Barricades et routes bloquées à travers le Soudan après un conflit tribal

Des milliers de membres de l'ethnie des Haoussas, impliquée dans le conflit tribal qui endeuille depuis une semaine le Soudan, ont monté lundi des barricades (Photo, AFP).
Des milliers de membres de l'ethnie des Haoussas, impliquée dans le conflit tribal qui endeuille depuis une semaine le Soudan, ont monté lundi des barricades (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 18 juillet 2022

Barricades et routes bloquées à travers le Soudan après un conflit tribal

  • Selon le dernier bilan officiel, 60 personnes ont été tuées et 163 blessées, dont une dizaine grièvement, en une semaine dans des affrontements dans l'Etat du Nil Bleu, frontalier de l'Ethiopie
  • Les violences ont opposé les Haoussas, des agriculteurs africains présents dans toute la bande sahélienne, à un autre clan africain, les Bartis

KHARTOUM: Des milliers de membres de l'ethnie des Haoussas, impliquée dans le conflit tribal qui endeuille depuis une semaine le Soudan, ont monté lundi des barricades et attaqué des bâtiments publics dans plusieurs villes, ont rapporté des témoins.

Selon le dernier bilan officiel, 60 personnes ont été tuées et 163 blessées, dont une dizaine grièvement, en une semaine dans des affrontements dans l'Etat du Nil Bleu, frontalier de l'Ethiopie. Les violences ont opposé les Haoussas, des agriculteurs africains présents dans toute la bande sahélienne, à un autre clan africain, les Bartis.

Les premiers se disent lésés et réclament la formation d'une autorité locale qui superviserait l'accès aux terres et à l'eau. Les seconds se disent propriétaires de la terre et refusent tout passage aux habitants n'appartenant pas à leur clan ou supervision hors système tribal.

Alors que les troupes déployées en renfort dans le Nil Bleu y maintiennent un calme précaire après des jours d'affrontements à l'arme à feu, la situation semble dégénérer ailleurs.

A Kassala (est), le gouvernorat a décrété une interdiction de rassemblement après que plusieurs milliers de Haoussas "ont incendié une partie des locaux du gouvernement local, des administrations et des magasins", selon un témoin, Hussein Saleh.

Idriss Hussein, un autre habitant, ajoute que les Haoussas "bloquent les routes en brandissant des bâtons". "C'est la panique dans le centre-ville", assure-t-il encore à l'AFP par téléphone, alors que selon un autre témoin, "magasins et banques ont baissé leur rideau".

A Wad Madani, à 200 kilomètres au sud de Khartoum, "des centaines de Haoussas ont monté des barricades de pierres et de pneus brûlés sur le principal pont et bloquent la circulation", indique Adel Ahmed, un autre habitant joint par téléphone.

L'eau et les terres, vitales pour agriculteurs et éleveurs, ont déjà causé des centaines de morts ces derniers mois lors de conflits tribaux dans un pays où de très nombreuses armes circulent après des décennies de guerre civile et de guérillas rebelles.

Les violences connaissent aussi un regain, notent les experts, depuis le putsch à Khartoum en octobre 2021 qui a créé un vide sécuritaire.

Et elles servent, accusent les pro-démocratie, les intérêts du pouvoir militaire et de ses alliés ex-rebelles qui font ainsi pression pour obtenir des gains politiques.

Les Haoussas sont l'une des ethnies les plus importantes d'Afrique avec des dizaines de millions de membres du Sénégal au Soudan.

Dans ce dernier pays, dont ils partagent la religion majoritaire, l'islam, mais pas la langue officielle, l'arabe, car ils parlent haoussa, ils sont près de trois millions.

Ils vivent principalement de l'agriculture au Darfour, frontalier du Tchad, dans l'Etat d'al-Jazira, au sud de Khartoum, ainsi que dans les Etats de Kessala, de Gedaref, de Sennar et du Nil Bleu, qui bordent l'Erythrée et l'Ethiopie.


