Comment les différentes traditions musicales ont façonné l'identité et la culture de l'Arabie saoudite

Le paysage musical contemporain du Royaume reprend des traditions ancestrales. (Photo fournie).
Le paysage musical contemporain du Royaume reprend des traditions ancestrales. (Photo fournie).
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Publié le Vendredi 23 septembre 2022

Comment les différentes traditions musicales ont façonné l'identité et la culture de l'Arabie saoudite

  • Les voyageurs ont véhiculé les traditions populaires à travers la péninsule arabique ; les cultures et les influences se sont fusionnées
  • L'Arabie saoudite embrasse aujourd'hui les différentes musiques du monde, sans pour autant se départir de son héritage

DJEDDAH: L'Arabie saoudite se distingue par la diversité et la richesse de sa musique populaire. Celle-ci associe d’un côté sonorités, rythmes et mélodies et de l’autre, poésie, percussions et danses transmises à travers les générations.

Les poètes et les musiciens ont traversé la péninsule arabique et le Moyen-Orient au cours des siècles ; ils ont ainsi échangé et fusionné leurs moyens d'expression par l'intermédiaire de chants, de musiques et de danses.

Le paysage musical contemporain du Royaume reprend ces traditions ancestrales. Il les traduit en rythmes populaires et en chansons inspirées de la littérature classique, des épopées et des poèmes héroïques. Il s'agit d'un miroir reflétant l'histoire, les valeurs, les normes et la conscience de la société.

Les chanteurs et les récitants ont transmis les poèmes au sein des différentes tribus et ce, depuis l'époque préislamique. Cette pratique s'est poursuivie jusqu'aux cours des califes ; ici, de fameux chanteurs récitaient des poèmes sur fond de mélodies et se produisaient devant un public privé.

Ces cours ont disparu au fil du temps. La pratique, elle, a perduré.

folklore
En raison de leurs déplacements continus, les Bédouins ne pouvaient pas transporter de bagages superflus, y compris les instruments de musique. Ils se contentaient donc de jouer sur des rythmes simples, en faisant des battements de mains ou en tapant sur des objets du quotidien. (Photo fournie)

La plupart des mélodies provenant de notre région s'inspirent du maqâm, un système des modes mélodiques séculaires qui caractérise la musique du Moyen-Orient. Le maqâm englobe un ensemble de modes ou de gammes mais aussi la manière dont on peut improviser et former des mélodies à partir de ces modes.

Les gammes de maqâm sont généralement faites de 7 notes qui se répètent à l'octave supérieure, même si certaines ont des fois 8 notes ou plus. Il y a peu d'harmonie dans ce genre de musique, mais on peut parfois percevoir des variations harmoniques qui se répètent pendant un ou deux moments.

Lors d'un voyage dans le Hedjaz en 1814, l'orientaliste suisse Johann Ludwig Burckhardt a répertorié dans son livre « Travels in Arabia » (Voyages en Arabie) les différentes notes musicales de cette région. Il décrit ainsi les prestations de femmes qui chantaient en deux chœurs de 6, 8 ou 10 personnes chacun. Le premier groupe chantait et psalmodiait, tandis que l'autre répétait après lui.

Le Hedjaz possède une riche culture musicale. Celle-ci repose sur des traditions de chant aux mélodies bien plus complexes que dans le reste du Royaume. Ces chants sont accompagnés d'instruments tels que l'oud (un instrument de musique cordophone muni d’une caisse de résonance profonde, NDLR), le qanoûn (un instrument à cordes pincées de la famille des cithares sur table, NDLR), le nay (la flûte) et, plus récemment, le violon.

Les villes comme La Mecque et Médine ont connu pendant des siècles des activités musicales qui rivalisaient voire surpassaient celles qui animaient les villes arabes voisines, dont Bagdad et Le Caire. Dans ces villes, la musique résonnait sans cesse dans les cours royales.

En raison de leurs déplacements continus, les Bédouins ne pouvaient pas transporter de bagages superflus, y compris les instruments de musique. Ils se contentaient donc de jouer sur des rythmes simples, en faisant des battements de mains ou en tapant sur des objets du quotidien ; ces sons servaient de base à leur musique.

