Grève TotalEnergies: Un compromis trouvé sans la CGT, qui veut amplifier le mouvement

Les automobilistes ont continué jeudi leur quête d'essence et de diesel, chassant les ravitaillements de camions-citernes et surveillant les applications (Photo, AFP).
Les automobilistes ont continué jeudi leur quête d'essence et de diesel, chassant les ravitaillements de camions-citernes et surveillant les applications (Photo, AFP).
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Publié le Vendredi 14 octobre 2022

Grève TotalEnergies: Un compromis trouvé sans la CGT, qui veut amplifier le mouvement

  • «L’équipe de négociation CFDT donne un avis favorable aux mesures qui sont sur la table», a déclaré Geoffrey Caillon, coordinateur CFDT
  • L'avis est également «plutôt favorable» à la CFE-CGC, selon son coordinateur Dominique Convert

LA DÉFENSE: Le groupe TotalEnergies et deux syndicats majoritaires semblaient vendredi en voie de s'accorder sur une augmentation des salaires dans le groupe, mais la CGT, à l'origine de l'arrêt de travail qui a provoqué une rare pénurie d'essence en France, a refusé tout accord et promis de continuer la grève.

Sous pression du gouvernement et d'une grève qui dure depuis 18 jours, la direction du groupe pétrolier avait convié les quatre syndicats représentatifs à négocier en urgence dans la nuit de jeudi à vendredi. Ce n'est qu'à 03H30 du matin que les représentants des deux syndicats réformistes CFDT et CFE-CGC sont sortis du siège de TotalEnergies à La Défense, pour annoncer qu'ils étaient favorables à la dernière proposition de la direction, selon eux de 7% d'augmentation de salaire et 3.000 à 6.000 euros de prime.

"L’équipe de négociation CFDT donne un avis favorable aux mesures qui sont sur la table", a déclaré Geoffrey Caillon, coordinateur CFDT. L'avis est également "plutôt favorable" à la CFE-CGC, selon son coordinateur Dominique Convert.

Chaque syndicat va désormais consulter ses adhérents pour décider de signer, ou non, l'offre, avant vendredi midi.

"On a soumis un accord pour signature avant midi", a confirmé Namita Shah, membre du comité exécutif de TotalEnergies, sans corroborer le chiffre de 7%, qui est supérieur aux 6% proposés jeudi.

La CGT, elle, avait déjà quitté l'immeuble, non sans avoir préventivement dénoncé l'accord des deux autres syndicats, forts de 56% de représentativité à eux deux.

"Ca ne changera rien à l’état d'esprit et à la détermination des grévistes", a prédit Alexis Antonioli, espérant désormais "la généralisation du mouvement."

Le mouvement des raffineries s'est de fait déjà mué en appels à la grève générale, et mardi prochain devrait être l'occasion d'une grande journée de grève nationale, des transports aux fonctionnaires, suite à l'appel jeudi de quatre grands syndicats (CGT, FO, Solidaires, FSU) et de plusieurs organisations de jeunesse. La grève de mardi touchera en particulier la SNCF et la RATP.

Le gouvernement avait fait fortement pression pour que ces négociations commencent, et Emmanuel Macron a assuré que le retour à la normale interviendrait "dans le courant de la semaine qui vient".

«La catastrophe»

Dans les Hauts-de-France, en Ile-de-France et dans le Centre-Val-de-Loire, particulièrement touchés par les pénuries créées par les grèves dans les raffineries et dépôts de carburants, les automobilistes ont continué jeudi leur quête d'essence et de diesel, chassant les ravitaillements de camions-citernes et surveillant les applications. Une pénurie qui fait perdre un temps considérable aux professionnels qui dépendent de leur véhicule: transporteurs routiers, artisans, ambulanciers...

"Depuis quatre-cinq jours, c'est la catastrophe", s'exclame Françoise Ernst, monitrice d'auto-école à Paris. "On ne peut plus travailler."

"C'est un vrai problème, pas que pour les chefs d'entreprise, pour tout le monde", témoignait aussi Enzo Rougès, chef d'entreprise dans l'automobile, à une station BP de Paris prise d'assaut.

Les routiers sont "sur le fil du rasoir", assure auprès de l'AFP le secrétaire général de l'organisation professionnelle Otre, Jean-Marc Rivera.

Seule une raffinerie a vu la grève s'arrêter jeudi, celle de Fos-sur-Mer appartenant à Esso-ExxonMobil, où un accord a été signé lundi avec CFDT et CFE-CGC mais est rejeté par la CGT. Les grévistes de celle de Gravenchon-Port-Jérôme l'ont en revanche reconduite jeudi.

Cinq raffineries, sur sept en France, restent à l'arrêt, ainsi que plusieurs dépôts dont un immense près de Dunkerque, appartenant à TotalEnergies.

