Castex, l'impopularité assumée

Le Premier ministre Jean Castex (à gauche) et la maire de Paris Anne Hidalgo devant la salle de concert du Bataclan le 13 novembre 2020 à Paris, lors de cérémonies du cinquième anniversaire des attentats terroristes de novembre 2015 (Christophe Archambault / AFP / Pool)
Le Premier ministre Jean Castex (à gauche) et la maire de Paris Anne Hidalgo devant la salle de concert du Bataclan le 13 novembre 2020 à Paris, lors de cérémonies du cinquième anniversaire des attentats terroristes de novembre 2015 (Christophe Archambault / AFP / Pool)
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Publié le Vendredi 13 novembre 2020

Castex, l'impopularité assumée

  • Devenu l’homme du reconfinement à l'automne, M. Castex s'est fait le messager des mauvaises nouvelles et des arbitrages douloureux, concentrant ainsi la foudre des récriminations
  • Jean Castex assure cependant ne faire que peu de cas des critiques à son égard, assumant ainsi pleinement un rôle de paratonnerre

PARIS : Impopulaire, et alors ? Encalminé dans un contexte épidémique, économique et social difficile, Jean Castex assure ne faire que peu de cas des critiques à son égard, assumant ainsi pleinement un rôle de paratonnerre, déjà bien éprouvé, pour Emmanuel Macron.

Ereinté par les enquêtes d'opinion, qui relatent semaine après semaine l’inexorable décrochage de sa cote, M. Castex a balayé de lui-même jeudi tout état d'âme en épilogue de son point-presse sur la situation épidémique : "La seule courbe qui m'intéresse, c'est celle des malades admis à l'hôpital ou en réanimation", a-t-il lancé, tout en disant ne "rien ignorer des polémiques et des contestations".

Homme du déconfinement au printemps, sous l'égide d'Edouard Philippe, devenu celui du reconfinement à l'automne, M. Castex s'est fait le messager des mauvaises nouvelles et des arbitrages douloureux, concentrant ainsi la foudre des récriminations.

Conséquence : alors qu'il recueillait par exemple la confiance de 43% des sondés par Elabe lors de sa nomination, il végète désormais à 26%. Au point de même devenir minoritaire parmi les électeurs d'Emmanuel Macron.

S'il affirme ne pas se soucier des coups reçus, il a tout de même tenu à remercier lundi soir les ténors de la majorité, réunis en visioconférence, "du soutien manifesté publiquement au moment où il en prend plein la tête", selon un participant.

" Ca ne le fait pas varier d'être impopulaire mais il apprécie le soutien", ajoute le même, soulignant la nécessité de "réussir les dix jours qui viennent sans regarder les courbes de popularité, ce que Jean Castex fait assez bien". "Il a intériorisé qu'il n'était pas là pour plaire mais pour faire. Je me demande s'il n'en fait pas une marque de fabrique", insiste-t-il.

Cette impassibilité revendiquée est aussi le corollaire de la nomination à Matignon de ce haut-fonctionnaire méconnu, issu de la droite mais sans réelle existence politique préalable, qui tranche avec un prédécesseur qui avait pris de l'épaisseur durant ses trois années en poste.

Propulsé de manière inattendue à la tête du gouvernement, M. Castex a "une grande force: c'est qu'il n'a pas de calendrier personnel, il a gagné au loto en étant là", martèle un ami.

En somme, un paratonnerre idéal pour Emmanuel Macron sur la route d'une réélection en 2022.

"Le gouvernement encaisse"

La stratégie semble d'ailleurs fonctionner : après avoir couru derrière celle d'Edouard Philippe au printemps, M. Macron voit désormais sa courbe de popularité surpasser celle de son Premier ministre.

"Macron haut, c'est très bien. Le président protège la nation du terrorisme, et le gouvernement encaisse, c'est bien comme ça", résume un ministre.

Cependant, Jean Castex n'est-il pas victime d'usure prématurée, quatre mois seulement après sa nomination, alors que certains au sein-même de sa majorité spéculent déjà sur un remplacement l'an prochain, peut-être à l'issue des élections régionales attendues en juin ?

"Tous ceux qui pensent qu'on va réussir en faisant échouer Jean se trompent", avertit en retour un ministre.

"L'impopularité n'aide pas : elle entrave les réformes, elle rend les majorités plus frondeuses et les rapports avec les oppositions plus âpres", pointe le sondeur Emmanuel Rivière, dont l'institut (Kantar, ex-TNS-Sofres) analyse depuis 1976 les cotes de confiance au sein de l'exécutif. "Mais Jean-Pierre Raffarin (à Matignon de 2003 à 2005, ndlr) a tenu malgré son impopularité, enjambant même une importante défaite aux régionales en 2004", souligne encore M. Rivière, "personnellement sceptique sur la perspective d'un changement à Matignon l'année prochaine".

