Les marieuses saoudiennes se modernisent

Une femme saoudienne se rend sur un site offrant des services matrimoniaux. De tels sites s’avèrent être une rude concurrence aux marieuses traditionnelles du Royaume. (AFP)
Une femme saoudienne se rend sur un site offrant des services matrimoniaux. De tels sites s’avèrent être une rude concurrence aux marieuses traditionnelles du Royaume. (AFP)
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Publié le Lundi 02 novembre 2020

Les marieuses saoudiennes se modernisent

  • « Les jeunes doivent prendre conscience que la passion se refroidit, la beauté se fane, mais une base solide pour construire le respect est la seule chose qui dure »
  • Um Nasser a plus de 10 000 abonnés sur son compte Twitter qu’elle utilise pour aider les Saoudiens célibataires à trouver des partenaires potentiels en créant une sorte de « profil de rencontre »

 

RIYAD : Les compétences traditionnelles des marieuses du Royaume ont survécu à de nombreux changements, et elles sont sûres que, malgré les transformations sociales rapides dans la jeune génération et la révolution technologique, elles pourront continuer à pratiquer leur métier.

Puisque les hommes et les femmes ont la possibilité de se rencontrer et d’échanger, et que les attitudes dans le pays sont en train de changer, la pratique du métier de marieuse, auparavant traditionnel, devrait théoriquement diminuer. Cependant, Arab News s’est entretenu avec des femmes qui continuent cette pratique et qui ont révélé que leurs services sont toujours aussi demandés.

Lorsqu’on entend le mot « marieuse », on imagine probablement la femme stricte et dure dans le film « Mulan » de Disney qui a semé la terreur dans le cœur des jeunes femmes chinoises cherchant à faire honneur à leur famille. Mais les marieuses saoudiennes veulent que les gens sachent que ceci ne représente pas du tout la réalité. La plupart d’entre elles ne veulent qu’une chose : un mariage heureux et réussi pour toute personne qui a recours à leurs services.

Um Nasser, une femme bienveillante âgée d’une cinquantaine d’années, a affirmé à Arab News qu'après presque quatre décennies de mariage, ses expériences lui avaient donné un aperçu inestimable de ce qui permet à une relation de fonctionner, et que l'amour n'a quelquefois rien à voir avec cela.

« Quand j’avais 16 ans, je me suis mariée avec le fils d’un ami de la famille. Bien que je ne puisse pas dire que c'était le coup de foudre, nous avons finalement évolué vers le respect et la compréhension mutuels, et notre relation s'est épanouie », raconte-t-elle. « Nous sommes mariés depuis 36 ans, et notre affection et notre respect l’un pour l’autre sont plus forts que jamais ».

D’après Um Nasser, les éléments fondamentaux du mariage ne sont pas l’amour et l’attirance, mais la compréhension et le compromis, ce dont elle pense que beaucoup de jeunes ne réalisent pas lorsqu'ils pensent au mariage.

« Tout le monde rêve d’une histoire d’amour comme dans les contes de fées ou du genre de relation que nous observons sur les réseaux sociaux. Je veux que les jeunes d’aujourd’hui prennent conscience du fait que ce que nous voyons sur Instagram et dans les films est faux. La passion se refroidit, la beauté se fane, mais une base solide pour construire le respect est la seule chose qui dure », dit-elle.

Um Nasser a plus de 10 000 abonnés sur son compte Twitter qu’elle utilise pour aider les Saoudiens célibataires à trouver des partenaires potentiels en créant une sorte de « profil de rencontre ».

« Je demande à mes clients des informations personnelles détaillées, telles que leur âge, leur taille, leurs demandes spécifiques sur ce qu'ils aimeraient le plus dans un partenaire, etc. Je crée ensuite un tweet dans lequel je partage toutes ces informations avec le  public. Les partenaires potentiels peuvent m’envoyer un message privé exprimant leur intérêt, et si leurs demandes sont compatibles, je peux les mettre en contact », explique-t-elle.

 « Si je reçois des détails d’un client qui, à mon avis, conviendraient à un autre, je peux également les mettre directement en contact, par l’intermédiaire de la personne à qui ils ont demandé de les “représenter” dans la discussion. Pour les femmes, il s'agit généralement d'un parent ou d'un tuteur. Pour les hommes, cette personne pourrait être leur mère, leur sœur ou leur tante », ajoute-t-elle.

Um Nasser a mentionné qu’en près de 20 ans de services matrimoniaux, elle avait marié plus de 300 couples, dont la majorité ont des relations réussies jusqu'à présent.

Le mariage c’est donner et recevoir. Écouter, comprendre et appliquer ce que vous apprenez l’un sur l’autre. Traverser des situations difficiles, écouter les plaintes et les attentes de l’autre, mais aussi respecter ses limites et faire des sacrifices.