Premiers stocks libérés

À 17H00 jeudi, 29,1% des stations manquaient d'un ou plusieurs carburants, selon le ministère de la Transition énergétique, à peine moins que la veille (30,8%). Dans le Centre Val-de-Loire, la proportion monte à 44,7%.

L'ouverture des négociations s'est faite après les réquisitions gouvernementales de salariés dans la raffinerie Esso-ExxonMobil de Gravenchon en Normandie, et au dépôt de Flandres de TotalEnergies à Mardyck, près de Dunkerque, pour rouvrir les vannes.

Sur le terrain, les premiers salariés réquisitionnés, forcés de travailler sous peine de sanctions pénales, ont permis de libérer de premiers stocks de carburants par oléoduc (7.000 mètres cubes du dépôt de Gravenchon en Normandie en 24 heures, selon le gouvernement) et par la route (25 camions-citernes de Dunkerque jeudi), sans encombre.

Pour accélérer la reprise, le gouvernement a de nouveau autorisé les camions-citernes à rouler ce week-end, alors que les poids lourds ont normalement interdiction de rouler du samedi 22H au dimanche 22H.


Le PDG de CMA CGM assure «ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale» des médias qu'il possède

Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
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  • "Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media
  • Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique"

PARIS: Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC.

"Les journaux ou chaînes de télévision qu'on a rachetés ont une indépendance, ce sont des journaux qui sont nuancés, qui offrent le pluralisme. Je ne m'immisce pas dans la ligne éditoriale de ces journaux", a-t-il déclaré lors d'une audition devant la commission des affaires économiques de l'Assemblée.

Il répondait au député France insoumise René Pilato qui suggérait une "grande loi de séparation des entreprises et des médias".

"Si des investisseurs comme le groupe CMA CGM ne viennent pas, ces médias malheureusement tombent", a ajouté M. Saadé, rappelant que le secteur des médias est "très sinistré".

"Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media.

Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique".

"Dans un monde traversé par les +fake news+, je crois que les industriels ont un rôle à jouer pour défendre le pluralisme, l'indépendance et la qualité de l'information. Si nous voulons continuer à produire de l'information en France et résister à la domination des grandes plateformes, nous devons garantir des groupes de médias solides capables de créer des contenus de qualité et de les diffuser sur tous les supports", a-t-il défendu.

Outre BFMTV, RMC, et désormais Brut, CMA Media possède les journaux La Tribune et La Tribune Dimanche, La Provence et Corse Matin. Le groupe vient également de racheter la chaîne télé Chérie 25 (NRJ Group).

Vendredi, les Sociétés des journalistes (SDJ) de BFMTV, RMC et La Tribune avaient déploré qu'"une prise de position de Rodolphe Saadé sur l'actualité politique et sociale du pays (ait) été diffusée à l'antenne de BFMTV" jeudi.

Il s'agissait d'extraits écrits tirés d'une tribune publiée dans La Provence après le mouvement "Bloquons tout" du 10 septembre. "Les entreprises ne sont pas des adversaires, elles sont des partenaires de la Nation", y écrivait notamment M. Saadé.

 


Faure «sur sa faim» après son entretien avec Lecornu, resté «très flou» sur ses intentions

Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
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  • Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu
  • Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland

PARIS: Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions".

"Pour l'instant, nous sommes restés sur notre faim et nous verrons bien ce qu'il a à nous dire dans les prochains jours", a déclaré le premier secrétaire du PS, à l'issue de sa première rencontre à Matignon, qui a duré près de deux heures.

Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu à la veille d'une importante journée de mobilisation syndicale.

Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland.

A propos de la journée d'actions de jeudi, il a expliqué que ces manifestations seraient "aussi un élément du rapport de force que nous devons installer avec un exécutif qui, jusqu'ici, n'a pas fait la démonstration de sa capacité à comprendre la colère et même l'exaspération des Français".

Olivier Faure a également dit qu'il ne souhaitait pas "voir revenir sur la table une loi immigration", estimant que le Premier ministre macroniste était "tiraillé par une droite qui lorgne de plus en plus vers l'extrême droite" et avait  "beaucoup de problèmes dans son propre socle commun".

"Nous ne cherchons pas la censure, nous ne cherchons pas la dissolution, nous ne cherchons pas la destitution. Nous cherchons à ce que les Français soient entendus", a-t-il plaidé, en citant un sondage Ifop commandé par le parti montrant que les Français, quelles que soient leurs sensibilités, plébiscitent les mesures poussées par le PS.

"Il y a des mesures qui sont très majoritaires dans le pays, pour la taxe Zucman" sur les hauts patrimoines, "pour en finir" avec la réforme des retraites, pour "rendre du pouvoir d'achat", notamment à travers "un taux différentiel de CSG", a-t-il détaillé.


