Républicains déboussolés cherchent nouveau président

Michèle Alliot-Marie (C), flanquée du conseiller diplomatique Jean-David Lewitt (R), du parti de droite français Les Républicains, part après le discours du président français lors de la conférence annuelle des ambassadeurs de France à l'Elysée présidentielle à Paris le 1er septembre 2022. (AFP).
Michèle Alliot-Marie (C), flanquée du conseiller diplomatique Jean-David Lewitt (R), du parti de droite français Les Républicains, part après le discours du président français lors de la conférence annuelle des ambassadeurs de France à l'Elysée présidentielle à Paris le 1er septembre 2022. (AFP).
Short Url
Publié le Jeudi 15 septembre 2022

Républicains déboussolés cherchent nouveau président

  • Contrairement à 2019, lors de l'élection de Christian Jacob, il y a cette fois un vrai suspense entre le député des Alpes maritimes Eric Ciotti et le patron des sénateurs LR Bruno Retailleau
  • L'enjeu est rien de moins que remettre à flot un parti en chute depuis des années

PARIS: Trois têtes d'affiche pour un parti en quête de sens: à moins de trois mois de l'élection du président des Républicains, Eric Ciotti, Bruno Retailleau et Aurélien Pradié rodent leurs arguments.

Présents aux journées parlementaires de LR jeudi et vendredi à Biarritz, ils participeront tous trois samedi à La Ciotat à la rentrée des Républicains des Bouches-du-Rhône, occasion de tester leurs discours devant les adhérents.

L'enjeu est rien de moins que remettre à flot un parti en chute depuis des années, et sonné par sa déroute (4,8%) à la présidentielle. "On est au bord du gouffre, je ne suis même pas sûr que ce soit sauvable", soupire un soutien de l'un des candidats.

Pour cela, Bruno Retailleau veut "créer un nouveau parti", Eric Ciotti promet "la rupture", et Aurélien Pradié plaide pour "tout changer: le nom, le siège, notre organisation..."

Contrairement à 2019, lors de l'élection de Christian Jacob, il y a cette fois un vrai suspense entre le député des Alpes maritimes Eric Ciotti et le patron des sénateurs LR Bruno Retailleau. Numéro 3 de LR, Aurélien Pradié fait lui figure de challenger, tandis que le maire d'Orléans Serge Grouard espère avoir ses parrainages.

"Retailleau est le candidat des cadres, Ciotti celui des militants", entend-on régulièrement chez LR.

Patron de la puissante fédération des Alpes-maritimes, très apprécié dans le sud-est, Eric Ciotti s'était à la surprise générale hissé en finale de la primaire l'an dernier avec son message sécuritaire-identitaire. Il soutient le très populaire Laurent Wauquiez, qu'il souhaiterait voir désigner dès 2023 candidat à la présidentielle.

Mais côté cadres, beaucoup redoutent que son arrivée ne fasse fuir vers Horizons élus et électeurs refroidis par un positionnement parfois proche d'Eric Zemmour. "Si c'est Ciotti, ça pètera tout de suite" prédit un député.

Dans ce contexte Bruno Retailleau apparaît à beaucoup comme une alternative, malgré des positions conservatrices. Lui-même est issu du mouvement de Philippe de Villiers et a hérité du micro-parti de François Fillon, Force républicaine.

« Clivage »

"Il a prouvé au Sénat qu'il peut fédérer les sensibilités et mettre en sourdine ses convictions" ce qui lui donne "un atout majeur du point de vue de l'incarnation et du rassemblement", assure une élue.

Elle s'inquiète toutefois d'"un clivage Fillon/Sarkozy qui réapparaît".

Bruno Retailleau a déjà reçu le soutien de Gérard Larcher, François Fillon, François-Xavier Bellamy, et mercredi Julien Aubert, ex-député et patron du mouvement Oser la France (fort de 3.000 adhérents).

Eric Ciotti est lui soutenu par Frédéric Péchenard, Nadine Morano et le patron des jeunes LR Guilhem Carayon.

Quant à Aurélien Pradié, qui veut être la "surprise" de ce match, il peut compter sur la jeune garde, tels les députés Julien Dive et Pierre-Henri Dumont.

