Philippines: les victimes de la dictature appréhendent une arrivée au pouvoir du fils de Marcos

Pour Bonifacio Ilagan, le tourbillon de désinformation et la résurgence de Marcos signifient un retour à contrecœur au militantisme (Photo, AFP).
Pour Bonifacio Ilagan, le tourbillon de désinformation et la résurgence de Marcos signifient un retour à contrecœur au militantisme (Photo, AFP).
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Publié le Dimanche 08 mai 2022

Philippines: les victimes de la dictature appréhendent une arrivée au pouvoir du fils de Marcos

  • Ancien prisonnier politique, M. Ilagan, alors président de l'organisation de jeunesse communiste Kabataang Makabayan, a été capturé lors d'un raid en 1974, il a été détenu pendant deux ans dans les geôles de Marcos et torturé à plusieurs reprises
  • Il se souvient aussi de l'enlèvement de sa sœur Rizalina et de son exécution extrajudiciaire présumée par les agents de Marcos

MANILLE: À la veille d'élections du 9 mai qui devraient permettre au fils du dictateur philippin Ferdinand Marcos d'accéder au palais présidentiel, les victimes du régime sont blessées et consternées, mais déterminées à reprendre leur combat. 

"Dans d'autres pays, les dictateurs ont fini dos au mur. Cela n'est jamais arrivé" aux Philippines, a déclaré à l'AFP Bonifacio Ilagan, 70 ans, dans un musée commémoratif de la capitale Manille.  

Ancien prisonnier politique, M. Ilagan, alors président de l'organisation de jeunesse communiste Kabataang Makabayan, a été capturé lors d'un raid en 1974, il a été détenu pendant deux ans dans les geôles de Marcos et torturé à plusieurs reprises.

Il se souvient des coups, des fers chauds qui lui brûlaient la plante des pieds et de la fois où ses geôliers ont essayé de lui enfoncer un bâton dans le pénis pour le forcer à parler. 

Il se souvient aussi de l'enlèvement de sa sœur Rizalina et de son exécution extrajudiciaire présumée par les agents de Marcos. 

Sa dépouille n'a jamais été retrouvée.

«Qu'est-on est devenus?»

Au cours de ses deux décennies au pouvoir, les forces de sécurité de Ferdinand Marcos ont tué, torturé, abusé sexuellement, mutilé ou détenu arbitrairement environ 70 000 opposants, estime Amnesty International.

Selon les estimations officielles, Marcos père, sa flamboyante épouse Imelda et leurs soutiens ont volé environ 10 milliards de dollars dans les caisses de l'État.

La fête a finalement pris fin en 1986 lorsqu'ils ont été chassés par la révolution "People Power" et envoyés en exil. 

C'est après la mort du dictateur en exil à Hawaï aux Etats-Unis en 1989 que le clan Marcos est rentré aux Philippines, entamant son retour en politique. 

"Qu'est-on est devenus?", s'interroge M. Ilagan, pour qui la renaissance des Marcos aujourd'hui est aussi douloureuse qu'insondable. 

"Notre culture, notre psyché a été pervertie, au point que beaucoup d'entre nous ne voient pas la réalité, même face aux faits."

Après l'éviction du régime, les procès pour fraude fiscale et corruption ont traîné durant plusieurs décennies, et aucun membre de la famille n'a jamais été emprisonné.

Les efforts pour récupérer les biens de l'État pillés sont incomplets, laissant à la famille un vaste trésor de guerre pour restaurer ses réseaux d'allégeance. 

Aujourd'hui, Imelda est en liberté sous caution pour une condamnation de 2018 concernant des fonds détournés et vit librement à Manille, la dépouille de son mari a été déplacée au cimetière des héros nationaux et plusieurs membres de la famille occupent des fonctions politiques. 

A leur retour, "ils ont été accueillis comme si rien ne s'était passé", a déclaré Judy Taguiwalo, une autre militante anti-Marcos qui a été arrêtée et torturée à deux reprises. 

Mme Taguiwalo estime que l'impunité qui a suivi la révolution et l'incapacité des gouvernements successifs de l'après-Marcos à améliorer la vie des Philippins ont constitué un terrain fertile pour une réécriture de l'histoire. 

