi-mai les dirigeants mondiaux à "agir pour empêcher un génocide".

A La Haye, la Cour internationale de justice (CIJ) avait sommé Israël dès janvier 2024 de prévenir tout acte de génocide. Quatre mois après, le procureur de la CPI avait demandé que des mandats d'arrêt soient délivrés à l'encontre de MM. Netanyahu et Gallant, soupçonnés de crimes contre l'humanité et crimes de guerre.

La CPI est depuis dans le collimateur de Washington qui a pris des mesures contre des magistrats ayant autorisé la Cour à émettre ces mandats d'arrêt, notamment l'interdiction d'entrée sur le sol américain et le gel des avoirs détenus aux États-Unis.


Rubio promet un soutien "indéfectible" à Israël, avant une visite à Doha

Le secrétaire d'État américain Marco Rubio et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu visitent le Mur occidental, le lieu de prière le plus sacré du judaïsme, dans la vieille ville de Jérusalem. (AP)
Le secrétaire d'État américain Marco Rubio et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu visitent le Mur occidental, le lieu de prière le plus sacré du judaïsme, dans la vieille ville de Jérusalem. (AP)
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  • En visite à Jérusalem, le secrétaire d’État Marco Rubio a réaffirmé le soutien « indéfectible » des États-Unis à Israël dans sa guerre contre le Hamas à Gaza
  • Alors que les offensives israéliennes se poursuivent, causant de lourdes pertes civiles à Gaza, les critiques internationales s’intensifient

Jérusalem: Le secrétaire d'Etat Marco Rubio a promis lundi à Jérusalem le "soutien indéfectible" des Etats-Unis à Israël pour éliminer le mouvement islamiste palestinien Hamas à Gaza, à la veille d'un déplacement à Doha.

Durant la visite de M. Rubio, l'armée israélienne a poursuivi son offensive dans la bande de Gaza assiégée et affamée, la Défense civile locale faisant état d'au moins 49 morts, dont des enfants.

Lancée en riposte à une attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre 2023, cette offensive a fait des dizaines de milliers de morts et détruit une grande partie du territoire palestinien, où le mouvement islamiste a pris le pouvoir en 2007.

Le déplacement de M. Rubio a coïncidé avec un sommet arabo-islamique à Doha, quelques jours après une attaque israélienne inédite le 9 septembre au Qatar contre des chefs du Hamas.

"Les habitants de Gaza méritent un avenir meilleur, mais cet avenir meilleur ne pourra commencer que lorsque le Hamas sera éliminé", a déclaré M. Rubio après une rencontre à Jérusalem avec le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu.

"Vous pouvez compter sur notre soutien indéfectible et notre engagement à voir cela se concrétiser", a-t-il ajouté.

M. Rubio se rend mardi au Qatar, en route pour Londres, afin de "réaffirmer le soutien total des Etats-Unis à la sécurité et la souveraineté du Qatar après l'attaque israélienne", selon le département d'Etat.

La frappe aérienne au Qatar, un médiateur entre Israël et le Hamas, a contrarié le président Donald Trump.

"Le Qatar a été un très grand allié. Israël et tous les autres, nous devons faire attention. Quand nous attaquons des gens, nous devons être prudents", a-t-il dit dimanche.

Malgré cette critique, M. Netanyahu a estimé que M. Trump était "le plus grand ami" qu'Israël ait jamais eu à la Maison Blanche.

- "Animaux barbares" -

Au sommet de Doha, l'émir du Qatar, cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, s'en est prix à Israël, l'accusant de "vouloir faire échouer les négociations" en vue d'un cessez-le-feu à Gaza et d'une libération des otages enlevés durant l'attaque du 7-Octobre.

Un communiqué final du sommet a appelé "tous les Etats à revoir les relations diplomatiques et économiques avec Israël", alors que les six monarchies du Golfe ont appelé les Etats-Unis à "user de leur influence" pour contenir Israël.

A Jérusalem, M. Rubio s'est montré pessimiste quant à la possibilité d'une solution "diplomatique" à Gaza, qualifiant le Hamas d'"animaux barbares".

"Même si nous souhaitons vivement qu'il existe un moyen pacifique et diplomatique pour mettre fin (à la guerre) -et nous continuerons à explorer cette voie-, nous devons également nous préparer à la possibilité que cela ne se produise pas", a-t-il dit.

