La menace russe s'éloigne de Kharkiv, affirme l'Ukraine

Un membre des Forces de défense territoriale ukrainiennes se tient devant un bâtiment détruit du Musée commémoratif littéraire national Hryhoriy Skovoroda dans le village de Skovorodynivka, dans la région de Kharkiv, le 7 mai 2022 (Photo, AFP).
Un membre des Forces de défense territoriale ukrainiennes se tient devant un bâtiment détruit du Musée commémoratif littéraire national Hryhoriy Skovoroda dans le village de Skovorodynivka, dans la région de Kharkiv, le 7 mai 2022 (Photo, AFP).
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Publié le Mercredi 11 mai 2022

La menace russe s'éloigne de Kharkiv, affirme l'Ukraine

  • «Nos forces armées nous ont donné à tous de bonnes nouvelles de la région de Kharkiv»
  • Cela semble aussi confirmer la tendance qui a émergé sur le front est

KIEV: L'étau russe se desserre sur Kharkiv, la deuxième ville de l'Ukraine située dans l'est et qui était pilonnée depuis fin février, ont affirmé les autorités ukrainiennes dans la nuit de mardi à mercredi, alors que le conflit pourrait s'étendre vers le sud-ouest selon Washington.

"Nos forces armées nous ont donné à tous de bonnes nouvelles de la région de Kharkiv. Les occupants sont progressivement repoussés de Kharkiv", a dit le président Volodymyr Zelensky dans une vidéo. "Je suis reconnaissant à tous nos combattants qui tiennent bon et font preuve d'une force surhumaine pour chasser l'armée d'envahisseurs".

"Les localités de Cherkasy Tychky, Rusky Tychky, Roubijné et Bayrak ont été libérées" dans la région de cette grande ville, a précisé l'état-major ukrainien sur Facebook. "Ainsi, l'ennemi a été repoussé encore plus loin de Kharkiv, et les occupants ont eu encore moins de possibilités de frapper le centre régional".

Mais "l'intensité des bombardements dans le district de Kharkiv a augmenté", a-t-il aussi relevé. De plus, selon Oleg Snegoubov, chef de l'administration régionale de Kharkiv s'exprimant sur Telegram, "en se retirant, les occupants russes laissent derrière eux des pièges mortels", des mines.

Les quartiers nord et nord-est de Kharkiv, qui comptait environ 1,5 million d'habitants avant la guerre, sont depuis des semaines frappés par des roquettes russes, causant la mort de civils. Fin février, les Russes ont voulu prendre la ville, en vain: les forces ukrainiennes ont résisté et les ont repoussés à quelques kilomètres de là, au prix d'âpres combats.

L'Institut américain d'étude de la guerre (ISW) avait noté en fin de semaine dernière que, dans cette partie orientale du pays, l'armée ukrainienne "fait des progrès significatifs et avancera probablement jusqu'à la frontière russe dans les jours ou semaines à venir".

Cela semble aussi confirmer la tendance qui a émergé sur le front est au cours de ce troisième mois de l'invasion russe: d'un côté, les unités ukrainiennes contre-attaquent et progressent à l'est de Kharkiv, de l'autre, les Russes grignotent petit à petit du terrain à environ 150 km au sud-est de l'avancée ukrainienne, en direction de la partie du Donbass qui n'est pas encore sous contrôle russe ou séparatiste prorusse.

Quid de la Transdniestrie ?

La "deuxième phase" de "l'opération militaire spéciale" annoncée par Moscou vise une emprise totale sur le Donbass, et les combats sont particulièrement intenses dans la région de Lougansk.

Mais l'attention se porte désormais également sur le sud-ouest du pays. Le président russe Vladimir Poutine veut "étendre" le conflit jusqu'à la Transdniestrie, région de Moldavie qui a fait sécession en 1990, a déclaré mardi la cheffe du renseignement américain, Avril Haines.

Le 22 avril, un général russe, Roustam Minnekaïev, avait d'ailleurs fait valoir que "le contrôle du sud de l'Ukraine, c'est également un couloir vers la Transdniestrie, où on observe également des cas d'oppression de la population russophone". Or, la défense des russophones est l'une des justifications par Moscou de la guerre actuelle.

Outre la Crimée annexée en 2014, les troupes russes occupent une grande partie du sud de l'Ukraine, notamment la capitale régionale de Kherson.

