Législatives: Un premier tour riche d'incertitudes

Gérald Darmanin, applaudit lors d'une soirée électorale pour l'alliance centriste Ensemble (Ensemble) à Tourcoing, le 12 juin 2022 (Photo, AFP).
Gérald Darmanin, applaudit lors d'une soirée électorale pour l'alliance centriste Ensemble (Ensemble) à Tourcoing, le 12 juin 2022 (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Lundi 13 juin 2022

Législatives: Un premier tour riche d'incertitudes

  • Jean-Luc Mélenchon a réussi à s'imposer comme l'adversaire numéro un d'Emmanuel Macron
  • Du côté du bloc d'extrême droite, les résultats du RN sont en demi-teinte

PARIS: "La messe n'est pas dite": experts et politologues mettent en garde contre les conclusions hâtives après le premier tour des législatives, loin de présager selon eux le résultat qui, dimanche prochain, donnera le "la" du second quinquennat d'Emmanuel Macron.

Au soir du premier tour, la recomposition toute fraîche de la vie politique française en trois blocs - centre, extrême droite, gauche radicale et écologique — est déjà supplantée par un mano a mano entre les troupes d'Emmanuel Macron (Ensemble!) et l'alliance des gauches et des écologistes emmenées par Jean-Luc Mélenchon.

"Il y a un rapport de forces extrêmement serré entre la Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes) et la majorité présidentielle qui, à ce stade, ne permet pas à celle-ci d'être assurée d'avoir une majorité absolue" dans une semaine, observe Mathieu Gallard, directeur d'études à Ipsos France.

"Est-ce que, oui ou non, la majorité présidentielle est en mesure d'obtenir la majorité absolue? Ce qui était acquis au lendemain de la présidentielle l'est moins ce soir. Mais au second tour, le mode de scrutin va mécaniquement favoriser la coalition Ensemble!", avance de son côté Adélaïde Zulfikarpasic, directrice de BVA Opinion.

Avec son audacieuse proposition - "élisez moi Premier ministre" - et son tour de force de réunir LFI, PCF, PS et écologistes sous la bannière de la Nupes, Jean-Luc Mélenchon a réussi à s'imposer comme l'adversaire numéro un d'Emmanuel Macron, lui qui avait échoué à se qualifier pour le second tour de la présidentielle.

"Le second tour n'est pas joué", veut croire l'éco-féministe Sandrine Rousseau.

Mais le bon score de la Nupes est-il pour autant synonyme de véritable dynamique électorale? "Le score de la Nupes est davantage le fruit de l'agrégat versus le choix de l'éclatement", met en avant Mme Zulfikarpasic.

"Les scores au niveau national ne donnent pas l’ordre d’arrivée dans les 577 circonscriptions dimanche prochain", met en garde le politologue Denys Pouillard, directeur de l'observatoire de la vie politique et parlementaire.

"Or, Nupes se retrouve face à un brise-lames: elle n'aura plus de réserves, elle ne peut compter sur des désistements, transformer l'essai va être difficile. L'union de la gauche est certes historique, mais après?" complète-t-il.

Loire: la Nupes et LR viennent menacer la suprématie d’Ensemble

Contestée par la Nupes et Les Républicains, la majorité présidentielle n'est pas assurée de conserver ses quatre sièges sur six dans la Loire.

La Nupes sera présente au second tour dans quatre circonscriptions. Le meilleur score du 1er tour dans le département est réalisé par Andrée Taurinya qui, avec 34,37% des voix, met en difficulté le député sortant Jean-Michel Mis (Ensemble, 27,36%) dans la 2ème circonscription.

De son côté, LR participera à trois des six duels du 19 juin, alors que le Rassemblement national ne parvient pas à se maintenir en dépit de scores souvent proches de 20% des suffrages exprimés.

Les électeurs de droite au bercail

De son côté, la majorité sortante est clairement en retrait par rapport à 2017 et au premier tour de la présidentielle de son champion, Emmanuel Macron.

"Il y a un léger recul lié au retour des électeurs de droite au bercail", analyse M. Gallard. "Il sera intéressant de voir ce qu'il va se passer du côté de ces électeurs et des Républicains qui pourraient pouvoir se maintenir dans pas mal de circonscriptions."

"La réélection d'Emmanuel Macron n'a pas été une réélection d'adhésion. On a beaucoup voté pour lui contre l'extrême gauche ou l’extrême droite. Les Français ont envie de le secouer un peu car ils ne sont pas satisfaits de son mandat", note Mme Zulfikarpasic.

