Chicago: Pourquoi les entreprises musulmanes et arabes paient le lourd tribut de la lutte contre la criminalité?

La violence armée et les homicides atteignent des proportions alarmantes dans la ville de Chicago. (AFP)
La violence armée et les homicides atteignent des proportions alarmantes dans la ville de Chicago. (AFP)
La violence armée et les homicides atteignent des proportions alarmantes dans la ville de Chicago. (AFP)
La violence armée et les homicides atteignent des proportions alarmantes dans la ville de Chicago. (AFP)
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Publié le Lundi 25 juillet 2022

Chicago: Pourquoi les entreprises musulmanes et arabes paient le lourd tribut de la lutte contre la criminalité?

  • Le conseiller municipal de Chicago affirme que le ciblage des magasins qui appartiennent à des Arabes et à des musulmans est «condamnable sur le plan moral»
  • Même si tous les commerces fermés appartiennent à des Arabes et des musulmans, la maire Lori Lightfoot conteste le fait qu’ils aient été ciblés en fonction de l’ethnie ou de la religion de leurs propriétaires

CHICAGO: Alors que la violence armée et les homicides continuent d’accabler la ville de Chicago, le bureau de la maire de la ville, Lori Lightfoot, a mis en place une stratégie censée améliorer la sécurité dans cette ville américaine.

Néanmoins, les entreprises qui appartiennent à des musulmans et à des Arabes affirment que cette stratégie leur porte préjudice sans qu’elle ne profite à quiconque.

Au mois de juin 2021, un groupe de travail formé par Mme Lightfoot a été accusé par les propriétaires d’entreprises arabes et musulmanes de prendre pour cible leurs magasins en menant des opérations de nuit dans les zones les plus dangereuses de la ville.

Plus de cent cinquante petites sociétés d’Américains arabes et de musulmans ont été fermées par le groupe de travail entre juin et septembre 2021, selon la Chambre de commerce arabo-américaine (AACC).

Des propriétaires d’entreprises arabes et musulmanes organisent une conférence de presse pour dénoncer le fait que la task force, destinée à combattre la criminalité, les prend pour cible. (Ray Hanania pour Arab News)
Des propriétaires d’entreprises arabes et musulmanes organisent une conférence de presse pour dénoncer le fait que la task force, destinée à combattre la criminalité, les prend pour cible. (Ray Hanania pour Arab News)

Pour exprimer leur mécontentement, les propriétaires de magasins sont intervenus par l’intermédiaire de l’AACC. Le 8 septembre 2021, ils ont tenu une conférence de presse pour sensibiliser le public aux agissements de ce groupe de travail.

Raymond Lopez a soutenu ce mouvement. Ce conseiller municipal de Chicago sera l’un des futurs opposants à Mme Lightfoot lors des élections de l’année prochaine.

Près de vingt-cinq propriétaires de magasins ont assisté à la conférence de presse. Un seul d’entre eux a préféré garder l’anonymat pour échapper aux représailles éventuelles de la municipalité.

«Plusieurs entreprises se sont plaintes d’avoir été fermées par la municipalité sans aucune raison valable. C’est au mois d’août que la tendance s’est dessinée, lorsqu’on recevait de plus en plus de réclamations de la part de propriétaires de magasins», confie à Arab News Hassan Nijem, président de la Chambre de commerce arabo-américaine.

«Nous avons porté plainte auprès de la municipalité de Chicago, mais seuls quelques conseillers municipaux nous ont écoutés et ont réagi, comme Raymond Lopez. On dirait que tout le monde refuse de reconnaître le problème auquel nous sommes confrontés.»

«En effet, nous représentons une cible facile qui permet à madame la maire de laisser croire qu’elle combattait la violence des gangs. Mais la réalité est tout autre».

La police de Chicago a apposé un avis de fermeture que sur la vitrine de ce magasin. (Ray Hanania pour Arab News)
La police de Chicago a apposé un avis de fermeture que sur la vitrine de ce magasin. (Ray Hanania pour Arab News)

M. Lopez a tenté, en vain, de convaincre le conseil municipal de Chicago de tenir une audience publique qui porterait sur les fermetures de magasins opérées par le groupe de travail. D’autres responsables se sont joints à lui, dont Silvana Tabares, ancienne représentante de l’État de l’Illinois, et Gilbert Villegas, candidat au poste de représentant du 3e district de l’Illinois.