"Au nom du renouvellement il peut faire un score. Mais son problème est que beaucoup le voient sur une ligne de gauche", ajoute l'élue déjà citée.

Conscient de ses points faibles, chacun a commencé à élargir son discours: au régalien pour Aurélien Pradié, à l'économie pour Eric Ciotti...

Mais "dans la bataille pour la tête du parti, la seule chose qui compte c'est le nombre de cartes", assure un député, qui voit là un avantage à Eric Ciotti.

Dans un parti comptant quelque 58.000 adhérents, beaucoup d'incertitudes demeurent: Bruno Retailleau saura-t-il mobiliser les réseaux Fillon? Eric Ciotti fera-t-il revenir les LR partis vers Eric Zemmour? Comment se comportera l'électorat plus urbain d'Ile-de-France?

Le premier tour de l'élection est prévu le 3 décembre, avec un deuxième le 10 si besoin. "Trois mois c’est long, ça peut créer des clans, il faut que ce soit facteur de renouveau et pas de division", soupire un maire.

D'autant que cette campagne se déroulera en parallèle d'une session parlementaire où des textes clé comme l'assurance-chômage, voire une possible réforme des retraites, nécessiteront l'apport de LR.

"Tous les candidats vont devoir se radicaliser. On risque de se retrouver dans une situation de blocage institutionnel qui nous sera préjudiciable", soupire un député.


Après «Bloquons tout» et les promesses de «rupture», les syndicats dans la rue jeudi

"Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées. (AFP)
"Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées. (AFP)
Short Url
  • Après sa rencontre avec Sébastien Lecornu lundi, la cheffe de file de la CGT, Sophie Binet, se montrait plus que jamais déterminée, malgré l'abandon de la suppression de deux jours fériés samedi
  • Dès son arrivée à Matignon, Sébastien Lecornu avait promis des "ruptures sur le fond" et "pas que sur la forme"

PARIS: "Le budget va se décider dans la rue": à l'instar de la CGT, les organisations syndicales appellent à faire grève et manifester jeudi pour contester des mesures budgétaire "brutales" annoncées cet été et que le nouveau Premier ministre n'a pour l'heure pas écartées.

Après sa rencontre avec Sébastien Lecornu lundi, la cheffe de file de la CGT, Sophie Binet, se montrait plus que jamais déterminée, malgré l'abandon de la suppression de deux jours fériés samedi. "(Il) ne s'est engagé à rien du tout. Aucune des mesures catastrophiques du musée des horreurs de M. Bayrou n'est enterrée !", a-t-elle lancé.

Dès son arrivée à Matignon, Sébastien Lecornu avait promis des "ruptures sur le fond" et "pas que sur la forme". Depuis vendredi, il reçoit les syndicats représentatifs - à l'exception de Frédéric Souillot (FO) qui souhaite le rencontrer après le 18. Mais ces derniers maintiennent leur appel à la mobilisation du 18, espérant peser de tout leur poids sur les futures orientations budgétaires.

CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, FSU et Solidaires seront ainsi unis jeudi dans la rue, pour la première fois depuis le 6 juin 2023 - date de la dernière mobilisation contre la réforme des retraites.

Les mesures avancées cet été sont "d'une brutalité sans précédent", dénonçaient-ils fin août dans un communiqué commun, regrettant que l'ancien gouvernement choisisse "encore une fois de faire payer les travailleuses et les travailleurs, les précaires, les retraité·es, les malades".

Ils pointent "des coupes dans les services publics, (...), une énième réforme de l'assurance chômage, le gel des prestations sociales et celui des salaires des fonctionnaires comme des contractuel·les, la désindexation des pensions de retraites, le doublement des franchises médicales, la remise en cause de la 5ème semaine de congés payés…".

L'abandon de la suppression de deux jours fériés, unanimement décriée par le monde syndical, constitue "une première victoire", qui "confirme que nous sommes en position de force", a estimé Sophie Binet.

