L'Allemagne commémore les cinquante ans de la prise d'otages des Jeux olympiques de Munich

Cette combinaison de photos prises le 6 septembre 1972 montre trois militants capturés par la police allemande à la base aérienne de Fürstenfeldbruck, après l'échec de l'action des forces de police allemandes pour libérer les membres de l'équipe olympique israélienne qui avaient été pris en otage par des militants du groupe Septembre noir pendant les Jeux olympiques de Munich : (de gauche à droite) Ibrahim Mosoud Badran, Samer Mohamed Abdulah et Abed Kair al Dnawly. (Photo par EPU / AFP)
Cette combinaison de photos prises le 6 septembre 1972 montre trois militants capturés par la police allemande à la base aérienne de Fürstenfeldbruck, après l'échec de l'action des forces de police allemandes pour libérer les membres de l'équipe olympique israélienne qui avaient été pris en otage par des militants du groupe Septembre noir pendant les Jeux olympiques de Munich : (de gauche à droite) Ibrahim Mosoud Badran, Samer Mohamed Abdulah et Abed Kair al Dnawly. (Photo par EPU / AFP)
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Publié le Vendredi 02 septembre 2022

L'Allemagne commémore les cinquante ans de la prise d'otages des Jeux olympiques de Munich

  • Cinquante ans après, une cérémonie en présence d'environ 70 proches de victimes et présidée par le chef de l'État allemand, Frank-Walter Steinmeier, se tiendra à 15 heures (13H00 GMT) sur le lieu même de l'épilogue tragique de la prise d'otage
  • Après les menaces de boycott de la commémoration, le gouvernement d'Olaf Scholz a accepté de débloquer une enveloppe de 28 millions d'euros, en partie versée par la Bavière et la ville de Munich

MUNICH : La délicate question de l'indemnisation des victimes enfin soldée, l'Allemagne commémore lundi la prise d'otages des Jeux olympiques de Munich en 1972 au cours de laquelle onze athlètes israéliens avaient été tués par un commando palestinien.

Ni l'Allemagne ni l'Etat hébreu n'ont oublié le «Massacre de Munich», la première attaque terroriste visant des Jeux olympiques.

Cinquante ans après, une cérémonie en présence d'environ 70 proches de victimes et présidée par le chef de l'État allemand, Frank-Walter Steinmeier, se tiendra à 15 heures (13H00 GMT) sur le lieu même de l'épilogue tragique de la prise d'otage. Le président israélien, Isaac Herzog, sera lui aussi présent.

Cette cérémonie menaçait de tourner au fiasco avec la menace de boycott de familles irritées par les propositions allemandes d'indemnisation jugées trop faibles.

Un accord arraché mercredi au terme de décennies de négociations confidentielles a permis de sauver les commémorations.

- Mondovision -

M. Steinmeier, figure morale en Allemagne, pourrait de surcroît devenir le premier dirigeant allemand à présenter des excuses pour les nombreux ratés qui ont entouré la tragédie.

L'assaut de la police, mal préparé et achevé dans un bain de sang, a aussi traumatisé l'Allemagne.

«Ils n'ont pas fait la moindre tentative de sauver des vies», s'était emporté Zwi Zamir, alors chef des services secrets extérieurs (Mossad), dans un compte-rendu déclassifié en 2012.

Le drame s'est de surcroît passé en mondovision, «devant un public de plusieurs milliards de personnes (...) ce qui ne s'est produit sous une forme similaire qu'avec le 11 septembre 2001», rappelle auprès de la radio publique Deutschlanfunk l'historien Markus Brauckmann.

Témoins et survivants continuent d'être hantés par cette prise d'otages.

Les handballeurs est-allemands, logés juste en face de l'appartement occupé par les athlètes israéliens, ont ainsi assisté au manège macabre des terroristes qui ont déposé dans la rue le corps sans vie d'un athlète.

Ces images ont ravivé chez l'ancien capitaine de l'équipe, Klaus Langhoff, les souvenirs de la Seconde guerre mondiale.

«Il y avait toujours quelqu'un, probablement le chef de ce groupe terroriste, qui avait toujours une grenade à la main», se rappelle auprès de l'AFP l'ancien sportif, aujourd'hui âgé de 82 ans. «C'était horrible. Chaque fois que nous regardions par la fenêtre ou sur le balcon, nous voyions cet athlète mort».

- «Obligation historique» -

Le contentieux sur les indemnisations a parachevé le traumatisme.

«Vous ne savez pas ce que nous avons enduré au cours des 50 dernières années», a confié à l'AFP Ankie Spitzer dont le mari Andrei était l'un des entraîneurs tués à Munich.

Après les menaces de boycott de la commémoration, le gouvernement d'Olaf Scholz a accepté de débloquer une enveloppe de 28 millions d'euros, en partie versée par la Bavière et la ville de Munich.

Avec cet accord, l'Allemagne «s'acquitte de son obligation historique envers les victimes et leurs familles, dans le contexte de la relation spéciale germano-israélienne», a salué le gouvernement allemand mercredi, au terme de longues années de négociations confidentielles.

Des documents vont aussi être déclassifiés pour permettre aux historiens allemands et israéliens de se saisir du sujet.

L'ancien joueur de handball Klaus Langhoff, qui a été témoin du saccage des Jeux olympiques de Munich en 1972, montre l'une de ses photos lors d'un entretien avec l'AFP à Rostock, dans le nord-est de l'Allemagne, le 25 août 2022. (Photo : Tobias Schwarz / AFP)
L'ancien joueur de handball Klaus Langhoff, qui a été témoin du saccage des Jeux olympiques de Munich en 1972, montre l'une de ses photos lors d'un entretien avec l'AFP à Rostock, dans le nord-est de l'Allemagne, le 25 août 2022. (Photo : Tobias Schwarz / AFP)

 

EN BREF

- Le 5 septembre 1972 à l'aube, huit membres de l'organisation palestinienne «Septembre noir» pénètrent dans un des appartements occupés par la délégation israélienne au village olympique.

