Parkour: Itinéraire vertigineux d'un duo sur les toits de Paris

Au coeur de Paris, une mince ouverture dans un toit en zinc mène sur un terrain de jeu vertigineux et privilégié pour Charles Poujade et Mélanie Buffetaud (Photo, AFP).
Au coeur de Paris, une mince ouverture dans un toit en zinc mène sur un terrain de jeu vertigineux et privilégié pour Charles Poujade et Mélanie Buffetaud (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 01 août 2022

Parkour: Itinéraire vertigineux d'un duo sur les toits de Paris

  • Le trio déniche l'échelle de secours au dernier étage, grimpe à pas de velours et en silence pour rejoindre les hauteurs via une petite fenêtre
  • Dans l'immeuble d'en face, celui de La Samaritaine, plusieurs personnes sont interpellées en les voyant parcourir les toits en courant, sautant, vrillant

PARIS: Au coeur de Paris, une mince ouverture dans un toit en zinc mène sur un terrain de jeu vertigineux et privilégié pour Charles Poujade et Mélanie Buffetaud. En couple, ils s'adonnent au parkour et voyagent au dessus de la ville.

En ce matin particulièrement chaud, le duo n'a que peu d'options pour une balade sur les hauteurs. Il faut éviter le trop plein de zinc, brûlant et glissant, et trouver un immeuble où ils pourront entrer et se hisser sur le dessus.

Ils ont fait appel à U'Mood (nom d'artiste), un ami de la communauté du parkour, cet art du déplacement consistant à franchir des obstacles avec son corps, pour accéder aux toits de Paris. Leur choix se porte sur une belle bâtisse de la rue de Rivoli après une tentative infructueuse près du centre Pompidou.

Le trio déniche l'échelle de secours au dernier étage, grimpe à pas de velours et en silence pour rejoindre les hauteurs via une petite fenêtre. Une fois celle-ci franchie, les "tracers" -  le nom donné aux pratiquants du parkour - remontent l'échelle et referment la lucarne. Un monde sans limite s'ouvre à eux.

"L’idée est d’être le plus discret et invisible possible. Si les voisins nous voient, la mission est échouée pour nous. Ne laisser aucune trace, qu'ils n’aient même pas l’idée que quelqu'un est allé sur leur toit", raconte à l'AFP Charles Poujade.

Voler

Dans l'immeuble d'en face, celui de La Samaritaine, plusieurs personnes sont interpellées en les voyant parcourir les toits en courant, sautant, vrillant. A quelques centimètres de leurs pieds, après un énième double salto, c'est le vide.

"Au début j'avais le vertige. Enfin pas un vrai vertige mais la peur du vide plutôt. On combat nos peurs, on les affronte et on travaille dessus. Je me suis mis à deux mètres de haut tous les jours, à me tenir debout sans perdre l’équilibre, et je suis allé un peu plus haut chaque jour", souligne Poujade, qui "vole un peu sur les toits comme les personnages de films".

Adepte du parkour depuis quatorze ans, Poujade s'entraîne exclusivement au sol et "monte sur les hauteurs de temps en temps". Depuis quatre ans ses balades parisiennes aériennes se font avec sa compagne, Mélanie Buffetaud, et il sont un des rares couples à évoluer ensemble.

Encore tendre dans la pratique, Mélanie Buffetaud, photographe, ne tente jamais le diable et se régale des images qui s'offrent à elle.

"C’est la seule façon que j'ai trouvé pour aimer la ville. Tu as accès à des endroits et des vues exceptionnelles qui te donnent envie de créer. Une lumière, des ombres, une perspective que je vais avoir envie de capturer. Il y a aussi le fait que c'est un endroit privilégié, il faut des compétences pour y aller, tu fais confiance à un bout de cheminée, un bout de tôle, tes appuis. C’est de la zénitude, c’est Paris mais calme", confie cette Clermontoise de 27 ans.

Contemplation

Le tandem, qui conte ses aventures et son mode de vie dans un livre paru récemment ("Voyous", aux éditions Michel Lafon), s'est fait une place de choix sur la scène de l'art du déplacement avec leurs deux chaînes Youtube (près de 3 millions d'abonnés réunis).

L'une de leurs vidéo - une course poursuite sur la plage en mode parkour - totalise quelque 125 millions de vues un an après sa diffusion.

Depuis ce succès, ils peuvent financer tous leurs projets, qu'ils étendent à du divertissement sportif; Poujade est l'un des candidats majeurs et réguliers du jeu télé Ninja Warriors et tous deux ont été sacrés champions du monde en 2019 de Chase Tag, un nouveau sport qui s'apparente au jeu du chat et de la souris.

