Petites combines et grandes manoeuvres autour du «talon d'Achille de l'Otan dans l'Arctique»

Sur cette photo d'archive prise le 07 mai 2022, un monument à Lénine est photographié pendant le blizzard, dans la ville minière de Barentsburg, sur l'archipel du Svalbard, dans le nord de la Norvège. (AFP)
Sur cette photo d'archive prise le 07 mai 2022, un monument à Lénine est photographié pendant le blizzard, dans la ville minière de Barentsburg, sur l'archipel du Svalbard, dans le nord de la Norvège. (AFP)
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Publié le Jeudi 23 juin 2022

Petites combines et grandes manoeuvres autour du «talon d'Achille de l'Otan dans l'Arctique»

  • Un traité atypique, conclu en 1920 à Paris, qui garantit aussi aux ressortissants des Etats signataires la liberté d'y exploiter les ressources naturelles «sur un pied de parfaite égalité»
  • C'est à ce titre que, depuis des décennies, la Russie - l'URSS avant elle - extrait du charbon sur ces terres habitées par moins de 3 000 personnes d'une cinquantaine de nationalités

BARENTSBURG: Dans le blizzard, des drapeaux russes, une sculpture à la gloire du communisme, un buste de Lénine... Incongrus en terre occidentale, les emblèmes témoignent des visées internationales sur l'archipel norvégien du Svalbard en plein cœur d'un Arctique convoité.

A un millier de kilomètres du pôle Nord, ce territoire grand comme deux fois la Belgique, parfois considéré comme le "talon d'Achille de l'Otan dans l'Arctique", offre à des puissances comme la Russie et la Chine une possibilité unique d'étendre leur empreinte dans une région stratégiquement importante et économiquement prometteuse.

La raison à cela ? Un traité atypique, conclu en 1920 à Paris, qui reconnaît la souveraineté de la Norvège sur le Svalbard mais garantit aussi aux ressortissants des Etats signataires (aujourd'hui 46) la liberté d'y exploiter les ressources naturelles "sur un pied de parfaite égalité".

C'est à ce titre que, depuis des décennies, la Russie - l'URSS avant elle - extrait du charbon sur ces terres habitées par moins de 3 000 personnes d'une cinquantaine de nationalités.

Ici, tout ou presque est glacial: la nature avec ses pics enneigés, ses glaciers et ses glaces marines malmenés par le changement climatique, les températures qui tombent souvent à -20°C l'hiver, mais aussi le décor façonné par les hommes.

Anachronique avec sa sculpture géante proclamant "Notre objectif - le communisme" et ses autres vestiges soviétiques, le village de Barentsburg pérennise la présence russe sur l'archipel.

Quelque 370 Russes et Ukrainiens du Donbass y cohabitent encore autour d'un filon de houille de piètre qualité. Plongés dans une obscurité totale l'hiver, sans route pour rejoindre le chef-lieu Longyearbyen (peuplé essentiellement de Norvégiens), ils dépendent de la mer pour être approvisionnés.

Sur les hauteurs, trône le consulat de Russie, moderne et protégé par de hautes grilles. Sergueï Gouchtchine y reçoit dans une entrée en marbre égayée par un jardin d'hiver, un luxe qui détonne avec l'allure décatie des bâtisses environnantes.

"Le Spitzberg est recouvert de la sueur et du sang du peuple russe depuis des siècles", affirme le consul. "Je ne conteste pas que c'est un territoire norvégien mais il fait (aussi) partie de l'histoire russe".

A la toponymie officielle - "Svalbard" - choisie par la Norvège pour asseoir son emprise sur l'archipel, les Russes préfèrent systématiquement le nom historique de "Spitzberg" (ou "Spitsberg"), une dissonance qui n'est symboliquement pas innocente.

Arguant que ses pêcheurs et chasseurs venaient sous ces latitudes dès le XVIe siècle traquer la baleine, le phoque et l'ours polaire et qu'elle y est aujourd'hui, hormis la Norvège, le seul acteur économique d'importance, la Russie veut avoir voix au chapitre sur la gouvernance du Svalbard.

Un ovni juridique conçu sous l'édredon: cinq choses à savoir sur le traité du Svalbard

Comptant parmi l'un des plus anciens traités internationaux encore en vigueur, le traité du Svalbard encadre la gouvernance de l'archipel de l'Arctique depuis son élaboration, dans des circonstances rocambolesques, à Paris en 1920.