- Ils tuent deux athlètes israéliens et en prennent neuf autres en otage, espérant les échanger contre plus de 200 prisonniers palestiniens.

- Après de longues heures de négociations, l'intervention des services de sécurité allemands sur la base militaire de Fürstenfeldbruck, à une trentaine de kilomètres à l'ouest de Munich, tourne au fiasco.

- Les neuf otages sont tués au cours de l'opération, ainsi qu'un policier ouest-allemand. Cinq des huit preneurs d'otages sont abattus et les trois autres capturés.

- La prise d'otages aura fait au total 18 morts. Un bilan effroyable qui a frappé de stupeur le monde entier et causé pour plusieurs raisons un profond traumatisme en Allemagne.

- La décision du Comité international olympique (CIO) de poursuivre coûte que coûte les Jeux après une simple journée d'interruption avait ainsi choqué.

- L'Allemagne avait en outre misé très gros sur cette organisation, censée tourner la page honteuse des Jeux de Berlin de 1936, vitrine du régime nazi et de sa vision aryenne du monde.

Mais les alertes des services de renseignements sur un risque d'attaque sont ignorées et la sécurité négligée.

Il y a 50 ans, prise d'otages meurtrière aux JO de Munich

Ce mardi 5 septembre 1972 est le 11e jour des Jeux olympiques de Munich, «Jeux de la Joie», si l'on en croit leur devise, censés faire oublier ceux organisés à Berlin en 1936, sous le régime nazi. Un commando palestinien pénètre dans le village olympique: c'est le début d'une prise d'otages qui fera 11 victimes chez les sportifs israéliens.

A l'aube, huit hommes vêtus de survêtements et portant des sacs de sport escaladent la clôture d'enceinte du village olympique et se dirigent vers le 31 rue Connolly, où réside la délégation israélienne. Ceux qui les croisent les prennent pour des athlètes rentrant d'une «virée» nocturne en ville.

Masqués de foulards noirs et armes à la main, les hommes font irruption dans les logements des Israéliens. L'entraîneur Moshe Weinberg et l'haltérophile Yossef Romano sont tués dans l'attaque. Certains parviennent à s'échapper mais neuf sportifs sont retenus sur place, les mains liées dans le dos.

Deux femmes de ménage à proximité donnent l'alerte après avoir entendu des coups de feu.

«Il était entre 4 et 5 heures du matin (...). En ouvrant ma porte, j'ai vu dans la cage d'escalier un homme en civil portant une casquette et brandissant une mitraillette», raconte à l'AFP un premier témoin, logeant dans le même immeuble que les Israéliens.

- «Septembre noir» -

«Peu après 07H00 GMT (08H00 locales), près de 3.000 policiers sont postés dans le village olympique et autour. Des tireurs d'élite sont arrivés et cernent l'immeuble», écrivent les journalistes de l'AFP.

Dans la matinée, l'opération est revendiquée par l'organisation palestinienne «Septembre noir», qui a déjà commis plusieurs actions spectaculaires. Le commando exige la libération de plus de 200 prisonniers détenus en Israël - ce que refuse le gouvernement de Golda Meir -, faute de quoi il exécutera ses otages.

Cet ultimatum est repoussé plusieurs fois tout au long de la journée, au fil des négociations entre les autorités ouest-allemandes et les fedayin.

Pendant ce temps, une foule de plusieurs milliers de personnes s'est massée aux abords du village olympique.

Les épreuves se déroulent normalement depuis le début de matinée et ce n'est qu'à 15H50 locales que les organisateurs annoncent la suspension des JO, jusqu'à l'issue d'une cérémonie d'hommage aux deux victimes de l'attaque prévue le lendemain matin.

Dans cette photo d'archive prise le 5 septembre 1972, des membres du groupe militant palestinien Septembre noir et leurs otages, des membres de l'équipe olympique israélienne, quittent le parking situé sous les appartements de l'équipe olympique israélienne au village olympique de la base aérienne de Fürstenfeldbruck, à Munich, dans le sud de l'Allemagne. (Photo par EPU / AFP)
Dans cette photo d'archive prise le 5 septembre 1972, des membres du groupe militant palestinien Septembre noir et leurs otages, des membres de l'équipe olympique israélienne, quittent le parking situé sous les appartements de l'équipe olympique israélienne au village olympique de la base aérienne de Fürstenfeldbruck, à Munich, dans le sud de l'Allemagne. (Photo par EPU / AFP)

- Fusillade à l'aéroport -

Peu après 22H00, les fedayin et leurs neuf otages sont transportés en autocar vers deux hélicoptères, qui décollent pour l'aéroport militaire de Fürstenfeldbruck, près de Munich. Les officiels allemands ont pris place à bord d'un troisième hélicoptère.

Les négociateurs ont en effet convaincu les preneurs d'otages de rejoindre ce lieu, pour partir au Caire à bord d'un avion mis à leur disposition. En fait, une intervention policière est prévue à l'aéroport, où cinq tireurs d'élite sont positionnés, pour neutraliser le commando et libérer les otages.

La fusillade éclate rapidement. Les échanges de tirs se prolongent, un fedayin lance une grenade dans un hélicoptère qui explose et prend feu.

Vers minuit, le porte-parole du gouvernement fédéral, Conrad Ahlers, affirme que «l'opération de récupération a été couronnée de succès». Selon la police, «tous les otages sont sains et saufs».

Pourtant, les journalistes sur place peuvent constater à la même heure que «la bataille fait rage». «Des rafales de fusils mitrailleurs se font entendre de temps en temps, des coups de feu isolés aussi, sans doute ceux de tireurs d'élite», écrit l'AFP.