"Il ne suffit pas de changer la personne qui se trouve dans le palais présidentiel. L'important est d'avoir des changements substantiels pour la majorité du peuple", regrette-t-elle.

«Histoires inventées»

La campagne électorale actuelle a été soutenue par une vaste campagne de désinformation sur les réseaux sociaux présentant la dictature comme un "âge d'or" de paix et de croissance économique, qui a convaincu des millions de personnes, notamment une population trop jeunes pour avoir connu le régime.

"L'époque où son père était président était une ère très fructueuse", explique à l'AFP Alma Lisa Ecat, 20 ans, qui vote pour la première fois. 

"Les Philippines étaient au sommet, pas comme aujourd'hui", dit-elle, ajoutant que les cas bien documentés d'exécutions extrajudiciaires, de torture et de disparitions étaient, au minimum, exagérés. 

"Je pense que ces histoires sont inventées par certaines personnes qui n'aiment pas les Marcos", a-t-elle affirmé.

La réticence de Ferdinand Marcos junior à admettre l'histoire controversée de sa famille laisse craindre qu'il ne la répète. 

"Marcos junior n'a pas reconnu publiquement les crimes de son père et le rôle de sa famille comme bénéficiaire directe de ces crimes", a déclaré Cristina Palabay, secrétaire générale du groupe de défense des droits de l'homme Karapatan. 

Sa campagne a diffusé "d'innombrables mensonges historiques" sur ce qui s'est passé aux Philippines entre 1965 et 1986, a-t-elle affirmé. 

Pour Bonifacio Ilagan, le tourbillon de désinformation et la résurgence de Marcos signifient un retour à contrecœur au militantisme. 

"Je pense qu'il n'y a pas d'autre voie pour moi. J'ai passé les meilleures années de ma vie dans ce mouvement pour une transformation significative de notre société." 

"Je ne peux pas revenir en arrière, ne serait-ce que pour la mémoire de ma sœur, en mémoire de mes amis qui ont sacrifié leur vie."


Attentat de Sydney: le Premier ministre australien rend visite au «héros» de la plage de Bondi

Le Premier ministre australien Anthony Albanese a rendu visite mardi à l'hôpital au "héros" de la plage de Bondi, Ahmed al Ahmed, qui a interrompu la fusillade la plus meurtrière que le pays ait connu depuis des décennies. (AFP)
Le Premier ministre australien Anthony Albanese a rendu visite mardi à l'hôpital au "héros" de la plage de Bondi, Ahmed al Ahmed, qui a interrompu la fusillade la plus meurtrière que le pays ait connu depuis des décennies. (AFP)
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  • Des images montrent Ahmed al Ahmed, un vendeur de fruits, se glisser entre des voitures garées pendant la fusillade, avant d'arracher son fusil à l'un des assaillants
  • Il a rapidement été salué en "héros" par les dirigeants australiens et étrangers, d'Anthony Albanese à Donald Trump

SYDNEY: Le Premier ministre australien Anthony Albanese a rendu visite mardi à l'hôpital au "héros" de la plage de Bondi, Ahmed al Ahmed, qui a interrompu la fusillade la plus meurtrière que le pays ait connu depuis des décennies.

Dimanche soir, alors qu'une foule était rassemblée sur cette plage de Sydney pour la fête juive de Hanouka, un père et son fils ont ouvert le feu pendant une dizaine de minutes, tuant 15 personnes et en blessant 42 autres.

Des images montrent Ahmed al Ahmed, un vendeur de fruits, se glisser entre des voitures garées pendant la fusillade, avant d'arracher son fusil à l'un des assaillants. Il a rapidement été salué en "héros" par les dirigeants australiens et étrangers, d'Anthony Albanese à Donald Trump.

"Il allait s'acheter un café et s’est retrouvé face à des gens qui se faisaient tirer dessus", raconte M. Albanese après une visite au chevet de M. Ahmed.

"Il a décidé d'agir, et son courage est une source d’inspiration pour tous les Australiens."