Des socialistes au RN, Lecornu reçoit ses opposants avant une grande journée d'action

Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu (C) participe à une réunion lors de sa visite au centre départemental de santé de Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025.  (AFP)
Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu (C) participe à une réunion lors de sa visite au centre départemental de santé de Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025. (AFP)
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  • Le Premier ministre Sébastien Lecornu entame une série de réunions avec les oppositions avant une grande journée de mobilisation, dans un climat tendu marqué par les revendications sociales et les divergences sur le plan de redressement budgétaire

PARIS: Sébastien Lecornu reçoit mercredi ses opposants politiques, à la veille d'une journée importante de mobilisation sociale, sans grande marge de manœuvre pour discuter, au vu des lignes rouges qu'ils posent et des menaces de censure.

Tous les dirigeants de gauche - à l'exception de La France insoumise qui a refusé l'invitation -  ainsi que ceux du Rassemblement national vont défiler dans le bureau du nouveau Premier ministre, à commencer par les socialistes à 09H30.

Sébastien Lecornu a déjà échangé la semaine dernière avec les responsables du "socle commun" de la droite et du centre, ainsi que les syndicats et le patronat.

"Le premier qui doit bouger, c'est le gouvernement", a estimé pour sa part le président du groupe des députés Liot Laurent Panifous, reçu mardi, ajoutant que "le sujet des retraites ne peut pas être renvoyé uniquement à 2027".

François Bayrou avait obtenu la mansuétude du PS sur le budget 2025 en ouvrant un "conclave" sur la réforme des retraites, qui s'est soldé par un échec. Puis il a présenté à la mi-juillet un sévère plan de redressement des finances publiques qui a fait hurler toutes les oppositions.

Mercredi, "ça va être un round d'observation. La veille des grosses manifs, on sera dur, exigeant. Ce qui se joue ce n'est pas au premier chef un sujet budgétaire", mais un "sujet démocratique" car ce sont les "battus qui gouvernent", anticipe un responsable socialiste.

- Gestes -

Ces entretiens ont lieu sous la pression de la rue, alors qu'une mobilisation massive est attendue jeudi, de l'ordre de celles contre la réforme des retraites en 2023. Les syndicats contestent notamment les mesures budgétaires "brutales" de François Bayrou.

Avant d'entamer les discussions, Sébastien Lecornu a fait plusieurs gestes en direction de la gauche et de l'opinion: retrait de la proposition impopulaire de supprimer deux jours fériés, et promesse de ne pas rouvrir le conclave sur les retraites.

Il a aussi consacré son premier déplacement samedi à l'accès aux soins, avant d'annoncer la suppression très symbolique, dès l'an prochain, des avantages restants octroyés aux ex-Premiers ministres.

Les socialistes ont eux posé leurs conditions dès dimanche face aux offres appuyées de dialogue du Premier ministre.

Ils considèrent que le plan Bayrou "ne doit pas servir de base de discussion", alors que Sébastien Lecornu a l'intention d'en faire un point de départ, puis de mettre les parlementaires devant leur responsabilité pour l'amender.

- "Rupture" -

Mercredi, les socialistes viendront avec en main un sondage Ifop commandé par le parti montrant que les Français, quelles que soient leurs sensibilités, plébiscitent les mesures poussées par le PS.

Parmi elles, la création d'une taxe de 2% sur les patrimoines supérieurs à 100 millions d'euros - la fameuse taxe Zucman, qui enflamme ce débat budgétaire - à laquelle 86% des sondés sont favorables, dont 92% des sympathisants Renaissance et 89% des sympathisants LR.

Le Premier ministre a cependant déjà fermé la porte à cette taxe, tout en reconnaissant que se posaient "des questions de justice fiscale".

La taxe Zucman, "c'est une connerie, mais ils vont la faire quand même parce que ça permet d'obtenir un accord de non-censure" avec la gauche, a de son côté prédit mardi Marine Le Pen, sans pour autant fermer la porte à une mise à contribution des plus fortunés.

"Si la rupture consiste à un retour aux sources socialistes du macronisme, c'est contraire à l'aspiration majoritaire du pays", a également mis en garde la cheffe des députés RN, attendue à 16H00 à Matignon avec Jordan Bardella.

Un avertissement auquel le patron des députés LR Laurent Wauquiez a fait écho mardi en dénonçant "la pression du PS", craignant qu'il "n'y ait plus rien sur l'immigration, la sécurité ou l'assistanat" dans le budget.

Autre point au cœur des discussions, le niveau de freinage des dépenses. La présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet a appelé dimanche à chercher un accord autour "de 35 à 36 milliards" d'euros d'économies, soit moins que les 44 milliards initialement prévus par François Bayrou, mais plus que les 21,7 milliards du PS.

"Les socialistes donnent l'air d'être déterminés et de poser des conditions mais c'est un moyen de rentrer dans les négociations", estime Manuel Bompard, coordinateur de LFI, grinçant sur la politique des "petits pas" du PS, au détriment des "grands soirs".