M. Lopez affirme que le ciblage des magasins qui appartiennent à des Arabes et à des musulmans reste «inefficace lorsqu’il s’agit de réduire la criminalité» et «condamnable sur le plan moral».

«Dans quels contextes et pour quelles raisons visons-nous spécifiquement ces personnes-là? Est-ce parce que nous croyons qu’ils ne se défendront pas? Ou sommes-nous motivés par des préjugés que nous refusons d’admettre? Ou encore parce que nous craignons de nous attaquer aux véritables catalyseurs de la violence dans nos quartiers?», s’insurge-t-il.

M. Nijem affirme que «madame la maire s’est empressée de rouvrir tous les magasins le lendemain de la conférence de presse que nous avons organisée pour braquer les projecteurs sur ce ciblage». Grâce à la couverture des chaînes de télévision, des radios et des journaux, il était «impossible de passer l’affaire sous silence», selon lui.

La maire de Chicago, Lori Lightfoot, dément le ciblage des Arabes et des musulmans. (Getty Images via AFP)
La maire de Chicago, Lori Lightfoot, dément le ciblage des Arabes et des musulmans. (Getty Images via AFP)

L’administration de Lori Lightfoot a démenti le ciblage des magasins en fonction de l’ethnie ou de la religion de leurs propriétaires. L’AACC affirme cependant que tous les magasins fermés appartenaient à des Arabes ou à des musulmans.

Elle a refusé de rencontrer les représentants de l’AACC ou ces propriétaires. Elle conteste les allégations de racisme et accuse les magasins d’enfreindre la loi.

De leur côté, les propriétaires des magasins assurent qu’ils collaborent avec la police municipale pour combattre la criminalité: ils signalent ainsi les incidents qui se produisent aux abords de leurs magasins et coopèrent sans réserve avec la police pour arrêter les auteurs de ces actes.

Auparavant, lorsqu’ils étaient accusés de violations du code, on leur accordait un délai pour y répondre plutôt que de fermer leurs établissements sans préavis.

«Tous les jours, j’ai peur que la task force […] s’attaque à notre commerce et le ferme sans préavis», raconte à Arab News Saad Malley, propriétaire d’une station-service à Chicago.

Quelques CHIFFRES

  • 161: nombre de magasins qui appartiennent à la communauté arabe ou musulmane et qui ont été visés depuis juin 2021
  • 1 500: nombre d’emplois supprimés en raison des fermetures
  • 5 millions de dollars: montant des taxes perdues à la suite des fermetures
  • 65%: pourcentage de la hausse des attaques à main armée à Chicago entre 2019 et 2021

C’est au mois de mai 2022 que les fermetures ont recommencé. Toutefois, elles ont cette fois diminué en ampleur. Le 2 mai, les images d’un jeune homme qui courait à toute vitesse en brandissant un fusil automatique illégal de type AK-47 ont été enregistrées par les caméras de surveillance de Citgo (une station-service, qui fait également épicerie, située dans le quartier ouest de Chicago). Le propriétaire de cette boutique s’appelle Ahmed Mohsin; c’est un Américain d’origine yéménite.

À 9h30, l’adolescent a traversé la rue où se situe le magasin pour se diriger vers Chicago Avenue. Il a ouvert le feu sur un homme qui s’apprêtait à emprunter les transports en commun.

La victime se tenait sur le trottoir situé devant le magasin de Mohsin et consultait son téléphone portable. Il a succombé sur le coup et est tombé du côté de la station-service de Mohsin. Quant au suspect, il s’est enfui et n’a jamais été identifié ni appréhendé par la police.

Ahmed Mohsin, propriétaire yéménite d’un magasin de Chicago, en compagnie des responsables de l’AACC, Hassan Nijem et Maher al-Khatab, après la fermeture de son magasin. (Ray Hanania pour Arab News)

«Nous avons appelé la police sur-le-champ. C’est ce que nous faisons à chaque fois qu’un crime se produit dans les environs. À leur arrivée, ils nous ont demandé de fermer le magasin le temps de l’enquête», raconte M. Mohsin à Arab News.

«Nous nous sommes pliés volontiers à cette demande, puisque nous sommes toujours prêts à aider la police de Chicago pour assurer la sécurité du quartier où nous travaillons.»

Le lendemain, il apprend la nouvelle par la police: l’entreprise qu’il possède depuis vingt ans restera fermée pour une durée indéterminée.

«L’hypothèse retenue est la suivante: nous sommes tenus responsables de la violence qui éclate sur la voie publique de la ville et qui s’étend à notre entreprise», explique M. Mohsin.