Voici cinq choses à savoir sur le traité du Svalbard:

Texte atypique

Dans le premier des dix articles du "Traité concernant le Spitsberg" - premier nom donné au Svalbard, également parfois orthographié "Spitzberg" -, les signataires reconnaissent "la pleine et entière souveraineté de la Norvège" sur l'archipel et ses dépendances, jusqu'alors considérés comme "terra nullius" (n'appartenant à personne).

Mais les articles suivants garantissent aux ressortissants des parties contractantes la liberté d'exploiter les ressources naturelles du territoire, leur accordant notamment le droit de se livrer "à toutes opérations maritimes, industrielles, minières et commerciales sur un pied de parfaite égalité".

Les possibilités de militarisation sont aussi drastiquement limitées. L'article 9 dispose que "la Norvège s'engage à ne créer et à ne laisser s'établir aucune base navale (...), à ne construire aucune fortification dans lesdites régions, qui ne devront jamais être utilisées dans un but de guerre".

Né d'une liaison adultère

"L'ébauche du traité du Svalbard a été conçue dans un lit" entre l'ambassadeur norvégien, Fritz Wedel Jarlsberg, qui entretenait une relation avec le conseiller juridique du ministère français des Affaires étrangères, Henri Fromageot", affirme l'ancien diplomate norvégien, Sverre Jervell.

"C'est une histoire épique" car dans l'intimité de leur liaison adultère à Paris, M. Jarlsberg écrit le premier article qui "dit que la Norvège a l'entière souveraineté sur le Svalbard" et M. Fromageot les suivants "qui disent en fait que la Norvège n'a pas l'entière responsabilité sur le Svalbard".

"Quand le texte a été envoyé à Oslo, le ministre des Affaires étrangères (Nils Ihlen, ndlr) est devenu très nerveux, il n'en voulait pas parce qu'il avait peur des Russes" qui auraient aussi pu revendiquer le territoire, relate M. Jervell.

Mais "le traité a été signé à l'insu" d'Oslo.

Il entre en vigueur en 1925.

46 signataires

Seule une poignée de pays sont représentés dans les tractations commencées en 1919. L'Allemagne, tout juste défaite pendant la Première Guerre mondiale, et la Russie, puissance qui aurait pu fait valoir ses droits mais alors en proie à la révolution, sont exclues des pourparlers.

Accepter une souveraineté norvégienne est d'autant plus digeste pour les Etats présents que le royaume nordique est neutre.

Rapidement reconnue par la Norvège après sa création fin 1922, l'Union soviétique signe formellement le traité en 1935.

Chine, Inde, Arabie saoudite, Venezuela, les deux Corées... Des dizaines d'autres pays signeront ultérieurement le texte, portant à 46 le nombre des parties contractantes.

Différences d'interprétation

Le traité est l'objet d'interprétations divergentes, en particulier sa portée géographique.

Presque seule contre tous, la Norvège affirme qu'en mer, il s'applique aux seules eaux territoriales, limitant ainsi l'accès égal aux ressources à la zone des 12 milles marins autour du Svalbard.

La Russie et les pays occidentaux estiment, eux, que le traité, de par son esprit, vaut pour les 200 milles de la Zone économique exclusive (ZEE), concept qui n'existait pas en 1920.

Pour contourner l'obstacle, la Norvège n'a pas établi de ZEE mais mis en place une Zone de protection des pêches (ZPP) qui lui permet de réglementer la pêche dans ces eaux.

Enjeux considérables

Derrière ces arguties juridiques, des ressources potentiellement considérables...

Jugeant que le principe d'égalité d'accès valait pour la zone des 200 milles - et ignorant le fait que la Norvège (non membre de l'UE) est, de toute façon, la seule puissance réglementaire reconnue -, l'Union européenne a accordé à ses pêcheurs des permis sur le cabillaud et le crabe des neiges ces dernières années.

Si Bruxelles et Oslo ont récemment convenu de quotas sur le cabillaud, la question de fond sur la portée géographique du traité n'a toujours pas été tranchée par une instance internationale.

Le crabe des neiges est particulièrement problématique.

