Face à une croissance mondiale en berne, la patronne du FMI appelle à l'action

La directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva, discute de l'économie mondiale et des priorités politiques le 6 octobre 2022 à Washington, DC. (AFP).
La directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva, discute de l'économie mondiale et des priorités politiques le 6 octobre 2022 à Washington, DC. (AFP).
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Publié le Jeudi 06 octobre 2022

Face à une croissance mondiale en berne, la patronne du FMI appelle à l'action

  • L'institution publiera mardi ses prévisions de croissance pour l'année à venir, et celles-ci seront révisées en baisse, a averti Mme Georgieva
  • En cause, la multiplication des crises, renforcées par les conséquences de la guerre russe en Ukraine, et les désastres écologiques qui ont frappé plusieurs régions du monde cet été, venant un peu plus déstabiliser l'économie mondiale

WASHINGTON : Les Etats et institutions doivent agir ensembleface au risque croissant de récession partout dans le monde, a averti la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), Kristalina Georgieva, dans un discours prononcé jeudi à Washington.

Face au risque de voir "cette période de fragilité devenir une dangereuse nouvelle normalité", Mme Georgieva a appelé à "plus de volonté à agir maintenant et ensemble".

"Il y a urgence à stabiliser l'économie. (...) Au FMI, nous appelons à une action conjointe" des Etats afin d'anticiper les crises à venir, a insisté la directrice générale du FMI, en ouverture des réunions annuelles de l'institution, qui doivent se tenir dans une semaine à Washington, entièrement en présentiel pour les participants, pour la première fois depuis l'automne 2019.

L'institution publiera mardi ses prévisions de croissance pour l'année à venir, et celles-ci seront révisées en baisse, a averti Mme Georgieva.

En cause, la multiplication des crises, renforcées par les conséquences de la guerre russe en Ukraine, et les désastres écologiques qui ont frappé plusieurs régions du monde cet été, venant un peu plus déstabiliser une économie mondiale déjà mise à mal par le Covid-19.

La pandémie a marqué un "virage fondamental pour l'économie mondiale" a ajouté Mme Georgieva, passant d'"un monde d'une prévisibilité relative" à "un monde sujet aux chocs et de plus grande incertitude".

Conséquence, l'institution s'attend désormais à ce qu'un nombre important de pays connaissent au moins deux trimestres consécutifs de repli de leur PIB, signe de récession, entre la fin de cette année et 2023.

Un risque qui devrait concerner "environ un tiers de l'économie mondiale" alors que "pour de nombreux foyers à travers le monde, même si la croissance est positive, ils auront le sentiment d'être en récession, à cause de la hausse du coût de la vie", a souligné Mme Georgieva.

Et cela pourrait même être pire: "l'incertitude est extrêmement élevée, dans un contexte de guerre et de pandémie. Il peut y avoir d'autres chocs économiques".

Dès lors, la première des priorités est d'empêcher les prix de continuer à flamber, car "loin d'être transitoire, l'inflation s'installe", a-t-elle estimé.

Et, alors que les banques centrales luttent en relevant leurs taux pour faire ralentir l'économie, ne pas agir maintenant nécessiterait "des taux encore plus élevés et persistants, qui causeraient encore plus de dégâts sur la croissance et l'emploi", a averti la patronne du FMI.

Risque d'une crise étendue de la dette

Kristalina Georgieva rejoint d'ailleurs le président de la banque centrale américaine (Fed), Jerome Powell, reconnaissant que la réduction de l'inflation "ne sera pas facile et ne sera pas indolore à court terme".

Attention cependant à un resserrement monétaire "trop fort et trop rapide" et surtout sans coordination, a prévenu la directrice générale du FMI, au risque de "plonger de nombreuses économies dans une récession prolongée".

D'autant que la hausse du dollar, conséquence de celle du taux directeur de la Fed, vient compliquer l'accès au crédit de nombreux pays qui empruntent dans cette monnaie et ont vu leur dette augmenter par ailleurs du fait de la hausse des taux d'intérêt.

"Plus du quart des pays émergents ont fait défaut ou sont à des niveaux difficiles, de même que plus de 60% des Etats à faibles revenus", s'est inquiété Kristalina Georgieva.

Le risque: une crise de la dette s'étendant à l'ensemble de ces pays.

"Les principaux prêteurs tels que la Chine ou le secteur privé doivent prendre leur responsabilité", a-t-elle martelé.