Les tambours constituaient par le passé un orchestre en soi. lls le sont de nos jours encore. En effet, la plupart des musiques folkloriques de l'Arabie saoudite et du Golfe font appel à des percussions sur cadre peu profondes. On les tient de la main gauche et avec la main droite, on tape selon un rythme unique à tons multiples.

Dans la musique saoudienne, les claquements de mains et la danse représentent un autre type de son percussif qui se divise en deux catégories. La première consiste en des pas exécutés à l'unisson, comme la danse « al-dahha » (dans le nord) et la « khatwa » (dans le sud-ouest).

La seconde catégorie est celle de la danse libre. Les danseurs font tournoyer des bisht (manteaux) colorés, tels que le « majroor » à Taïf, le « yanbaawi » et le « mezmar » dans la partie occidentale du Royaume. Ils dansent en solo ou en couple.

La « ardah » est une ancienne danse de guerre, qui s'est muée en danse de paix et de célébration. Elle associe élégies, chants, tambours et mouvements lents et majestueux. La ardah fait désormais partie intégrante de la culture traditionnelle saoudienne.

Les poèmes entonnés sont empreints de patriotisme et les mouvements fiers, virils et majestueux des danseurs relatent une histoire alliant bravoure, résilience et persévérance.

Dans la province orientale du Royaume, les arts populaires s'inspirent des traditions ancestrales : la pêche aux perles, les activités maritimes, l'agriculture dans les oasis et l'échange commercial au-delà des frontières. Le gouvernorat d'Al-Ahsa se distingue par des chants liés à la récolte des dattes, alors que les chants de bergers résonnent dans le sud-ouest et dans d'autres régions encore.

Ces traditions ne proviennent toutefois pas du néant. Les commerçants, les pèlerins et les nomades qui cherchaient de nouveaux pâturages ont propagé les traditions à travers les frontières ; les cultures se sont fusionnées et les influences ont commencé à se répandre.

« Si l'on examine la carte de l'Arabie saoudite, on s'aperçoit qu'elle est entourée de toutes parts par des pays aux cultures différentes tant au niveau de la musique que des paroles », explique à Arab News le poète et écrivain saoudien Abdallah Thabit.

« L'Arabie saoudite est limitrophe du Yémen au sud, de l'Irak et du Levant et de la Turquie au nord, des pays du Golfe à l'est, et de l'Égypte et du Soudan à l'ouest. Au fil des siècles, les différentes régions du Royaume ont été influencées par leurs voisins ».

Pour les personnes non averties, il est donc difficile de déterminer avec précision les caractéristiques intrinsèques de la musique saoudienne qui est distincte de celle de ses voisins, mais qui se retrouve dans toutes les provinces du Royaume.

Selon M. Thabit, Tariq Abdel-Hakim, commandant en chef de l'orchestre de l'armée saoudienne et maestro ayant composé l'hymne national saoudien, a joué un rôle déterminant dans ce domaine. C'est à lui que l'on doit le style musical moderne qui caractérise l'Arabie saoudite.

Les contributions de Tariq Abdel-Hakim (décédé en 2012 à l'âge de 92 ans) ont marqué un tournant pour la musique saoudienne. Grâce à lui, la musique saoudienne a évolué d'une mélodie auditive à une notation musicale écrite fondée sur des principes scientifiques solides.

« C'est son élève, Omar Kadras, qui s'est employé à établir un lien entre le rythme et les sons du folklore. Il a créé un nouveau son au sein de la musique saoudienne », explique M. Thabit.

« Talal Maddah est un pionnier de la musique saoudienne, connu sous le nom de la Voix de la Terre. Il a été le premier à chanter Al-Mkblahah, en l’occurrence les longues chansons. Mohammed Abdo a quant à lui contribué à populariser cette nouvelle forme de musique. Mais comme vous pouvez le constater, avant que cette musique n'arrive à maturité, de grands noms l'ont rendue populaire.  Parmi ceux-ci figurent Hisham Al-Abdali, Hassan Jawah, Abdelrahman Muezzin Platin - qui était également muezzin (cheikh chargé d'appeler, du haut des minarets des mosquées, aux cinq prières quotidiennes, NDLR), et bien d'autres encore ».