Denys Pouillard juge, pour sa part, que "le travail des députés sortants a été jugé et parfois mal jugé par un électorat déçu par ce qu'ils ont pu apporter au niveau local".

Du côté du bloc d'extrême droite, "les résultats du RN sont en demi-teinte et (le parti) a de quoi être déçu. Marine Le Pen n’apparaît plus comme la principale opposante", complète la directrice de BVA Opinion.

Sarthe: le RN se qualifie dans quatre des cinq circonscriptions

Dans la Sarthe, département ancré à droite, les candidats du Rassemblement national sont parvenus à se qualifier pour le second tour des législatives dans quatre des cinq circonscriptions face aux candidats de la majorité présidentielle et de la Nupes.

Dans ce département, où Emmanuel Macron et Marine Le Pen étaient arrivés au coude-à-coude au 1er tour de la présidentielle à 20,29% et 19,99% des voix, le RN confirme son ancrage.

Ainsi dans la 3e circonscription où la sortante Pascale Fontenel-Personne ne se représentait pas, le 2e tour donnera lieu à un duel RN-majorité présidentielle entre le candidat du parti lepéniste Bruno Pinçon (27,34%) et le macroniste Eric Martineau (26,05%).

"La période qui s'annonce risque d'être plutôt originale", pronostique Emiliano Grossman, professeur associé à Sciences Po: "Ca se présente mal pour la majorité absolue. Pour gouverner, il va falloir que l'exécutif négocie constamment. Or, ce n'est pas du tout dans l'ADN de la Ve République et de Macron. Il va falloir apprendre et prendre au sérieux le Parlement".

"Les débats à l'Assemblée vont pencher du côté du centre droit, avec les députés Horizons d'Edouard Philippe qui disposeront d'un poids considérable. Dans le même temps, on aura une opposition de gauche très forte", analyse Mme Zulfikarpasic.

De quoi provoquer des étincelles et rallumer l'intérêt pour la démocratie participative, alors que l'abstention a atteint un niveau record (entre 52,1 et 53,2%)?

"Si la participation est aussi faible, c’est qu'il y a le sentiment que le Parlement ne sert à rien", déplore M. Grossman.


Rassemblement à Paris en mémoire d'Aboubakar Cissé et contre l'islamophobie

"Le racisme tue, non à la haine contre les musulmans", a-t-on pu lire sur des pancartes tenues par des manifestants réunis à l'appel de SOS Racisme et de la militante associative Assa Traoré. (AFP)
"Le racisme tue, non à la haine contre les musulmans", a-t-on pu lire sur des pancartes tenues par des manifestants réunis à l'appel de SOS Racisme et de la militante associative Assa Traoré. (AFP)
Short Url
  • "Je n'ai pas l'impression que l'on (les musulmans) soit entendu et représenté dans les médias ou au gouvernement. Si cela avait été une victime d'une autre religion, d'un autre nom et d'une autre culture nous, nous aurions été au soutien. Il existe un deu
  • Un juge d'instruction du pôle criminel de Nîmes a été saisi et une information judiciaire ouverte pour meurtre avec préméditation et à raison de la race ou de la religion

PARIS: Au moins un millier de personnes se sont rassemblées à Paris pour rendre hommage à Aboubakar Cissé, un musulman tué la semaine dernière dans une mosquée du Gard, et dénoncer l'"islamophobie", a constaté une journaliste de l'AFP.

"Le racisme tue, non à la haine contre les musulmans", a-t-on pu lire sur des pancartes tenues par des manifestants réunis à l'appel de SOS Racisme et de la militante associative Assa Traoré.

"Je n'ai pas l'impression que l'on (les musulmans) soit entendu et représenté dans les médias ou au gouvernement. Si cela avait été une victime d'une autre religion, d'un autre nom et d'une autre culture nous, nous aurions été au soutien. Il existe un deux poids deux mesures", commente Yasmina, 52 ans, fonctionnaire, qui n'a pas souhaité donner son nom de famille.

"On arrive encore à dire que ce n'était pas un musulman qui était visé mais on ne va pas se mentir il n'y a que les musulmans en France qui fréquentent les mosquées. À un moment il faut poser les mots comme on le fait à juste titre contre l'antisémitisme, et appeler ça de l'islamophobie", a souligné Myriam, 30 ans, assistante dentaire, qui n'a pas souhaité non plus donner son nom.

