Antiquités pillées: un commerce illicite devenu massif depuis les Printemps arabes

Des visiteurs font la queue devant la Pyramide pour entrer au musée du Louvre, à Paris le 29 avril 2022 (Photo, AFP).
Des visiteurs font la queue devant la Pyramide pour entrer au musée du Louvre, à Paris le 29 avril 2022 (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 02 juin 2022

Antiquités pillées: un commerce illicite devenu massif depuis les Printemps arabes

  • Le sujet a fait les gros titres dans le monde entier ces derniers jours après la révélation d'une enquête sur un important trafic d'antiquités
  • Le Louvre Abu Dhabi et le musée de Louvre ont annoncé lundi se constituer partie civile dans cette affaire

PARIS: L'enquête sur un vaste trafic d'antiquités pillées au Proche et au Moyen-Orient, impliquant un ancien président du musée du Louvre, lève le voile sur ce commerce illicite devenu "massif", accru depuis les Printemps arabes, selon des spécialistes interrogés par l'AFP.

Au coeur de ce trafic: des objets pillés sur des sites archéologiques dont des nécropoles, "véritables supermarchés à ciel ouvert" dans "des pays en guerre ou instables politiquement" comme la Syrie, l'Irak ou l'Egypte, mais "aussi en Amérique latine et en Afrique", dit à l'AFP Vincent Michel, professeur d'archéologie de l'Orient à l'université de Poitiers.

Cet expert dans la lutte contre le trafic illicite des biens culturels décrit une "chaîne sophistiquée": depuis les pays sources, via des pays de transit (Asie, pays du Golfe, Israël et Liban) vers des pays de destination (mondes anglo-saxon et européen mais aussi de plus en plus Russie, Japon, Chine ou pays du Golfe) qui abritent les acheteurs et nombre de musées ou projets de musées.

"Ce trafic, né des fouilles clandestines et aggravé par la paupérisation, croît depuis les Printemps arabes de 2011", souligne le spécialiste, qui intervient régulièrement à l'Unesco. "On ne peut plus le minimiser".

Le sujet a fait les gros titres dans le monde entier ces derniers jours après la révélation d'une enquête sur un important trafic d'antiquités, dans laquelle Jean-Luc Martinez, un ex-président du plus grand musée du monde, le Louvre, a été mis en examen.

Le Louvre Abu Dhabi et le musée de Louvre ont annoncé lundi se constituer partie civile dans cette affaire.

Fouilles clandestines en hausse

"Impossible à chiffrer" précisément, le trafic mondial d'antiquités porterait sur "des dizaines voire des centaines de millions" d'euros.

"Le marché de l'art légal a un chiffre d'affaires de près de 63 milliards de dollars annuel et les trafiquants se disent qu'il y a de l'argent à se faire", souligne M. Michel, qui forme les services spécialisés de police, de justice et des douanes.

Ce commerce illicite "alimente la petite délinquance comme le grand banditisme", met-il en garde.

"Connecté aux trafics de stupéfiants et d'armes, il s'inscrit dans une criminalité organisée polymorphe de blanchiment de capitaux", qui "sert les mafias, narcotrafiquants et groupes terroristes".

En Egypte, où circulent aussi quantité de faux, on est passé de 1.500 fouilles clandestines par an à 8.960 en 2020, indique l'expert.

Les oeuvres pillées sont en parfait état de conservation en raison du climat aride, comme au Mexique, relève-t-il. Les pilleurs ont notamment recours à des détecteurs de métaux, pour cibler en priorité l'or, l'argent et le bronze.

Selon Xavier Delestre, conservateur régional de l'archéologie à la Direction régionale des affaires culturelles de Provence-Alpes-Côte d'Azur, où "le pillage des sites archéologiques locaux s'est aggravé", les services de l'Etat sont aussi confrontés à "un trafic de biens culturels en provenance de l'étranger", d'Afrique et d'Amérique latine notamment.

Il s'agit, dit-il, "d'oeuvres d'art de très haute valeur marchande qui vont échouer dans les ports francs [sites de stockage où les oeuvres transitent sans être taxées] et réapparaître avec une fausse histoire, puis être réintégrées dans le marché licite; ou d'objets de moindre valeur circulant en masse à partir des réseaux sociaux vers des sites de vente en ligne".

Atteinte «irréversible» au patrimoine  

Les faussaires sont d'une "ingéniosité incroyable pour blanchir les objets pillés en mélangeant les informations fausses et vraies, inventant des pedigrees, fabriquant de faux documents d'exportation ou factures d'achat, afin de masquer l'origine illicite", précise M. Michel.

Une fois réintroduit dans le marché légal, "un objet pillé est presque indétectable".