Au cours de la seconde moitié du siècle dernier, ce mouvement artistique a connu un essor. De nombreux compositeurs sont apparus, comme Siraj Omar, Kadars, et de nombreux chanteurs, à commencer par Maddah, Mohammed et Abou Bakr Salem, puis Abdel Majeed Abdallah, Abadi Al-Jawhar, Rabeh Saqr, Rashid Al-Majed et bien d'autres.

« Dans le même temps sont apparues des voix féminines, qui étaient malheureusement peu nombreuses, comme celles d'Ibtisam Lutfi, Etab, Sarah Qazzaz et Toha. Ces chanteuses étaient plutôt orientées vers le chant populaire », explique M. Thabit.

Etab
La chanteuse saoudienne Eta. (Photo fournie).

La musique saoudienne contemporaine embrasse tous genres de musique : le jazz, le hip-hop, le rap, la techno et le rock'n roll. Elle intègre souvent des éléments du folklore, comme en témoignent les chansons « Lifestyle Samry », « Lehe » et « Hawages » de Majed Al-Eissa.

En dépit du caractère coloré et animé des chansons traditionnelles, les jeunes Saoudiens sont également séduits par la musique étrangère. Jara, chanteuse qui compte parmi les plus jeunes artistes saoudiens de renom, a fait sensation en 2020 avec la sortie de son single de rap « 966 ». Le musicien hip-hop Qusai Qusai poursuit son ascension dix ans après la sortie de son premier album.

« Les sonorités provenant de la région que j'intègre dans mes chansons me permettent de célébrer mon héritage ; je souhaite faire connaître au monde notre belle culture », confie à Arab News Saud Al-Turki, un producteur de musique basé à Khobar.

Roi Salmane
Une vue de la danse traditionnelle saoudienne Ardah, à laquelle prend part le roi d'Arabie saoudite Salmane. ​​​​​

« En tant que producteur, je souhaite me sentir libre d'utiliser tous genres de sons. Toucher un public mondial a plus d'impact, à mon avis. En écoutant les sons saoudiens, on peut percevoir qu’ils s'inspirent des différentes parties de la région et ce, en fonction de la région d'où on est originaire ».

En 2016, le Royaume s'est ouvert au monde et a commencé à promouvoir les activités artistiques et à encourager les jeunes à y participer. Avant cela, M. Al-Turki affirme que le fait de s'aventurer dans des styles musicaux variés n'était pas monnaie courante.

« À l'époque, les entités gouvernementales et les grandes entreprises ne nous soutenaient pas. Au contraire, nous ne bénéficiions pas de la même adhésion, du même respect et du même soutien que ceux accordés aux artistes d'aujourd'hui », explique-t-il.

L'Arabie saoudite embrasse aujourd'hui les différentes musiques du monde et les goûts qui évoluent, sans pour autant se départir de son héritage.

« Nous ne devons jamais oublier nos origines », affirme M. Al-Turki. « L'Arabie saoudite est historiquement diversifiée et rien n'est plus beau qu'une culture diversifiée. Chaque région se pare de sons particuliers qui méritent d'être appréciés et valorisés ».

« Nous sommes tenus de souligner et de célébrer cette variété de sons ». 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Ouverture du Grand Musée égyptien : le monde réuni au Caire pour son inauguration