Cette photo d'archive prise le 7 septembre 1972 montre un hélicoptère de l'armée calciné à la base aérienne de Fürstenfeldbruck, après la prise d'otages des membres de l'équipe israélienne par un commando palestinien. (Photo par EPU / AFP)
Cette photo d'archive prise le 7 septembre 1972 montre un hélicoptère de l'armée calciné à la base aérienne de Fürstenfeldbruck, après la prise d'otages des membres de l'équipe israélienne par un commando palestinien. (Photo par EPU / AFP)

- «Tous morts» -

Alors que la police annonce une conférence de presse à Munich, l'un des reporters de l'AFP présents à l'aéroport, Charles Biétry, suspectant une diversion, décide de rester sur place avec deux confrères de la presse écrite française.

Il voit sortir dans la nuit «un homme en costume cravate, le visage ravagé par les larmes», racontera-t-il plus tard. «Tout a été manqué, tous les otages sont morts», dit en allemand cet homme, le maire de Munich Georg Kronawitter.

Charles Biétry trouve un couple pour l'amener en voiture jusqu'à une cabine téléphonique d'où il pourra appeler l'agence. «Le plus terrible était d'entendre à la radio les chants de joie qui venaient d'Israël», où on croyait les otages sauvés.

A 02H16 locales, l'AFP annonce que «tous les otages ont été tués». Les autorités allemandes ne confirmeront ce scoop que 56 minutes plus tard.

Onze Israéliens sont donc morts, les neuf otages ainsi que les deux membres de l'équipe tués au début de l'attaque. Un policier ouest-allemand a également été victime de la fusillade. Cinq membres du commando ont été tués, les trois autres arrêtés.

Alors que la polémique sur le fiasco de l'opération policière fait déjà rage, le Comité international olympique (CIO) annonce dans la matinée du 6 septembre que «les Jeux continuent».

«Nous ne pouvons pas tolérer qu'une poignée de terroristes détruise ce noyau de la collaboration internationale et de la bonne volonté que constituent les Jeux Olympiques», déclare son président, Avery Brundage.

Dans le village olympique de Munich, le souvenir lointain de l'attentat

Rares sont les jours où Mechthild Foerster ne passe pas devant la plaque commémorant la prise d'otage sanglante des JO de Munich de 1972. Pourtant, cette habitante de l'ancien village olympique n'a pas l'impression de «vivre dans un château hanté».

Le site où ont été attaqués les membres de la délégation israélienne par le commando de l'organisation palestinienne «Septembre noir», il y a cinquante ans, est aujourd'hui un ensemble pimpant d'habitations et un quartier recherché de la capitale bavaroise.

Au 31 de la Connollystrasse, les assaillants palestiniens masqués de foulards noirs et armes à la main, avaient fait irruption dans les logements des Israéliens. Cette adresse est devenue celle de Mechthild Foerster.

Quand elle a emménagé dans l'immeuble, en 1986, «ce n'est pas comme si j'avais eu la sensation effrayante de devoir vivre dans un château hanté», assure la retraitée de 85 ans.

Dans le bâtiment, les anciens appartements de la délégation israélienne ont été acquis par l'Institut Max-Planck qui y loge certains chercheurs de passage à Munich. Les logements voisins, comme celui de Mme Foerster, sont habités.

Une plaque commémorative, en allemand et en hébreu, rend hommage aux onze Israéliens tués le 5 septembre 1972.

Lorsqu'avec son mari elle a obtenu un logement au village olympique, l'octogénaire ignorait qu'il était situé dans l'immeuble de la tragédie. «On l'a su assez rapidement quand même, avec la plaque devant l'immeuble». Mais «la vie continue et les plaies doivent être pansées», estime-t-elle.

Dès 1973, le village olympique reconverti a d'ailleurs accueilli ses premiers habitants, rappelle Mme Foerster, dont la belle-soeur avait emménagé dans le lotissement cette année-là.

- «Nulle par ailleurs» -

Le site de 40 hectares, adossé à l'immense parc olympique de 80 hectares, est devenu un quartier beaucoup plus plaisant qu'à ses débuts.

«Il faisait particulièrement chaud à l'intérieur, parce que finalement ce n'était qu'un assemblage de béton, une sorte de montagne qui chauffe l'été», se rappelle la résidente.

«Et si nous n'avions pas eu beaucoup de plantes presque partout, ce serait invivable en été. Maintenant c'est devenu très agréable», explique-t-elle en souriant, de retour de ses courses effectuées en vélo.

Le village, avec ses chemins de pavés rouges et jaunes et ses tuyaux colorés surélevés qui guident les visiteurs, est aujourd'hui un lieu de résidence tranquille pour les retraités et les familles.

Notamment car aucune voiture ne circule à la surface, les voies de circulation ayant été conçues en souterrain.

«On peut laisser les enfants devant la maison, aucune voiture ne circule», se félicite Charlotte Haupt, mère d'un petit garçon de 18 mois.

Elle ne se verrait vivre «nulle part ailleurs à Munich avec des enfants». Arrivée au village en tant qu'étudiante en 2010 en colocation, elle y vit depuis 2016 avec son compagnon.

«C'est un village, mais dans le sens positif du terme. Les habitants s'entraident, on se dit bonjour le matin, on se connaît», décrit-elle.

Même si reconnaît Tina Wild, jeune mère de famille, «il y a des quartiers plus intéressants» et plus animés dans la deuxième ville allemande.

Situé à un peu plus de six kilomètres du centre de Munich, dont le marché immobilier compte parmi les plus chers d'Europe, l'ancien village olympique accueille aussi une résidence étudiante, avec des baux limités à six semestres.

Celle-ci a été aménagée dans la partie du complexe réservée, à l'époque des JO, aux athlètes féminines. Car en 1972, ces dernières étaient hébergées dans un quartier séparé des hommes, une pratique qui n'a plus cours aujourd'hui.

Après le choc de Munich en 1972, la campagne d'assassinats ciblés du Mossad

Après le meurtre de 11 de ses athlètes par un commando palestinien aux JO de Munich en 1972, un maître-mot s'impose à nouveau en Israël: plus jamais. Rapidement, le Mossad se lance à la traque de ses ennemis dans une campagne d'assassinats ciblés.