Au sein du gouvernement, on regarde aussi avec un œil mi-goguenard, mi-inquiet les rivalités de coulisses entre le locataire de Matignon et son ministre de l'Economie Bruno Le Maire.

"J'ai déjà vécu cela avec Edouard Philippe, lorsque Bruno Le Maire disait qu'il ne faisait plus la maille (plus l'affaire, ndlr)", soupire une ministre.

Enfin, des doutes sur son autorité sont aussi nés de récents couacs, entre prises de position ministérielles contradictoires et faux-pas de la majorité à l'Assemblée. De quoi faire tourner à plein régime l'essoreuse de Matignon.

 


Élections législatives à Paris : Barnier exhorte Dati à « ne pas se tromper » d'élection

La ministre française de la Culture, Rachida Dati, prononce un discours lors d'une visite au centre social et culturel La Croix des Oiseaux à Avignon, dans le sud de la France, le 24 juillet 2025. (Photo de CLEMENT MAHOUDEAU / AFP)
La ministre française de la Culture, Rachida Dati, prononce un discours lors d'une visite au centre social et culturel La Croix des Oiseaux à Avignon, dans le sud de la France, le 24 juillet 2025. (Photo de CLEMENT MAHOUDEAU / AFP)
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  • a ministre de la Culture a annoncé lundi sa candidature à cette législative partielle, lançant les hostilités contre l'ex-Premier ministre qui brigue le même siège de député et qui est également membre du parti LR.
  • Ils lui reprochent également d'être « parachuté ».

PARIS : Selon Michel Barnier, Rachida Dati a « une ambition légitime » pour la mairie de Paris et ne doit « pas se tromper » d'élection en se présentant également à la législative dans la deuxième circonscription de la capitale.

La ministre de la Culture a annoncé lundi sa candidature à cette législative partielle, lançant les hostilités contre l'ex-Premier ministre qui brigue le même siège de député et qui est également membre du parti LR.

« Je veux que les Parisiens puissent voter pour quelqu’un plutôt que contre. C’est à Rachida Dati, qui a une ambition légitime pour animer des listes d’union à Paris, de ne pas se tromper et de choisir la bonne voie », commente Michel Barnier, désigné par LR comme candidat à cette législative, dans La Tribune Dimanche.

« Je ne suis candidat qu’à la députation », martèle l'éphémère ancien Premier ministre. « Rachida Dati le sait. Je le lui ai dit et je l’ai même écrit aux adhérents LR (…). Il n’y a aucune ambiguïté là-dessus », ajoute-t-il, se disant prêt à soutenir la ministre dans sa course pour l’Hôtel de Ville.

Des proches de la maire du VIIe arrondissement, renvoyée en procès pour corruption et trafic d'influence le 22 juillet, craignent que Michel Barnier ait lui aussi des ambitions pour la mairie de Paris si elle ne pouvait pas se présenter.

Ils lui reprochent également d'être « parachuté ».

« Cela fait plus de vingt-cinq ans que j’ai quitté, volontairement, mes fonctions en Savoie » et « je suis Parisien depuis plus de vingt ans ». J’habite dans cette circonscription depuis plus de douze ans », répond-il.

Ces rivalités risquent d'entraîner une nouvelle guerre fratricide, dont Les Républicains ont le secret. Pour l'éviter, LR espère trouver un accord avec Rachida Dati « d'ici la rentrée ».

Interrogé sur les ambitions que lui prêtent certains pour 2027, Michel Barnier réitère qu'il sera « présent dans le débat public » pour la présidentielle et les législatives.


Droit du travail: le gouvernement se donne jusqu'en septembre pour cadrer la négociation

Cette photographie montre l'entrée du ministère du Travail, à Paris, le 17 janvier 2025. (AFP)
Cette photographie montre l'entrée du ministère du Travail, à Paris, le 17 janvier 2025. (AFP)
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  • Le gouvernement lance des négociations larges sur le droit du travail et l’assurance chômage, avec une lettre de cadrage attendue la semaine prochaine
  • Parmi les mesures envisagées : monétisation de la cinquième semaine de congés, suppression de deux jours fériés, lutte contre les temps partiels subis et assouplissement des CDD et intérim

PARIS: Le ministère du Travail a indiqué vendredi que la feuille de route de la négociation sur le droit du travail, avec notamment la possible monétisation de la cinquième semaine de congés payés, serait envoyée en septembre pour poursuivre "la concertation préalable".

Plaidant qu'"il faut travailler plus", le Premier ministre François Bayrou avait souhaité le 15 juillet que les partenaires sociaux ouvrent des négociations sur une nouvelle réforme de l'assurance chômage et sur le droit du travail pour participer à l'effort budgétaire.

Le ministère doit adresser "dans le courant de la semaine prochaine" la "lettre de cadrage" fixant le cadre de la négociation d'une nouvelle réforme de l'assurance chômage avec des discussions prévues "jusqu’à la mi-novembre", ainsi que le document d'orientation concernant la suppression de deux jours fériés pour une négociation qui doit durer "jusqu’à la fin du mois de septembre".