Selon le commandement ukrainien pour le sud, les troupes russes sont en train de frapper "sans merci" la région de Mykolaïv, qui représente l'ultime verrou avant Odessa, à l'ouest. "Des maisons privées, des installations agricoles ont été endommagées et l'alimentation en électricité de l'une des localités a été interrompue", a-t-il affirmé dans la nuit de mardi à mercredi.

Odessa, centre culturel majeur tant pour les Ukrainiens que pour les Russes, a été sporadiquement frappée par des missiles russes depuis le début du conflit. Cette ville portuaire russophone avait reçu lundi la visite surprise du président du Conseil européen, Charles Michel.

Dans les environs d'Odessa, "la pression psychologique se poursuit sur la population voisine de la Transdniestrie" avec "le possible blocage de la région en raison de la mise hors service du pont du Dniestr, qui a de nouveau été attaqué par des missiles", a aussi avancé le commandement ukrainien pour le sud.

Fin avril et début mai, des explosions avaient secoué la Transdniestrie, où stationnent des troupes russes depuis une trentaine d'années.

La Russie s'était aussitôt dite "alarmée" par ces "actes terroristes", indiquant suivre la situation de près. De son côté, l'Union européenne a annoncé le 4 mai qu'elle allait "considérablement accroître" son aide militaire à la Moldavie. Ce petit pays, non membre de l'Otan, a également reçu le soutien fin avril de Paris et Berlin.

Vote sur l'aide militaire américaine 

Dans le sud-est, les forces russes ont encore pilonné l'aciérie Azovstal, à Marioupol, où se terrent toujours des dizaines d'Ukrainiens, soldats et civils. "Des dizaines de frappes", "chaque heure", a écrit sur Telegram Petro Andriouchtchenko, adjoint au maire de cette ville portuaire prise par les Russes et presque entièrement détruite.

La cheffe du renseignement américain a par ailleurs dit que M. Poutine compte sur un essoufflement du soutien occidental à l'Ukraine et se prépare à "un conflit prolongé", pour lequel il va "probablement" imposer la loi martiale en Russie. Ce qui pourrait conduire à une "trajectoire plus imprévisible et potentiellement une escalade" dans les prochains mois, selon Mme Haines.

A Kiev, vidée de la majorité de ses résidents au début de l'invasion russe, près des deux tiers des 3,5 millions d'habitants de la capitale sont revenus, a indiqué mardi le maire Vitali Klitschko.

Dans la soirée, il a annoncé le décès à l'âge de 88 ans du premier président de l'Ukraine indépendante, Léonid Kravtchouk (1990-1994). Cet ancien apparatchik était revenu sur la scène politique en 2020 en devenant, à la demande du président Zelensky, un des négociateurs ukrainiens dans les pourparlers avec la Russie portant sur le conflit du Donbass.

Du côté de l'aide américaine à l'Ukraine, la Chambre des représentants a adopté mardi soir une enveloppe faramineuse de près de 40 milliards de dollars, suivant Joe Biden dans son soutien indéfectible à Kiev. Le texte voté par des élus des deux camps comprend un volet économique et humanitaire, mais aussi des armes et des munitions. Il doit désormais être voté au Sénat, en fin de semaine ou en début de semaine prochaine, avant d'être promulgué par le président américain.

Concernant les sanctions contre la Russie, les négociations se poursuivent sur le projet d'embargo de l'UE sur le pétrole russe, actuellement bloqué par la Hongrie. Un accord est possible "dans la semaine", a assuré mardi le secrétaire d'Etat français aux Affaires européennes, Clément Beaune.

Le Premier ministre italien Mario Draghi, dont le pays est très dépendant au gaz russe mais livre des armes à l'Ukraine, a rencontré mardi Joe Biden à la Maison Blanche. Le premier a appelé de ses voeux "une Union européenne forte (...) dans l'intérêt des Etats-Unis", le président américain louant "un bon ami et un grand allié".


Washington cible l'Autorité palestinienne, en plein débat sur la reconnaissance d'un Etat de Palestine

Le président de l'Autorité palestinienne Mahmud Abbas. (File/AFP)
Le président de l'Autorité palestinienne Mahmud Abbas. (File/AFP)
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  • Les Etats-Unis ont annoncé jeudi des sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), en pleine offensive en faveur d'un Etat de Palestine

WASHINGTON: Les Etats-Unis ont annoncé jeudi des sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), en pleine offensive en faveur d'un Etat de Palestine.

