La sobriété énergétique s’impose en France!

Des véhicules font la queue pour de l'essence dans une station TotalEnergies à Bron, près de Lyon, le 10 octobre 2022, alors que les stations-service à travers la France manquent d'essence à cause d'une grève. (Photo d'OLIVIER CHASSIGNOLE / AFP)
Des véhicules font la queue pour de l'essence dans une station TotalEnergies à Bron, près de Lyon, le 10 octobre 2022, alors que les stations-service à travers la France manquent d'essence à cause d'une grève. (Photo d'OLIVIER CHASSIGNOLE / AFP)
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Publié le Mercredi 12 octobre 2022

La sobriété énergétique s’impose en France!

La sobriété énergétique s’impose en France!
  • Les Français sont rentrés dans le dur de la crise énergétique, ne serait-ce que sur le plan psychologique
  • L’onde de choc de la guerre entre l’Ukraine et la Russie est en train d’envahir tous les espaces et oblige les gouvernements à imaginer des solutions pour en diminuer l’impact

Aujourd’hui, les Français sont rentrés dans le dur de la crise énergétique, ne serait-ce que sur le plan psychologique. Ce qui était décrit auparavant comme un scénario catastrophe par les plus pessimistes est en train de devenir une réalité.

L’onde de choc de la guerre entre l’Ukraine et la Russie est en train d’envahir tous les espaces et oblige les gouvernements à imaginer des solutions pour en diminuer l’impact.

Le mantra politique de l’époque est la sobriété énergétique. Une multitude de comportements quotidiens à réinventer pour consommer le moins d’énergie possible et participer à l’effort collectif afin d’éviter les ruptures. La sobriété est un élément de marketing politique qui a pour but de faire passer les inévitables menaces de hausses à venir.

En plus du bouclier tarifaire, le gouvernement a présenté la politique de la sobriété énergétique comme un choix susceptible de protéger le pouvoir d’achat des Français ou, du moins, d’en ralentir la chute.

Le Français est donc invité par son gouvernement à contrôler ses appareils domestiques consommateurs d’énergie, à contrôler la température de son chauffage personnel, à privilégier le télétravail… Autant de gestes écoénergétiques qui vont changer la vie quotidienne et faire de la démarche économique le cœur des rapports sociaux.

Il n’est pas certain que cette nouvelle façon de vivre sera un long fleuve tranquille. Récemment, lorsqu’une information selon laquelle une compagnie de distribution d’énergie s’apprêterait à contrôler à distance la consommation électrique des Français et à procéder à des coupures sans leur demander leur avis, un vent de révolte a soufflé sur les réseaux sociaux. La compagnie en question s’est trouvée dans l’obligation de procéder à des démentis répétés pour effacer cette fausse rumeur.

En plus du bouclier tarifaire, le gouvernement a présenté la politique de la sobriété énergétique comme un choix susceptible de protéger le pouvoir d’achat des Français ou, du moins, d’en ralentir la chute. L’exécutif mise sur une discipline collective qui aurait pour conséquence que la consommation d’énergie baisse de manière significative sur l’ensemble du territoire français, évitant aux gouvernements de répercuter les hausses générales sur le budget des particuliers.

Le véritable test de la sobriété énergétique française aura lieu lors de l’hiver prochain.

L’Élysée, tout comme Matignon, mise sur le fait que les Français vont majoritairement respecter les consignes données pour mettre en pratique cette sobriété, d’abord pour des raisons économiques, car les ressorts internationaux et les impacts nationaux de l’austérité sont évidents. Ensuite, l’esprit même de cette sobriété épouse l’air du temps écologique, qui pousse davantage à l’ascétisme qu’à la société de consommation. Il s’agit en effet de «la fin de l’abondance», pour reprendre les termes du président Emmanuel Macron .

Cette sobriété énergétique est exigée des particuliers, mais aussi des entreprises privées et publiques. Dans ce domaine, les services de l’État sont censés donner l’exemple et éviter d’apparaître comme des consommateurs d’énergie hors sol, car cela fournirait à la presse d’investigation une occasion en or de révéler une situation anachronique et contradictoire.

Sobre dans sa consommation, économe dans ses gestes quotidiens afin de ne pas subir l’inévitable flambée des prix: tel est le message du gouvernement. L’opposition, qu’il s’agisse de l’extrême gauche ou de l’extrême droite, l’avait accueilli de manière dubitative, reprochant à l’exécutif de recourir à des solutions superficielles et inefficaces au lieu de s’attaquer aux causes structurelles qui menacent le pouvoir d’achat des Français.

Le véritable test de la sobriété énergétique française aura lieu lors de l’hiver prochain. La dureté du froid déterminera certainement la capacité de résistance des Français et leur aptitude à respecter les nouvelles règles.

Le gouvernement a beau dire qu’il n’y a pas de pénurie d’essence en France et qu’il ne s’agit en fin de compte que d’un problème de distribution interne, le message n’est pas audible.

C’est en effet la grande inconnue de cette équation politique gouvernementale: le degré d’acceptation des Français de ces restrictions inédites – d’autant plus qu’ils voient l’incontestable hausse du coût de la vie affecter leurs budgets.

Autre élément de complication, le fait que certains syndicats et des acteurs sociaux tirent parti de cette séquence difficile pour faire avancer leurs revendications. C’est actuellement le cas des syndicats des sociétés énergétiques comme ExxonMobil et TotalEnergies, qui ont bloqué les raffineries et ont privé une grande partie des pompes à essence de Paris et d’Île-de-France de gasoil, plongeant les consommateurs dans un grand désarroi. Cette grève avait amplifié la perspective d’une crise et d’une pénurie qui menacent les pays européens dans le contexte de la guerre entre la Russie et l’Ukraine.

Le gouvernement a beau dire qu’il n’y a pas de pénurie d’essence en France et qu’il ne s’agit en fin de compte que d’un problème de distribution interne, le message n’est pas audible. La France est entrée de plain-pied dans la grande crise qu’a provoquée sur les marchés mondiaux l’aventure militaire russe en Ukraine. Et l’angoisse française s’accentue à mesure que s’éloigne l’espoir d’une sortie de ce long tunnel.

Mustapha Tossa est un journaliste franco-marocain. En plus d’avoir participé au lancement du service arabe de Radio France internationale, il a notamment travaillé pour Monte Carlo Doualiya, TV5 Monde et France 24. Mustapha Tossa tient également deux blogs en français et en arabe où il traite de la politique française et internationale à dominance arabe et maghrébine.  

TWITTER: @tossamus

NDLR: L’opinion exprimée dans cette page est propre à l’auteur et ne reflète pas nécessairement celle d’Arab News en français.