Mais Israël ne peut intervenir militairement en sol allemand. Et l'intervention des services allemands s'achève par la mort des otages. En Israël, c'est la consternation. Des Juifs tués de nouveau en Allemagne, l'écho de la Shoah retentit.

«C'était un vrai choc. La nature des assassinats, l'impuissance des athlètes et le fait que l'attaque soit sur le sol allemand, cela avait une résonance particulière», confie à l'AFP l'ex-Premier ministre Ehud Barak, à l'époque chef d'une unité d'élite de l'armée. «Il y avait un profond chagrin, beaucoup de colère (...) et aussi le sentiment non-dit d'une revanche à prendre.»

«La Première ministre de l'époque Golda Meir ne savait pas quoi faire. Aharon Yariv, son conseiller sur les affaires de terrorisme et le chef du Mossad, Zvi Zamir, viennent la voir (...) et disent une chose: nous devons maintenant détruire Septembre noir», raconte l'historien israélien Michael Bar Zohar.

«Et ils ajoutent: nous ne pouvons pas tuer tous les terroristes de Septembre noir, mais si nous arrivons, et je cite, à +écraser la tête du serpent+, c'est-à-dire à en tuer le chef, nous allons réussir à stopper cette organisation. Golda hésite énormément», ajoute-t-il. «Doit-elle autoriser des assassinats un peu partout en Europe et au Moyen-Orient? Elle dit oui.»

Le Mossad, le service de renseignement extérieur, lance alors l'opération «Colère de Dieu», qui deviendra célèbre. Son but: assassiner les dirigeants palestiniens de Septembre noir où qu'ils soient.

Les mois suivants, des têtes du groupe et parfois des proches de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), commencent à tomber en Europe. Des actions du Mossad opérant dans l'ombre même si Israël ne revendique aucun des assassinats.

- Une femme nommée Ehud Barak -

Mais les cibles d'Israël ne transitent pas toutes par l'Europe. Certaines se planquent à Beyrouth, comme Mohammed Youssef al-Najjar, Kamal Adwan et Kamal Nasser.

Dans la nuit du 9 au 10 avril 1973, l'unité d'élite de l'armée «Sayeret Matkal», sous la direction d'Ehud Barak, et le Mossad mènent une opération digne de Hollywood pour abattre les trois leaders palestiniens dans leurs appartements d'un quartier chic de Beyrouth.

Le commando embarque dans des bateaux lance-missiles, puis des zodiacs pour la capitale libanaise où l'attendent des agents du Mossad munis de véhicules de location et prétendant être des touristes.

Le but était d'accoster la nuit, de filer en vitesse aux appartements, d'abattre les trois hommes puis de retourner par bateau en Israël.

«Mais en nous préparant, il nous est apparu évident qu'un groupe de 15 jeunes hommes déambulant après minuit dans une rue (de Beyrouth) où ils ne peuvent pas se payer un appartement serait suspect. Alors nous avons décidé de déguiser quatre hommes en femmes (...) J'étais l'une des femmes», raconte M. Barak, aujourd'hui âgé de 80 ans.

«J'étais une brunette, j'avais une perruque, du rouge à lèvres et du fard bleu sur les yeux. Nous avons utilisé des chaussettes de soldats pour nous faire des seins. Nous cachions nos armes sous nos vestes et des explosifs miniatures dans nos sacs. Des grenades aussi», ajoute-t-il.

Arrivée à Beyrouth, l'équipe se divise en groupes, fonce vers les appartements. Les Israéliens essuient des tirs nourris mais abattent leurs trois cibles. L'opération fait aussi des victimes civiles libanaises. Et deux soldats israéliens sont tués.

Le commando reprend la mer pour Israël. Au petit matin, Ehud Barak rentre chez lui, des traces de maquillage au visage. «Pendant un instant, (mon épouse) était mal à l'aise. Elle m'a dit: 'que se passe-t-il'? Je ne pouvais lui dire mais elle a allumé la radio et on parlait déjà de ce qui s'était passé.»

-  Ali Hassan Salamé, le «Prince rouge» -

Pendant l'opération, M. Barak raconte que lui et ses hommes étaient «très confiants en leurs moyens». Mais cet excès de confiance des Israéliens sera peut-être à l'origine de ratés par la suite.

Trois mois après Beyrouth, le Mossad pense avoir localisé à Lillehammer, en Norvège, Ali Hassan Salamé, considéré comme le chef des opérations de Septembre noir et surnommé «Prince rouge» pour son côté dandy.

Un commando s'y rend pour l'assassiner. Mais le Mossad se méprend et tue à la place Ahmed Boushiki, un serveur d'origine marocaine.

Les agents du Mossad étaient «trop sûrs d'eux-mêmes», décrypte M. Bar Zohar, auteur de plusieurs ouvrages sur le renseignement israélien.

«Ils étaient déjà presque sûrs que c'était une opération de routine et ont ignoré tous les indices prouvant que ce n'était pas lui (Salamé). Par exemple, ils ont vu que l'homme qu'ils suivaient habitait dans un quartier délabré, se promenait à bicyclette et allait seul à la piscine. Ce n'est pas un chef terroriste qui fait ça», dit-il.

Après avoir tué par erreur le Marocain, trois des agents israéliens seront arrêtés en Norvège et passeront 22 mois en prison.

Un an plus tard, le Mossad se lance dans une opération, mais de longue haleine cette fois, pour s'approcher de Salamé. L'agent «D» est envoyé vivre à Beyrouth où il fréquente la même salle de sport que Salamé, se noue d'amitié avec lui et sa femme libanaise, l'ex-Miss Univers Georgina Rizk.

Pendant des années, «D» apprend à connaître les habitudes et les déplacements de Salamé, soupçonné d'être en contact avec les Américains.

«Je le considère comme à la fois un ami et un ennemi mortel. Ce n'est pas facile. Tu sais au fond de toi qu'il doit mourir», témoignera cet agent en 2019 dans un documentaire de la chaîne israélienne 13, sans que son identité ne soit dévoilée.