Assassinat au Liban: les autorités pointent du doigt le Mossad

Le corps de Mohammad Sarur, qui faisait l'objet de sanctions des Etats-Unis, a été retrouvé criblé de sept balles dans une villa proche de Beyrouth le 9 avril. (AFP).
Le corps de Mohammad Sarur, qui faisait l'objet de sanctions des Etats-Unis, a été retrouvé criblé de sept balles dans une villa proche de Beyrouth le 9 avril. (AFP).
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  • Le corps de Mohammad Sarur, qui faisait l'objet de sanctions des Etats-Unis, a été retrouvé criblé de sept balles dans une villa proche de Beyrouth le 9 avril
  • "Ce crime (...) selon les données que nous avons jusqu'à présent, a été exécuté par des services de renseignement", a affirmé dimanche soir le ministre de l'Intérieur, Bassam Mawlawi, lors d'une interview télévisée

BEYROUTH: Le ministre libanais de l'Intérieur et deux autres hauts responsables ont affirmé que le Mossad était impliqué dans l'assassinat d'un homme accusé de transférer des fonds de l'Iran au Hamas palestinien, selon les premiers résultats de l'enquête.

Le corps de Mohammad Sarur, qui faisait l'objet de sanctions des Etats-Unis, a été retrouvé criblé de sept balles dans une villa proche de Beyrouth le 9 avril.

"Ce crime (...) selon les données que nous avons jusqu'à présent, a été exécuté par des services de renseignement", a affirmé dimanche soir le ministre de l'Intérieur, Bassam Mawlawi, lors d'une interview télévisée.

Au journaliste de la chaîne Al-Jadeed qui lui demandait s'il pensait qu'il s'agissait du Mossad, le service de renseignement israélien, il a répondu "oui".

Sarur travaillait pour des institutions financières du puissant Hezbollah pro-iranien, allié du Hamas, selon une source de sécurité libanaise.

En août 2019, le Trésor américain avait annoncé des sanctions à son encontre, l'accusant d'être "responsable du transfert de dizaines de millions de dollars entre les Gardiens de la révolution d'Iran", l'armée idéologique du régime, "et les brigades Ezzeddine al-Qassam", la branche armée du Hamas, "à travers le Hezbollah au Liban".

"Toutes les données indiquent que le Mossad est derrière son assassinat", a affirmé lundi à l'AFP un haut responsable judiciaire qui a requis l'anonymat.

"L'enquête en est à ses début, et rassemble les éléments, notamment des télécommunications", a ajouté ce responsable.

Un responsable de sécurité qui a également requis l'anonymat a précisé à l'AFP que "le Mossad a utilisé des agents libanais et syriens pour attirer Sarur dans une villa à Beit Méry", sur les hauteurs de Beyrouth.

"C'est là qu'il a été torturé et tué", a ajouté cette source, selon laquelle "les auteurs du crime ont utilisé des pistolets munis de silencieux et effacé toutes les empreintes digitales" sur les lieux du crime.

Selon sa famille, il avait disparu six jours avant que son corps soit retrouvé.

Le Liban et Israël sont toujours en état de guerre et les autorités annoncent régulièrement avoir arrêté des personnes accusées d'espionner pour le compte de leur ennemi.

En janvier 2019, l'armée libanaise avait annoncé avoir arrêté un agent du Mossad impliqué dans une tentative d'assassinat un an plus tôt d'un responsable du Hamas dans le sud du Liban.

Mais les opérations du Mossad au Liban remontent à plus de cinquante ans. Le service de renseignement extérieur israélien avait notamment assassiné, en avril 1973, trois responsables palestiniens lors d'une attaque spectaculaire à Beyrouth.

Mohammed Youssef al-Najjar, Kamal Adwan et Kamal Nasser, avaient été abattus à leurs domiciles par un commando dont faisait partie Ehud Barak, devenu plus tard Premier ministre, déguisé en femme.

En janvier 1979, un autre haut responsable de l'Organisation de libération de la Palestine, Ali Hassan Salamé, avait été tué dans l'explosion de son véhicule à Beyrouth, attribuée au Mossad.

Salamé, marié à l'époque à l'ex-Miss Univers libanaise Georgina Rizk, comme les trois autres dirigeants, étaient poursuivis pour leur implication dans la mort d'athlètes israéliens à Munich en 1972.


