Macron donne sa feuille de route au gouvernement Borne, s'en remet à la justice sur le cas Abad

«Le gouvernement que vous constituez est avant toute chose (...) un gouvernement pour agir», a lancé le chef de l'Etat. (AFP)
«Le gouvernement que vous constituez est avant toute chose (...) un gouvernement pour agir», a lancé le chef de l'Etat. (AFP)
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Publié le Lundi 23 mai 2022

Macron donne sa feuille de route au gouvernement Borne, s'en remet à la justice sur le cas Abad

  • Le nouveau ministre de l'Education nationale, l'universitaire Pap Ndiaye, a franchi le perron d'un pas lent et posé, en souriant
  • Seule véritable surprise du nouvel exécutif, sa nomination a suscité un tombereau de réactions furieuses à l'extrême droite qui l'accuse de «vouloir déconstruire le pays»

PARIS: "Agir" pour "rassembler le pays" face à des "défis inédits": Emmmanuel Macron a donné sa feuille de route au gouvernement d'Elisabeth Borne lundi lors du premier Conseil des ministres de son nouveau quinquennat, laissant à la justice le soin de "trancher" le cas de Damien Abad, qui fait face à des accusations de viols.


"Le gouvernement que vous constituez est avant toute chose (...) un gouvernement pour agir", a lancé le chef de l'Etat en pointant "un contexte inédit" avec la crise de Covid-19, "dont nous sortons à peine si tant est qu'elle soit totalement terminée", le "retour de la guerre en Europe" et des "défis inédits" pour la société française.


"Agir donc rassembler notre pays, (avec) un gouvernement qui lui ressemble", a-t-il dit dans son début de prise de parole, exceptionnellement retransmis, en saluant des ministres venus du monde politique comme de la société civile.


Un "gouvernement tout à la fois de continuité, de nouveautés", a-t-il assuré avec, assise à sa gauche, la nouvelle ministre des Affaires étrangères Catherine Colonna, diplomate de carrière et ex-porte-parole de Jacques Chirac à l'Elysée, et à sa droite Bruno Le Maire, reconduit à l'Economie et aux Finances et désormais numéro deux du gouvernement.


Il s'agit de "tout à la fois de consolider ce qui a été fait durant les cinq années qui viennent de s'écouler, car un deuxième mandat n'est pas un mandat pour refaire ou défaire" et de "bâtir une action nouvelle sur le fond et sur la forme", a-t-il martelé.


Le chef de l'Etat a aussi eu un mot aimable pour les nouveaux venus, selon une source gouvernementale, au moment où toute l'attention se focalise sur Damien Abad, principale prise de guerre de la Macronie post-présidentielle et dans la tourmente depuis trois jours. 


Nommé ministre des Solidarités, de l'Autonomie et des Personnes handicapées, l'ex-patron des députés LR, lui-même handicapé, fait face à de graves accusations de viols concernant deux femmes en 2010 et en 2011 dans un article publié samedi par Mediapart, ce qu'il nie "avec la plus grande force".


Alors que les appels à sa démission se multiplient dans l'opposition, l'exécutif s'est refusé à céder à la pression. 

Abad, «un comportement qui devrait vous écarter d'un poste» de ministre, selon Marine Le Pen

Marine Le Pen a estimé lundi à propos de Damien Abad, nommé ministre et accusé de viols, que "le simple fait d'avoir de manière récurrente un comportement inapproprié avec les femmes devrait vous écarter d'un poste, en l'occurrence de ministre".

"Ca en dit long sur le comportement du président de la République (qui) ne peut pas résister à faire un bon coup (...) même (avec) un profil dont il savait qu'il pouvait poser problème", a ajouté la finaliste d'extrême droite à la présidentielle, lors d'une conférence de presse à Marseille sur les législatives.

"Comme il n'a pas le souhait de démissionner du poste (...) c'est à d'autres que lui de décider", a-t-elle ajouté.

 

"La justice est la seule à devoir ou à pouvoir trancher", a déclaré la nouvelle porte-parole du gouvernement, Olivia Grégoire.


La ligne du président et de la Première ministre reste la "tolérance zéro pour les délinquants sexuels", a-t-elle cependant insisté, en encourageant toutes "les femmes qui ont subi des violences à se présenter à la justice".