M. Rubio a aussi affiché la solidarité des Etats-Unis avec Israël avant un sommet coprésidé par la France et l'Arabie saoudite le 22 septembre à l'ONU, destiné à promouvoir la reconnaissance d'un Etat de Palestine, au côté d'Israël.

Une initiative largement symbolique dans la mesure où Israël s'oppose fermement à la création d'un tel Etat auquel aspirent les Palestiniens.

Les Etats-Unis sont également hostiles à cette démarche, qui selon M. Rubio, a "enhardi" le Hamas.

En soirée, le secrétaire d'Etat a rencontré à Jérusalem des familles d'otages, selon un responsable du département d'Etat. Sur les 251 personnes enlevées durant l'attaque du 7-Octobre, 47 sont encore retenues à Gaza, dont 25 décédées selon l'armée israélienne.

- "Un corps sans âme" -

Dans le territoire palestinien, la Défense civile a indiqué que plus de la moitié des 49 Palestiniens tués l'avaient été à Gaza-ville, où l'armée a intensifié ses attaques avec l'objectif de s'en emparer.

Compte-tenu des restrictions imposées aux médias à Gaza et des difficultés d'accès sur le terrain, l'AFP n'est pas en mesure de vérifier de manière indépendante les informations des différentes parties.

L'armée israélienne, qui présente Gaza-ville comme l'un des derniers bastions du Hamas dans le territoire palestinien, y a détruit plusieurs tours d'habitation en accusant le Hamas de s'y cacher.

Les Palestiniens continuent de fuir, en grand nombre, la ville et ses environs, qui comptaient un million d'habitants selon l'ONU.

"Je me sens comme un corps sans âme", dit Susan Annan, une Palestinienne qui habitait dans l'une de tours détruites. "Nous avons quitté notre maison avec seulement nos vêtements. Nous n'avons rien pu emporter."

L'attaque du 7-Octobre a entraîné la mort de 1.219 personnes côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP basé sur des données officielles.

Les représailles israéliennes ont fait au moins 64.905 morts à Gaza, selon le ministère de la Santé du territoire. L'ONU y a déclaré la famine, ce que Israël dément.


La flottille pour Gaza quitte la Tunisie, direction le territoire palestinien

Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
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  • Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place
  • Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser"

BIZERTE: Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire.

"Nous essayons d'envoyer un message à la population de Gaza, (de lui dire) que le monde ne l'a pas oubliée", a dit à l'AFP la militante écologiste suédoise Greta Thunberg avant d'embarquer dans le port de Bizerte, dans le nord de la Tunisie.

"Lorsque nos gouvernements ne prennent pas leurs responsabilités, nous n'avons pas d'autre choix que de prendre les choses en main", a-t-elle ajouté.

Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place.

Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser", "nous partons par solidarité, dignité et pour la justice".

Les embarcations arrivées d'Espagne s'étaient transférées à Bizerte après un séjour mouvementé à Sidi Bou Saïd, près de Tunis.

La "Global Sumud Flotilla", accueillie par des rassemblements de soutien, a indiqué que deux de ses bateaux avaient été visés par des attaques de drones deux nuits de suite la semaine passée, publiant des vidéos à l'appui. Après la deuxième annonce, les autorités tunisiennes ont dénoncé "une agression préméditée" et dit mener une enquête.

L'eurodéputée franco-palestinienne Rima Hassan qui, comme Greta Thunberg, avait été détenue à bord du "Madleen" lors d'une précédente traversée vers Gaza, a dit à l'AFP redouter "bien entendu" de nouvelles attaques, ajoutant: "on se prépare aux différents scénarios".

Selon elle, les personnalités les plus en vue - dont l'actrice française Adèle Haenel - ont été réparties entre les deux plus gros bateaux de coordination "de manière à équilibrer et (ne) pas concentrer toutes les personnalités visibles dans un seul et même bateau".

Le départ de Tunisie a été repoussé à plusieurs reprises en raison de motifs de sécurité, de retard dans les préparatifs pour certains bateaux et de la météo.

La Global Sumud Flotilla ("sumud" signifie "résilience" en arabe), qui comprend aussi des embarcations parties ces derniers jours de Corse (France), Sicile (Italie) et Grèce, avait initialement prévu d'atteindre le territoire palestinien à la mi-septembre, après deux tentatives bloquées par Israël en juin et juillet.