Il est entré en contact avec l’AACC, qui n’a pas tardé à organiser une conférence de presse à la station-service le 5 mai. D’autres propriétaires de magasins et plusieurs médias y ont assisté.

Des individus brandissent des pancartes lors d’une marche contre la violence armée à Chicago le 31 décembre 2020, dans un contexte de recrudescence des meurtres dans la ville (768 cette année-là), ce qui représente une hausse de 252 meurtres par rapport à l’année 2019 (516). (AFP)
Des individus brandissent des pancartes lors d’une marche contre la violence armée à Chicago le 31 décembre 2020, dans un contexte de recrudescence des meurtres dans la ville (768 cette année-là), ce qui représente une hausse de 252 meurtres par rapport à l’année 2019 (516). (AFP)

Une dizaine de jours plus tard, la task force a autorisé Mohsin à rouvrir sa boutique, mais à condition qu’il la ferme en fin de soirée.

Il a également été contraint d’embaucher une équipe de sécurité supplémentaire recommandée par l’administration du maire Lightfoot. La ville a suggéré trois firmes, dont les frais varient entre 22 000 et 30 000 dollars par mois (1 dollar = 0,98 euro).

La réponse de la municipalité à la conférence de presse a été la suivante: la station-service de Mohsin avait préalablement été notifiée de dix-huit violations de la loi.

Or, ces avis ont été délivrés sur une période de vingt ans et le dernier remonte à 2021.

Selon Mme Lightfoot, Mohsin avait rapporté des centaines de crimes commis sur les lieux de son entreprise. Ce dernier a reconnu ce fait, précisant toutefois qu’il ne faisait que remplir son devoir de citoyen lorsqu’il alertait la police.

Selon M. Nijem, «tous les faits de violence qui se sont produits à proximité ou aux alentours des commerces visés par la municipalité de la ville au cours de l’année écoulée étaient sans rapport avec les magasins ou leurs propriétaires».

«La municipalité prétend enquêter sur des ventes de cigarettes ou des violations du règlement. Mais ce genre d’enquête ne justifie pas la fermeture du magasin et ne se rapporte pas à des actes de violence», ajoute-t-il.

«Les faits violents correspondent aux crimes commis dans la communauté où se trouve le magasin. Ils n’ont aucun rapport avec les propriétaires, les employés ou les commerces. Le seul lien est qu’ils se déroulent à proximité».

Des individus brandissent des pancartes lors d’une marche contre la violence armée à Chicago le 31 décembre 2020, dans un contexte de recrudescence des meurtres dans la ville (768 cette année-là), ce qui représente une hausse de 252 meurtres par rapport à l’année 2019 (516). (AFP)
Des individus brandissent des pancartes lors d’une marche contre la violence armée à Chicago le 31 décembre 2020, dans un contexte de recrudescence des meurtres dans la ville (768 cette année-là), ce qui représente une hausse de 252 meurtres par rapport à l’année 2019 (516). (AFP)

D’après M. Nijem, jamais auparavant la municipalité n’avait fermé des magasins qui appartenaient à des personnes qui ne sont pas Arabes ou musulmanes en réponse à des crimes commis à proximité.

Il évalue à moins de 5% la part des commerces de détail de petite taille que possèdent et gèrent les Arabes et les musulmans, dans une ville qui compte près de 3 millions d’habitants. «Plutôt que de combattre la criminalité, ils s’en prennent aux commerces des Arabes et des musulmans!», s’exclame M. Nijem.

Ce dernier souligne que la fermeture d’un établissement (une station-service, par exemple) fait perdre à la ville, au comté et à l’État les recettes fiscales générées par les ventes. Ces pertes se situent, selon lui, entre 10 000 et 20 000 dollars par mois. Par ailleurs, les employés sont privés de leur emploi, explique M. Nijem.