En janvier 1979, près de cinq ans après le début de l'opération, Salamé est tué dans l'explosion de son véhicule à Beyrouth.

- L'Iran ou la poursuite des assassinats ciblés-

Et la campagne d'assassinats ciblés se poursuit lors des soulèvements palestiniens dans les territoires occupés par l'armée israélienne, avant de bifurquer sur l'Iran, ennemi juré d'Israël.

«Après Munich, Israël a pris conscience que s'il ne prenait pas l'initiative, personne n'allait prévenir les attaques à sa place», explique à l'AFP Ronen Bergman, historien israélien spécialisé dans le Mossad et auteur de l'ouvrage «Lève-toi et tue le premier» publié chez Grasset.

«Il y a un lien direct entre ce qui s'est passé et ce que l'on observe aujourd'hui, le fait qu'Israël utilise les assassinats ciblés comme l'une des principales armes dans sa politique de défense de sa sécurité nationale», ajoute-t-il en référence aux meurtres de scientifiques liés au programme nucléaire iranien imputés à Israël.

«Il est clair que les assassinats ciblés ont été très efficaces contre les organisateurs d'attentats (anti-Israël), mais il y a encore débat à savoir à quel point les assassinats de scientifiques du programme nucléaire, à partir de 2007, sont vraiment efficaces. C'est difficile à mesurer, mais ce qui est certain c'est que cette politique se poursuit», dit M. Bergman.

Israël accuse l'Iran de chercher à se doter de la bombe atomique pour le détruire, ce que Téhéran dément. Il est ainsi opposé aux tractations entre puissances mondiales et l'Iran pour relancer l'accord sur le nucléaire iranien.

Accord ou pas, le Premier ministre israélien Yaïr Lapid, lui, s'est fait clair affirmant que son pays «continuera à faire tout ce qu'il peut pour empêcher l'Iran» d'acquérir l'arme nucléaire.

Les «souvenirs de la guerre ont ressurgi»: le traumatisme d'un témoin des JO de Munich

Les «souvenirs» de la Seconde Guerre mondiale ont «ressurgi»: 50 ans après la sanglante prise d'otages des JO de Munich, le traumatisme d'un témoin direct, l'ex-handballeur est-allemand Klaus Langhoff, reste profond.

Le 5 septembre 1972, Klaus Langhoff, capitaine de la sélection de RDA de handball, et ses coéquipiers occupent un appartement juste en face de celui des athlètes israéliens attaqués par le commando palestinien «Septembre noir».

Les handballeurs se retrouvent ainsi aux premières loges de l'attaque terroriste inédite qui va viser les Jeux et s'achever par un bain de sang après une intervention policière sur une base militaire.

«J'ai été réveillé, ça devait être vers 05h30, par le secrétaire général. Il est venu me voir dans ma chambre et m'a dit +Klaus, informe tous les autres joueurs. C'est là-bas, dans le logement israélien. Il y a des coups de feu et une attaque terroriste+», raconte à l'AFP l'ancien sportif, aujourd'hui âgé de 82 ans mais à la carrure toujours imposante. «Par qui ? Nous ne savions pas encore».

- Grenade en main -

«Je dois dire que ça a été un choc. Un grand choc», confie-t-il 50 ans plus tard, encore ébranlé par ce face à face, à une vingtaine de mètres, avec les terroristes.

Puis est commise la première exécution d'un athlète israélien. «Ils l'ont abattu dans la maison. Et ils l'ont mis dans la rue».

«C'était bien sûr un spectacle horrible. Et ce sportif ou cet entraîneur est resté là un bon moment, jusqu'à ce qu'ils l'emmènent (...) Quand nous regardions dehors, par la fenêtre ou sur le balcon, nous voyions ce sportif mort», raconte M. Langhoff.

«Et en plus, il y avait toujours quelqu'un en bas devant la porte d'entrée, probablement le chef de ce groupe terroriste, qui tenait en permanence une grenade en main, et en haut, sur le balcon et sur le toit, il y avait un autre terroriste qui avait une kalachnikov prête à tirer», décrit-il.

«C'était comme une scène de la guerre», enchaîne celui qui, à l'âge de six ans, avait vu des cadavres de soldats allemands gisant dans des tombes creusées à la hâte. «Ces souvenirs de la guerre ont ressurgi».

Un deuxième athlète israélien est tué, tandis que neuf autres sont pris en otage. Ils trouveront tous la mort lors de l'assaut de la police qui tourne au fiasco.

Les Jeux, conçus pour faire oublier le triste précédent des JO de 1936 à Berlin, transformés en vitrine de la propagande nazie, avaient pourtant bien commencé pour ces athlètes est-allemands, autorisés en pleine Guerre froide à séjourner à l'ouest.

La première semaine, avant l'attaque, avait été «si excellente, si joyeuse», se remémore-t-il.

- Obsession des médailles -

Le lendemain de l'attaque, les Jeux sont suspendus pour la première fois de l'histoire de l'olympisme. L'équipe est-allemande se prépare à une annulation pure et simple mais le Comité international olympique (CIO) décide finalement de poursuivre les compétitions.

Traumatisée, l'équipe de RDA finit à la quatrième place.

A son retour de l'autre côté du Mur, les sportifs sont pris au dépourvu par le manque d'empathie en RDA. «Seules les médailles comptaient».

«Pour nous en RDA, finir quatrième a été un choc pour le système. Il n'y avait pas de camp de prisonniers mais seules les places 1 à 3 étaient récompensées financièrement», explique, amer, M. Langhoff.

Le régime est-allemand, hostile à Israël, qualifie la prise d'otages de «tragédie», à peine mentionnée dans les médias du pays.

Les autorités communistes «ont complètement ignoré cette attaque», elles ne «pensaient qu'à réussir la compétition», soupire M. Langhoff.

La situation n'est guère plus reluisante à l'ouest, entre les lacunes sécuritaires des JO, l'intervention ratée de la police puis par la suite, des réticences à présenter des excuses et à indemniser les familles de victimes.