Cette "criminalité transnationale nourrit une économie de prédation qui intéresse notre sécurité nationale. C'est aussi une atteinte au patrimoine irréversible car un objet pillé, sorti de son contexte, perd toute valeur scientifique", déplore-t-il.

Internet a aggravé le phénomène en raison de "l'anonymat", de "la multiplication des sites de vente", des "innombrables moyens de blanchiment" et de la "faculté d'adaptation" des trafiquants, selon les deux experts.


Israël: des élus favorables à une loi instaurant la peine de mort pour les «terroristes»

 La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir. (AFP)
La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir. (AFP)
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  • Selon le médiateur israélien chargé des otages, Gal Hirsch, le Premier ministre Benjamin Netanyahu soutient cette initiative
  • La commission a approuvé un amendement au Code pénal, qui sera maintenant transmis au Parlement pour un vote en première lecture, une loi étant instaurée en Israël après une vote en troisième lecture

JERUSALEM: La commission de Sécurité nationale de la Knesset a voté lundi en faveur d'une proposition de loi instaurant la peine de mort pour les auteurs d'attaques jugées "terroristes", une mesure soutenue par le ministre israélien de la Sécurité nationale d'extrême droite Itamar Ben Gvir.

La commission a approuvé un amendement au Code pénal, qui sera maintenant transmis au Parlement pour un vote en première lecture, une loi étant instaurée en Israël après une vote en troisième lecture.

Selon le médiateur israélien chargé des otages, Gal Hirsch, le Premier ministre Benjamin Netanyahu soutient cette initiative.

Dans une note explicative de la commission, il est indiqué que "son objectif est de couper le terrorisme à sa racine et de créer une forte dissuasion".

Le texte propose qu'un "terroriste reconnu coupable de meurtre motivé par le racisme ou la haine (...) soit condamné à la peine de mort - de manière obligatoire", ajoutant que cette peine serait "non optionnelle".

La proposition de loi a été présentée par une élue du parti Otzma Yehudit (Force Juive) d'Itamar Ben Gvir.

Ce dernier a menacé de cesser de voter avec la coalition de droite de Benjamin Netanyahu si ce projet de loi n'était pas soumis à un vote parlementaire d'ici le 9 novembre.

"Tout terroriste qui se prépare à commettre un meurtre doit savoir qu'il n'y a qu'une seule punition: la peine de mort", a dit le ministre lundi dans un communiqué.

M. Ben Gvir avait publié vendredi une vidéo de lui-même debout devant une rangée de prisonniers palestiniens allongés face contre terre, les mains attachées dans le dos, dans laquelle il a appelé à la peine de mort.

Dans un communiqué, le Hamas a réagi lundi soir en affirmant que l'initiative de la commission "incarne le visage fasciste hideux de l'occupation sioniste illégitime et constitue une violation flagrante du droit international".

"Nous appelons les Nations unies, la communauté internationale et les organisations pertinentes des droits de l'Homme et humanitaires à prendre des mesures immédiates pour arrêter ce crime brutal", a ajouté le mouvement islamiste palestinien.

Le ministère palestinien des Affaires étrangères et des expatriés, basé à Ramallah, a également dénoncé cette décision, la qualifiant de "nouvelle forme d'extrémisme israélien croissant et de criminalité contre le peuple palestinien".

"C'est une étape dangereuse visant à poursuivre le génocide et le nettoyage ethnique sous le couvert de la légitimité", a ajouté le ministère.


Frappes israéliennes sur le sud du Liban: deux morts 

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah. (AFP)
Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah. (AFP)
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  • Selon un bilan provisoire, "une frappe ennemie d'Israël" dans la région de Nabatiyé a fait lundi "un mort et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé
  • Un drone a visé une voiture à Doueir, a rapporté l'agence nationale d'information Ani

BEYROUTH: Des frappes israéliennes sur le sud du Liban ont tué lundi deux personnes et blessé sept autres, a indiqué le ministère libanais de la Santé, au lendemain de la menace d'Israël d'intensifier ses attaques contre le Hezbollah pro-iranien.

Malgré un cessez-le-feu conclu en novembre 2024, Israël continue de mener des attaques régulières contre les bastions du Hezbollah. Et le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a accusé dimanche le Hezbollah de tenter de se "réarmer".

Selon un bilan provisoire, "une frappe ennemie d'Israël" dans la région de Nabatiyé a fait lundi "un mort et sept blessés, a indiqué le ministère de la Santé.

Un drone a visé une voiture à Doueir, a rapporté l'agence nationale d'information Ani.

Sur place, un photographe de l'AFP a vu des pompiers tenter d'éteindre l'incendie de la voiture visée qui s'est propagé à d'autres véhicules à proximité. Des ouvriers ramassaient les bris de verre des devantures de commerces endommagées, a-t-il également constaté.

Une autre frappe sur un village de la région de Bint Jbeil a fait un mort, selon le ministère de la Santé.