L'annonce des sanctions américaines survient en effet au moment où de nombreux Etats, dont la France et le Canada, ont promis de reconnaître un Etat de Palestine en marge de l'Assemblée générale de l'ONU en septembre, provoquant la colère d'Israël et des Etats-Unis qui parlent d'une "récompense" faite au Hamas dans la bande de Gaza.

La France et l'Arabie saoudite ont co-présidé lundi et mardi à l'ONU une conférence internationale, plaidant ainsi pour la solution à deux Etats, israélien et palestinien, seul chemin pour parvenir à la paix au Proche-Orient.

Washington, qui rejette toute reconnaissance unilatérale d'un Etat palestinien, a décrit la conférence comme étant une "insulte" faite aux victimes de l'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023.

Dans un communiqué jeudi, le département d'Etat américain a fait part de sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'OLP, sans les identifier, accusés notamment d'"internationaliser le conflit avec Israël".

Washington reproche aux deux institutions de "soutenir des actions au sein d'organisations internationales qui sapent et contredisent les engagements antérieurs" notamment à travers la Cour internationale de justice (CIJ) et la Cour pénale internationale (CPI).

Washington avait sanctionné en juin quatre magistrates de la CPI, estimant que leurs procédures visant l'exécutif israélien étaient "illégitimes" et "politisées".

Washington, principal allié d'Israël, accuse aussi l'OLP et l'Autorité palestinienne de "continuer à soutenir le terrorisme, y compris par l'incitation et la glorification de la violence" dans les livres scolaires, une accusation de longue date.

Les sanctions consistent en un refus de visa pour des membres des deux institutions.

- "Distorsion morale" -

"Il est dans l'intérêt de notre sécurité nationale d'imposer des sanctions et de tenir l'OLP et l'Autorité palestinienne responsables du non-respect de leurs engagements et de la remise en cause des perspectives de paix", a indiqué le département d'Etat.

Le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar, s'est aussitôt félicité de cette décision, jugeant que "l'Autorité palestinienne doit payer le prix de sa politique actuelle consistant à verser des indemnités aux terroristes et à leurs familles pour les attentats commis et pour l'incitation à la haine contre Israël dans les écoles, les manuels scolaires, les mosquées et les médias palestiniens".

Il a également relevé, sur X, que cette mesure "met en évidence la distorsion morale de certains pays qui se sont empressés de reconnaître un Etat palestinien virtuel tout en fermant les yeux sur le soutien de l'Autorité palestinienne au terrorisme et à l'incitation à la haine".

L'Autorité palestinienne, dont le président est Mahmoud Abbas, administre la Cisjordanie occupée, tandis que l'OLP, créée en 1964, est le mouvement fondateur représentant les Palestiniens, longtemps dirigée par leur leader historique Yasser Arafat.

L'OLP rassemble la majorité des mouvements politiques palestiniens mais pas le mouvement islamiste Hamas, qui s'est emparé du pouvoir à Gaza en 2007.

Des pays arabes et occidentaux voudraient voir l'Autorité palestinienne, très affaiblie, jouer un rôle dans la gouvernance de la bande de Gaza après la guerre qui y fait rage depuis octobre 2023.

Depuis son retour au pouvoir en janvier, le président Donald Trump, qui a accueilli le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu par trois fois à la Maison Blanche, plus qu'aucun autre dirigeant étranger, a apporté un soutien inconditionnel à Israël, tout en oeuvrant sans succès pour un cessez-le-feu à Gaza.

Mais il s'est montré peu disert sur l'Autorité palestinienne, décriée pour le manque de réformes et la corruption.

Parmi ses premiers décrets, le président Trump avait levé des sanctions imposées sous son prédécesseur Joe Biden visant des colons israéliens extrémistes en Cisjordanie, en proie à une recrudescence des violences.