Contrairement aux pêcheurs européens, la Norvège estime qu'il s'agit d'une espèce "sédentaire" (vivant en contact permanent avec le fond marin comme les huîtres) qui relève donc du droit régissant le plateau continental, autre concept qui n'existait pas en 1920 et où un Etat côtier dispose de droits exclusifs.

Si Oslo devait un jour transiger sur le crabe, la question de la propriété se poserait pour d'autres ressources (hydrocarbures, minéraux) gisant potentiellement au même endroit.

L'arme environnementale

Incidemment, l'archipel, notamment l'île la plus au sud, Bjørnøya (l'île aux Ours), est posté près des eaux que les sous-marins nucléaires russes de la puissante Flotte du Nord doivent emprunter pour gagner l'océan Atlantique.

"Le principal intérêt des Russes est d'éviter une situation où d'autres pourraient utiliser l'endroit à des fins offensives", analyse Arild Moe, chercheur à l'Institut Fridtjof Nansen à Oslo.

"Pour ce faire, ils y maintiendront une présence raisonnable et seront aussi très attentifs à ce qui s'y produit", dit-il.

Après avoir plaidé, en vain, pour une cogestion au sortir de la Seconde Guerre mondiale, la Russie réclame maintenant, sans plus de succès, des "consultations bilatérales" pour lever les restrictions qui, dit-elle, brident ses activités dans l'archipel.

Son filon de charbon tournant depuis longtemps à perte, Barentsburg a ajouté des cordes à son arc en se diversifiant dans la recherche scientifique et le tourisme. On y vient en motoneige ou en bateau, selon les saisons, pour admirer ce qui fut pendant des décennies une vitrine de l'URSS du côté occidental du Rideau de fer.

Tous ces vestiges du passé, "on les garde ici non pas parce qu'on aspire toujours au communisme mais parce que l'on tient à notre patrimoine et aussi parce que les touristes aiment se prendre en photo avec", glisse la guide et historienne Natalia Maximichina.

Mais Moscou reproche aux autorités norvégiennes d'entraver l'expansion de ses activités en invoquant la protection de la nature, un impératif contenu dans le traité fondateur. Les vols d'hélicoptères russes sont par exemple très strictement encadrés.

"On a commencé à mettre en place des réserves naturelles autour des implantations russes", reconnaît l'ancien diplomate Sverre Jervell, architecte de la politique norvégienne dans la région de la mer de Barents.

"Surtout après la fin de la Guerre froide et la dissolution de l'URSS, quand Barentsburg peinait à rester à flot".

Pour réfréner les ambitions russes ? "Pas officiellement, mais en réalité, oui", dit-il. "On avait bien sûr de bons arguments: c'est une nature très fragile. Mais on a en particulier protégé les espaces autour des implantations russes".

Outre Barentsburg, la Russie a longtemps maintenu d'autres communautés minières (Pyramiden, Grumant) sur l'archipel, à tel point que le nombre de Russes y dépassait largement celui des Norvégiens à la fin de la Guerre froide.

Action, réaction 

Régulièrement, la Russie hausse la voix et accuse la Norvège de violer une disposition importante du traité qui, de facto, fait du Svalbard un espace démilitarisé.

Chaque escale de frégate norvégienne ou visite de parlementaires de l'Otan donne lieu à des protestations officielles.

Idem pour la gigantesque station satellite Svalsat, près de Longyearbyen, la plus grande installation de ce type au monde.

Sur un plateau venteux, tout près de la Réserve mondiale de semences (la fameuse "Arche de Noé végétale"), quelque 130 antennes abritées par des radômes blancs aux airs de balles de golf géantes communiquent avec l'espace. Et téléchargent des données militaires, fustige Moscou.

En janvier, un des deux câbles à fibre optique reliant Svalsat au continent a été mystérieusement endommagé.

Les critiques fusent dans les deux sens. La Russie est, elle aussi, accusée de prendre des libertés avec le traité.

Comme lorsque son vice-Premier ministre Dmitri Rogozine, pourtant sur la liste des sanctions européennes après l'annexion russe de la Crimée en 2014, a fait une apparition impromptue au Svalbard en 2015.

Ou quand des forces spéciales tchétchènes en route pour un exercice près du pôle Nord y ont fait escale l'année suivante.

Si les experts excluent la réédition du scénario criméen dans l'archipel, ils disent s'attendre à y observer de nouvelles passes d'armes à cause du nouveau coup de froid provoqué par l'invasion russe de l'Ukraine le 24 février.