Le Grand Musée Egyptien, le plus grand musée archéologique au monde consacré à une seule civilisation, a officiellement ouvert ses portes (AFP).
Le Grand Musée Egyptien, le plus grand musée archéologique au monde consacré à une seule civilisation, a officiellement ouvert ses portes (AFP).
Le Grand Musée Egyptien, le plus grand musée archéologique au monde consacré à une seule civilisation, a officiellement ouvert ses portes (AFP).
Le Grand Musée Egyptien, le plus grand musée archéologique au monde consacré à une seule civilisation, a officiellement ouvert ses portes (AFP).
Le Grand Musée Egyptien, le plus grand musée archéologique au monde consacré à une seule civilisation, a officiellement ouvert ses portes (AFP).
Le Grand Musée Egyptien, le plus grand musée archéologique au monde consacré à une seule civilisation, a officiellement ouvert ses portes (AFP).
Le Grand Musée Egyptien, le plus grand musée archéologique au monde consacré à une seule civilisation, a officiellement ouvert ses portes (AFP).
Le Grand Musée Egyptien, le plus grand musée archéologique au monde consacré à une seule civilisation, a officiellement ouvert ses portes (AFP).
La statue colossale en granit rose du roi Ramsès II, vieille de 3 200 ans, à l'entrée du Grand Musée égyptien. (Fourni)
La statue colossale en granit rose du roi Ramsès II, vieille de 3 200 ans, à l'entrée du Grand Musée égyptien. (Fourni)
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  • Le Grand Musée Égyptien, plus grand musée au monde consacré à une seule civilisation, expose plus de 57 000 artefacts, dont la collection complète de Toutankhamon
  • Inauguré par Abdel Fattah Al-Sissi, l’événement a rassemblé des dirigeants mondiaux et marque un nouveau chapitre culturel et historique pour l’Égypte

LE CAIRE : Le Grand Musée Égyptien — le plus grand musée archéologique au monde dédié à une seule civilisation — a officiellement ouvert ses portes.

L’événement d’inauguration a réuni de nombreuses personnalités internationales, parmi lesquelles le président allemand Frank-Walter Steinmeier, le roi Philippe de Belgique et le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis.

Les hauts responsables arabes présents étaient menés par le ministre saoudien de la Culture, le prince Badr ben Abdallah, accompagné du prince héritier Theyazin d’Oman et du président palestinien Mahmoud Abbas.

Le président égyptien Abdel Fattah Al-Sissi a inauguré ce musée tant attendu, vitrine d’un milliard de dollars dédiée aux trésors pharaoniques, affirmant que son ouverture marquait « un nouveau chapitre de l’histoire » pour le pays.

« Aujourd’hui, alors que nous célébrons ensemble l’ouverture du Grand Musée Égyptien, nous écrivons un nouveau chapitre de l’histoire du présent et de l’avenir de cette patrie millénaire », a déclaré Al-Sissi devant un parterre de princes, reines, chefs d’État et autres dignitaires réunis sur l’esplanade du musée.

Le spectacle fastueux de samedi a illuminé à la fois les pyramides et la façade monumentale du musée, avec de grandes mises en scène musicales et des performances conjointes entre Le Caire et Tokyo, Paris et New York.

Situé à environ deux kilomètres des pyramides de Gizeh, le site s’étend sur 490 000 m². Son design, signé par le cabinet irlandais Heneghan Peng Architects, mêle modernité et histoire.

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Le site, situé à environ 2 kilomètres des pyramides de Gizeh, couvre une superficie totale de 490 000 mètres carrés. (Fourni)

Le musée est le fruit de l’initiative de l’ancien ministre égyptien de la Culture, Farouk Hosny, qui proposa l’idée en 1992. La construction débuta en 2005, mais fut interrompue trois ans durant les troubles politiques qui suivirent la révolution de 2011.

Le projet a néanmoins surmonté de nombreux défis — bouleversements politiques et pandémie mondiale — qui ont retardé son ouverture à quatre reprises.

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Le Grand Musée égyptien de Gizeh, dans la banlieue sud-ouest de la capitale, Le Caire. (Fourni)

« Dire que le Grand Musée Égyptien est un cadeau de l’Égypte au monde n’est pas une exagération, car l’héritage de la civilisation égyptienne ancienne constitue un patrimoine universel », a déclaré le Premier ministre égyptien, Mostafa Madbouly.

Cet héritage sera présenté sur 40 000 m² d’espaces d’exposition, dont 7 500 m² consacrés aux trésors du roi Toutankhamon, tous découverts dans sa tombe sur la rive ouest de Louxor en 1922 par l’archéologue britannique Howard Carter.

Le musée abrite plus de 57 000 artefacts répartis entre les galeries de Toutankhamon, les galeries principales, la Grande Salle, le Grand Escalier et le musée de la barque de Khéops. La barque solaire de 4 600 ans du pharaon Khéops, longue de 43 mètres, découverte dans les années 1950 près de la Grande Pyramide, est l’un des joyaux de la collection.