Même la CFDT, pourtant peu rompue aux cortèges syndicaux, maintient sa participation: vendredi, Marylise Léon a réaffirmé que son syndicat était "plus que jamais motivé pour aller dans la rue", à l'issue de son entrevue avec Sébastien Lecornu.

"Le budget tel qu'il a commencé à être construit n'est pas compatible avec la justice sociale, fiscale et environnementale donc il y a vraiment besoin de le revoir de fond en comble", a-t-elle estimé lundi sur France Inter.

Sur la durée ? 

Sur la taxation des hauts patrimoines, revenue au cœur du débat, Mme Léon a pourtant apprécié que le Premier ministre dise être conscient de la nécessité de "faire quelque chose".

"Le budget, il va se décider dans la rue", insiste Mme Binet. Ainsi, "il faut faire une démonstration de force jeudi prochain et après", laissant entrevoir une mobilisation dans la durée.

Lundi, la CGT annonçait déjà plus de 220 manifestations, un chiffre encore amené à évoluer.

Les organisations syndicales parviendront-elles à dépasser l'affluence du mouvement citoyen "Bloquons tout" - qui a rassemblé près de 200.000 personnes le 10 septembre selon le ministère de l'Intérieur, sans toutefois parvenir à paralyser le pays ? Les manifestants du 10, parfois méfiants vis-à-vis des syndicats, participeront-ils à cette nouvelle journée ?

Aucune inquiétude côté syndical: "Nous avons déjà d'excellents retours sur la mobilisation de jeudi", assure Frédéric Souillot (FO).

"Nous avons l'objectif d'avoir un million de personnes avec nous", avance de son côté Cyril Chabanier (CFTC).

"La colère sociale est toujours là", abonde Julie Ferrua, co-déléguée générale de Solidaires.

De leur côté, les autorités s'attendent à une mobilisation plus importante que le 10 septembre et craignent la présence de plusieurs centaines de manifestants radicaux dans des cortèges. Une cellule de crise sera ouverte dès mardi au ministère de l'Intérieur.

Après le 18, ce sera le tour des agriculteurs de la FNSEA, le 26 septembre, de mener "une grande journée d'actions" autour des échanges internationaux de produits agricoles.


Lecornu va mettre fin aux "avantages à vie" des ex-ministres dès 2026

Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu participe à une réunion alors qu'il visite le centre de santé départemental à Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025. (AFP)
Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu participe à une réunion alors qu'il visite le centre de santé départemental à Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025. (AFP)
Short Url
  • Le Premier ministre Sébastien Lecornu concrétise une promesse phare pour réduire le « décalage » entre les élites politiques et la réalité des Français, dans un contexte de forte défiance envers sa nomination

PARIS: Fini le chauffeur et la voiture de fonction "à vie" pour les anciens de Matignon: les avantages octroyés aux ex-Premiers ministres seront "supprimés" dès 2026, a annoncé lundi Sébastien Lecornu, concrétisant l'une de ses premières promesses, très symbolique pour l'opinion.

Il n'est "pas concevable" que les anciens ministres "puissent bénéficier d'avantages à vie en raison d'un statut temporaire", a écrit le locataire de Matignon sur X, confirmant la mise en place de cette réforme dès le 1er janvier 2026.

"La protection policière ne sera accordée aux anciens Premiers ministres et ministres de l'Intérieur que pour une durée limitée, et reconduite en fonction de la réalité du risque. Tous les autres moyens mis à disposition des anciens Premiers ministres à vie le seront dorénavant pour une durée limitée", a expliqué M. Lecornu sur ce réseau social.

Sollicité par l'AFP, Matignon a expliqué que le gouvernement avait préparé une "instruction" à destination du Secrétariat général du gouvernement, en vue de revoir le décret du 20 septembre 2019, qui avait déjà restreint les privilèges accordés aux anciens Premiers ministres.

Ces derniers peuvent actuellement se voir octroyer "sur leur demande, un véhicule de fonction et un conducteur automobile", à la charge de l'Etat. Ils peuvent aussi bénéficier d'un "agent pour leur secrétariat particulier" pendant dix ans à compter de la fin de leurs fonctions et au plus tard jusqu'à ce qu'ils atteignent l'âge de 67 ans.