"Le Svalbard est sensible à la conjoncture internationale", analyse Arild Moe. "C'est un endroit où la Russie peut facilement exprimer son mécontentement et mettre la pression sur la Norvège. On va probablement le voir à l'avenir".

«Talon d'Achille de l'Otan»

Pour James Wither, professeur au Centre européen d'études de sécurité George C. Marshall, l'archipel est le "talon d'Achille de l'Otan dans l'Arctique" car son "éloignement de la Norvège continentale et son statut juridique particulier le rendent politiquement et militairement vulnérable à l'aventurisme russe".

"Bien que le danger d'une confrontation militaire directe reste faible", Moscou pourrait être tenté d'y avancer de manière à diviser le camp occidental, écrivait l'ancien officier britannique en 2018.

La Norvège cherche à minimiser les griefs russes, arguant qu'ils sont connus de longue date et qu'elle jouit sur ces îles de la même souveraineté que sur n'importe quelle autre partie de son territoire.

Salué pour avoir réussi à nouer des liens étroits avec son homologue russe Sergueï Lavrov quand il était ministre des Affaires étrangères entre 2005 et 2012, le Premier ministre norvégien Jonas Gahr Støre se veut l'apôtre de l'adage "Grand Nord, basses tensions".

"Je ne dirais pas que nous sommes en train d'être testés, mais il y a un intérêt grandissant pour l'Arctique des pays riverains et plus éloignés", dit-il.

"Nous souhaitons voir les communautés se développer au Svalbard (...) et cela se fera de manière transparente", ajoute-t-il.

Par précaution, l'Etat norvégien a tout de même déboursé 300 millions de couronnes (33,5 millions d'euros) en 2016 pour acheter un immense domaine foncier à proximité immédiate de Longyearbyen, le seul encore dans des mains privées sur l'archipel.

Face à l'intérêt supposé d'investisseurs étrangers, notamment chinois, le gouvernement d'alors avait justifié l'achat de ces 217,6 km2 par son "souhait que ces terres soient norvégiennes".

L'arrivée éventuelle de nouvelles puissances soulève la crainte d'une déstabilisation, une peur sur laquelle la Russie ne manque pas de jouer.

"Si nous quittions le Spitzberg, qui viendrait prendre notre place ?" demande le consul Sergueï Gouchtchine. "Cela pourrait être la Chine par exemple ou les Etats-Unis, ou n'importe quel autre Etat partie au traité".

«Diplomatie par la science»

Au même titre que le Groenland, l'Islande ou les îles Féroé, le Svalbard semble bien dans le viseur de la Chine qui se définit comme un Etat "quasi Arctique" et affiche sa volonté d'établir une "route de la Soie polaire".

Dans un Arctique qui se réchauffe trois fois plus vite que la planète, le recul de la banquise ouvre des opportunités économiques, réelles ou fantasmées: nouvelles zones de pêche, nouvelles routes maritimes commerciales, accès plus facile à de potentielles ressources pétro-gazières et minérales...

Tout est bon pour mettre le pied dans la porte.

Troisième localité de l'archipel, Ny-Ålesund est une ancienne communauté minière désormais tournée vers la recherche scientifique internationale.

Parmi les bâtisses occupées par les institutions d'une dizaine de pays, difficile de ne pas voir celle occupée par les chercheurs chinois.

Caractéristiques de la Chine impériale, deux grands lions gardiens en marbre veillent sur l'entrée du vénérable bâtiment, propriété de l'Etat norvégien mais rebaptisé "station Fleuve jaune" par ses locataires de l'Institut de recherche polaire de Chine (PRIC).

Un flagrant exemple de "planter de drapeau", de "diplomatie par la science" dont la portée ne doit pas être sous-estimée, selon Torbjørn Pedersen, professeur norvégien de sciences politiques à l'université de Bodø.

"Certaines capitales étrangères en sont venues à dépeindre leur présence là-bas comme des stations nationales et des positions stratégiques susceptibles de leur donner une influence politique sur les îles et dans la région arctique au sens large", écrivait-il dans le Polar Journal en 2021.