Um Mansour, marieuse traditionnelle

« Cela me rend très heureuse de savoir que j'ai aidé des gens à trouver leur partenaire de vie, et certains d'entre eux sont même encore en contact avec moi jusqu’à ce jour », dit-elle.

Toutefois, alors que beaucoup de jeunes trouvent aujourd’hui leurs propres partenaires en raison des changements d’attitude dans le pays, et des possibilités croissantes pour les hommes et les femmes de se rencontrer au travail ou lors d’évènements sociaux, comment les marieuses continuent-elles à travailler ?

Um Mansour, une autre marieuse traditionnelle, a confié à Arab News qu’elle avait acquis une renommée uniquement par le bouche à oreille. « Je n’utilise pas les réseaux sociaux parce que je n’en ai pas besoin. Beaucoup de mes anciens clients me recommandent à leurs amis et leurs familles, et je peux travailler de cette façon ». Selon elle, un mariage est plus qu'une relation : c'est un partenariat, ce qui signifie que tout le monde doit faire le même effort pour faire avancer les choses.

« Compromis, compromis, compromis. Le mariage c’est donner et recevoir. Écouter, comprendre et appliquer ce que vous apprenez l’un sur l’autre. Traverser des situations difficiles, écouter les plaintes et les attentes de l’autre, mais aussi respecter ses limites et faire des sacrifices », insiste-t-elle.

Mansour a déclaré que même si elle ne reçoit plus autant de demandes de personnes âgées de moins de 30 ans de nos jours, ses clients proviennent d'un groupe démographique différent, souvent oublié du public.

« Notre société peut malheureusement avoir une vision négative des femmes divorcées et veuves. Beaucoup de ces dames qui viennent me voir sont des femmes merveilleuses et aimantes qui ont simplement été victimes de circonstances malheureuses. Elles méritent une seconde chance et je veux faire tout ce qui est en mon pouvoir pour leur assurer cela », poursuit-elle.

Mais que pensent les jeunes Saoudiens des services matrimoniaux ? Arab News a demandé à des hommes et des femmes âgés de moins de 30 ans s'ils envisageraient ou non un mariage arrangé et ce qu'ils attendaient d'un partenaire potentiel.

Sarah Almutairi, une femme de 22 ans originaire de Riyad, a affirmé qu'elle était ouverte à l'idée d'un mariage arrangé, à condition qu'elle ait l'occasion de tisser des liens avec la personne qui a été choisie pour elle.

« Je pense que je suis encore un peu jeune pour envisager sérieusement le mariage, mais je crois que ce qui doit arriver arrivera. Si ma famille me proposait quelqu'un qui, selon eux, serait un bon partenaire pour moi, je ne le refuserais pas catégoriquement, mais je ne pense pas que je serais à l'aise d'épouser un étranger. Si nous pouvions nous rencontrer d’abord pendant un certain temps, même sous supervision, et apprendre à nous connaître, je ne m’y opposerais pas», explique-t-elle.

Hussam Alajmi, 30 ans, de Riyad, a déclaré qu’il envisagerait de demander les services d’une marieuse s’il ne rencontrait pas quelqu’un lui-même dans les prochaines années.

« J’espère toujours pouvoir rencontrer quelqu’un au travail ou lors d’un évènement social, mais peut-être que si je ne rencontre personne avant l’âge de 35 ans, j’y penserai. Je suis à un âge où je pense sérieusement à me marier le plus tôt possible », dit-il.

M. Alajmi a mentionné qu’il y avait plusieurs raisons pour lesquelles il ne s'était pas encore marié, la raison principale étant d'ordre financier.
« Le mariage est un engagement financier important, et je ne sais pas si je gagne actuellement assez d’argent pour subvenir aux besoins d’une femme et d’un ménage. Je veux pouvoir subvenir aux besoins de ma femme, même si elle a sa propre source de revenus. C’est ainsi que j’ai été élevé ».

Yasmine Alkhudair, 27 ans, a affirmé que les soucis financiers étaient en grande partie la raison pour laquelle elle ne s'était pas encore mariée, affirmant que l’augmentation des dépenses et la flambée des prix de l'immobilier préoccupaient plusieurs personnes de sa génération.

« Je ne suis pas d'accord avec l'idée que ce sont les hommes qui doivent subvenir aux besoins du ménage et payer le loyer, etc. Dans cette économie, c’est une attente injuste. Quand je me marierai, je voudrais que nous soyons partenaires. Mais certains hommes trouvent ce concept émasculant, en raison de la pression que la société exerce sur eux », souligne-t-elle.

Cependant, Mme Alkhudair a rejeté l'idée des services matrimoniaux traditionnels, affirmant qu'elle souhaitait rencontrer son partenaire de manière « organique ».

