Dans le nord de l'Ukraine, la crainte d'une nouvelle attaque depuis le Bélarus

Cette photo prise le 4 novembre 2022 montre des tombes vides après l'exhumation des corps dans les fosses communes creusées pendant l'occupation russe dans la ville d'Izyum, dans la région de Kharkiv, lors de l'invasion russe de l'Ukraine. (Photo de Dimitar DILKOFF / AFP)
Cette photo prise le 4 novembre 2022 montre des tombes vides après l'exhumation des corps dans les fosses communes creusées pendant l'occupation russe dans la ville d'Izyum, dans la région de Kharkiv, lors de l'invasion russe de l'Ukraine. (Photo de Dimitar DILKOFF / AFP)
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Publié le Samedi 05 novembre 2022

Dans le nord de l'Ukraine, la crainte d'une nouvelle attaque depuis le Bélarus

  • C'est à partir du passage frontalier de Senkivka qu'au premier jour de l'invasion par les forces de Moscou, la 90e division blindée russe s'est engouffrée comme dans du beurre dans cette partie du territoire ukrainien
  • Depuis, les Ukrainiens surveillent comme le lait sur le feu la zone de Senkivka et les près de 900 km de frontière avec son voisin bélarusse, dont le territoire a servi de base arrière aux soldats russes

GORODNIA, Ukraine : A couvert à l'orée d'un bois trempé par une pluie continue, le garde-frontière ukrainien scrute l'horizon plein nord avec son monoculaire. La frontière avec le Bélarus et la Russie est à moins de 5 km.

Ce matin-là, le ciel est bouché, le plafond très bas. Les drones russes ne viendront pas survoler les tranchées de ce dernier poste avancé des gardes-frontières, dans le nord-est de l'Ukraine.

Coiffé d'un passe-montagne ne laissant voir que ses yeux, l'homme au monoculaire arbore fièrement son lanceur de missile anti-char anglo-suédois NLAW.

«Notre objectif premier est d'empêcher une (nouvelle) invasion. Mais si cela se reproduit dans cette région, alors nous serons prêts à arrêter l'ennemi à la frontière, pour l'empêcher de s'enfoncer dans notre pays» comme le 24 février, assure à l'AFP le garde-frontière de 33 ans, qui ne souhaite pas donner son nom.

Le passage frontalier de Senkivka est tout proche. Il forme un Y: au nord-ouest le Bélarus, au nord-est la Russie, au sud l'Ukraine.

C'est à partir de là qu'au premier jour de l'invasion par les forces de Moscou, la 90e division blindée russe s'est engouffrée comme dans du beurre dans cette partie du territoire ukrainien.

Les Russes sont allés jusqu'aux portes de Tcherniguiv, la capitale de la région éponyme, qu'ils n'ont jamais pu prendre, repoussés par une farouche résistance ukrainienne, alors que la ville était régulièrement bombardée.

Début avril, l'envahisseur s'est retiré en remontant vers le Nord, par là où il était arrivé, avant de recentrer son offensive sur l'est et le sud de l'Ukraine.

- «Menace croissante» -

Depuis, les Ukrainiens surveillent comme le lait sur le feu la zone de Senkivka et les près de 900 km de frontière avec son voisin bélarusse, dont le territoire a servi de base arrière aux soldats russes.

Le 20 octobre, l'armée ukrainienne s'est alarmée de la «menace croissante» d'une nouvelle offensive russe depuis ce voisin du nord, allié de Moscou.

Le Bélarus venait alors d'annoncer le déploiement sur son territoire d'une nouvelle force conjointe avec la Russie, comptant jusqu'à 9.000 soldats russes et environ 170 chars.

«Si tu veux la paix prépare la guerre», avait dit le président bélarusse Alexandre Loukachenko, accusant l'Ukraine de préparer des «attaques» contre son pays. L'armée de Minsk n'a jusqu'à présent pas pris part aux combats en Ukraine.

Sur le campement des garde-frontières ukrainiens, édifié après le retrait russe début avril, «Lynx», de son nom de code, estime à «50/50» le risque d'une nouvelle offensive russe.

«La probabilité d'une attaque sera toujours élevée ici, près de la frontière, avec un tel voisin», estime le trentenaire, mitrailleuse en bandoulière, debout dans une solide et profonde tranchée couverte.

«Il y a des tirs d'artillerie (russe) constants ici (...) À un moment donné, c'était plus calme, mais avec le début de l'automne, l'ennemi est devenu plus actif», relate le garde-frontière.

Mais désormais «il y a plus de positions (des forces ukrainiennes), et plus de fortifications, tout est plus sérieux maintenant (...) Nous envisageons toutes les options pour éviter (la répétition du) scénario» du 24 février, assure-t-il.

A 30 km au sud du village de Senkivka, Gorodnia (21.000 habitants avant la guerre), a été parmi les premières localités ukrainiennes à voir les Russes arriver, dès le matin de l'invasion.

- «Nations fraternelles» -

Son maire, Andrïi Bogdan espère que «la situation ne se répétera pas», même si «cette menace existe», dit-il à l'AFP, en évoquant les troupes russes présentes au Bélarus.

Mais selon lui, «la situation est complètement différente» par rapport à février, quand le territoire de sa commune était «presque sans protection».

«Nous comptons sur nos gardes-frontières, nos forces armées et toutes les forces de défense. Aujourd'hui, ils sont ici, prêts à combattre», se rassure le maire.

L'homme est fier et ému de montrer aux journalistes de l'AFP un petit film tourné quand les forces russes sont arrivées dans la ville. On y voit notamment des habitants, drapeaux ukrainiens à la main, faire face à des véhicules blindés pour les empêcher d'avancer. Les Russes resteront finalement en dehors de la ville durant leur occupation de la zone.

Dans son magasin d'alimentation situé à un carrefour principal de Gorodnia, Svitlana dit ne pas croire «que le Bélarus puisse nous attaquer».

«Nous vivons à la frontière, nous sommes des nations fraternelles. J'ai un frère au Bélarus, et une sœur à Moscou (...) Nous nous parlons constamment. Au début, même ma sœur ne croyait pas que cela soit arrivé. Mais ils comprennent et nous soutiennent», explique la cinquantenaire.

«Je veux que tout se termine, le plus tôt possible», lâche-t-elle.


Russie: le suicide apparent d'un ministre sème la peur au sein de l'élite

Roman Starovoït avait été gouverneur de la région russe de Koursk, frontalière de l'Ukraine, avant d'être promu ministre à Moscou en mai 2024, trois mois avant que les troupes ukrainiennes ne prennent le contrôle d'une petite partie de ce territoire lors d'une offensive surprise. Une attaque qui avait été un revers pour le Kremlin. (AFP)
Roman Starovoït avait été gouverneur de la région russe de Koursk, frontalière de l'Ukraine, avant d'être promu ministre à Moscou en mai 2024, trois mois avant que les troupes ukrainiennes ne prennent le contrôle d'une petite partie de ce territoire lors d'une offensive surprise. Une attaque qui avait été un revers pour le Kremlin. (AFP)
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  • Si les circonstances de la mort de Roman Starovoït, âgé de 53 ans, restent floues, les médias russes ont évoqué une enquête pour corruption le visant, assurant qu'il devait être arrêté prochainement
  • Limogé par le président Vladimir Poutine, il s'est probablement donné la mort, selon les premiers résultats de l'enquête, qui est en cours

SAINT-PETERSBOURG: Le suicide probable du ministre russe des Transports, Roman Starovoït, annoncé peu après son limogeage lundi par Vladimir Poutine sur fond d'allégations de corruption, a profondément choqué l'élite politique, où chacun redoute de faire les frais de la chasse aux profiteurs.

Ses funérailles ont eu lieu vendredi dans un cimetière de Saint-Pétersbourg en présence de sa famille et de collègues, mais en l'absence de M. Poutine qui n'a pas non plus participé à la cérémonie d'adieu jeudi.

Si les circonstances de la mort de Roman Starovoït, âgé de 53 ans, restent floues, les médias russes ont évoqué une enquête pour corruption le visant, assurant qu'il devait être arrêté prochainement.

Limogé par le président Vladimir Poutine, il s'est probablement donné la mort, selon les premiers résultats de l'enquête, qui est en cours.

"C'est une grande perte pour nous, très inattendue. Nous sommes tous choqués", a déclaré à l'AFP Vassilissa, 42 ans, l'épouse d'un collègue de M. Starovoït, lors de la cérémonie de jeudi.

"Il était tellement actif, joyeux, il aimait énormément la vie. Je ne comprends pas comment cela a pu arriver", ajoute cette femme, les larmes aux yeux.

Après avoir déposé devant le cercueil de grands bouquets de roses rouges, des anciens collègues de M. Starovoït, en costumes sombres, sont repartis très vite dans leurs luxueuses voitures noires.

Dans une ambiance très lourde rappelant les funérailles dans le film culte "Le Parrain" de Francis Ford Coppola, d'autres personnes interrogées par les journalistes de l'AFP dans la foule ont refusé de parler.

"Bouc émissaire" 

Roman Starovoït avait été gouverneur de la région russe de Koursk, frontalière de l'Ukraine, avant d'être promu ministre à Moscou en mai 2024, trois mois avant que les troupes ukrainiennes ne prennent le contrôle d'une petite partie de ce territoire lors d'une offensive surprise. Une attaque qui avait été un revers pour le Kremlin.

Son successeur à la tête de cette région, Alexeï Smirnov, a lui été arrêté au printemps pour le détournement des fonds destinés à renforcer les fortifications à la frontière. Celle-là même que les Ukrainiens ont traversé facilement, pour n'être repoussés que neuf mois plus tard.

Les autorités "ont essayé de faire de lui (Roman Starovoït) un bouc émissaire", accuse auprès de l'AFP Andreï Pertsev, analyste du média indépendant Meduza, reconnu "indésirable" et interdit en Russie.

L'incursion ukrainienne "s'est principalement produite parce qu'il n'y avait pas assez de soldats pour protéger la frontière", mais c'était "plus facile de rejeter la faute sur un responsable civil", explique-t-il.

L'affaire Starovoït s'inscrit dans une vague récente de répression visant de hauts responsables soupçonnés de s'être enrichis illégalement pendant l'offensive russe en Ukraine. Et selon des analystes, si les scandales de corruption on toujours existé en Russie, la campagne militaire a changé les règles du jeu politique.

"Il existait des règles auparavant, selon lesquelles les gens savaient: une fois qu'ils montaient suffisamment haut, on ne les embêtait plus", estime M. Pertsev. "Mais elles ne fonctionnent plus."

"On ne vole pas" 

Alors que Vladimir Poutine promettait régulièrement de s'attaquer à la corruption - étant lui même accusé de s'être enrichi illégalement par ses détracteurs -, les rares arrestations médiatisées ont été davantage utilisées pour cibler des opposants ou résultaient de luttes internes entre les échelons inférieurs du pouvoir en Russie.

Depuis l'offensive en Ukraine lancée en février 2022, "quelque chose dans le système a commencé à fonctionner de manière complètement différente", souligne la politologue Tatiana Stanovaïa du Centre Carnegie Russie Eurasie, interdit en Russie en tant qu'organisation "indésirable".

"Toute action ou inaction qui, aux yeux des autorités, accroît la vulnérabilité de l'État face aux actions hostiles de l'ennemi doit être punie sans pitié et sans compromis", estime Mme Stanovaïa en définissant la nouvelle approche du pouvoir.

Pour le Kremlin, la campagne en Ukraine est une "guerre sainte" qui a réécrit les règles, confirme Nina Khrouchtcheva, professeure à The New School, une université de New York, et arrière-petite-fille du dirigeant soviétique Nikita Khrouchtchev.

"Pendant une guerre sainte, on ne vole pas (...) on se serre la ceinture et on travaille 24 heures sur 24", résume-t-elle.

Signe des temps, plusieurs généraux et responsables de la Défense ont été arrêtés pour des affaires de détournement de fonds ces dernières années. Début juillet, l'ancien vice-ministre de la Défense Timour Ivanov a été condamné à 13 ans de prison.

Cette ambiance, selon Mme Stanovaïa, a créé un "sentiment de désespoir" au sein de l'élite politique à Moscou, qui est peu susceptible de s'atténuer.

"À l'avenir, le système sera prêt à sacrifier des figures de plus en plus en vue," avertit-elle.

 


Un trafic de stupéfiants démantelé entre Espagne et France, 13 arrestations

reize personnes, dont le "donneur d'ordres" présumé, ont été arrêtées par des policiers qui ont démantelé un "important" trafic de drogues importées d'Espagne pour alimenter la région Auvergne-Rhône-Alpes, au terme d'une enquête de près de deux ans, a annoncé vendredi la police. (AFP)
reize personnes, dont le "donneur d'ordres" présumé, ont été arrêtées par des policiers qui ont démantelé un "important" trafic de drogues importées d'Espagne pour alimenter la région Auvergne-Rhône-Alpes, au terme d'une enquête de près de deux ans, a annoncé vendredi la police. (AFP)
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  • 2,4 tonnes de résine de cannabis ont été saisies par les enquêteurs de Office anti-stupéfiants (OFAST) de la police judiciaire de Lyon, qui ont mené ces opérations
  • Dans cette première phase, les 11 suspects ont été mis en examen et sont, depuis, en détention provisoire, selon la DIPN

LYON: Treize personnes, dont le "donneur d'ordres" présumé, ont été arrêtées par des policiers qui ont démantelé un "important" trafic de drogues importées d'Espagne pour alimenter la région Auvergne-Rhône-Alpes, au terme d'une enquête de près de deux ans, a annoncé vendredi la police.

Onze suspects ont été interpellés entre décembre 2023 et juillet 2024, notamment grâce à l'interception par les policiers de deux poids-lourds et d'un convoi de voitures "entre la région lyonnaise et le Gard", "au moment où les stupéfiants étaient remis à des équipes locales", explique la Direction interdépartementale de la police (DIPN) du Rhône dans un communiqué.

Dans le même laps de temps, 2,4 tonnes de résine de cannabis ont été saisies par les enquêteurs de Office anti-stupéfiants (OFAST) de la police judiciaire de Lyon, qui ont mené ces opérations.

Dans cette première phase, les 11 suspects ont été mis en examen et sont, depuis, en détention provisoire, selon la DIPN.

Puis l'enquête a permis l'interpellation, le 30 juin dernier, d'un homme "soupçonné d'être le donneur d'ordres" et, le lendemain, d'un autre suspect, "fugitif condamné en 2016" à sept ans de prison pour trafic de stupéfiants. A son domicile dans l'Ain, "54 kg de cocaïne et plusieurs dizaines de milliers d'euros" ont été saisis, précise le communiqué qui n'en dit pas plus sur le profil de ces hommes. Ils ont été mis en examen le 4 juillet et placés en détention provisoire.

La police considère ainsi avoir réussi le "démantèlement de ce groupe criminel organisé (...) réalisant des importations de stupéfiants depuis l'Espagne vers la région Auvergne-Rhône-Alpes" pour des "quantités importantes".

 


Iran: la lauréate du prix Nobel de la Paix Mohammadi se dit «menacée d'élimination physique», selon le comité Nobel

La prix Nobel de la paix iranienne, Narges Mohammadi, dit avoir été "directement et indirectement menacée d'élimination physique" par les autorités iraniennes, a indiqué vendredi le comité Nobel qui s'est entretenu avec elle par téléphone. (AFP)
La prix Nobel de la paix iranienne, Narges Mohammadi, dit avoir été "directement et indirectement menacée d'élimination physique" par les autorités iraniennes, a indiqué vendredi le comité Nobel qui s'est entretenu avec elle par téléphone. (AFP)
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  • La prix Nobel de la paix iranienne, Narges Mohammadi, dit avoir été "directement et indirectement menacée d'élimination physique"
  • Ces menaces "montrent clairement que sa sécurité est en jeu, à moins qu'elle ne s'engage à mettre fin à tout engagement public en Iran"

OSLO: La prix Nobel de la paix iranienne, Narges Mohammadi, dit avoir été "directement et indirectement menacée d'élimination physique" par les autorités iraniennes, a indiqué vendredi le comité Nobel qui s'est entretenu avec elle par téléphone.

Ces menaces "montrent clairement que sa sécurité est en jeu, à moins qu'elle ne s'engage à mettre fin à tout engagement public en Iran" ainsi qu'à "toute apparition dans les médias", ajoute le comité Nobel dans un communiqué. Mme Mohammadi a été récompensée en 2023 pour "son combat contre l'oppression des femmes en Iran et pour la promotion des droits de l'homme".