«Rétrospectivement, il y a eu de grandes omissions dans le processus de prise en compte de la terreur», résume M. Langhoff. «Je ne veux même pas commencer à parler de l'aspect financier. Mais même sur le plan moral, il y a beaucoup de choses qui sont tout simplement incompréhensibles.»

Des excuses de l'Allemagne attendues lors de la commémoration des JO de Munich

La cérémonie de commémoration de la prise d'otages de Munich, en présence d'environ 70 proches de victimes, pourrait donner l'occasion au chef de l'Etat allemand, Frank-Walter Steinmeier, de présenter des excuses pour les nombreux ratés qui ont précipité la tragédie. Le président israélien, Isaac Herzog, sera lui aussi présent.

Cette commémoration menaçait de tourner au fiasco avec la menace de boycott de familles irritées par les propositions allemandes d'indemnisation jugées trop faibles.

Un accord arraché mercredi au terme de décennies de négociations confidentielles a permis de sauver l'événement.

- Mondovision -

Restent les excuses réclamées par les victimes.

Le délégué allemand à la lutte contre l'antisémitisme, Felix Klein, a appelé M. Steinmeier, figure morale en Allemagne, à prononcer les mots attendus.

«Je pense qu'il est temps de présenter des excuses et je pense que le président fédéral trouvera les mots justes», a déclaré Felix Klein aux journaux du groupe de médias Funke vendredi.

Le 5 septembre 1972 à l'aube, huit membres de l'organisation palestinienne «Septembre noir» pénètrent dans un des appartements occupés par la délégation israélienne au village olympique.

Ils tuent deux athlètes israéliens et en prennent neuf autres en otage, espérant les échanger contre plus de 200 prisonniers palestiniens.

Après de longues heures de négociations, l'intervention des services de sécurité allemands sur la base militaire de Fürstenfeldbruck, à une trentaine de kilomètres à l'ouest de Munich, tourne au fiasco.

Les neuf otages sont tués au cours de l'opération, ainsi qu'un policier ouest-allemand. Cinq des huit preneurs d'otages sont abattus et les trois autres capturés.

La prise d'otages aura fait au total 18 morts. Un bilan effroyable qui a frappé de stupeur le monde entier et causé pour plusieurs raisons un profond traumatisme en Allemagne.

La décision du Comité international olympique (CIO) de poursuivre coûte que coûte les Jeux après une simple journée d'interruption avait ainsi choqué.

L'Allemagne avait en outre misé très gros sur cette organisation, censée tourner la page honteuse des Jeux de Berlin de 1936, vitrine du régime nazi et de sa vision aryenne du monde.

Mais les alertes des services de renseignements sur un risque d'attaque avaient été ignorées et la sécurité négligée.

L'assaut de la police, mal préparé et achevé dans un bain de sang, a aussi traumatisé l'Allemagne.

«Ils n'ont pas fait la moindre tentative de sauver des vies», s'était emporté Zwi Zamir, alors chef des services secrets extérieurs (Mossad), dans un compte-rendu déclassifié en 2012.

Le drame s'est de surcroît passé en mondovision, «devant un public de plusieurs milliards de personnes (...) ce qui ne s'est produit sous une forme similaire qu'avec le 11 septembre 2001», rappelle auprès de la radio publique Deutschlanfunk l'historien Markus Brauckmann.

Témoins et survivants continuent d'être hantés par cette prise d'otages.

Les handballeurs est-allemands, logés juste en face de l'appartement occupé par les athlètes israéliens, ont ainsi assisté au manège macabre des assaillants qui ont déposé dans la rue le corps sans vie d'un athlète.

Ces images ont ravivé chez l'ancien capitaine de l'équipe, Klaus Langhoff, les souvenirs de la Seconde guerre mondiale.

«C'était horrible. Chaque fois que nous regardions par la fenêtre ou sur le balcon, nous voyions cet athlète mort», se rappelle auprès de l'AFP l'ancien sportif, aujourd'hui âgé de 82 ans..

- «Obligation historique» -

Le contentieux sur les indemnisations a parachevé le traumatisme.

«Vous ne savez pas ce que nous avons enduré au cours des 50 dernières années», a confié à l'AFP Ankie Spitzer dont le mari, Andrei, était l'un des entraîneurs tués à Munich.

Après les menaces de boycott de la commémoration, le gouvernement d'Olaf Scholz a accepté de débloquer une enveloppe de 28 millions d'euros, en partie versée par la Bavière et la ville de Munich.

Avec cet accord, l'Allemagne «s'acquitte de son obligation historique envers les victimes et leurs familles», a salué le gouvernement allemand mercredi, au terme de longues années de négociations confidentielles.

Des documents vont aussi être déclassifiés pour permettre aux historiens allemands et israéliens de se saisir du sujet.


Un médecin syrien condamné à perpétuité en Allemagne pour crimes contre l'humanité sous Assad

L'Allemagne a déjà poursuivi et jugé des auteurs de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre commis hors de son territoire, notamment des Syriens et des Irakiens, au nom du principe juridique de compétence universelle. (AFP)
L'Allemagne a déjà poursuivi et jugé des auteurs de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre commis hors de son territoire, notamment des Syriens et des Irakiens, au nom du principe juridique de compétence universelle. (AFP)
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  • Agé de 40 ans, il réfutait toutes les accusations, parmi lesquelles celles d'avoir mis le feu aux parties génitales d'un adolescent et d'avoir administré une injection létale à un détenu qui avait résisté aux coups
  • "Il a tué deux personnes et blessé grièvement neuf autres", a affirmé en rendant son verdict le juge Christoph Koller, soulignant que ces actes commis en 2011 et 2012 "s'inscrivaient dans la réaction brutale du régime dictatorial et injuste d'Assad"

FRANCFORT: Un médecin syrien, accusé de tortures d'opposants au régime de Bachar al-Assad, a été condamné à la prison à vie lundi par la justice allemande, après un procès fleuve de plus de trois ans à Francfort.