« Je veux rencontrer quelqu'un par moi-même et construire une relation avec lui avant de me marier. Je me rends compte que le mariage est plus qu’être amoureux de quelqu'un, mais pour moi, c’est un élément fondamental du processus. Sortir ensemble dans notre société demeure encore un processus étranger, certes, mais je pense que cela peut être fait de manière respectueuse, conformément à nos traditions et à notre religion », précise-t-elle. "C'est de cette manière que je veux rencontrer mon partenaire de vie ».

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


La fête de la musique sous le signe du dialogue culturel franco-saoudien

Du 20 au 26 juin 2025, la Fête de la Musique résonnera dans trois grandes villes d’Arabie saoudite : Riyad, Khobar et Djeddah. (Photo Fournie)
Du 20 au 26 juin 2025, la Fête de la Musique résonnera dans trois grandes villes d’Arabie saoudite : Riyad, Khobar et Djeddah. (Photo Fournie)
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  • Née en France en 1982, la Fête de la Musique s’est imposée comme un événement planétaire célébré dans plus de 120 pays.
  • L’édition 2025 proposera une programmation riche et éclectique, reflet de la vitalité des scènes française et saoudienne contemporaines.

RIYAD : Du 20 au 26 juin 2025, la Fête de la Musique résonnera dans trois grandes villes d’Arabie saoudite : Riyad, Khobar et Djeddah. À l’initiative de l’ambassade de France, en collaboration avec l’Alliance française, Saudi Music Hub, Unstable, Hayy Jameel et MDL Beast, une série d’événements musicaux viendra marquer ce rendez-vous culturel international devenu emblématique.

Née en France en 1982, la Fête de la Musique s’est imposée comme un événement planétaire célébré dans plus de 120 pays. Fidèle à son principe fondateur, elle vise à rendre la musique accessible à tous gratuitement. Elle reste, cette année encore, un puissant vecteur de dialogue culturel. En Arabie saoudite, cette célébration musicale prend une dimension particulière, s’inscrivant dans un contexte de renouveau artistique et d’ouverture culturelle, en pleine résonance avec les objectifs de Vision 2030.

L’édition 2025 proposera une programmation riche et éclectique, reflet de la vitalité des scènes française et saoudienne contemporaines. Des artistes français seront présents, comme Karimouche, figure singulière du spoken word et de la chanson engagée, ou DJ SÔNGE, productrice électro aux univers immersifs et afro-futuristes.

Ces artistes partageront la scène avec des talents saoudiens tels que Kosh, beatmaker fusionnant rythmes traditionnels et basses électroniques, ou Seera, jeune espoir de la scène folk locale. Plusieurs artistes émergents, sélectionnés avec soin en collaboration avec les partenaires saoudiens, viendront compléter cette mosaïque sonore.

Chacune des villes participantes offrira une atmosphère unique. Riyad ouvrira le bal le 20 juin avec une nuit musicale au Unstable, lieu hybride emblématique de la scène urbaine saoudienne. Le 21 juin, Khobar prendra le relais au Saudi Music Hub, un espace dédié à la formation musicale, pour une soirée plus intimiste. Enfin, Djeddah clôturera cette semaine de célébration les 25 et 26 juin, au cœur du centre culturel Hayy Jameel, avec deux concerts présentés par des artistes féminines marquantes.

Au-delà des concerts, ces rencontres musicales seront l'occasion de moments de partage, de découvertes et d'échanges, favorisant la création de liens entre artistes et publics des deux pays. En soutenant la circulation des talents et la coopération artistique, la France réaffirme son engagement en faveur de la diversité culturelle et du dialogue entre les sociétés.

La Fête de la Musique 2025 est ainsi bien plus qu’un simple rendez-vous festif : elle est le symbole vivant d’une amitié en construction, portée par des sons, des voix et des émotions partagées.


La bibliothèque Jadal est une oasis culturelle dans la province orientale de l'Arabie saoudite

Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
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  • Ali Al-Herz a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres, offrant aux visiteurs un espace où la mémoire, la philosophie et la culture prennent vie.
  • adal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

DHAHRAN : Dans le village tranquille d'Umm Al-Hamam, situé dans la province orientale de l'Arabie saoudite, une passion de longue date pour les livres s'est transformée en un havre culturel.

Ali Al-Herz, bibliophile et archiviste littéraire, a transformé sa maison en une bibliothèque d'exception nommée Jadal, un véritable trésor contenant plus de 37 000 livres, plus de 100 000 journaux et magazines, ainsi que des antiquités, dont certaines datent de plus d'un siècle.