"Une partie de la présence scientifique au Svalbard peut sembler motivée par des motivations géopolitiques", ajoutait-il. Elle "pourrait potentiellement enhardir certains acteurs étatiques, y compris des grandes puissances, avec des aspirations régionales - et devenir un véritable défi de sécurité pour le pays hôte, la Norvège".

Les autorités norvégiennes voient d'un mauvais œil ces postures qui ont davantage leur place en Antarctique que dans un pays souverain.

En 2019, elles ont lancé une nouvelle stratégie officielle qui vise à affaiblir cette logique de stations autonomes sur lesquelles chaque nation ferait flotter son pavillon. L'accent doit être mis dorénavant sur des recherches communes par thématiques au sein d'infrastructures partagées.

La mission scientifique franco-allemande (AWIPEV) semble faire les frais de cette reprise en main. Depuis 2014, France et Allemagne souhaitent regrouper au sein d'un bâtiment unique leurs moyens actuellement dispersés sur plusieurs emprises, mais le dossier n'avance pas.

En coulisse, il se murmure que les Norvégiens redoutent de créer un précédent.

"On ne peut pas faire quelque chose pour les Français et refuser la même chose aux Chinois", résume Sverre Jervell. "Le principe du traité du Svalbard est de ne pas discriminer".


Gaza: Bruxelles propose de taxer des biens importés d'Israël dans l'UE et de sanctionner deux ministres

La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu.  "Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas. (AFP)
La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu. "Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas. (AFP)
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  • L'exécutif européen avait déjà proposé en août 2024 de sanctionner ces deux ministres. Une tentative vaine, faute d'accord au sein des 27 Etats membres
  • Ces sanctions pour être adoptées requièrent l'unanimité des pays de l'UE

BRUXELLES: La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu.

"Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas.

Les mesures commerciales devraient, si elles étaient adoptées par les pays de l'UE, renchérir de quelque 227 millions d'euros le coût de certaines importations israéliennes, principalement d'origine agricole.

La Commission européenne a également proposé de sanctionner deux ministres israéliens d'extrême droite, Itamar Ben-Gvir, chargé de la Sécurité nationale, et Bezalel Smotrich chargé des Finances, selon un responsable de l'UE.

L'exécutif européen avait déjà proposé en août 2024 de sanctionner ces deux ministres. Une tentative vaine, faute d'accord au sein des 27 Etats membres. Ces sanctions pour être adoptées requièrent l'unanimité des pays de l'UE.

"Tous les États membres conviennent que la situation à Gaza est intenable. La guerre doit cesser", a toutefois plaidé mercredi Mme Kallas. Ces propositions seront sur la table des représentants des 27 Etats membres dès mercredi.

Les sanctions dans le domaine commercial ne nécessitent que la majorité qualifiée des Etats membres. Mais là encore, un accord sera difficile à obtenir, jugent des diplomates à Bruxelles.

Des mesures beaucoup moins ambitieuses, également présentées par la Commission européenne il y a quelques semaines, n'avaient pas trouvé de majorité suffisante pour être adoptées. Avait notamment fait défaut le soutien de pays comme l’Allemagne ou l'Italie.

Les exportations israéliennes vers l'UE, son premier partenaire commercial, ont atteint l'an dernier 15,9 milliards d'euros.

Seuls 37% de ces importations seraient concernés par ces sanctions, si les 27 devaient donner leur feu vert, essentiellement dans le secteur agro-alimentaire.


Trump s'en prend à des magistrats après l'assassinat de Charlie Kirk

Cette capture d'écran provenant de la diffusion en direct du tribunal de l'Utah montre Tyler Robinson, suspect dans le meurtre du militant politique Charlie Kirk, assistant à une audience à distance depuis sa cellule de prison à Provo, dans l'Utah, le 16 septembre 2025. (AFP)
Cette capture d'écran provenant de la diffusion en direct du tribunal de l'Utah montre Tyler Robinson, suspect dans le meurtre du militant politique Charlie Kirk, assistant à une audience à distance depuis sa cellule de prison à Provo, dans l'Utah, le 16 septembre 2025. (AFP)
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  • Dans le viseur du locataire de la Maison Blanche, sur son réseau Truth, se trouvent deux de ses cibles privilégiées : l'ex-procureur spécial Jack Smith, et le juge Juan Merchan qui avait présidé son procès pour des paiements cachés à une star du X
  • Donald Trump reproche à Jack Smith d'avoir ouvert il y a quelques années une enquête sur Turning Point, le mouvement créé par l'influenceur ultraconservateur américain Charlie Kirk, assassiné le 10 septembre

WASHINGTON: Le président américain Donald Trump a de nouveau stigmatisé mercredi des magistrats qui l'avaient poursuivi et jugé durant le mandat de Joe Biden, prenant prétexte du récent assassinat de l'influenceur ultraconservateur Charlie Kirk.