Sur les toits de Paris, Charles et Mélanie contemplent une dernière fois la beauté de la ville avant de se faufiler de nouveau par la petite fenêtre qui les ramène en bas.

Tout est remis en place, sans bruit ni mot. Ils redescendent par les escaliers puis ouvrent la porte de l'immeuble sur le vacarme parisien.


Blocage de l'aide humanitaire à Gaza : deux enquêtes pour complicité de génocide ouvertes en France

Cette photographie montre le palais de justice de Bayonne, dans le sud-ouest de la France, le 28 mai 2025. (Photo de Gaizka IROZ / AFP)
Cette photographie montre le palais de justice de Bayonne, dans le sud-ouest de la France, le 28 mai 2025. (Photo de Gaizka IROZ / AFP)
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  • Deux juges d'instruction spécialisés du pôle crimes contre l'humanité du tribunal judiciaire de Paris ont été désignés pour superviser l'enquête, selon une source proche du dossier.
  • La justice française est compétente au regard de la nationalité française des personnes visées.

PARIS : Deux instructions ont été ouvertes en France en mai, à la suite de plaintes, pour complicité de génocide et de crimes contre l'humanité visant des Franco-Israéliens soupçonnés d'avoir participé à des actions de blocage de l'aide humanitaire à Gaza entre janvier et mai 2024.

Deux juges d'instruction spécialisés du pôle crimes contre l'humanité du tribunal judiciaire de Paris ont été désignés pour superviser l'enquête, selon une source proche du dossier.

Ces instructions ont été ouvertes à l'origine à la suite de deux plaintes avec constitution de partie civile déposées en novembre 2023 à Paris : l'une par l'association Avocats pour la justice au Proche-Orient et l'association Coordination des appels pour une paix juste au Proche-Orient, et l'autre par l'Union juive française pour la paix (UJFP).

Le Parquet national antiterroriste (Pnat) a indiqué vendredi avoir ouvert ces deux informations pour « des chefs de complicité de génocide, provocation publique et directe au génocide suivie d’effet et complicité de crimes contre l’humanité, entre le 1er janvier et le 31 mai 2024 sur le territoire d’Israël, d’Égypte et de Gaza ». 

Dans sa plainte, l'UJFP dénonçait « l'organisation, la participation et l'appel à participer à des actions concrètes de blocage de l'aide humanitaire à destination du territoire occupé de Gaza, notamment en empêchant physiquement le passage des camions aux postes-frontières contrôlés par l'armée israélienne ».

Selon une autre source proche du dossier, le réquisitoire introductif du parquet national antiterroriste (Pnat) pour cette plainte date du 21 mai et vise au moins une association et deux personnes physiques pour des faits qui se seraient déroulés aux postes-frontières de Nitzana et de Kerem Shalom.

En droit français, le réquisitoire introductif est un acte de procédure par lequel le parquet saisit le juge d'instruction.

La justice française est compétente au regard de la nationalité française des personnes visées.

« Nous sommes très satisfaites de cette décision, qui est parfaitement cohérente avec la démonstration factuelle et juridique ainsi que les preuves objectives apportées par les parties civiles. Nous attendons de voir si la suite de l'instruction sera tout aussi cohérente », ont réagi auprès de l'AFP les avocates des plaignants, Mes Damia Taharraoui et Marion Lafouge.

« La période de prévention », c'est-à-dire la période à laquelle se sont déroulés les faits visés par l'enquête, « remonte à janvier 2024, à un moment où personne ne voulait entendre parler de génocide », ont-elles souligné.

Leur plainte avec constitution de partie civile pour complicité de génocide et incitation à la commission d'un génocide vise des figures d'Israël is forever et de Tzav-9, deux associations pro-Israël présentées comme ayant la nationalité française.

Celle d'Avocats pour la justice au Proche-Orient et de la Coordination des appels pour une paix juste au Proche-Orient (CAPJPO) - Europalestine, s'appuie notamment sur des photos, des vidéos et des prises de parole publiques pour accuser des responsables d'Israël is forever d'avoir bloqué des véhicules humanitaires.

Israël fait face à une pression internationale croissante pour mettre fin à la guerre qui ravage Gaza.

En janvier 2024, la Cour internationale de justice (CIJ) a appelé Israël à prendre toutes les mesures nécessaires pour empêcher tout acte de génocide. Mi-mai, le chef des opérations humanitaires de l'ONU a aussi exhorté les dirigeants mondiaux à « agir pour empêcher un génocide ».