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Un visiteur visite le Grand musée égyptien à Gizeh, dans la banlieue sud-ouest de la capitale Le Caire. (AFP)

« Ce qui distingue véritablement le Grand Musée Égyptien, c’est la présentation complète de la collection de Toutankhamon — plus de 5 000 artefacts exposés ensemble pour la première fois », a confié à Arab News l’ancien directeur du musée, le Dr Tarek Tawfik.

L’inauguration de samedi comprenait notamment l’ouverture de deux salles consacrées à ces 5 000 pièces exceptionnelles.

« Les visiteurs seront émerveillés par les techniques modernes de présentation du musée, qui racontent l’histoire du roi à travers une approche curatoriale novatrice, différente des styles d’exposition traditionnels », a ajouté Tawfik.

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La statue de la reine Hatchepsout au musée. (Fourni)

Certaines sections du musée sont ouvertes au public depuis 2024, et de nouvelles galeries ouvriront le 4 novembre, dans l’espoir d’attirer visiteurs locaux et touristes internationaux.

Dès l’entrée, le parcours débute par l’obélisque suspendu du roi Ramsès II dans la cour du musée. Les visiteurs peuvent également admirer une statue monumentale du pharaon dans le hall d’accueil avant d’emprunter le Grand Escalier — une statue vieille de 3 200 ans et haute de 11 mètres, déplacée ici après avoir longtemps trôné au centre d’un rond-point encombré devant la principale gare ferroviaire du Caire.

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Les galeries principales traitent de trois thèmes principaux - les croyances, la société et la royauté - couvrant différentes périodes de l'Égypte ancienne, de l'ère préhistorique et des anciens, moyens et nouveaux royaumes jusqu'à la période gréco-romaine. (Fourni)

Les galeries principales explorent trois thèmes centraux — croyances, société et royauté — couvrant les différentes périodes de l’Égypte ancienne, de la préhistoire à l’époque gréco-romaine.

Le musée abrite aussi un vaste centre de restauration de 32 000 m², le plus grand du Moyen-Orient, comprenant 16 laboratoires spécialisés ouverts au public — une première mondiale.

Présenté comme un pont entre l’héritage antique de l’Égypte et sa vision moderne, le Grand Musée Égyptien offre une fenêtre unique sur l’une des civilisations les plus fascinantes de l’histoire.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Casse du musée du Louvre: des suspects interpellés mercredi en cours de défèrement

Des policiers français patrouillent devant le musée du Louvre après son cambriolage, avec la pyramide du Louvre conçue par Ieoh Ming Pei en arrière-plan, à Paris le 19 octobre 2025. (AFP)
Des policiers français patrouillent devant le musée du Louvre après son cambriolage, avec la pyramide du Louvre conçue par Ieoh Ming Pei en arrière-plan, à Paris le 19 octobre 2025. (AFP)
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  • Sept suspects au total ont été interpellés dans l’enquête sur le spectaculaire casse du Louvre, dont le butin — estimé à 88 millions d’euros en bijoux de la Couronne — reste introuvable
  • L’enquête, fondée sur des traces ADN, la vidéosurveillance et la téléphonie, met aussi en lumière une « faille sécuritaire majeure » au Louvre, selon la ministre de la Culture Rachida Dati

PARIS: Des défèrements de suspects ayant été interpellés mercredi dans le cadre de l'enquête sur le casse du Louvre, dont le butin a été estimé à 88 millions d'euros, étaient en cours samedi devant des magistrats du tribunal judiciaire de Paris.

"Il y a des défèrements sur commission rogatoire", a indiqué le parquet de Paris sollicité par l'AFP, sans préciser le nombre de suspects déférés.

Cinq nouvelles interpellations liées à ce cambriolage spectaculaire avaient été annoncées jeudi matin par la procureure de Paris Laure Beccuau qui avait précisé que les bijoux volés restaient introuvables.

Ces nouvelles interpellations se sont ajoutées à celles de deux trentenaires arrêtés il y a une semaine et qui sont soupçonnés d'avoir fait partie du commando de quatre hommes sur place.