Attaquer directement Israël n'est plus tabou pour l'Iran

Au cours des 45 dernières années, les deux ennemis ont pris l'habitude de lancer des opérations clandestines, qu'ils ne revendiquent pas, ou de s'en remettre à des actions menées par des organisations non-étatiques, comme le Hezbollah libanais soutenu par Téhéran. (AFP).
Au cours des 45 dernières années, les deux ennemis ont pris l'habitude de lancer des opérations clandestines, qu'ils ne revendiquent pas, ou de s'en remettre à des actions menées par des organisations non-étatiques, comme le Hezbollah libanais soutenu par Téhéran. (AFP).
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  • Au cours des 45 dernières années, les deux ennemis ont pris l'habitude de lancer des opérations clandestines, qu'ils ne revendiquent pas,
  • "Aujourd’hui, l’équation stratégique a changé. Cibler les forces et les moyens iraniens entraînera une réponse directe", a averti Mohammad Jamshidi

TEHERAN: En attaquant pour la première fois le territoire israélien, l'Iran a annoncé avoir appliqué sa nouvelle stratégie: répliquer directement depuis son territoire à Israël lorsque les intérêts iraniens seront pris pour cibles en Iran ou à l'étranger.

Ce changement de posture face à son ennemi juré a été dévoilé par les dirigeants politiques et militaires iraniens qui se sont exprimés depuis la vague de drones, missiles balistiques et de croisière lancés samedi soir vers Israël.

Israël a affirmé avoir intercepté, avec l'aide des Etats-Unis notamment, 99% des plus de 350 projectiles. Seuls quelques missiles sont entrés dans l'espace aérien israélien touchant "légèrement" une base militaire et il y a eu quelques blessés, d'après lui.

A Téhéran, le président Ebrahim Raïssi a dit avoir infligé une "leçon instructive à l'ennemi sioniste".

Pour lui, "la punition de l'agresseur" s'est réalisée sur "la base du droit légitime de se défendre" après la mort de sept militaires iraniens dans une frappe attribuée à Israël contre le consulat iranien à Damas le 1er avril.

Mais l'envergure de la riposte a surpris la communauté internationale car la République islamique s'était gardée d'attaquer frontalement Israël depuis son instauration en 1979.

Au cours des 45 dernières années, les deux ennemis ont pris l'habitude de lancer des opérations clandestines, qu'ils ne revendiquent pas, ou de s'en remettre à des actions menées par des organisations non-étatiques, comme le Hezbollah libanais soutenu par Téhéran.

« La nouvelle stratégie »

"Aujourd’hui, l’équation stratégique a changé. Cibler les forces et les moyens iraniens entraînera une réponse directe", a averti Mohammad Jamshidi, un conseiller de M. Raïssi, dans un message posté sur X dimanche.

Hossein Salami, le commandant des Gardiens de la révolution, l'armée idéologique de la République islamique, a été plus explicite: "la nouvelle équation est la suivante: désormais, en cas d'attaque israélienne contre des intérêts, des personnalités ou des citoyens iraniens n’importe où, il y aura une riposte" lancée depuis l'Iran.

Saluant à la une le succès "historique" de l'attaque, le quotidien gouvernemental Iran a souligné lundi qu'elle illustrait la "nouvelle stratégie du pouvoir dans la région".

Elle représente "un test dont l'Iran avait besoin pour savoir comment agir dans les batailles futures", a renchéri le quotidien ultraconservateur Javan.

Le journal réformateur Ham Mihan souligne que "la réponse directe" de l'Iran à Israël a "mis fin au statu quo et brisé les règles du conflit qui oppose les deux parties" depuis des décennies.

"Il n'y a plus de guerre de l'ombre entre les deux camps", qui "peuvent oser attaquer directement l'autre partie", écrit-il.

Cela n'avait pas été le cas après les précédentes attaques attribuées à Israël contre des intérêts iraniens en Syrie, ou ailleurs, ces dernières années.

« L'ère de la patience est terminée »

Depuis le début de la guerre à Gaza entre Israël et le Hamas, déclenchée par une attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien le 7 octobre, l'Iran défend avec force ce mouvement. En s'appuyant surtout, selon des experts, sur la stratégie d'essayer d'épuiser Israël par des actions menées par ses alliés, les Houthis yéménites ou le Hezbollah libanais.