Des avantages qui ne s'appliquent pas pour les "ex" de Matignon lorsque ces derniers disposent déjà de ces privilèges via leur mandat (parlementaire ou local) ou leur fonction publique.

- "Mettre fin aux derniers privilèges" -

Une autre instruction du chef du gouvernement à l'attention de la Direction générale de la police nationale (DGPN) permettra de créer "un cadre" relatif à la "protection policière" des anciens Premiers ministres et ministres de l'Intérieur, a détaillé Matignon.

"On ne peut pas demander aux Français de faire des efforts si ceux qui sont à la tête de l'État n'en font pas. La réforme, ce n'est pas toujours +pour les autres+, cela crée la suspicion", avait lancé Sébastien Lecornu dans un entretien donné à plusieurs titres de la presse régionale durant le week-end.

"Beaucoup de choses ont été réglées pour les anciens présidents de la République. Je vais donc mettre fin aux derniers privilèges", avait-il encore promis, quelques jours seulement après sa prise de fonctions à Matignon, durant laquelle il s'était inquiété du "décalage" observé entre la vie politique et la vie "réelle" des Français.

Le Premier ministre, nommé mardi par Emmanuel Macron après la chute de François Bayrou, met ainsi en musique l'une de ses premières promesses, alors qu'il consulte en parallèle les forces politiques, syndicales et patronales en vue de former un gouvernement susceptible de survivre aux menaces de censure des oppositions.

Il doit aussi batailler contre une opinion publique très défiante vis-à-vis de sa nomination, même si les chiffres de confiance des Français à son égard varient selon les instituts de sondage.

Son prédécesseur, François Bayrou, avait déjà annoncé vouloir passer au crible ces privilèges ministériels: il avait confié fin août une mission à l'ex-député socialiste René Dosière pour identifier les "avantages indus, excessifs, inacceptables" dans un contexte de dérapage des finances publiques.

En réalité, l'économie à espérer de ces annonces est dérisoire par rapport aux dizaines de milliards d'euros recherchées par les gouvernements successifs. Les privilèges accordés au titre du décret de 2019 (chauffeur, secrétariat, véhicule) ont coûté 1,58 million d'euros à l'Etat en 2024, selon le gouvernement.

Un montant auquel il faut ajouter les dépenses de protection policière, évaluées à 2,8 millions d'euros par an dans un rapport parlementaire de 2019.


L’histoire de Donia, arrivée de Gaza à Paris, le quotidien morbide des Gazaouis qui ne veulent que vivre

Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous. (AFP)
Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous. (AFP)
Short Url
  • Donia Al-Amal Ismail, poète, journaliste et mère de quatre enfants, habitante de Gaza, arrivée à Paris il y a presque trois mois. Elle raconte son histoire à Arab News en français.
  • Difficile de ne pas se sentir anéantie face à ce visage doux et tendre, à ces yeux verts empreints d’une tristesse insondable.

PARIS: Depuis le début de la guerre à Gaza, les récits qui parviennent à franchir les ruines et le silence imposé sont rares.
Derrière les chiffres et les bilans atones relayés par les médias, il y a des voix : celles de civils qui ont vu leur existence basculer en quelques heures.
Parmi elles, Donia Al-Amal Ismail, poète, journaliste et mère de quatre enfants, habitante de Gaza, arrivée à Paris il y a presque trois mois. Elle raconte son histoire à Arab News en français.
Difficile de ne pas se sentir anéantie face à ce visage doux et tendre, à ces yeux verts empreints d’une tristesse insondable. Donia témoigne de ce que signifie vivre la guerre : vivre avec la peur, la faim, fuir sous les bombes, errer d’un abri de fortune à un autre.
Marcher pour ne pas crever, marcher avec le seul souci de garder en vie ses deux enfants (une fille et un garçon) restés avec elle, les deux autres étant en Égypte.
Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous.
Son récit, émouvant par-dessus tout, saccadé par de longs silences et des larmes qui coulent spontanément sur les joues, n’en est pas moins ferme : pour elle, indéniablement, Gaza est le foyer des Gazaouis qui feront tout pour reconstruire.