Les ministres de l'économie du G20 doivent se retrouver à Washington, en compagnie des gouverneurs des banques centrales, en marge de la réunion annuelle du FMI, mercredi et jeudi prochain. Ils ont notamment la volonté d'avancer sur les sujets de l'imposition mondiale, de la régulation du secteur financier ou encore du financement des infrastructures.

Si agir à court terme est essentiel, "ce ne sera pas suffisant pour revitaliser l'économie mondiale", a prévenu Mme Georgieva, qui appelle à des "réformes de transformation", que le FMI compte soutenir.

Parmi les points d'attention, selon la directrice générale du FMI, "l'investissement dans la santé, l'éducation, des filets de protection plus solides sont essentiels", de même que la numérisation et le développement des infrastructures numériques.

"Nous devons répondre à cette période d'instabilité (...) en stabilisant nos économies face aux crises immédiates et construire notre stabilité face aux crises à venir", a-t-elle conclu.


IA: Google investit 5 milliards de livres au Royaume-Uni avant la visite de Trump

Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
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  • Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat
  • Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres

LONDRES: Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays.

Cette somme financera "les dépenses d'investissement, de recherche et développement" de l'entreprise dans le pays, ce qui englobe Google DeepMind (le laboratoire d'IA du géant californien), a indiqué le groupe dans un communiqué.

Google ouvre mardi un centre de données à Waltham Cross, au nord de Londres, dans lequel il avait déjà annoncé l'an dernier injecter un milliard de dollars (850 millions d'euros). La somme annoncée mardi viendra aussi compléter ce financement, a précisé un porte-parole de l'entreprise à l'AFP.

Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat.

Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres.

Selon un responsable américain, qui s'exprimait auprès de journalistes, dont l'AFP, en amont de la visite, les annonces se porteront à "plus de dix milliards, peut-être des dizaines de milliards" de dollars.

Le gouvernement britannique avait déjà dévoilé dimanche plus d'un milliard de livres d'investissements de banques américaines dans le pays, là aussi en amont de la visite d'Etat du président Trump.

Et l'exécutif britannique a annoncé lundi que Londres et Washington allaient signer un accord pour accélérer les délais d'autorisation et de validation des projets nucléaires entre les deux pays.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités.

Le partenariat avec Washington, baptisé "Atlantic Partnership for Advanced Nuclear Energy", doit lui aussi être formellement signé lors de la visite d'État de Donald Trump.

 


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".


La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, alerte le Secours populaire

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
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  • "La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire
  • "La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg

PARIS: La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, touchant tous les aspects de la vie des plus fragiles, alerte jeudi le Secours Populaire, qui publie un baromètre témoignant de cette situation jugée préoccupante.

"La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire.

L'association publie un baromètre qui indique qu'un tiers des Français (31%) rencontrent des difficultés financières pour se procurer une alimentation saine permettant de faire trois repas par jour. De même 39% ont du mal à payer leurs dépenses d'électricité et 49% à partir en vacances au moins une fois par an, selon ce sondage réalisé par l'Institut Ipsos, auprès d'un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population nationale âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

"La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg.

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier.

Malgré un "léger mieux" constaté sur certains indicateurs lié au "ralentissement de l'inflation", ce baromètre révèle "une situation sociale toujours très préoccupante", selon le Secours populaire.

En début de semaine, la déléguée interministérielle à la prévention et la lutte contre la pauvreté, Anne Rubinstein, a évoqué des "difficultés" rencontrées par l'Etat pour résorber un taux de pauvreté qui a atteint un niveau record en 2023 en France métropolitaine.

Face à cette situation, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) a appelé mardi à une "mobilisation collective" pour "débloquer la lutte contre la précarité".

Au niveau européen, 28% de la population déclare se trouver en situation précaire, également selon ce baromètre du Secours Populaire, qui s'appuie aussi sur des échantillons de 1.000 personnes représentatifs de neuf autres pays (Allemagne, Grèce, Italie, Pologne, Royaume-Uni, Moldavie, Portugal, Roumanie, Serbie).

La part des personnes se considérant comme précaires demeure à un niveau "très alarmant" en Grèce (46%) et en Moldavie (45%), pointe le baromètre.

En 2024, le Secours populaire a soutenu 3,7 millions de personnes en France. L'association fournit notamment de l'aide alimentaire et organise des activités pour différents publics pour rompre l'isolement.