L'envoyé de Trump rencontre Netanyahu, Israël face à des critiques accrues

L'envoyé du président américain Donald Trump pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, rencontre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu jeudi. (GPO)
L'envoyé du président américain Donald Trump pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, rencontre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu jeudi. (GPO)
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  • L'émissaire américain Steve Witkoff a discuté jeudi à Jérusalem avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu de la guerre à Gaza, à l'heure où de nombreux pays ont dit envisager de reconnaître un Etat palestinien au grand dam d'Israël
  • Les morts tombés sous les tirs et bombardements israéliens se comptent par dizaines chaque jour dans le territoire palestinien assiégé par Israël

Jérusalem, Non défini: L'émissaire américain Steve Witkoff a discuté jeudi à Jérusalem avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu de la guerre à Gaza, à l'heure où de nombreux pays ont dit envisager de reconnaître un Etat palestinien au grand dam d'Israël.

Après 22 mois d'une guerre dévastatrice déclenchée par une attaque du Hamas sur le sol israélien le 7 octobre 2023, la bande de Gaza est menacée d'une "famine généralisée" selon l'ONU et est totalement dépendante de l'aide humanitaire distribuée par camions ou larguée depuis les airs.

Les morts tombés sous les tirs et bombardements israéliens se comptent par dizaines chaque jour dans le territoire palestinien assiégé par Israël, selon la Défense civile locale qui a fait état de 38 Palestiniens tués jeudi.

Plusieurs dizaines de corps gisaient empilés à la morgue de l'hôpital al-Chifa dans le nord de Gaza, dans l'attente d'être collectés par leurs proches, a constaté un correspondant de l'AFP.

"Le moyen le plus rapide de mettre fin à la crise humanitaire à Gaza est que le Hamas CAPITULE ET LIBÈRE LES OTAGES !!!", a déclaré le président américain Donald Trump sur X.

Rien n'a filtré de la rencontre entre MM. Witkoff et Netanyahu mais en début de semaine, M. Trump a semblé se distancer de son allié israélien en évoquant une "vraie famine" à Gaza.

Avant l'arrivée jeudi de l'émissaire de M. Trump, des dizaines de mères et proches d'otages encore aux mains du Hamas ont manifesté devant le bureau du Premier ministre à Jérusalem, exigeant un "accord global" qui garantirait la libération des 49 otages encore détenus à Gaza, dont 27 ont été déclarés morts par l'armée.

- "Position minoritaire" -

L'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023 a entraîné du côté israélien la mort de 1.219 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de données officielles.

En riposte, Israël a juré de détruire le Hamas et lancé une offensive dévastatrice à Gaza qui a fait au moins 60.249 morts, en majorité des civils, d'après les données du ministère de la Santé à Gaza jugées fiables par l'ONU. La campagne aérienne et terrestre a dévasté le territoire et provoqué un désastre humanitaire.

Le chef de la diplomatie allemande Johann Wadephul a lui rencontré à Jérusalem son homologue israélien Gideon Saar, avant de rencontrer M. Netanyahu.

Avant de décoller pour Israël, M. Wadephul a estimé qu'Israël était "de plus en plus en position minoritaire", alors qu'un "nombre croissant de pays, y compris européens, sont prêts à reconnaître un Etat palestinien sans processus de négociation préalable".

Ces visites interviennent après la multiplication des alertes d'organisations internationales sur une famine à Gaza et l'échec de négociations indirectes, sous médiation américaine, qatarie et égyptienne, entre Israël et le Hamas en vue d'un cessez-le-feu.

Le gouvernement israélien a annoncé dimanche une pause limitée dans l'offensive afin de permettre l'acheminement de l'aide dans le petit territoire pauvre où s'entassent plus de deux millions de Palestiniens.

Mais ces aides sont jugées insuffisantes par les organisations internationales face aux besoins immenses de la population.

- "Pression déformée"

Le Portugal a indiqué jeudi envisager de reconnaître l'Etat de Palestine, après que plusieurs pays dont le Canada, la France et le Royaume-Uni ont annoncé leur intention de faire de même en marge de l'Assemblée générale de l'ONU en septembre.

Une telle reconnaissance reste néanmoins largement symbolique en raison du refus d'Israël de la création d'un tel Etat auquel aspirent les Palestiniens.

Dans ce contexte, Israël a dénoncé une "campagne de pression internationale déformée" venant "récompenser le Hamas et nuire aux efforts visant à obtenir un cessez-le-feu à Gaza".