Ces deux habitants d'Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), âgés de 34 et 39 ans, ont été mis en examen et placés en détention provisoire mercredi soir.

En garde à vue, ces deux hommes - un arrêté à l'aéroport de Roissy alors qu'il tentait de rejoindre l'Algérie, l'autre à Aubervilliers - "se sont livrés à des déclarations (...) minimalistes par rapport à ce qui nous paraît être démontré par le dossier", avait indiqué Laure Beccuau.

Parmi les nouveaux interpellés se trouve un autre membre présumé du commando ayant commis le 19 octobre en moins de huit minutes ce casse qui a fait le tour de la planète, avait précisé la procureure. "Des traces ADN" le lient au vol, avait-elle noté.

Les autres personnes interpellées "peuvent éventuellement nous renseigner sur le déroulement de ces faits", avait éclairé la procureure, sans vouloir en dire plus sur leur profil.

Ces nouvelles interpellations "n'ont pas été du tout liées aux déclarations" des deux mis en examen, mais "à d'autres éléments dont nous disposons au dossier", les traces ADN, la vidéosurveillance ou encore l'examen de la téléphonie, avait-elle ajouté.

Les nouvelles interpellations ont eu lieu à Paris et dans son agglomération, notamment en Seine-Saint-Denis, avait-elle indiqué.

- "Faille sécuritaire majeure" -

Mme Beccuau avait souligné sa "détermination", comme celle de la centaine d'enquêteurs mobilisés, à retrouver le butin et l'ensemble des malfaiteurs impliqués.

Concernant les bijoux, la procureure avait expliqué que l'Office central de lutte contre le trafic des biens culturels (OCBC) explorait "un certain nombre de marchés parallèles" car ce n'est vraisemblablement pas sur le marché légal des oeuvres d'art qu'ils surgiront.

Parmi les hypothèses des enquêteurs: celle que ces joyaux puissent "être une marchandise de blanchiment, voire de négociation dans le milieu", a-t-elle pointé.

L'affaire a provoqué des débats-fleuves sur la sécurité du Louvre, musée d'art le plus visité du monde.

La ministre de la Culture Rachida Dati a dévoilé vendredi les premières conclusions de l'enquête de l'Inspection générale des affaires culturelles, avec un bilan très critique: "une sous-estimation chronique, structurelle, du risque intrusion et vol" par le Louvre, "un sous-équipement des dispositifs de sécurité", une gouvernance "pas adaptée" et des protocoles de réaction aux vols et intrusions "totalement obsolètes".

"On ne peut pas continuer comme ça", a martelé Rachida Dati.

Le jour du casse, les quatre malfaiteurs avaient pu garer un camion-élévateur au pied du musée, permettant à deux d'entre eux de se hisser avec une nacelle jusqu'à la galerie d'Apollon où sont conservés les joyaux de la Couronne.

Tout en réaffirmant que les dispositifs de sécurité à l'intérieur du Louvre avaient fonctionné, Mme Dati a annoncé des mesures pour répondre à une "faille sécuritaire majeure" à l'extérieur du musée.

"Nous allons mettre des dispositifs anti-voiture-béliers, anti-intrusion", a-t-elle annoncé, assurant que ces nouvelles installations seraient en place "avant la fin de l'année".


A Paris, le Centre Pompidou s'offre une dernière fête avant cinq ans de fermeture

un feu d'artifice intitulé "Le Dernier Carnaval" au Centre Pompidou (Beaubourg) à l'occasion de sa fermeture pour un projet de rénovation de cinq ans, à Paris, le 22 octobre 2025. (AFP)
un feu d'artifice intitulé "Le Dernier Carnaval" au Centre Pompidou (Beaubourg) à l'occasion de sa fermeture pour un projet de rénovation de cinq ans, à Paris, le 22 octobre 2025. (AFP)
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  • Le Centre Pompidou organise un dernier week-end festif baptisé « Because Beaubourg » avant cinq ans de travaux, transformant ses huit étages en un immense terrain de jeu mêlant concerts, performances et expériences immersives
  • L’événement, réunissant 80 artistes et plusieurs grandes marques partenaires, célèbre la culture et l’esprit d’ouverture du lieu avant sa fermeture pour rénovation complète

PARIS: Dans un tourbillon de musique, d'images et de patins à roulettes, le Centre Pompidou à Paris s'offre un dernier week-end festif avant cinq ans de travaux, avec "Because Beaubourg", événement qui transforme l'intégralité du bâtiment en un immense terrain de jeu.