M. Villegas s’est engagé à mener, de concert avec d’autres conseillers municipaux, une bataille acharnée pour que cessent les fermetures discriminatoires. «Les problèmes surviennent lorsque la ville dispose d’une force de frappe. […] On ne sait jamais comment cette dernière opère, ou encore quelle procédure est appliquée aux propriétaires d’entreprises qui sont affectés. Nous souhaitons instaurer une procédure régulière et équitable», explique-t-il.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Des rapports internes concluent à un climat antisémite et anti-musulman à Harvard

Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël". (AFP)
Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël". (AFP)
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  • Harvard, comme d'autres universités américaines de renom, Columbia en particulier, est accusée par le président républicain d'avoir laissé prospérer l'antisémitisme sur son campus pendant les mouvements étudiants contre la guerre à Gaza menée par Israël
  • Un premier groupe de travail sur l'antisémitisme et les positions anti-Israël, composé principalement de membres du corps enseignant mais aussi d'étudiants

NEW YORK: Deux rapports distincts sur Harvard publiés mardi par l'université ont établi qu'un climat antisémite et anti-musulman s'était installé sur le campus de la prestigieuse université américaine, dans le viseur de Donald Trump, et la pressent d'agir pour y remédier.

Ces deux rapports de plusieurs centaines de pages, construits notamment à partir de questionnaires et de centaines de témoignages d'étudiants et d'encadrants menés depuis janvier 2024, sont rendus au moment où l'université implantée près de Boston (nord-est) s'est attiré les foudres de Donald Trump, qui l'a dernièrement dépeinte en "institution antisémite d'extrême gauche", "foutoir progressiste" et "menace pour la démocratie".

Harvard, comme d'autres universités américaines de renom, Columbia en particulier, est accusée par le président républicain d'avoir laissé prospérer l'antisémitisme sur son campus pendant les mouvements étudiants contre la guerre à Gaza menée par Israël après l'attaque du Hamas le 7 octobre 2023.

Un premier groupe de travail sur l'antisémitisme et les positions anti-Israël, composé principalement de membres du corps enseignant mais aussi d'étudiants, a établi que les deux phénomènes "ont été alimentés, pratiqués et tolérés, non seulement à Harvard, mais aussi plus largement dans le monde universitaire".

Le rapport exhorte l'université pluricentenaire à "devenir leader dans la lutte contre l'antisémitisme et les positions anti-Israël".

Un autre groupe de travail distinct, lui consacré aux positions anti-musulmans, anti-arabes et anti-Palestiniens, a conclu à "un sentiment profondément ancré de peur parmi les étudiants, les enseignants et le personnel". Les personnes interrogées décrivent "un sentiment de précarité, d'abandon, de menace et d'isolement, ainsi qu'un climat d'intolérance omniprésent", écrivent ses auteurs.

"Harvard ne peut pas - et ne va pas - tolérer l'intolérance. Nous continuerons à protéger tous les membres de notre communauté et à les préserver du harcèlement", s'engage dans une lettre accompagnant les deux rapports le président de Harvard, Alan Garber, à l'initiative des deux rapports, en promettant de "superviser la mise en oeuvre des recommandations" préconisées.

Harvard, l'université la plus ancienne des Etats-Unis et une des mieux classées au monde, s'est distinguée en étant la première à attaquer en justice l'administration Trump contre un gel de plus de deux milliards de dollars de subventions fédérales, décidé après que la célèbre institution a refusé de se plier à une série d'exigences du président.

Donald Trump, qui reproche aux universités d'être des foyers de contestation progressiste, veut avoir un droit de regard sur les procédures d'admission des étudiants, les embauches d'enseignants ou encore les programmes.

L'accusation d'antisémitisme est fréquemment employée par son administration pour justifier ses mesures contre les établissements d'enseignement supérieur, ainsi que contre certains étudiants étrangers liés aux manifestations contre la guerre à Gaza.


Canada: le libéral Mark Carney donné vainqueur après une campagne centrée sur Trump

Le Premier ministre canadien et chef du Parti libéral, Mark Carney, salue ses partisans lors d'une fête de victoire à Ottawa (Ontario), le 29 avril 2025. (AFP)
Le Premier ministre canadien et chef du Parti libéral, Mark Carney, salue ses partisans lors d'une fête de victoire à Ottawa (Ontario), le 29 avril 2025. (AFP)
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  • Le Parti libéral de Mark Carney a remporté lundi les législatives canadiennes, selon les projections des médias locaux, après une campagne centrée sur les menaces du président américain Donald Trump contre le pays
  • Toutefois, selon des résultats encore préliminaires, les libéraux pourraient rester minoritaires au Parlement et seraient donc contraints de gouverner avec l'appui d'un autre parti

OTTAWA: Le Parti libéral de Mark Carney a remporté lundi les législatives canadiennes, selon les projections des médias locaux, après une campagne centrée sur les menaces du président américain Donald Trump contre le pays.