Les Etats-Unis, qui ont dénoncé les annonces sur la reconnaissance d'un Etat palestinien, ont imposé des sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), accusant les deux organismes d'avoir pris des mesures pour "internationaliser leur conflit avec Israël" et de "continuer à soutenir le terrorisme".

Le gouvernement Netanyahu, qui veut chasser le Hamas de Gaza et a annoncé son intention de contrôler le territoire, semble peiner à trancher sur une solution politique d'après-guerre.

Dans ce contexte, la frange la plus radicale de sa coalition gouvernementale plaide pour un retour des colonies à Gaza, évacuées en 2005 avec le retrait unilatéral israélien du territoire après 38 ans d'occupation.

L'armée israélienne a par ailleurs annoncé le retrait du nord de Gaza de sa 98e Division, composée d'unités parachutistes et de commandos d'élite, qui a "se prépare désormais à de nouvelles missions".


Une experte de l’ONU : « La famine imposée à Gaza est une atteinte grave à la dignité humaine »

Des Palestiniens se rassemblent pour recevoir de la nourriture d'une cuisine caritative dans la ville de Gaza, le 28 juillet 2025. (Reuters)
Des Palestiniens se rassemblent pour recevoir de la nourriture d'une cuisine caritative dans la ville de Gaza, le 28 juillet 2025. (Reuters)
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  • Alice Jill Edwards dénonce une privation prolongée de nourriture entraînant malnutrition, défaillances d’organes et décès, notamment chez les nourrissons et femmes enceintes
  • « Des règles changeantes, une distribution militarisée et l’incertitude permanente sur l’accès aux besoins de base provoquent désespoir, stress et traumatismes », alerte-t-elle

NEW YORK: La rapporteuse spéciale de l’ONU sur la torture, Alice Jill Edwards, a exprimé mercredi sa vive inquiétude face à l’augmentation du nombre de décès liés à la famine parmi les Palestiniens de Gaza.

Elle a qualifié la famine infligée aux civils de « meurtrière, inhumaine et dégradante », appelant à une aide humanitaire rapide et sans entrave vers l’enclave dévastée.

« Priver des gens de nourriture, d’eau et de dignité constitue une violation grave et répétée dans ce conflit. Cela doit cesser », a-t-elle déclaré, citant des rapports « choquants » de civils tués en faisant la queue pour se nourrir, et des cas généralisés de faim et de malnutrition.

Elle a alerté sur un risque croissant de famine généralisée à Gaza, soulignant que toutes les parties au conflit ont des obligations juridiques, au regard du droit international, d’assurer un accès à l’eau et à la nourriture pour les civils sous leur contrôle, et de faciliter l’aide humanitaire.

« Ils ne doivent ni voler, ni détourner, ni bloquer délibérément l’acheminement de l’aide », a-t-elle averti.

Elle a décrit les « conséquences physiologiques catastrophiques » de la privation prolongée de calories : malnutrition, défaillance d’organes et décès, touchant particulièrement les groupes vulnérables comme les nourrissons et les femmes enceintes.

« L’impact psychologique d’un tel déni est d’une cruauté intrinsèque », a-t-elle poursuivi.

« Des règles constamment changeantes, des distributions militarisées, et une incertitude quotidienne sur l’accès aux besoins fondamentaux plongent les gens dans un désespoir et une détresse extrêmes. »

Elle a salué l’annonce par Israël de pauses humanitaires permettant au Programme alimentaire mondial d’opérer pendant trois mois, tout en soulignant que « davantage doit être fait » pour mettre fin aux hostilités et établir une paix durable fondée sur la solution à deux États.

« Personne ne devrait subir l’humiliation de devoir mendier pour se nourrir, surtout quand des stocks suffisants sont disponibles », a-t-elle déclaré.

Edwards a également renouvelé son appel à la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages, à la libération des Palestiniens détenus arbitrairement, et à la mise en place d’enquêtes indépendantes sur les allégations de torture, de mauvais traitements et d’éventuels crimes de guerre, de la part de toutes les parties.

Elle a indiqué avoir exprimé ses préoccupations à plusieurs reprises aux autorités concernées et continuer de réclamer une pleine reddition de comptes.

Les rapporteurs spéciaux font partie des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme de l’ONU. Ils sont indépendants, ne sont pas membres du personnel des Nations unies et travaillent bénévolement.