"Je suis venu parce que j'ai entendu dire que c'était la fermeture. Et j'avais envie de participer à ça une dernière fois, pour en profiter un petit peu", explique à l'AFP Eliot Ibert, 23 ans, en coloriant une fresque participative.

Fermé au public depuis le 22 septembre, le bâtiment aux emblématiques tuyaux colorés rouvre ses portes ce week-end avec un parcours inédit. De vendredi à dimanche, quelque 80 artistes se produisent à travers concerts, DJ sets, performances, masterclasses, projections et expériences immersives sur les huit étages.

"C'est le plus grand événement que le Centre Pompidou ait fait depuis son ouverture", assure Paul Mourey, codirecteur artistique de l'événement, imaginé avec le label Because Music.

- "Spleen" -

Chaque étage propose une expérience différente. Au niveau -1, des pianistes amateurs se succèdent devant une fresque des étudiants des Beaux-Arts, tandis que le Forum, au rez-de-chaussée, devient le théâtre de performances en journée et un club illuminé la nuit.

Le Village des enfants prend place au 3e étage, tandis que plusieurs artistes et sociétés ont investi le 4e niveau. Shygirl, Shay ou Pedro Winter, fondateur du label Ed Banger, ainsi que les entreprises Spotify, Samsung et Snapchat, qui proposent de tester ses lunettes de réalité augmentée, participent à des installations et expériences interactives.

Autant de partenaires qui contribuent à financer l'événement.

Le premier et le sixième étage accueillent, de jour comme de nuit, des artistes tels que Catherine Ringer, Christine and the Queens, Selah Sue, Keziah Jones ou Sébastien Tellier.

Le musicien français, qui profite de l'événement pour promouvoir son nouvel album prévu en janvier, souligne l'importance de participer à cette célébration : "La culture, aujourd'hui, elle est rare. Quand il y a des petits îlots de culture, c'est important d'y être. Je n'avais pas envie de manquer ça."

Brigitte Baleo, 78 ans, retraitée ayant travaillé dix ans à la bibliothèque du Centre Pompidou, confie que la fermeture lui laisse "un peu de spleen".

"Ça tend l'estomac, il y a trop de souvenirs", ajoute-t-elle, émue. "Mais il faut que la fermeture ait lieu, pour réhabiliter ce monument".

Conçu en 1977 comme un lieu "ouvert à tous" par les architectes Renzo Piano et Richard Rogers, le bâtiment souffre aujourd'hui de vétusté.

Désamiantage, accessibilité du lieu, sécurité et complet réaménagement intérieur sont au menu de ses importants travaux de rénovation.

- Rollers et vue panoramique -

Cette fermeture, "c'est quelque chose qui me touche", abonde Florence, qui n'a pas souhaité donner son nom.

Férue d'électro, la Bordelaise de 57 ans vient d'assister au deuxième étage à "Space Opera", un film musical du duo français Justice projeté comme une expérience de clubbing, à quelques pas de l'installation inédite Camera/Man de Thomas Bangalter, un des deux membres de Daft Punk.

Pour encore plus de mouvements, elle compte bien expérimenter le Roller Disco qui fait vibrer l'ancienne galerie 1, au dernier étage.

Entre DJ sets, patins à roulettes et vues panoramiques sur Paris, l'ambiance mêle nostalgie et effervescence festive.

Gulliver Hubard, un étudiant britannique de 20 ans, savoure lui sa première visite. "C'est une chance de le voir avant sa fermeture", assure-t-il.

En journée, le programme est entièrement gratuit, et les organisateurs espèrent accueillir entre 10.000 et 15.000 visiteurs par jour.

Le programme nocturne, payant, a lui été pris d'assaut : les 12.000 billets se sont arrachés en à peine une journée.