Un certain nombre d'actions judiciaires ont été entreprises en lien avec ce « génocide » imputé à Israël, notamment en Suisse, aux Pays-Bas ou encore en Allemagne.

En France, vendredi, une grand-mère accusant les autorités israéliennes d'être responsables de la mort de ses deux petits-enfants français à Gaza en octobre 2023 a déposé une plainte avec constitution de partie civile contre X pour meurtre et génocide à Paris.


«Tout ne se règle pas avec la police»: à Argenteuil, des médiateurs contre le harcèlement scolaire

Un piéton descend les escaliers de la Dalle d'Argenteuil, à Argenteuil, dans la banlieue nord de Paris, le 23 avril 2025. (AFP)
Un piéton descend les escaliers de la Dalle d'Argenteuil, à Argenteuil, dans la banlieue nord de Paris, le 23 avril 2025. (AFP)
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  • Depuis une dizaine d'années, Hakim et Mohammed se rendent quotidiennement à la sortie des établissements scolaires, des terrains de sport et dans les quartiers d'Argenteuil (Val-d'Oise)
  • Une façon de déminer des situations explosives sans recourir systématiquement à la répression, dans une ville meurtrie par la mort quatre ans plus tôt d'Alisha, 14 ans, harcelée et jetée dans la Seine par des camarades de collège

ARGENTEUIL: A la sortie du collège mardi midi, Sajaa, 11 ans, se glisse discrètement derrière Hakim, solide gaillard flanqué d'une polaire estampillée "Médiation urbaine" pour lui glisser à l'oreille qu'un élève la frappe. "Je vais lui parler à la sortie", répond fermement le médiateur.

Depuis une dizaine d'années, Hakim et Mohammed se rendent quotidiennement à la sortie des établissements scolaires, des terrains de sport et dans les quartiers d'Argenteuil (Val-d'Oise). Ces 16 agents municipaux sont formés spécialement pour repérer les cas de harcèlement scolaire et prévenir les rixes.

Une façon de déminer des situations explosives sans recourir systématiquement à la répression, dans une ville meurtrie par la mort quatre ans plus tôt d'Alisha, 14 ans, harcelée et jetée dans la Seine par des camarades de collège.

Pour ce qui concerne Sajaa, Hakim explique qu'il va mettre l'élève harceleur "face à ces actions" devant "tout le monde".

"Si tu leur dis +ce n'est pas bien+, ça rentre par là, ça sort par là", mime-t-il en montrant ses oreilles. Il faut "rentrer dans leur ego", leur dire "tu es un lâche". "C'est ça qui marche avec eux", conclut-il. Souvent, l'élève finit par "s'excuser" et "arrêter".

"Tous les jours, tu dois en remettre une couche", soupire-t-il. Mais "à force de te voir, ça les dissuade".

"Confiance" 

Un dispositif qui fonctionne grâce à la "confiance" que les équipes de médiateurs ont réussi à inspirer aux parents et aux jeunes, expliquent, flattés, Mohammed et Hakim, habitants de toujours du quartier du Val d'Argent, qui ne peuvent traverser une rue sans "checker" tel "chef", tel "beau gosse", telle "petite".

"Beaucoup de jeunes ont un lien particulier avec les médiateurs" qui sont "des capteurs de terrain", explique à l'AFP Chems Akrouf, directeur de la sécurité et de la prévention de la commune d'Argenteuil.

"On va leur dire qu'un jeune a été tabassé ou qui est le bouc émissaire d'une classe", poursuit-il en précisant que les médiateurs "ne sont pas là pour dénoncer à la police, mais pour essayer de diminuer l'agressivité des jeunes".

A l'inverse, un incident détecté par la police doit être "transmis au volet prévention" pour "aller au coeur de la difficulté", détaille M. Akrouf. "Tout ne se règle pas avec la police", affirme cet ancien agent de renseignement, même si dans les cas graves, les familles sont incitées à déposer plainte.

"Un peu délaissés" 

Depuis la mort d'Alisha, les équipes ont été renforcées. Six agents supplémentaires ont été recrutés et l'un est depuis 2023 spécifiquement dédié à la veille sur les réseaux sociaux.

"Toutes ces actions ne visent qu'à une seule chose, ne pas laisser un jeune être isolé", affirme M. Akrouf.

Car "pour un rien, ça peut exploser", soupire Hakim, au volant de sa Scenic grise. Il dit avoir confisqué avec Mohammed "une centaine de couteaux", depuis qu'il a commencé à travailler.

"Il y a beaucoup de familles en détresse, monoparentales, des jeunes un peu délaissés", raconte Hakim. "Le plus compliqué", c'est quand les harceleurs "ne voient pas le mal", déplore-t-il, leur répétant patiemment de se mettre à la place de l'autre.