Deux plaintes ont déjà été classées mais la justice dit analyser un nouveau signalement de l'Observatoire des violences sexistes et sexuelles en politique.

«Aller vite»


Le secrétaire national du PS Olivier Faure a invité lundi la Première ministre à se séparer de Damien Abad car "la parole des femmes doit être respectée". 


"Elisabeth Borne devrait lui dire qu'il n'a pas sa place", a renchéri l'écologiste Sandrine Rousseau, candidate de la Nouvelle union populaire écologiste et sociale (Nupes) aux législatives.


La Première ministre a assuré de son côté ne "pas avoir été au courant" de ces affaires lors de la composition de son gouvernement. Des responsables de la République en marche (LREM) alertés par l'Observatoire affirment de leur côté ne pas avoir pris connaissance des emails qui leur avaient été adressés.


L'équipe d'Elisabeth Borne fait son entrée sur scène à moins de trois semaines des législatives des 12 et 19 juin. Son sort est donc suspendu à l'issue du scrutin qui définira la nouvelle majorité. La moitié des membres du gouvernement (14 sur 28) sont en lice et devront quitter le gouvernement s'ils sont battus.


Période de réserve électorale oblige, les membres du gouvernement sont en outre contraints à partir de lundi à une grande parcimonie dans leurs prises de parole.


Le premier projet de loi du gouvernement Borne, qui porte sur la défense du pouvoir d'achat, "priorité du quotidien" des Français et "urgence" gouvernementale, sera présenté avant les législatives des 12 et du 19 juin, a précisé Olivia Grégoire. 


"Il faut aller vite, donc nous allons aller vite", a-t-elle dit, en rappelant dans les grandes lignes les mesures prévues pour contenir les prix de l'énergie et des denrées alimentaires ainsi que la revalorisation à venir des prestations sociales.


Ecole, santé et transition écologique sont aussi au sommet des priorités gouvernementales. La délicate réforme des retraites n'a en revanche pas été abordée lors de ce premier conseil des ministres. 


Macron fustige les «bourgeois des centres-villes» qui financent «parfois» le narcotrafic

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  • Emmanuel Macron a également insisté sur "la nécessité d'avoir une approche interministérielle du très local à l'international"
  • La question est au centre du débat public depuis l'assassinat jeudi à Marseille de Mehdi Kessaci, le frère d'un militant engagé contre le narcotrafic

PARIS: Le président Emmanuel Macron a estimé mercredi lors du Conseil des ministres que ce sont "parfois les bourgeois des centres-villes qui financent les narcotrafiquants", selon des propos rapportés par la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon lors de son compte-rendu.

Le chef de l'État a appuyé "l'importance d'une politique de prévention et de sensibilisation puisque, je reprends ses mots, +c'est parfois les bourgeois des centres-villes qui financent les narcotrafiquants+", a précisé Maud Bregeon, ajoutant: "on ne peut pas déplorer d'un côté les morts et de l'autre continuer à consommer le soir en rentrant du travail".

Emmanuel Macron a également insisté sur "la nécessité d'avoir une approche interministérielle du très local à l'international". La question est au centre du débat public depuis l'assassinat jeudi à Marseille de Mehdi Kessaci, le frère d'un militant engagé contre le narcotrafic.

 


Amiante dans les écoles: plus de 50 personnes et sept syndicats portent plainte à Marseille

Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire. (AFP)
Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire. (AFP)
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  • "La grande majorité des établissements scolaires en France, construits avant son interdiction en 1997, présentent encore à ce jour de l’amiante dans de nombreux éléments du bâti", rappelle dans un communiqué l'avocate Julie Andreu
  • Or, la vétusté de certains d'entre eux aggrave l'exposition à l'amiante et selon l'avocate, "les responsables concernés (collectivités locales) n’ont pas pris les mesures qui s’imposent"

MARSEILLE: Ils sont parents d'élèves, enseignants, agents municipaux: une cinquantaine de personnes, toutes exposées à l'amiante dans des écoles des Bouches-du-Rhône, vont déposer mercredi à Marseille une plainte contre X pour "mise en danger délibérée de la vie d'autrui".

