Transition climatique: après le pétrole, une nouvelle dépendance aux métaux stratégiques?

Un travailleur coupe du métal d'une plate-forme pétrolière désaffectée dans un chantier à Stord le 17 juin 2022 (Photo, AFP).
Un travailleur coupe du métal d'une plate-forme pétrolière désaffectée dans un chantier à Stord le 17 juin 2022 (Photo, AFP).
Short Url
Publié le Lundi 24 octobre 2022

Transition climatique: après le pétrole, une nouvelle dépendance aux métaux stratégiques?

  • Ces métaux permettent à l'industrie, l'électronique, les transports ou les systèmes énergétiques de se passer d'hydrocarbures et de ne plus émettre les gaz à effet de serre
  • Selon l'AIE, la demande mondiale de métaux critiques pourrait d'ici 2040 quadrupler si le monde se conforme aux engagements de l'accord de Paris sur le climat

PARIS: Après un siècle de tensions géopolitiques autour de l'accès au pétrole, les experts craignent que la transition énergétique ne crée, surtout en Europe, de nouvelles dépendances vis-à-vis des pays producteurs de métaux cruciaux pour les technologies bas-carbone et l'électrification de la planète.

1 - Quels sont les métaux de la transition climatique ?

Cobalt, nickel, manganèse, lithium conduisent l'électricité dans les batteries automobiles. Les terres rares (neodyme, praseodyme, dysprosium...) sont utilisées dans les disques durs ou les aimants permanents des éoliennes. Cuivre et aluminium conduisent l'électricité en général. Le platine sert à l'hydrogène.

Ces métaux permettent à l'industrie, l'électronique, les transports ou les systèmes énergétiques de se passer d'hydrocarbures et de ne plus émettre les gaz à effet de serre qui réchauffent la planète.

Les métaux seront "au centre des efforts de décarbonation et d'électrification de l'économie au fur et à mesure que l'on s'éloigne des carburants fossiles," précise un rapport du cabinet McKinsey publié début 2022.

Ils vont devenir aussi importants que fut le charbon pour les machines à vapeur au XIXe siècle, ou le pétrole au XXe siècle.

2 - Quels besoins pour parvenir à la neutralité carbone en 2050 ?

Selon l'AIE, la demande mondiale de métaux critiques pourrait d'ici 2040 quadrupler si le monde se conforme aux engagements de l'accord de Paris sur le climat.

Pour cette transition, il faudra produire plus de métaux d'ici 2050 que l'humanité en a produit au cours de toute son histoire, estime Olivier Vidal (Institut des Sciences de la terre, Grenoble, CNRS).

Deux visions s'opposent: certains anticipent une pénurie, quand d'autres affirment que l'évolution technologique et le recyclage permettront de soutenir l'augmentation de production.

Selon une étude de l'université de Louvain, l'Europe est exposée à des "manques critiques sur les 15 prochaines années", surtout sur le lithium, le cobalt, le nickel, le cuivre et les terres rares.

Le continent européen, qui importe la quasi-totalité de ses matériaux critiques, ne parviendrait qu'à couvrir entre 5 et 55% de ses besoins en 2030, mais il dispose de ressources inexploitées telles que cobalt, gallium, germanium ou lithium, répond l'Alliance européenne des matières premières (ERMA). A condition que des "permis miniers" soient accordés, souligne Bernd Schaefer, son dirigeant. De nouveaux projets d'exploitation de lithium ont été lancés, dont lundi en France, par le groupe Imerys.

Les Etats-Unis viennent d'ouvrir leur première mine de cobalt depuis des décennies, dans l'Idaho. Les constructeurs automobiles comme Tesla veulent entrer directement au capital d'opérateurs miniers.

3 - Quels sont les pays producteurs ?

Le marché du cobalt est dominé par un acteur principal à chaque extrémité de la chaîne de valeur: la République démocratique du Congo (RDC) assure 70% de la production mondiale, et la Chine couvre plus de 50% du raffinage.

L'Afrique du Sud représente 37% de la production mondiale de manganèse et la Guinée 22% de la bauxite (qui sert à faire l'aluminium, NDLR).

Pour le lithium, les principaux pays producteurs sont l'Australie, le Chili et l'Argentine. La Bolivie dispose des réserves inexploitées les plus importantes.

4 - Quels risques géopolitiques autour de ces métaux ?

"Le triangle du pétrole et du gaz - Arabie Saoudite, Russie et Etats-Unis - gouverne le monde depuis quarante ans. Un monopole qui laissera peu à peu place à une bipolarisation du monde entre les Etats-Unis et la Chine, grands utilisateurs des métaux de la transition énergétique", estime Philippe Varin, auteur d'un rapport sur l'approvisionnement de l'industrie française en matière premières minérales.

En Afrique et ailleurs, la Chine et ses entreprises ont pris "40% du contrôle des chaînes de valeur pour les métaux nécessaires à la fabrication de batteries. Ce changement de décor géopolitique sera générateur de tensions sur les métaux," dit-il, en demandant le développement d'une "diplomatie des métaux" dans une optique "de partenariat avec des pays riches en ressources".

Les matières premières stratégiques "pourraient être l'objet d'une confrontation entre la Chine et les États-Unis dans les années à venir," ajoute Emmanuel Hache, prospectiviste au centre de recherche IFP Energies nouvelles.

"Aux prémisses de tous les conflits on trouve toujours les matières premières en première ligne," souligne le CyclOpe, guide annuel des matières premières, liant par exemple le coup d'Etat en Guinée de 2021 à l'exploitation de la bauxite.


Automobile: les équipementiers français pressent Bruxelles d'imposer un contenu local

 Trois des plus gros équipementiers automobiles français ont demandé à Bruxelles d'imposer l'obligation d'un contenu local dans les véhicules, lors des annonces attendues mardi sur la révision de l'interdiction de vendre des voitures neuves autres que tout électriques, selon une lettre consultée lundi. (AFP)
Trois des plus gros équipementiers automobiles français ont demandé à Bruxelles d'imposer l'obligation d'un contenu local dans les véhicules, lors des annonces attendues mardi sur la révision de l'interdiction de vendre des voitures neuves autres que tout électriques, selon une lettre consultée lundi. (AFP)
Short Url
  • Les équipementiers européens "contribuent pour 75% à la valeur d'un véhicule et représentent 1,7 million d'emplois" en Europe
  • Mais "les surcapacités mondiales, les importations subventionnées (par le pays exportateur, NDLR) et un déséquilibre commercial accru érodent les fondations de notre industrie"

PARIS: Trois des plus gros équipementiers automobiles français ont demandé à Bruxelles d'imposer l'obligation d'un contenu local dans les véhicules, lors des annonces attendues mardi sur la révision de l'interdiction de vendre des voitures neuves autres que tout électriques, selon une lettre consultée lundi.

Dans cette missive adressée à la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et datée du 12 décembre, les dirigeants des équipementiers Valeo, Forvia et OPmobility demandent à la Commission "des mesures claires sur le contenu local lors des annonces du 16 décembre".

Les équipementiers européens "contribuent pour 75% à la valeur d'un véhicule et représentent 1,7 million d'emplois" en Europe, mais "les surcapacités mondiales, les importations subventionnées (par le pays exportateur, NDLR) et un déséquilibre commercial accru érodent les fondations de notre industrie", écrivent Christophe Périllat (Valeo), Martin Fisher (Forvia) et Félicie Burelle (OPmobility).

"Les perspectives actuelles indiquent que 350.000 emplois et 23% de la valeur ajoutée des automobiles dans l'UE sont en danger d'ici 2030 si des mesures fortes ne sont pas prises de manière urgente", ajoutent-ils.

Ces équipementiers soutiennent "la position des ministres français en faveur de +flexibilités ciblées+ dans la réglementation sur (les émissions de) CO2 si elle est assortie de conditions de critères de contenu local, dans l'intérêt des emplois, du savoir-faire dans l'automobile" et de "l'empreinte carbone" en Europe.

Les constructeurs automobiles européens et l'Allemagne notamment réclament depuis des semaines de nets assouplissements dans l'interdiction de vendre des voitures neuves thermiques ou hybrides prévue à partir de 2035.

Les annonces de la Commission sont attendues mardi après-midi.

La semaine dernière, plusieurs ministres français avaient envoyé une lettre aux commissaires européens pour dire qu'ils acceptaient des "flexibilités ciblées", à condition qu'elles s'accompagnent d'une règlementation incitative à la production en Europe.

"On est prêt à faire preuve de flexibilité", avait ensuite expliqué Roland Lescure, ministre français de l'Economie. "Si vous voulez vendre encore un peu de moteurs thermiques en 2035 très bien, mais il faut qu’ils soient faits en Europe", avec "au moins 75% de la valeur ajoutée faite en Europe", avait-il ajouté.


Espagne: amende de 64 millions d'euros contre Airbnb pour avoir publié des annonces de logements interdits

Le gouvernement espagnol a annoncé lundi avoir infligé une amende de 64 millions d'euros à la plateforme Airbnb pour avoir notamment publié des annonces de logements interdits, une infraction qualifiée de "grave", en pleine crise du logement dans le pays. (AFP)
Le gouvernement espagnol a annoncé lundi avoir infligé une amende de 64 millions d'euros à la plateforme Airbnb pour avoir notamment publié des annonces de logements interdits, une infraction qualifiée de "grave", en pleine crise du logement dans le pays. (AFP)
Short Url
  • L'amende qui vise Airbnb et atteint précisément 64.055.311 euros est "définitive", a précisé dans un communiqué le ministère de la Consommation
  • "Des milliers de familles vivent dans la précarité à cause de la crise du logement, tandis que quelques-uns s'enrichissent grâce à des modèles économiques qui expulsent les gens de chez eux"

MADRID: Le gouvernement espagnol a annoncé lundi avoir infligé une amende de 64 millions d'euros à la plateforme Airbnb pour avoir notamment publié des annonces de logements interdits, une infraction qualifiée de "grave", en pleine crise du logement dans le pays.

En Espagne, les plateformes de location de courte durée suscitent un vif débat, surtout dans les grandes villes touristiques, où de nombreux habitants leur reprochent de contribuer à la flambée des loyers.

L'amende qui vise Airbnb et atteint précisément 64.055.311 euros est "définitive", a précisé dans un communiqué le ministère de la Consommation, ajoutant que la plateforme basée aux Etats-Unis devait désormais "corriger les manquements constatés en supprimant les contenus illégaux".

"Des milliers de familles vivent dans la précarité à cause de la crise du logement, tandis que quelques-uns s'enrichissent grâce à des modèles économiques qui expulsent les gens de chez eux", a critiqué le ministre de la Consommation, Pablo Bustinduy, cité dans le communiqué.

"Aucune entreprise en Espagne, aussi grande ou puissante soit-elle, n'est au-dessus des lois", a-t-il poursuivi.

L'Espagne a accueilli en 2024 un nombre record de 94 millions de visiteurs, ce qui en fait la deuxième destination touristique dans le monde derrière la France. Ce chiffre pourrait être battu cette année.

Mais si le tourisme est un moteur de l'économie, de nombreux Espagnols dénoncent la congestion des infrastructures, la disparition des commerces traditionnels, remplacés par des boutiques touristiques, et surtout la flambée des loyers, les propriétaires de logements se tournant vers la location touristique, y compris sur Airbnb, nettement plus rentable.

Face à cette poussée de colère, plusieurs régions et municipalités ont annoncé des mesures ces derniers mois, à l'image de la mairie de Barcelone (nord-est), qui a promis de ne pas renouveler les licences de quelque 10.000 appartements touristiques, qui expireront en novembre 2028.

 


La RATP se cherche un ou une présidente

Cette photographie montre le logo de la société française de transports publics RATP, sur un bâtiment à Paris, le 3 mars 2025. (AFP)
Cette photographie montre le logo de la société française de transports publics RATP, sur un bâtiment à Paris, le 3 mars 2025. (AFP)
Short Url
  • Après le départ de Jean Castex à la SNCF, l’Élysée s’apprête à nommer rapidement le nouveau président ou la nouvelle présidente de la RATP
  • Plusieurs profils circulent, tandis que la régie fait face à d’importants défis

PARIS: Après le départ de Jean Castex à la SNCF, la RATP se cherche un ou une présidente, dont la nomination pourrait intervenir "rapidement", selon des sources concordantes.