Mais, parvenu devant le collège Lucie Aubrac, il sourit. Ici, les bagarres permanentes ont cessé, les tensions se sont apaisées. "On n'a plus trop de problèmes de harcèlement. Nos efforts portent leurs fruits."

Des élèves d'un autre collège de la ville, Paul Vaillant Couturier, ont même reçu un prix national, le 21 mai, récompensant leur affiche contre le harcèlement scolaire, qui sera utilisée dans toute la France.

"Ca signifie beaucoup", explique Narjes, 14 ans, l'une des conceptrices de l'affiche, elle-même victime de harcèlement grave en primaire. A l'AFP, en marge de la présentation de leur prix jeudi, elle confie: "Je vois qu'on peut écouter les autres et que je peux me défendre".

 


Mort de deux enfants français à Gaza fin 2023: Israël visé à Paris par une plainte pour génocide

Une manifestante tient une pancarte sur laquelle on peut lire « Gaza silence, nous tuons, arrêtez le génocide » lors d'un rassemblement contre l'envoi de pièces d'équipement militaire à Israël, à Marseille, le 5 juin 2025. (AFP)
Une manifestante tient une pancarte sur laquelle on peut lire « Gaza silence, nous tuons, arrêtez le génocide » lors d'un rassemblement contre l'envoi de pièces d'équipement militaire à Israël, à Marseille, le 5 juin 2025. (AFP)
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  • La mère des enfants, Yasmine Z., blessée comme son troisième enfant et vivant toujours à Gaza, a été condamnée en 2019 en son absence par le tribunal correctionnel de Paris pour financement du terrorisme
  • D'après la plainte, ce bombardement fait partie d'un projet visant à "éliminer la population palestinienne et la soumettre à des conditions d'existence de nature à entraîner la destruction de leur groupe"

PARIS: Une plainte contre X pour meurtre et génocide est déposée vendredi en France par une grand-mère accusant les autorités israéliennes d'être responsables de la mort de ses deux petits-enfants français à Gaza en octobre 2023, a annoncé vendredi à l'AFP l'avocat Arié Alimi.

Cette plainte avec une constitution partie civile vise à obtenir la désignation d'un juge d'instruction, et la Ligue des droits de l'Homme compte s'y joindre.

La nationalité française des victimes pourrait déclencher la compétence directe de la justice française et l'amener à devoir se prononcer sur ces accusations de "génocide", catégoriquement rejetées par Israël comme "scandaleuses", alors qu'à ce stade, les initiatives juridiques en ce sens n'ont pas prospéré.

La plainte de 48 pages concerne la mort de Janna et Abderrahim Abudaher, âgés de 6 et 9 ans, le 24 octobre 2023, soit 17 jours après l'attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien Hamas le 7 octobre 2023 sur le sol israélien.

Elle est déposée par Jacqueline Rivault, la grand-mère maternelle des enfants qui habite en France, pour meurtre et tentative, crime contre l'humanité, génocide et complicité de ces deux crimes.

Selon la plainte, la "violence extrême" et les "bombardements réguliers" de l'armée israélienne sur Gaza après le 7 octobre ont amené la famille à se réfugier dans une maison du nord de la bande de Gaza qui a été visée par "deux missiles de F16 tirés par l'armée israélienne".

La mère des enfants, Yasmine Z., blessée comme son troisième enfant et vivant toujours à Gaza, a été condamnée en 2019 en son absence par le tribunal correctionnel de Paris pour financement du terrorisme pour avoir distribué de l'argent à Gaza à des membres du Jihad islamique et du Gaza entre 2012 et 2013. Un mandat d'arrêt a été émis.

D'après la plainte, ce bombardement fait partie d'un projet visant à "éliminer la population palestinienne et la soumettre à des conditions d'existence de nature à entraîner la destruction de leur groupe".

La plainte est déposée contre X mais vise nommément le Premier ministre Benjamin Netanyahu ainsi que les membres du gouvernement israélien, ainsi que Tsahal.

Israël fait face à une pression internationale croissante pour mettre fin à la guerre qui ravage Gaza, déclenchée par l'attaque du 7-octobre, qui a entraîné la mort de 1.218 personnes côté israélien, en majorité des civils.

En retour, Israël a lancé une campagne militaire de représailles, passant par des bombardements massifs et des combats au sol, qui a tué plus de 54.600 Palestiniens, majoritairement des civils, selon des données du ministère de la Santé du gouvernement du Hamas pour Gaza, jugées fiables par l'ONU.