Toutefois, selon des résultats encore préliminaires, les libéraux pourraient rester minoritaires au Parlement et seraient donc contraints de gouverner avec l'appui d'un autre parti.

Il y a quelques mois encore, la voie semblait toute tracée pour permettre aux conservateurs canadiens emmenés par Pierre Poilievre de revenir aux affaires, après dix ans de pouvoir de Justin Trudeau.

Mais le retour de Donald Trump à la Maison Blanche et son offensive inédite contre le Canada, à coups de droits de douane et de menaces d'annexion, ont changé la donne.

A Ottawa, où les libéraux sont réunis pour la soirée électorale dans une aréna de hockey, l'annonce des résultats a provoqué une salve d'applaudissements et des cris enthousiastes.

"Je suis si heureuse", lâche sur place Dorothy Goubault, originaire de la région des Mille Iles en Ontario. "Je suis contente car nous avons quelqu'un qui peut parler à M. Trump à son niveau. M. Trump est un homme d'affaires. M. Carney est un homme d'affaires, et je pense qu'ils peuvent tous les deux se comprendre".

Pour le ministre Steven Guilbeault, "les nombreuses attaques du président Trump sur l'économie canadienne, mais aussi sur notre souveraineté et notre identité même, ont vraiment mobilisé les Canadiens", a-t-il déclaré sur la chaine publique CBC.

Et les électeurs "ont vu que le Premier ministre Carney avait de l'expérience sur la scène mondiale".

Mark Carney n'avait pas encore pris la parole à minuit locales (04H00 GMT), tandis que se poursuivait le dépouillement.

Dans les longues files devant les bureaux de vote toute la journée, les électeurs ont souligné l'importance de ce scrutin, parlant d'élections historiques et déterminantes pour l'avenir de ce pays de 41 millions d'habitants.

- "Chaos" -

À 60 ans, Mark Carney, novice en politique mais économiste reconnu, a su convaincre une population inquiète pour l'avenir économique et souverain du pays qu'il était la bonne personne pour piloter le pays en ces temps troublés.

Cet ancien gouverneur de la banque du Canada et de Grande-Bretagne n'a cessé de rappeler pendant la campagne que la menace américaine est réelle pour le Canada.

"Ils veulent nos ressources, notre eau. Les Américains veulent notre pays", a-t-il prévenu.

"Le chaos est entré dans nos vies. C'est une tragédie, mais c'est aussi une réalité. La question clé de cette élection est de savoir qui est le mieux placé pour s'opposer au président Trump?", a-t-il expliqué pendant la campagne.

Pour faire face, il a promis de maintenir des droits de douane sur les produits américains tant que les mesures de Washington seront en place.

Mais aussi de développer le commerce au sein de son pays en levant les barrières douanières entre provinces et de chercher de nouveaux débouchés, notamment en Europe.

En face, le chef conservateur, qui avait promis des baisses d'impôts et des coupes dans les dépenses publiques, n'a pas réussi à convaincre les électeurs de ce pays du G7, 9e puissance mondiale, de tourner le dos aux libéraux.

Pierre Poilievre aura aussi souffert jusqu'au bout de la proximité, de par son style et certaines de ses idées, avec le président américain, ce qui lui a aliéné une partie de l'électorat, selon les analystes.

Au QG des conservateurs à Ottawa, Jason Piche se dit toutefois "surpris" des résultats, "je pensais que ce serait plus serré que ça".

Un peu plus loin, Jean-Guy Bourguignon, homme d'affaires de 59 ans, se dit carrément "très triste". "Est-ce que c'est vraiment ça le pays dans lequel nous voulons vivre?", demande-t-il alors qu'il énumère les politiques des libéraux, qu'il juge liberticides.

Près de 29 millions d'électeurs étaient appelés aux urnes dans ce vaste pays du G7 qui s'étend sur six fuseaux horaires. Et plus de 7,3 millions de personnes avaient voté par anticipation, un record.


Ukraine: Poutine annonce une trêve du 8 au 10 mai, «tentative de «manipulation»» répond Zelensky

Le président russe Vladimir Poutine prononce un discours lors d'une réunion du Conseil des législateurs à Saint-Pétersbourg, le 28 avril 2025. (AFP)
Le président russe Vladimir Poutine prononce un discours lors d'une réunion du Conseil des législateurs à Saint-Pétersbourg, le 28 avril 2025. (AFP)
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  • Le président russe Vladimir Poutine a annoncé lundi une trêve sur le front en Ukraine durant trois jours du 8 au 10 mai
  • Son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky denonçant une "tentative de manipulation"

MOSCOU: Le président russe Vladimir Poutine a annoncé lundi une trêve sur le front en Ukraine durant trois jours du 8 au 10 mai, à l'occasion de la commémoration de la victoire sur l'Allemagne nazie, son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky denonçant une "tentative de manipulation".