Aboubakar Cissé, un jeune Malien, a été lardé de plusieurs dizaines de coups de couteau dans la mosquée de la petite commune gardoise de La Grand-Combe, où il était venu tôt comme chaque semaine pour faire le ménage, avant la prière du vendredi.

Son assassin, un Français d'origine bosnienne de 21 ans, s'est rendu à la police italienne.

Dans la vidéo qu'il avait lui-même réalisée juste après son meurtre, le suspect a insulté la religion de sa victime.

Un juge d'instruction du pôle criminel de Nîmes a été saisi et une information judiciaire ouverte pour meurtre avec préméditation et à raison de la race ou de la religion.

Outre une marche blanche à La Grand-Combe, un rassemblement en mémoire de la victime et contre l'islamophobie a déjà été organisé dimanche à Paris et une manifestation s'est déroulée mardi à Lyon.


Un 1er-Mai syndical qui se veut «festif et combatif», mais sans unité large

Pour les salaires, pour l'abrogation de la réforme des retraites, ou encore "contre la trumpisation du monde" : les organisations syndicales appellent à battre le pavé jeudi pour le 1er-Mai, mais la mobilisation se tient sans unité large. (AFP)
Pour les salaires, pour l'abrogation de la réforme des retraites, ou encore "contre la trumpisation du monde" : les organisations syndicales appellent à battre le pavé jeudi pour le 1er-Mai, mais la mobilisation se tient sans unité large. (AFP)
Short Url
  • A Paris, la manifestation doit partir à 14H00 de la place d'Italie vers la place de la Nation
  • Si - comme l'an dernier - l'intersyndicale ne sera pas unie pour l'occasion, le numéro un de FO Frédéric Souillot défilera aux côtés de ses homologues, dont la cheffe de file de la CGT Sophie Binet, dans le cortège parisien

PARIS: Pour les salaires, pour l'abrogation de la réforme des retraites, ou encore "contre la trumpisation du monde" : les organisations syndicales appellent à battre le pavé jeudi pour le 1er-Mai, mais la mobilisation se tient sans unité large.

Pour la journée internationale des travailleurs, la CGT a recensé quelque 260 rassemblements en France. La centrale de Montreuil a appelé avec la FSU, Solidaires et des organisations de jeunesse (Union étudiante, Unef, Fage, USL) à défiler "contre l'extrême droite, pour la paix, les libertés et la justice sociale".

Si - comme l'an dernier - l'intersyndicale ne sera pas unie pour l'occasion, le numéro un de FO Frédéric Souillot défilera aux côtés de ses homologues, dont la cheffe de file de la CGT Sophie Binet, dans le cortège parisien.

A Paris, la manifestation doit partir à 14H00 de la place d'Italie vers la place de la Nation.

D'autres cortèges s'élanceront dès le matin, comme Marseille et Lille à 10h30. Ce sera aussi le cas dès 10 heures à Bordeaux, Strasbourg ou Dunkerque, où des responsables de gauche, comme Marine Tondelier (Ecologistes), François Ruffin (ex-LFI) ou Boris Vallaud (PS) sont attendus pour protester contre le plan du sidérurgiste ArcelorMittal prévoyant la suppression d'environ 600 postes.

La numéro un de la CFDT Marylise Léon et son homologue de l'Unsa Laurent Escure se retrouvent, eux, dans la matinée dans le centre de Paris pour un rassemblement et une table ronde sur le travail.

Cent jours après l'arrivée de Donald Trump au pouvoir, la CGT, la FSU et Solidaires veulent aussi faire de cette journée un temps fort "contre la trumpisation du monde et l'internationale réactionnaire qui se développe partout", a expliqué à l'AFP Thomas Vacheron, cadre de la CGT.

Des syndicats internationaux (américain, belge, argentin, notamment) ont été conviés au défilé parisien. "Cette démarche unitaire et internationale est un petit pas" pour lutter contre des politiques qui menacent les travailleurs (hausse des droits de douane ou expulsions massives des travailleurs clandestins), selon Murielle Guilbert (Solidaires).

"Le sang et les larmes"

Cette année encore, de source policière, la présence de militants de l'ultra-gauche est jugée très probable à Paris, Nantes ou Lyon, entre autres.

De même source, dans la capitale où un peu plus de 2.000 membres des forces de l'ordre sont attendus, la décision du gouvernement de dissoudre le groupe antifasciste "La Jeune garde" et le collectif "Urgence Palestine" pourrait tendre le climat.