L'homme a été touché plusieurs fois à l'épaule après s'être battu avec l'un des assaillants. M. Albanese rapporte qu'il devra "subir une nouvelle intervention chirurgicale" mercredi.

"Au moment où nous avons été témoins d'actes maléfiques, il brille comme un exemple de la force de l'humanité", a salué le Premier ministre. "Nous sommes un pays courageux. Ahmed al Ahmed incarne ce que notre pays a de meilleur."

Alité, des tubes dans le nez, M. Ahmed a brièvement remercié en arabe les personnes le soutenant, dans une vidéo qui circule sur les réseaux sociaux mardi matin.

"J'apprécie les efforts de chacun (...). Puisse Allah vous récompenser et vous accorder le bien être", a-t-il déclaré, selon une traduction (en anglais) fournie par la chaîne publique turque TRT World.

Ce père de deux enfants, originaire de Syrie, vit en Australie depuis plus de 10 ans, selon les médias locaux.

Sa mère a déclaré lundi au média australien ABC qu'elle n'avait cessé de "culpabiliser et de pleurer" lorsqu'elle a reçu l'appel lui annonçant que son fils avait été blessé par balle dans "un accident". "Nous prions pour que Dieu le sauve", dit-elle.

Une collecte de fonds en ligne a récolté plus de 1,9 million de dollars australiens (1,1 million d'euros) de dons pour couvrir les frais médicaux de M. Ahmed.


La CPI rejette un appel d'Israël contestant sa compétence

La CPI, qui siège à La Haye, a émis en novembre 2024 des mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant. (AFP)
La CPI, qui siège à La Haye, a émis en novembre 2024 des mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant. (AFP)
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  • Dans un document de 44 pages publié lundi, les juges ont maintenu leur décision d'enquêter sur des faits survenus dans le territoire palestinien après l'attaque meurtrière du 7 octobre 2023, perpétrée contre Israël par le groupe militant palestinien Hamas
  • Le porte-parole de la diplomatie israélienne Oren Marmorstein a indiqué, dans un message sur X, rejeter la décision, accusant la CPI de "politisation" et de "mépris flagrant des droits souverains des Etats non parties"

LA HAYE: La Cour pénale internationale a rejeté lundi une demande en appel d'Israël qui contestait sa compétence pour enquêter sur des crimes présumés dans la bande de Gaza depuis le début de la guerre contre le Hamas.

La CPI, qui siège à La Haye, a émis en novembre 2024 des mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant.

Ils sont soupçonnés de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité à Gaza. Famine, meurtre et persécution font partie des chefs d'accusation.

Dans un document de 44 pages publié lundi, les juges ont maintenu leur décision d'enquêter sur des faits survenus dans le territoire palestinien après l'attaque meurtrière du 7 octobre 2023, perpétrée contre Israël par le groupe militant palestinien Hamas.

Le porte-parole de la diplomatie israélienne Oren Marmorstein a indiqué, dans un message sur X, rejeter la décision, accusant la CPI de "politisation" et de "mépris flagrant des droits souverains des Etats non parties".

La Cour examine actuellement une autre contestation israélienne de sa compétence, en plus d'une demande de récusation du procureur Karim Khan.

Elle a dit non en juillet à une demande d'Israël de rejet des mandats d'arrêts, ainsi qu'à l'appel de cette décision en octobre.

Créée en 2002, la CPI poursuit des individus accusés des pires atrocités tels que les crimes de guerre, les crimes contre l'humanité et le génocide.

Israël n'adhère pas au traité de Rome ayant institué la CPI, ce qui ne les empêche pas d'introduire des contestations juridiques auprès de la Cour.

La Cour avait déjà statué en 2021 que sa compétence territoriale s'étendait à Gaza.

Les accusations de génocide commis par Israël envers les Palestiniens dans la bande de Gaza se sont multipliées depuis le début de la guerre, le 7 octobre 2023, après l'attaque du Hamas contre Israël ayant coûté la vie à 1.221 personnes côté israélien, principalement des civils, selon un décompte de l'AFP établi à partir de données officielles.

Les représailles israéliennes à Gaza ont depuis fait plus de 70.000 morts, selon les chiffres du ministère de la Santé du territoire palestinien contrôlé par le Hamas, que l'ONU considère comme fiables.