Le président américain Donald Trump exhorte Kiev et Moscou à conclure un cessez-le-feu et un accord de paix, trois ans après le début de l'offensive russe ayant déjà fait des dizaines de milliers de morts civils et militaires.

"A partir de minuit entre le 7 et le 8 mai, et jusqu'à minuit entre le 10 et le 11 mai, la partie russe annonce un cessez-le-feu", a indiqué le Kremlin dans un communiqué. "Pendant cette période, toutes les opérations de combat seront arrêtées".

D'après la présidence russe, Vladimir Poutine a pris cette décision unilatérale "pour des raisons humanitaires" et à l'occasion des célébrations du 80e anniversaire de la victoire sur l'Allemagne nazie.

Pour M. Zelensky, au contraire, "il y a désormais une nouvelle tentative de manipulation". "Pour une raison, a-t-il dit dans son adresse quotidienne, tout le monde doit attendre le 8 mai et ne cesser le feu qu'ensuite pour garantir le silence" lors de la parade du 9 mai sur la place Rouge à Moscou.

La Russie commémore le 9 mai cet événement dont Vladimir Poutine a fait un marqueur essentiel de la puissance retrouvée du pays. Les dirigeants d'une vingtaine de pays sont attendus pour un défilé militaire en grande pompe sur la place Rouge à Moscou.

Le Kremlin a dit considérer que l'Ukraine "devrait suivre cet exemple", tout en prévenant que les forces russes "fourniront une réponse adéquate et efficace" en cas de violation de la trêve.

Vladimir Poutine avait déjà déclaré un bref cessez-le-feu de 30 heures les 19 et 20 avril à l'occasion de Pâques. Les deux camps s'étaient ensuite accusés de l'avoir violé, même si une baisse de l'intensité des combats avait été ressentie dans plusieurs secteurs du front.

"Accroître la pression sur la Russie"

La Maison Blanche a soutenu lundi que Donald Trump souhaitait un cessez-le-feu "permanent" en Ukraine et pas seulement une trêve temporaire.

Les Etats-Unis, jusque-là le premier soutien de l'Ukraine, veulent tourner la page aussi vite que possible quitte, craint Kiev, à accepter des dispositions très favorables à Moscou.

Le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio a dit dimanche à son homologue russe, Sergueï Lavrov, qu'il était temps de mettre fin à une "guerre insensée" en Ukraine, selon un communiqué lundi.

De son côté, le président français Emmanuel Macron a affirmé que "dans les huit à dix jours prochains, nous allons accroître la pression sur la Russie", dans un entretien publié par le magazine Paris Match.

Il a estimé avoir "convaincu les Américains de la possibilité d’une escalade des menaces, et potentiellement de sanctions" contre Moscou.

Conditions maximalistes de Poutine 

La Russie maintient des conditions maximalistes concernant l'Ukraine, dont elle veut la reddition et le renoncement à rejoindre l'Otan, tout en s'assurant de pouvoir garder les territoires ukrainiens annexés.

La reconnaissance internationale de l'annexion russe de la Crimée et de quatre autres régions ukrainiennes est une condition "impérative" à la paix, a encore martelé lundi le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov.

La Russie a annexé la péninsule ukrainienne de Crimée en mars 2014, ce que la communauté internationale, Etats-Unis compris, n'a jamais reconnu.

En septembre 2022, quelques mois après le déclenchement de son assaut à grande échelle, elle a aussi revendiqué l'annexion de quatre régions ukrainiennes qu'elle occupe partiellement, celles de Donetsk, Lougansk, Kherson et Zaporijjia.

La Russie, qui a l'avantage sur le front, a revendiqué lundi la prise de Kamyanka, un village de la région de Kharkiv, dans le nord-est de l'Ukraine.

La Corée du Nord a pour la première fois reconnu lundi avoir envoyé des troupes en Russie et qu'elles avaient aidé Moscou à reprendre aux Ukrainiens les zones de la région de Koursk dont ils s'étaient emparés.

Trois personnes ont par ailleurs été tuées lundi dans une attaque russe contre un village de la région de Donetsk (est), selon les services du procureur régional.