Sept syndicats et trois associations de victimes de l'amiante sont aussi plaignants dans ce dossier, qui concerne 12 établissements scolaires, la plupart à Marseille.

"La grande majorité des établissements scolaires en France, construits avant son interdiction en 1997, présentent encore à ce jour de l’amiante dans de nombreux éléments du bâti", rappelle dans un communiqué l'avocate Julie Andreu, qui représente ces plaignants d'une douzaine d'établissements scolaires et dont la plainte va être déposée à 14h.

Or, la vétusté de certains d'entre eux aggrave l'exposition à l'amiante et selon l'avocate, "les responsables concernés (collectivités locales) n’ont pas pris les mesures qui s’imposent".

Classée cancérogène, l'amiante présente des risques pour la santé principalement par inhalation, lorsque les poussières pénètrent le système respiratoire.

"Une collègue est décédée en avril 2024 des suites d’un cancer lié à l’amiante, reconnu comme maladie professionnelle", a expliqué dans un dossier de presse le collectif stop amiante éducation, dans lequel sont réunis les syndicats et associations plaignants.

Le collectif dénonce "de nombreuses défaillances", notamment une absence d'information sur l'amiante, malgré les obligations réglementaires, ou encore une absence de protection pendant les travaux.

En mars, les syndicats enseignants avaient révélé que plus de 80% des bâtiments scolaires en France étaient potentiellement concernés par la présence d'amiante.

Un rapport du Haut Conseil de la Santé Publique publié en 2014, prévoit que d’ici 2050, 50.000 à 75.000 décès par cancer du poumon dus à l’amiante aient lieu, auxquels s’ajoutent jusqu'à 25.000 décès par mésothéliome (un autre type de cancer).

 


Assassinat de Mehdi Kessaci: «Non, je ne me tairai pas» face au narcotrafic, dit son frère dans une tribune au Monde

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  • "Je dirai et répéterai que mon frère Mehdi est mort pour rien. Je dirai la violence du narcotrafic"
  • "On me parle de crime d’avertissement. Mais un crime n'est jamais un avertissement"

PARIS: "Non, je ne me tairai pas" face au narcotrafic, a déclaré mercredi dans une tribune publiée dans le journal Le Monde Amine Kessaci, le frère de Mehdi, abattu jeudi à Marseille par deux personnes à moto.

"Je dirai et répéterai que mon frère Mehdi est mort pour rien. Je dirai la violence du narcotrafic", a également écrit le militant écologiste de 22 ans, engagé dans la lutte contre le narcobanditisme. En 2020, cette famille de six enfants avait déjà été endeuillée par l'assassinat d'un autre de ses frères, Brahim, 22 ans, dont le corps avait été retrouvé carbonisé dans un véhicule.

"On me parle de crime d’avertissement. Mais un crime n'est jamais un avertissement", a encore déclaré Amine Kessaci, qui a enterré mardi son frère Mehdi. "Voici ce que font les trafiquants : ils tentent d’annihiler toute résistance, de briser toute volonté, de tuer dans l’œuf tout embryon de révolte pour étendre leur pouvoir sur nos vies", a-t-il ajouté.

La protection policière qui lui a été accordée ne l'a pas été à ses proches, a souligné le militant écologiste de 22 ans. "Pourtant, qui ignorait que ma famille avait déjà payé un tribut de sang? Comment ne pas savoir que ma famille pouvait être touchée ?", s'est-il interrogé.

"Face à un tel ennemi, l’Etat doit prendre la mesure de ce qu'il se passe et comprendre qu'une lutte à mort est engagée", a-t-il encore prévenu.

"Il est temps d’agir, par exemple de faire revenir les services publics dans les quartiers, de lutter contre l’échec scolaire qui fournit aux trafiquants une main-d’œuvre soumise, de doter les enquêteurs et les forces de police des moyens dont ils ont besoin, de renforcer, de soutenir réellement les familles de victimes du narcotrafic. Nous comptons nos morts, mais que fait l’Etat ?"

Medhi Kessaci, 20 ans, a été assassiné jeudi à Marseille près d'une salle de concert par deux hommes à moto, activement recherchées, un "crime d'intimidation" et "un assassinat d'avertissement" pour les autorités.