"On ne tolèrera rien", a averti mercredi le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau.

"Il faut relativiser" cette présence de "black blocs" face aux "centaines de milliers de manifestantes et de manifestants" attendues, a nuancé Sophie Binet mercredi, dénonçant des "stratégies malheureusement classiques (...) pour décrédibiliser la mobilisation sociale".

En 2023, les huit principaux syndicats (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, Solidaires, FSU) avaient défilé ensemble contre la réforme des retraites, du jamais vu depuis près de 15 ans, avec une très forte mobilisation à la clé (entre 800.000, selon les autorités et 2,3 millions, selon la CGT).

L'an dernier, les chiffres étaient revenus dans des fourchettes plus ordinaires: entre 121.000 personnes, selon les autorités, et 210.000, selon la CGT; et jeudi, la mobilisation devrait attirer sensiblement le même nombre de manifestants (100.000 à 150.000 de source policière).

Ce rendez-vous traditionnel se tient au moment où les syndicats craignent que le gouvernement apporte son soutien à des propositions de loi visant à autoriser certaines professions à faire travailler les salariés le 1er-Mai - seul jour férié et chômé en France -, une journée acquise "dans le sang et dans les larmes des ouvriers", rappelle Sophie Binet.

Le syndicat des "Gilets jaunes" a par ailleurs appelé ses sympathisants à mener une opération secrète sur différents points de rassemblement. "On va montrer aux partenaires du pouvoir ce qu’est un VRAI syndicat", ont-ils écrit dans un appel posté sur le réseau social X.


Macron et von der Leyen inciteront lundi les chercheurs étrangers à choisir l'Europe

Le président français Emmanuel Macron accueille la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen à son arrivée au sommet de la « coalition des volontaires » au palais de l'Élysée, à Paris, le 27 mars 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Le président français Emmanuel Macron accueille la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen à son arrivée au sommet de la « coalition des volontaires » au palais de l'Élysée, à Paris, le 27 mars 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Short Url
  • Le président français clôturera cette conférence dans la prestigieuse université de la Sorbonne, « dédiée à la science, à l'attractivité de l'Union européenne, mais aussi plus largement à l'innovation, à la recherche et aux libertés académiques »
  • « Ici, en France, la recherche est une priorité, l’innovation est une culture et la science est un horizon sans limite », avait-il assuré.

PARIS : À Paris, le président Emmanuel Macron et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen participeront lundi à une conférence pour vanter les mérites de l'Europe auprès des chercheurs étrangers, notamment américains, confrontés à « un certain nombre de menaces », a annoncé l'Élysée mercredi.

Le président français clôturera cette conférence dans la prestigieuse université de la Sorbonne, « dédiée à la science, à l'attractivité de l'Union européenne, mais aussi plus largement à l'innovation, à la recherche et aux libertés académiques », ont affirmé ses services à la presse.

Le message de cette rencontre sera « très clair » : « Choose Science, Choose Europe ».

Selon son entourage, il s'agit de dire, « dans un moment où les libertés académiques connaissent un certain nombre de reculs ou de menaces, que l'Europe est un continent attractif et que l'innovation, l'attractivité, la science et la recherche sont des éléments essentiels pour la croissance européenne ».

Le chef de l'État aura à cette occasion un entretien avec la présidente de la Commission européenne, qui participera à la conférence. 

Le 18 avril, Emmanuel Macron avait donné rendez-vous le 5 mai aux chercheurs « du monde entier ». Sur le réseau X, il les avait invités à « choisir la France et l'Europe », dans une tentative d'attirer les chercheurs américains menacés par la politique de Donald Trump.

« Ici, en France, la recherche est une priorité, l’innovation est une culture et la science est un horizon sans limite », avait-il assuré.

Parallèlement, le gouvernement a lancé une plateforme baptisée « Choose France for Science », présentée comme « une première étape pour préparer l'accueil des chercheurs internationaux ».

Depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche en janvier, chercheurs et universités sont dans le collimateur de son gouvernement et redoutent pour leur avenir, entre libertés académiques et de recherche menacées et financements réduits.

De plus en plus de chercheurs ou d'aspirants chercheurs réfléchissent donc à quitter le pays, considéré jusqu'ici comme le paradis de la recherche dans nombre de domaines.

En France, dès début mars, le ministre chargé de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Philippe Baptiste, a demandé aux universités de réfléchir à des moyens de les accueillir.