Arrivé en Allemagne en 2015, où il a exercé comme chirurgien orthopédique jusqu'à son arrestation en 2020 après avoir été reconnu par d'autres réfugiés syriens, Alaa Moussa était jugé pour de multiples crimes sur des détenus dans des hôpitaux militaires de Damas et de Homs durant la guerre civile en Syrie.

Agé de 40 ans, il réfutait toutes les accusations, parmi lesquelles celles d'avoir mis le feu aux parties génitales d'un adolescent et d'avoir administré une injection létale à un détenu qui avait résisté aux coups.

"Il a tué deux personnes et blessé grièvement neuf autres", a affirmé en rendant son verdict le juge Christoph Koller, soulignant que ces actes commis en 2011 et 2012 "s'inscrivaient dans la réaction brutale du régime dictatorial et injuste d'Assad" aux manifestations des opposants.

Dénonçant "une violation massive des droits de l'Homme" par l'accusé, le juge a souligné que le verdict était aussi une façon de montrer "que la souffrance des victimes n'est pas oubliée".

"Outre les difficultés inhérentes à un délai de 12 ans, le régime syrien a tenté jusqu'à sa chute (en décembre 2024, ndlr) d'exercer une influence sur la procédure" allemande, a-t-il poursuivi, évoquant des menaces sur des proches des témoins.

Etant donné la gravité des faits, la condamnation à la perpétuité d'Alaa Moussa a été assortie d'une peine de sûreté pour une durée non encore définie (qui sera décidée au bout de quinze ans d'incarcération).

Lors de son procès commencé le 19 janvier 2022, entouré de hautes mesures de sécurité, Alaa Moussa avait été confronté à plus d'une cinquantaine de témoins et d'anciennes victimes.

Certains avaient témoigné masqués et beaucoup avaient fait état de menaces et d'intimidation à l'encontre de leur famille restée au pays alors que l'ombre des services secrets syriens planait sur les audiences.

Une situation qui s'est détendue après la chute, durant le procès, du dictateur Bachar al-Assad, renversé en décembre 2024 et désormais réfugié en Russie.

Parmi les témoins, un ancien lieutenant d'Alep, âgé aujourd'hui d'une quarantaine d'années, emprisonné après avoir refusé de tirer sur des manifestants en novembre 2011.

"Puni pour ses actes" 

Il avait affirmé avoir vu Alaa Moussa infliger des injections à des malades allongés sur le sol, qui sont décédés peu après, dans l'hôpital militaire où il sévissait.

"Aucun tortionnaire, quel que soit le lieu où il a commis son crime, ne peut être certain d'échapper à la justice. Il devra toujours s'attendre à être puni pour ses actes", a asséné le juge Christoph Koller lors de son verdict.

L'Allemagne a déjà poursuivi et jugé des auteurs de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre commis hors de son territoire, notamment des Syriens et des Irakiens, au nom du principe juridique de compétence universelle.

Il y a deux semaines, la justice allemande avait ainsi condamné à la prison à vie un ancien chef d'une milice syrienne soutenant l'ex-président Bachar al-Assad, reconnu coupable notamment de meurtre, d'actes de torture et de séquestration entre 2012 et 2014.

Lors du premier procès au monde sur des exactions du régime de Bachar al-Assad tenu en Allemagne, Anwar Raslan, un ex-gradé des services de renseignement syriens, avait été condamné en janvier 2022 à la prison à vie pour le meurtre de 27 prisonniers et des faits de torture sur au moins 4.000 autres, en 2011 et 2012, dans la prison Al-Khatib.

Des procès sur les crimes commis en Syrie ont également eu lieu ailleurs en Europe, notamment en France et en Suède.

Le conflit en Syrie, déclenché par des protestations pacifiques violemment réprimées en 2011, a fait plus d'un demi-million de morts, déplacé des millions de personnes et ravagé l'économie et les infrastructures du pays.


Ukraine: l'aide européenne compense le désengagement américain, selon le Kiel Institute

Gabriel Felbermayr, économiste autrichien et président de l'Institut de Kiel pour l'économie mondiale, participe à une conférence de presse le 11 mars 2020 à Berlin afin de commenter l'impact économique et politique de l'épidémie du nouveau coronavirus. (Photo de Tobias SCHWARZ / AFP)
Gabriel Felbermayr, économiste autrichien et président de l'Institut de Kiel pour l'économie mondiale, participe à une conférence de presse le 11 mars 2020 à Berlin afin de commenter l'impact économique et politique de l'épidémie du nouveau coronavirus. (Photo de Tobias SCHWARZ / AFP)
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  • « L'Europe comble largement le retrait de l'aide américaine », écrit l'institut dans un communiqué, qui recense l'aide militaire, financière et humanitaire promise et livrée à l'Ukraine depuis l'invasion russe du 24 février 2022.
  • Début 2025, les données du Kiel Institute montrent que « la récente augmentation de l'aide européenne a été tirée par un petit groupe de pays », au premier rang desquels se trouvent « les pays nordiques et le Royaume-Uni ».

PARIS : Selon l'institut de recherche allemand Kiel Institute, une hausse de l'aide des pays européens à l'Ukraine a permis début 2025 de combler le vide laissé par le désengagement de la nouvelle administration américaine de Donald Trump.

« L'Europe comble largement le retrait de l'aide américaine », écrit l'institut dans un communiqué, qui recense l'aide militaire, financière et humanitaire promise et livrée à l'Ukraine depuis l'invasion russe du 24 février 2022.

Alors que « les États-Unis, qui étaient auparavant le plus gros donateur à l'Ukraine, n'ont pas annoncé de nouvelle enveloppe depuis début janvier », l'Ukraine a tout de même reçu plus d'aide de janvier à avril 2025 qu'en moyenne les années précédentes sur la même période. 