Sous fortes pressions américaines, une trêve fragile est en vigueur depuis le 10 octobre.

 


Un pilote de ligne dit avoir évité une collision avec un avion militaire américain au large du Venezuela

Cette capture d'écran tirée d'une vidéo publiée par la procureure générale américaine Pam Bondi sur son compte X le 10 décembre 2025 montre ce que Mme Bondi décrit comme l'exécution d'un « mandat de saisie d'un pétrolier utilisé pour transporter du pétrole sanctionné provenant du Venezuela et d'Iran » au large des côtes vénézuéliennes le 10 décembre. Photo d'illustration. (AFP)
Cette capture d'écran tirée d'une vidéo publiée par la procureure générale américaine Pam Bondi sur son compte X le 10 décembre 2025 montre ce que Mme Bondi décrit comme l'exécution d'un « mandat de saisie d'un pétrolier utilisé pour transporter du pétrole sanctionné provenant du Venezuela et d'Iran » au large des côtes vénézuéliennes le 10 décembre. Photo d'illustration. (AFP)
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  • Ce signalement intervient sur fond de tensions entre les Etats-Unis et le Venezuela, l'armée américaine ayant mobilisé d'importantes forces aux alentours de la République bolivarienne
  • Le gouvernement américain reproche notamment au président vénézuélien, Nicolas Maduro, réélu en 2024 à l'issue d'un scrutin aux résultats contestés par la communauté internationale, de contrôler un vaste trafic de stupéfiants

NEW YORK: La compagnie américaine JetBlue a annoncé lundi avoir fait état aux autorités d'un incident en vol, l'un de ses pilotes ayant affirmé avoir dû modifier sa trajectoire pour éviter une collision avec un avion ravitailleur de l'armée américaine, au large du Venezuela.

Ce signalement intervient sur fond de tensions entre les Etats-Unis et le Venezuela, l'armée américaine ayant mobilisé d'importantes forces aux alentours de la République bolivarienne.

Le gouvernement américain reproche notamment au président vénézuélien, Nicolas Maduro, réélu en 2024 à l'issue d'un scrutin aux résultats contestés par la communauté internationale, de contrôler un vaste trafic de stupéfiants.

Le dirigeant a toujours réfuté ces allégations, affirmant que Washington s'en servait comme d'un prétexte pour le renverser et mettre la main sur les immenses réserves de pétrole du pays.

Vendredi, l'un des pilotes d'un vol JetBlue assurant la liaison entre l'île caribéenne de Curaçao et New York, a signalé, par radio au contrôle aérien, avoir dû interrompre son ascension après détection d'un avion ravitailleur de l'US Air Force.

Toujours selon le pilote, dont la conversation avec les contrôleurs a été enregistrée et est disponible sur le site LiveATC.net, l'appareil militaire n'avait pas activé son transpondeur, l'émetteur-récepteur qui permet au trafic aérien de le repérer.

"On a failli avoir une collision", explique le pilote. "C'est scandaleux."

"Scandaleux", lui répond le contrôleur aérien. "Vous avez tout à fait raison."

Sollicité par l'AFP, JetBlue a salué l'initiative de l'équipage ayant "rapporté promptement cet incident" à sa hiérarchie, qui en a fait état "aux autorités fédérales". La compagnie américaine "contribuera à toute enquête" sur les circonstances de ce chassé-croisé.

Le commandement militaire américain dédié à cette région, l'US Southern Command, a expliqué à l'AFP "étudier" le dossier, tout en rappelant que "la sécurité (demeurait sa) priorité absolue".

Fin novembre, l'Agence de régulation de l'aviation civile, la FAA, avait demandé aux vols opérant dans la région où se trouve le Venezuela de "faire preuve de prudence".

Elle avait justifié cet avis par "une détérioration des conditions de sécurité et du renforcement de l'activité militaire au Venezuela et dans ses environs".

La FAA avait évoqué des "menaces qui pourraient présenter un risque pour les appareils (commerciaux) à toutes altitudes, que ce soit en vol, à l'atterrissage et au décollage".