Samedi, l'armée israélienne a tué quatre personnes, visées de plein fouet dans leur voiture dans le sud, qu'elle a présentées comme des membres de la force d'élite du Hezbollah.

Des centaines de personnes ont participé à leurs funérailles dimanche dans la ville de Nabatiyé, scandant "Mort à Israël".

Le Hezbollah a été fortement affaibli par la guerre, avec notamment l'assassinat de son chef historique, Hassan Nasrallah, par une frappe israélienne en septembre 2024 à Beyrouth, mais il demeure financièrement résilient et armé.

Les États-Unis ont accru la pression sur les autorités libanaises pour désarmer le groupe, ce que le Hezbollah refuse.

"Nous attendons du gouvernement libanais qu'il fasse ce qu'il s'est engagé à faire, c'est-à-dire désarmer le Hezbollah, mais il est clair que nous exercerons notre droit à l'autodéfense comme convenu dans les termes du cessez-le-feu", avait averti le Premier ministre israélien dimanche.


La Turquie mobilise ses partenaires musulmans autour de Gaza

La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien. (AFP)
La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien. (AFP)
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  • Devant le Comité permanent pour la coopération économique de l'OCI, réuni lundi à Istanbul, le président turc Recep Tayyip Erdogan a critiqué l'attitude "très médiocre" d'Israël
  • "Nous devons apporter davantage d'aide humanitaire aux habitants de Gaza, puis commencer les efforts de reconstruction" a poursuivi le chef de l'Etat en appelant la Ligue arabe et l'OCI à jouer "un rôle moteur" en ce sens

ISTANBUL: La Turquie réunit lundi à Istanbul les ministres des Affaires étrangères de sept pays musulmans pour tenter de peser sur l'avenir de Gaza en les mobilisant sur la reconstruction du territoire palestinien.

Les ministres de ces sept pays (Turquie, Arabie saoudite, Qatar, Emirats arabes unis, Jordanie, Pakistan et Indonésie), tous membres de l'organisation de la coopération islamique (OCI), avaient été reçus par Donald Trump fin septembre à New York en marge de l'Assemblée générale de l'ONU, avant la présentation du plan de paix américain six jours plus tard.

Devant le Comité permanent pour la coopération économique de l'OCI, réuni lundi à Istanbul, le président turc Recep Tayyip Erdogan a critiqué l'attitude "très médiocre" d'Israël depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu le 10 octobre, alors que "le Hamas semble déterminé" à respecter l'accord, estime-t-il.

"Nous devons apporter davantage d'aide humanitaire aux habitants de Gaza, puis commencer les efforts de reconstruction" a poursuivi le chef de l'Etat en appelant la Ligue arabe et l'OCI à jouer "un rôle moteur" en ce sens.

En amont de cette réunion, le chef de la diplomatie turque Hakan Fidan a reçu samedi une délégation du bureau politique du Hamas emmenée par Khalil al-Hayya, le négociateur en chef du mouvement islamiste palestinien.

Selon des responsables du ministère des Affaires étrangères, M. Fidan doit appeler à la mise en place de mécanismes permettant aux Palestiniens d'assurer la sécurité et la gouvernance de Gaza.

"Agir avec prudence" 

"Nous devons mettre fin au massacre à Gaza. Un cessez-le-feu à lui seul ne suffit pas", a insisté M. Fidan lors d'un forum à Istanbul.

"Nous devons reconnaître que Gaza doit être gouvernée par les Palestiniens et agir avec prudence", a encore souligné le ministre turc, plaidant de nouveau pour une solution à deux Etats.

Le chef de la diplomatie turque accuse Israël de chercher des prétextes pour rompre le cessez-le-feu.

Mais les efforts d'Ankara, qui multiplie les contacts diplomatiques avec les pays de la région et cherche à infléchir la position pro-israélienne des Etats-Unis, sont vus d'un mauvais œil par Israël qui juge Ankara trop proche du Hamas.

Les dirigeants israéliens ont exprimé à plusieurs reprises leur refus de voir la Turquie participer à la force internationale de stabilisation à Gaza.

En vertu du plan de Donald Trump, sur lequel est basé l'accord de cessez-le-feu, cette force de stabilisation, formée principalement de troupes de pays arabes et musulmans, doit se déployer à Gaza à mesure que l'armée israélienne s'en retirera.

Seuls des pays jugés "impartiaux" pourront rejoindre cette force, a cependant prévenu le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar.

Autre signe de la méfiance du gouvernement israélien : une équipe de secouristes turcs dépêchée pour participer à la recherche de corps, y compris israéliens, dans les ruines de Gaza, attendait toujours en fin de semaine dernière le feu vert israélien pour entrer dans le territoire palestinien, selon Ankara.