« Reste à savoir s'il s'agit d'une hausse temporaire ou du début d'une évolution plus durable du rôle de l'Europe en tant que principal soutien de l'Ukraine », a déclaré Christoph Trebesch, qui dirige l'équipe du Kiel Institute chargée de suivre les engagements en faveur de l'Ukraine, cité dans le communiqué.

Début 2025, les données du Kiel Institute montrent que « la récente augmentation de l'aide européenne a été tirée par un petit groupe de pays », au premier rang desquels se trouvent « les pays nordiques et le Royaume-Uni ».

En revanche, « il est frappant de constater le peu d'aide allemande allouée ces derniers mois », a-t-il commenté. « Au lieu d'augmenter son soutien après l'arrivée de Trump au pouvoir, nous observons une forte baisse de l'aide allemande par rapport aux années précédentes. »

« La tendance est la même pour l'Italie et l'Espagne », a-t-il précisé. 

Au 30 avril 2025, 294 milliards d'euros au total ont été alloués à des dépenses précises en faveur de l'Ukraine (sur 405 milliards promis), selon les derniers chiffres du Kiel Institute. Les 111 milliards restants ont été promis à long terme, mais pas encore alloués.

Sur la somme déjà donnée, 140 milliards d'euros correspondent à de l'aide militaire, 133 milliards à de l'aide financière et 21 milliards à de l'aide humanitaire.

Les principaux donateurs sont l'Union européenne et ses membres (131 milliards d'euros donnés ou alloués), les États-Unis (115 milliards) et le Royaume-Uni (19 milliards).

En matière d'aide militaire, l'Europe, le Royaume-Uni compris, « dépasse pour la première fois depuis juin 2022 les États-Unis », selon le Kiel Institute. Les Européens ont déjà donné ou alloué 72 milliards d'euros d'aide militaire à l'Ukraine depuis le début de la guerre, contre 65 milliards pour les États-Unis. 


Les dirigeants du G7, dont Trump, se rejoignent au Canada tandis qu'un conflit oppose l'Iran et Israël

Le logo du G7 2025 est visible sur la pelouse devant le centre des médias de Banff, à l'approche du sommet du Groupe des Sept (G7) qui se tiendra à Kananaskis, dans la province canadienne de l'Alberta, le 16 juin 2025. (Photo : Ben Sheppard / AFP)
Le logo du G7 2025 est visible sur la pelouse devant le centre des médias de Banff, à l'approche du sommet du Groupe des Sept (G7) qui se tiendra à Kananaskis, dans la province canadienne de l'Alberta, le 16 juin 2025. (Photo : Ben Sheppard / AFP)
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  • Les pays du G7 ont entamé dimanche des négociations dans l'espoir de trouver un langage commun concernant le conflit entre l'Iran et Israël.
  • La priorité absolue pour tous sera d'éviter les drames, malgré les nombreux sujets de frictions, des droits de douane imposés par Donald Trump à la guerre en Ukraine, ou encore à celle du Moyen-Orient.

KANANASKIS, CANADA : Les pays du G7 ont entamé dimanche des négociations dans l'espoir de trouver un langage commun concernant le conflit entre l'Iran et Israël, alors que leurs dirigeants, dont le président américain, se retrouvent pour un sommet sous tension dans les Rocheuses canadiennes.

Il s'agit du premier grand sommet depuis que Donald Trump est revenu au pouvoir en janvier, ce qui a fragilisé l'unité du club des grandes démocraties industrialisées (Allemagne, Royaume-Uni, Canada, États-Unis, France, Italie et Japon).

Le président américain, qui n'a cessé de menacer le Canada ces derniers mois, est arrivé en fin de journée dans ce pays, avec sur la tête une casquette blanche portant son slogan « Make America Great Again » (« Rendre sa grandeur à l'Amérique »).

Pour cette réunion qui se déroule à Kananaskis, dans le parc national de Banff, dans l'ouest du Canada, il retrouvera ses alliés du G7 ainsi que les dirigeants de nombreux autres pays invités : l'Inde, l'Ukraine, le Mexique, l'Afrique du Sud et l'Australie seront notamment présents.

La priorité absolue pour tous sera d'éviter les drames, malgré les nombreux sujets de frictions, des droits de douane imposés par Donald Trump à la guerre en Ukraine, ou encore à celle du Moyen-Orient.

Mais parviendront-ils à parler d'une voix commune, notamment sur cette région du monde ?

Israël a stupéfié le monde vendredi en ouvrant un nouveau front avec une campagne militaire surprise et massive contre l'Iran.

Selon une source gouvernementale citée par l'AFP, les dirigeants du G7 travaillent à une déclaration commune. Reste à décider s'il s'agit d'appeler à la désescalade ou simplement de soutenir Israël en affirmant que le pays a le droit de se défendre. 

Mais cette guerre n'est pas le seule enjeu des discussions à Kananaskis. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky est parmi les invités et doit s'entretenir avec Donald Trump

Le président américain, qui s'est rapproché de façon spectaculaire de Moscou, a de nouveau eu un entretien téléphonique samedi avec le président russe Vladimir Poutine. Ce dernier lui a dit être prêt à un nouveau round de négociations.

De leur côté, les Européens tentent de convaincre Donald Trump de promulguer de nouvelles sanctions contre Moscou, ciblant plus précisément les ventes de pétrole russe. 

Tous les pays souhaitent par ailleurs aborder l'aspect commercial avec le président Trump. En imposant des taxes douanières d'au moins 10 % sur la plupart des produits entrant aux États-Unis, ce dernier a dévié le cours de la mondialisation et menacé l'économie mondiale d'un ralentissement général. 

Ce sommet du G7 est la première visite du président américain sur le sol canadien depuis qu'il a menacé son voisin du nord, estimant qu'il serait préférable qu'il devienne le 51^e État américain.

Le Premier ministre canadien, Mark Carney, et Donald Trump se rencontreront lundi matin lors d'un tête-à-tête. Outre MM. Carney et Zelensky, le dirigeant américain doit aussi rencontrer la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum.