La Russie envoie des renforts après une percée ukrainienne

Des bénévoles déblaient les décombres d'une maison détruite à la suite d'un bombardement dans le village de Moshchun, à Kiev (Photo, AFP).
Des bénévoles déblaient les décombres d'une maison détruite à la suite d'un bombardement dans le village de Moshchun, à Kiev (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Samedi 10 septembre 2022

La Russie envoie des renforts après une percée ukrainienne

  • Le gouverneur de la région de Kharkiv, Oleg Sinegoubov a exhorté les habitants partis à ne pas revenir
  • Kiev a affirmé jeudi avoir avancé de deux à trois kilomètres près de Kramatorsk et de Sloviansk

GRAKOVÉ: L'armée russe envoyait vendredi des renforts en direction de la région ukrainienne de Kharkiv, réplique à une percée grâce à laquelle Kiev dit avoir repris le contrôle de 30 localités dans cette zone frontalière de la Russie.

"Nous prenons progressivement le contrôle de nouvelles localités. Nous ramenons partout le drapeau ukrainien et la protection à nos citoyens", a déclaré le président ukrainien Volodymyr Zelensky dans une vidéo, annonçant la prise de 30 localités dans cette régions.

Kiev a affirmé jeudi avoir reconquis quelque 1.000 km2 ces derniers jours, en particulier la ville de Balakliïa. "C'est difficile, mais on avance", a déclaré vendredi sur Telegram le commandant en chef de l'armée ukrainienne, Valery Zaloujny.

Dans le village de Grakové, près de Kharkiv, repris aux forces russes il y a deux jours, des journalistes de l'AFP ont vu vendredi des destructions témoignant de la violence des combats, tandis que la police procédait à l'exhumation de deux corps, possiblement victimes d'un crime de guerre russe.

"C'était effrayant, il y avait des bombardements et des explosions partout", a raconté à l'AFP Anatoli Vassiliev, 61 ans, l'un des rares habitants à être resté à Grakové.

Malgré les gains territoriaux des forces ukrainiennes, le gouverneur de la région de Kharkiv, Oleg Sinegoubov a exhorté les habitants partis à ne pas revenir, faute d'électricité ou de gaz dans les villages repris aux Russes.

Les médias russes faisaient de leur côté état du déploiement de renforts dans cette direction, diffusant des vidéos montrant blindés, obusiers et camions roulant en grand nombre sur des routes non géolocalisées. Moscou n'a fait aucun commentaire sur ce déploiement, se contentant d'énumérer, comme chaque jour, les lourdes pertes que l'armée russe aurait infligé aux Ukrainiens.

Signe de l'avancée ukrainienne, les autorités prorusses des territoires occupés dans la région ont pour leur part annoncé vendredi évacuer les habitants vers d'autres zones sous contrôle de Moscou ou en Russie.

Combats acharnés 

Depuis Bruxelles, le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken a estimé que le déploiement de renforts par Moscou montre que la Russie paye "un énorme prix".

Côté européen, les 27 ministres des Finances de l'UE ont donné vendredi leur feu vert à une nouvelle aide de cinq milliards d'euros à l'Ukraine sous forme de prêt, afin de l'aider face aux conséquences de la guerre.

Un haut responsable de l'administration d'occupation russe, Vitali Gantchev, a affirmé vendredi sur la chaîne de télévision russe Rossiya 24 que des "combats acharnés" étaient en cours autour de la ville de Balakliïa, que Kiev a dit jeudi avoir reconquise.

Selon lui, des combats ont aussi lieu près de la localité de Chevtchenkové, toujours dans la région de Kharkiv. "Les forces armées ukrainiennes essayent de briser les défenses. Des réserves depuis la Russie ont été envoyées là-bas, nos troupes ripostent", a-t-il ajouté.

Dans son bilan du soir, l'armée ukrainienne a assuré de son côté infliger des "pertes significatives" à son adversaire, disant noter une démoralisation des troupes russes.

L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a de son côté fait état d'une "coupure totale de courant" dans la ville ukrainienne d'Energodar, où est située la centrale nucléaire de Zaporijjia, une situation qui "compromet la sécurité des opérations".

Unité de l'Otan

Outre la percée dans cette région, Kiev a revendiqué jeudi une série de succès dans le Sud et l'Est, affirmant avoir repris des territoires et de nombreuses localités.

S'ils sont consolidés, ces gains ukrainiens sont les plus importants pour l'Ukraine depuis le retrait des troupes russes des environs de Kiev fin mars.

Dans le Donbass, bassin minier de l'Est ukrainien où les combats les plus violents de la guerre se sont déroulés ces derniers mois, Kiev a affirmé jeudi avoir avancé de deux à trois kilomètres près de Kramatorsk et de Sloviansk et repris le village d'Ozerné.

A 45 km de là, à Bakhmout, huit civils ont été tués jeudi et 17 autres blessés dans des frappes russes, selon les autorités ukrainiennes.

Bakhmout, qui comptait 70.000 habitants avant le début du conflit fin février, n'a plus d'eau ni d'électricité pour le quatrième jour consécutif, selon le gouverneur régional, Pavlo Kyrylenko.

En déplacement à Prague, Lloyd Austin, le secrétaire américain à la Défense, a salué les récents succès de l'Ukraine, notant que les armements occidentaux, comme les HIMARS américains, ont pu être employés pour "changer la dynamique sur le champ de bataille". "Nous voyons des succès à Kherson (sud) maintenant, des succès à Kharkiv, et donc tout ça est très, très encourageant", a-t-il dit.

Le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken était pour sa part à Bruxelles pour une réunion avec l'Otan, où il compte insister sur "l'unité" des membres de l'organisation pour "s'assurer que notre Alliance soit aussi forte que possible pour dissuader la Russie de toute nouvelle agression".


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Short Url
  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Short Url
  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Short Url
  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.