Mais Jadal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

Al-Herz a déclaré à Arab News : « Depuis ma naissance, j'ai été entouré des livres de ma mère. J'ai grandi immergé dans cette passion, à tel point qu'elle m'a complètement envahi ; je suis devenu un rat de bibliothèque. »

L'étincelle qui a tout déclenché a été la rencontre d'Al-Herz avec l'épopée Sirat Antar à l'âge de 13 ans. « À partir de cette épopée, et à travers elle, j'ai commencé à explorer d'autres mondes », a-t-il déclaré. 

C'est cette curiosité et cette fascination qui ont finalement conduit Al-Herz à créer l'une des initiatives les plus originales du royaume d'Arabie saoudite.

Le nom « Jadal » signifie « débat » ou « discussion » en arabe, reflétant l'esprit curieux de la bibliothèque. Pour Al-Herz, l'objectif n'est pas seulement de préserver les textes, mais aussi l'idée de questionner et d'explorer les idées.

Al-Herz a déclaré : « J'ai choisi ce nom pour la bibliothèque, car il est profondément ancré dans l'histoire philosophique de la Grèce antique, ainsi que dans notre propre tradition culturelle arabo-islamique, en particulier dans notre héritage religieux. »

L'atmosphère philosophique imprègne les trois salles principales, nommées d'après Socrate, Platon et Aristote, qui accueillent les visiteurs dans un univers dédié à la lecture et à la réflexion. 

Des manuscrits rares, des textes anciens, des journaux et des antiquités ont été soigneusement archivés. Chaque pièce est un murmure du passé qui s'adresse à l'avenir. 

Al-Herz explique : « Même mon intérêt récent pour l'achat de livres s'est principalement orienté vers les éditions rares et les imprimés anciens, afin de créer une harmonie entre patrimoine et modernité. »

Mais Jadal ne se laisse pas envahir par la nostalgie, car Al-Herz organise toutes les deux semaines une réunion littéraire. Cet événement fait revivre une tradition qui était autrefois importante dans la vie intellectuelle des Arabes.

C'est un environnement où écrivains, universitaires et penseurs se réunissent autour d'un café arabe pour échanger des idées dans une atmosphère animée. 

À une époque où les gens recherchent des informations instantanées en ligne, Al-Herz continue d'utiliser des méthodes traditionnelles. « Il y a une lutte permanente entre deux générations », observe-t-il. « La victoire reviendra finalement à cette dernière génération, une fois que ma génération aura disparu. Les bibliothèques papier seront alors transformées en musées. »

Il a peut-être raison, mais pour l'instant, au cœur de la campagne de Qatif, la bibliothèque Jadal continue d'exister, et c'est un lieu où l'encre, la mémoire, le débat et le patrimoine continuent de façonner l'âme culturelle du Royaume. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com 


Amin Maalouf apporte un soutien inattendu aux langues régionales

Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
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  • Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs,
  • Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale.

PARIS : Une initiative d'un collectif visant à enseigner le patrimoine littéraire dans les langues régionales de France a reçu lundi  un soutien inattendu : celui du secrétaire perpétuel de l'Académie française, Amin Maalouf.

M. Maalouf, écrivain franco-libanais, a été élu en 2023 à la tête d'une institution dont la mission est de veiller au rayonnement et à l'intégrité de la langue française.

Toutefois, il soutient la démarche du Collectif pour les littératures en langues régionales, qui suggère un enseignement de ce type au collège ou au lycée, a indiqué ce collectif à l'AFP.

Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs, afin de sensibiliser à la « richesse de la production littéraire » dans d'autres langues que le français. 

« M. Maalouf, comme nous, est convaincu qu'il est nécessaire que les élèves français découvrent ces trésors culturels », écrit ce collectif à M. Bayrou, qui parle lui-même le béarnais.

Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale (de l'alsacien au tahitien, en passant par le basque ou le corse), traduits en français.

On y trouve entre autres un poème en provençal de Frédéric Mistral (prix Nobel de littérature en 1904) intitulé Mirèio, une chronique en breton de Pierre-Jakez Hélias intitulée Bugale ar Republik, un court récit en créole martiniquais de Raphaël Confiant intitulé Bitako-a, ainsi qu'une chanson en picard d'Alexandre Desrousseaux intitulée Canchon dormoire (plus connue sous le nom de P'tit Quinquin).

« Il ne s'agit pas de donner des cours de langues régionales, mais de présenter des œuvres issues des littératures en langues régionales, que ce soit en français ou en version bilingue », précise le collectif.

Idéalement, selon lui, les élèves aborderaient des langues issues d'autres régions que la leur. « Pourquoi seuls les élèves antillais apprendraient-ils qu'il existe une littérature en créole ? », demande ce collectif, qui présente son initiative à la presse lors d'une visioconférence lundi après-midi.