Dans le viseur du locataire de la Maison Blanche, sur son réseau Truth, se trouvent deux de ses cibles privilégiées : l'ex-procureur spécial Jack Smith, et le juge Juan Merchan qui avait présidé son procès pour des paiements cachés à une star du X.

Donald Trump reproche à Jack Smith d'avoir ouvert il y a quelques années une enquête sur Turning Point, le mouvement créé par l'influenceur ultraconservateur américain Charlie Kirk, assassiné le 10 septembre.

"Pourquoi le merveilleux Turning Point a-t-il été mis sous ENQUÊTE par le +Dérangé+ Jack Smith et l'administration Biden Corrompue et Incompétente ?", s'interroge Donald Trump dans un message sur Truth.

"Ils ont essayé de forcer Charlie, ainsi que de nombreuses autres personnes et mouvements, à cesser leurs activités. Ils ont instrumentalisé le ministère de la Justice contre les opposants politiques de Joe Biden, y compris MOI!", s'offusque-t-il encore.

Jack Smith, lui-même visé par une enquête administrative depuis le retour au pouvoir de Donald Trump, avait été nommé procureur spécial en 2022.

Il avait lancé des poursuites fédérales contre Donald Trump, pour tentatives illégales d'inverser les résultats de l'élection de 2020 et rétention de documents classifiés après son départ de la Maison Blanche.

Les poursuites avaient été abandonnées après la réélection de Trump, en vertu de la tradition consistant à ne pas poursuivre un président en exercice. Jack Smith avait ensuite démissionné du ministère de la Justice.

Sans jamais le citer nommément, le président Trump s'en prend également sur le réseau Truth à Juan Merchan, qui a présidé le procès Stormy Daniels. Le président avait été reconnu coupable de 34 chefs d'accusation, pour des paiements cachés de 130.000 dollars à l'ex-star du X.

Donald Trump exprime le souhait que le juge "corrompu" paie "un jour un prix très élevé pour ses actions illégales".

Depuis l'assassinat de Charlie Kirk, le camp républicain redouble de véhémence contre les démocrates et organisations progressistes, accusés de promouvoir la violence politique.

"La gauche radicale a causé des dégâts énormes au pays", a affirmé le président républicain mardi, avant son départ au Royaume-Uni. "Mais nous y remédions".

Selon le Washington Post, un élu républicain du Wisconsin a déposé une proposition de loi visant à bloquer les fonds fédéraux aux organisations employant des personnes "qui tolèrent et célèbrent la violence politique".

Le New York Times précise pour sa part que sont notamment dans le viseur l'Open Society Foundation du milliardaire George Soros ainsi que la Ford Foundation, qui toutes deux financent des organisations de gauche.


Pompe exceptionnelle pour la deuxième visite d'Etat de Trump au Royaume-Uni

Le président américain Donald Trump (C) et la première dame américaine Melania Trump débarquent d'Air Force One après avoir atterri à l'aéroport de Stansted, dans l'est de l'Angleterre, le 16 septembre 2025. (AFP)
Le président américain Donald Trump (C) et la première dame américaine Melania Trump débarquent d'Air Force One après avoir atterri à l'aéroport de Stansted, dans l'est de l'Angleterre, le 16 septembre 2025. (AFP)
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  • Donald Trump entame une visite d'État de deux jours au Royaume-Uni, marqué par un faste inédit à Windsor malgré des manifestations annoncées à Londres
  • Alors que le gouvernement de Keir Starmer tente de tirer profit de cette visite par des annonces d’investissements technologiques majeurs, la rencontre est aussi ternie par l’affaire Epstein

LONDRES: Tour en calèche, garde d'honneur géante, défilé aérien inédit: le Royaume-Uni sort le grand jeu pour la deuxième visite d'Etat de Donald Trump, reçu mercredi à Windsor par Charles III, à l'abri des manifestations.

"Cela va être un très grand jour", a commenté M. Trump en arrivant au Royaume-Uni mardi soir, se réjouissant de voir le roi, son "ami de longue date".

Encadrée par un dispositif de sécurité exceptionnel, cette visite d'Etat de deux jours débute par un déploiement spectaculaire de faste royal, dont le dirigeant républicain est friand, et une cérémonie militaire d'une ampleur sans précédent, impliquant 1.300 membres des forces armées britanniques.

"On dit que le château de Windsor, c'est le top, non? Donc ça va être chouette", avait lancé Donald Trump, 79 ans, avant son départ de Washington, se félicitant aussi d'être le seul président américain à avoir deux fois les honneurs d'une visite d'Etat au Royaume-Uni. La première avait eu lieu en 2019.

Le président et son épouse Melania seront accueillis à la mi-journée dans ce domaine royal situé à l'ouest de Londres, d'abord par le prince héritier William et son épouse Catherine, puis par le roi Charles III, 76 ans, et la reine Camilla, 78 ans.

Une incertitude entoure toutefois la présence de Camilla: la reine consort se remet d'une sinusite aiguë qui l'a empêchée d'assister à des funérailles royales mardi.

Après une salve royale tirée du château et depuis la Tour de Londres, les trois couples doivent participer à une procession en calèche, mais toujours dans l'enceinte du domaine, et non dans les rues de la ville comme cela avait été le cas lors de la visite d'Etat du président français Emmanuel Macron en juillet.

- Fanfare et cornemuses -

Donald Trump aura l'unique privilège de passer en revue une garde d'honneur comprenant exceptionnellement trois régiments de la Garde royale, accompagnée d'une fanfare, tambours et cornemuses dans la cour carrée du château.

Après un déjeuner en privé avec la famille royale, le couple Trump déposera des fleurs sur la tombe de la reine Elizabeth II, décédée en septembre 2022, dans la chapelle St George.

Un défilé aérien, alliant de façon inédite des avions de combat F35 britanniques et américains, et la patrouille acrobatique des "Red Arrows", précèdera le traditionnel banquet royal avec quelque 150 invités.

Une profusion d'honneurs de nature à flatter l'ego du milliardaire américain, qui s'est plus tôt cette année lui-même comparé à un monarque.

Mais à 40 km de là, des milliers de manifestants sont attendus dans le centre de Londres, pour protester contre la venue d'un président très impopulaire dans le pays. Le rassemblement à l'appel de la coalition "Stop Trump", prévu à partir de 14H00 (13H00 GMT), sera encadré par plus de 1.600 policiers. D'autres sont prévus ailleurs au Royaume-Uni.

Le deuxième jour de la visite, jeudi, sera consacrée à une séquence plus politique, qui se déroulera à Chequers, résidence de campagne du Premier ministre Keir Starmer.

La conférence de presse pourrait donner lieu à des questions embarrassantes pour les deux dirigeants, relatives notamment à l'affaire Jeffrey Epstein. Elle est revenue hanter cette semaine Keir Starmer, qui a limogé son ambassadeur à Washington Peter Mandelson, après des révélations sur ses liens avec le délinquant sexuel américain, mort en prison en 2019.

Un sujet dont se passerait bien Donald Trump, qui voit sa présidence également empoisonnée par l'affaire Epstein depuis des semaines.

Des images du financier américain ont d'ailleurs été diffusées mardi soir par un groupe anti-Trump sur une tour du château de Windsor.

De son côté, le gouvernement de Keir Starmer, fragilisé sur le plan économique et en pleine crise politique, cherche à tirer parti de cette visite pour multiplier les annonces, entre accord sur la tech et investissements américains.

Il a déjà enregistré un investissement massif de 30 milliards de dollars (25 milliards d'euros) de Microsoft, un autre de 5 milliards de livres (5,8 milliards d'euros) de Google et l'annonce d'un partenariat incluant OpenAI et Nvidia pour développer des infrastructures dédiées à l'IA dans le nord-est de l'Angleterre.

Un partenariat plus général pour doper la coopération technologique dans l'IA, le quantique et le nucléaire doit être signé pendant la visite, mais ses contours sont encore flous.

Les espoirs d'accord pour faire baisser les droits de douane actuellement appliqués sur le whisky (10%) et l'acier (25%) semblent en revanche avoir été douchés, selon la presse britannique.