En 2020, l'Iran avait aussi choisi une réaction relativement limitée, selon les spécialistes, à la mort du général Qassem Soleimani, un important chef  des Gardiens de la Révolution, dans une frappe américaine près de Bagdad en janvier 2020.

Quatre jours plus tard, il avait lancé des missiles contre deux bases américaines en Irak, mais en avertissant au préalable les Etats-Unis selon des sources américaines. Aucun soldat n'avait été tué.

Dans son message dimanche, Mohammad Jamshidi a souligné: "l'ère de la patience stratégique face aux vices du régime sioniste est terminée".

Le concept de la "patience stratégique" a été défendu par l'ex-président modéré Hassan Rohani après la décision des Etats-Unis de quitter l'accord sur le nucléaire en 2018 sous la présidence de Donald Trump. Il justifiait le fait que Téhéran ne prendrait pas immédiatement de contre-mesures et attendrait la bonne opportunité en pariant sur le long terme.

Après la frappe contre le consulat d'Iran à Damas, des partisans de la République islamique ont critiqué cette stratégie, estimant qu'elle était trop passive et encourageait Israël à mener davantage d'attaques contre les intérêts iraniens.

"L'opération victorieuse" contre Israël a "renforcé la dissuasion stratégique de l'Iran face aux ennemis", a affirmé lundi le ministre iranien des Affaires étrangères Hossein Amir-Abdollahian.


L'Iran a fermé ses installations nucléaires le jour de son attaque contre Israël

Les installations iraniennes devaient rouvrir lundi. (AFP).
Les installations iraniennes devaient rouvrir lundi. (AFP).
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  • M. Grossi a été interrogé sur la possibilité d'une frappe de représailles israélienne contre des installations nucléaires iraniennes
  • "Ce que je peux vous dire, c'est que nos inspecteurs en Iran ont été informés par le gouvernement iranien qu'hier (dimanche, NDLR), toutes les installations nucléaires que nous inspectons chaque jour resteraient fermées pour des raisons de sécurité"

NATIONS-UNIES: L'Iran a fermé ses installations nucléaires dimanche, jour de son attaque contre Israël, a indiqué lundi le directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Rafael Grossi.

Lors d'une conférence de presse en marge d'une réunion du Conseil de sécurité de l'ONU consacrée à la centrale ukrainienne de Zaporijjia, M. Grossi a été interrogé sur la possibilité d'une frappe de représailles israélienne contre des installations nucléaires iraniennes.

"Nous sommes toujours préoccupés par cette possibilité", a répondu le chef de l'AIEA.

"Ce que je peux vous dire, c'est que nos inspecteurs en Iran ont été informés par le gouvernement iranien qu'hier (dimanche, NDLR), toutes les installations nucléaires que nous inspectons chaque jour resteraient fermées pour des raisons de sécurité", a-t-il ajouté.

Selon lui, les installations iraniennes devaient rouvrir lundi. "J'ai décidé de ne pas laisser les inspecteurs revenir tant que la situation n'est pas complètement calme. Nous reprendrons demain" (mardi, NDLR), a-t-il expliqué.

Cette fermeture "n'a pas eu d'impact sur nos activités d'inspection. Mais bien sûr, nous appelons toujours à la plus grande retenue", a-t-il poursuivi.

En 1981, Israël avait bombardé le réacteur nucléaire d'Osirak, dans l'Irak de Saddam Hussein, malgré l'opposition de Washington. Israël a également admis, en 2018, avoir lancé un raid aérien ultrasecret onze ans plus tôt contre un réacteur nucléaire dans l'est de la Syrie.

Les services secrets israéliens sont aussi accusés par Téhéran d'avoir assassiné deux physiciens nucléaires iraniens en 2010, et d'en avoir enlevé un autre l'année précédente.

Egalement en 2010, une cyberattaque très sophistiquée via le virus Stuxnet, attribuée par Téhéran à Israël et aux Etats-Unis, avait frappé le programme nucléaire iranien, entraînant une série de pannes dans son parc de centrifugeuses utilisées pour l'enrichissement de l'uranium.

Israël accuse l'Iran - qui dément - de vouloir se doter de la bombe atomique et dit chercher par tous les moyens à l'en empêcher.