L'annonce se fera par communiqué de l'Elysée en vertu de l'article 13 de la Constitution qui prévoit que le président de la République nomme aux emplois civils et militaires de l'Etat.

Suivront, deux semaines plus tard, deux auditions de l'impétrant devant les sénateurs, puis devant les députés. Les parlementaires ont la possibilité de s'opposer au candidat d'Emmanuel Macron s'ils réunissent trois cinquième de leurs votes cumulés contre le nom choisi par l'Elysée.

En revanche, si le candidat est adoubé par le Parlement, son nom est proposé en conseil d'administration comme nouvel administrateur, puis confirmé dans la foulée par un décret suivant le conseil des ministres.

Depuis l'arrivée de l'ancien Premier ministre Jean Castex à la tête de la SNCF début novembre, les rumeurs se multiplient sur le nom de celui ou celle qui sera chargé de lui succéder aux commandes de la Régie autonome des transports parisiens, vieille dame créée le 21 mars 1948 et désormais plongée dans le grand bain de l'ouverture à la concurrence.

Les articles de presse pèsent les différents "profils" pressentis, politiques ou techniques qui pourraient "faire le job".

Les noms qui reviennent le plus souvent sont ceux de Xavier Piechaczyk, président du directoire du distributeur d'électricité RTE et ex-conseiller énergie-transport de Jean-Marc Ayrault et François Hollande, Alain Krakovitch, actuel directeur des TGV et Intercités à SNCF Voyageurs, Jean-François Monteils, président du directoire de la Société des grands projets (SGP) et selon la Tribune, Valérie Vesque-Jeancard, présidente de Vinci Airways et directrice déléguée de Vinci Airports.

"Si le nom sort de l'Elysée avant la fin de l'année, cela permettrait au PDG de prendre ses fonctions fin janvier-début février" souligne un fin connaisseur des milieux ferroviaires qui requiert l'anonymat.

- "Aller vite" -

"Une entreprise industrielle comme la RATP ne peut pas rester sans pilote très longtemps" souligne une autre source, proche du dossier, qui requiert aussi l'anonymat, avant d'ajouter "il faut aller vite, car c'est aussi une boite politique, la RATP".

Une entreprise aux enjeux d'autant plus complexes, que malgré son ancrage initial parisien, la RATP dépend du financement de la région Ile-de-France pour ses matériels, s'étend de plus en plus loin dans la banlieue, voire en métropole, et gère des réseaux de transports dans 16 pays sur les cinq continents.

En France, elle est notamment pressentie pour gérer les transports ferroviaires régionaux autour de Caen en Normandie à partir de 2027 après avoir répondu - via sa filiale RATP Dev - à des appels d'offre d'ouverture à la concurrence.

A Paris, la RATP est en train d'introduire progressivement de nouveaux matériels sur son réseau. Le nouveau métro MF19 construit par Alstom, ira d'abord sur la ligne 10 puis sept autres lignes (7 bis, 3 bis, 13 d'ici 2027, puis 12, 8, 3 et 7 d'ici 2034).

L'ensemble du processus prendra une dizaine d'années environ de travaux de modernisation sur les lignes concernées: beaucoup d'ingénierie fine à organiser pour réaliser les travaux pendant la nuit sans interrompre le trafic diurne et de désagréments pour les voyageurs.

A échéance plus lointaine, le ou la future patronne devra déterminer la stratégie du groupe dans les nouvelles ouvertures à la concurrence qui se dessinent: les tramway en 2030 puis le métro en 2040.

Sur le réseau de bus francilien, où la RATP a d'ores et déjà perdu son monopole, elle est parvenue à conserver l'exploitation de 70% des lignes d'autobus qu'elle gérait à l'issue des dernières vagues d'appels d'offre de mise en concurrence qui se sont achevées cet automne.

En particulier, elle continue d'exploiter via RATP Dev tous les bus de Paris intra-muros et a engagé un processus de verdissement de sa flotte de bus, financé par Ile-de-France Mobilités (IDFM), l'autorité organisatrice des transports.

Ses concurrents Keolis (filiale de la SNCF), Transdev et l'italien ATM ont pris les rênes le 1er novembre des lignes remportées.