Mais les autres mesures ayant trait à "la modernisation du marché du travail et la qualité du travail" feront l'objet d'un document d'orientation à la rentrée. Outre la monétisation de la cinquième semaine de congés payés, il s'agit notamment de lutter contre les temps partiels subis, de "fluidifier" le marché du travail avec des assouplissements sur les CDD et les contrats d'intérim ou encore de dispositions sur l’indemnisation des arrêts maladie.

"Un envoi en septembre plutôt que début août répond à une demande de certains des partenaires sociaux de pouvoir poursuivre la concertation préalable à l’envoi de ce document d’orientation", a expliqué le ministère, ajoutant que cela "permettra de continuer à recueillir leurs avis, leurs idées et leurs priorités pour enrichir ce document".

Le calendrier de cette négociation doit s'étendre "sur plusieurs mois, au minimum jusqu’à la fin de l’année 2025", selon la même source.


Paris salue la conférence de New York et poursuit l’initiative avec Riyad

Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux médias lors d'une visite des entrepôts du Croissant-Rouge égyptien où est stockée l'aide destinée à Gaza, dans la ville frontalière égyptienne d'El-Arish, en Égypte, le 8 avril 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux médias lors d'une visite des entrepôts du Croissant-Rouge égyptien où est stockée l'aide destinée à Gaza, dans la ville frontalière égyptienne d'El-Arish, en Égypte, le 8 avril 2025. (AFP)
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  • Paris et Riyad poussent pour une reconnaissance collective de l’État palestinien
  • La France appelle à un cessez-le-feu, la levée du blocus et le désarmement du Hamas

PARIS: Sur fond de crise humanitaire d’une cruauté inqualifiable dans la bande de Gaza, le président Emmanuel Macron a annoncé une opération de largage de vivres conduite par la France, avec le soutien de la Jordanie, des Émirats arabes unis et de l’Allemagne.

« Face à l’urgence absolue, nous venons de conduire une opération de largage de vivres à Gaza », a déclaré le chef de l’État sur X, en remerciant les partenaires impliqués et saluant l’engagement des forces armées françaises.

Mais, de son point de vue, ces largages restent insuffisants : « Il faut qu’Israël ouvre un plein accès humanitaire », a-t-il insisté, réitérant l’exigence française d’une levée immédiate du blocus des aides.

Au-delà de la réponse d’urgence, Paris entend porter une initiative diplomatique structurante : la conférence internationale co-présidée à New York par la France et l’Arabie saoudite a marqué un tournant en posant un cadre politique ambitieux.

Cette conférence, tenue en l’absence des États-Unis et d’Israël, a réuni plus de 40 ministres et 120 participants, aboutissant à l’adoption d’un plan d’action en 42 points.

Malgré les réticences et le scepticisme ambiants, elle a permis l’émergence d’une dynamique inédite vers la reconnaissance de l’État palestinien et un processus de paix régional.

Le plan d’action validé à New York constitue désormais un socle politique partagé entre acteurs européens, puissances arabes, Union européenne et Ligue arabe.

Ce texte appelle à un cessez-le-feu immédiat à Gaza, à la libération de tous les otages, à l’acheminement massif de l’aide humanitaire, mais surtout à la mise en œuvre concrète de la solution à deux États.

Il prévoit notamment un processus progressif de désarmement du Hamas, condition indispensable à la stabilisation durable de la région.

Pour la France, ce texte marque une rupture avec l’impasse diplomatique des dernières décennies et propose pour la première fois un mécanisme concerté de démilitarisation et de réintégration de Gaza dans le giron de l’Autorité palestinienne.

Le document évoque même la possibilité de confier les armes du Hamas à une tierce partie sous supervision internationale, afin de garantir qu’elles ne soient plus utilisées.

Ce volet, essentiel pour Israël, est aussi le fruit d’un consensus entre les États arabes partenaires, y compris ceux perçus comme proches du Hamas.

Sur le front politique, Paris se réjouit de l’effet de levier de la conférence : peu après, plusieurs pays — Portugal, Royaume‑Uni, Canada — ont annoncé leur volonté de reconnaître l’État palestinien, à l’occasion de l’Assemblée générale des Nations unies en septembre.

Une coalition de volontaires est en train de se constituer : quinze États, aux côtés de la Ligue arabe et de l’Union européenne, ont d’ores et déjà signé une déclaration commune en ce sens.

La France espère ensuite entraîner d’autres partenaires européens, notamment l’Allemagne. « Nous continuons à travailler en E3 avec nos partenaires allemands et britanniques », indique une source haut placée.

Si Berlin reste prudent, des signes d’évolution apparaissent dans les récentes déclarations de sa ministre des Affaires étrangères. Paris entend maintenir ces échanges diplomatiques jusqu’à septembre.

Contrairement aux critiques israéliennes et américaines, la France affirme que cette dynamique de reconnaissance ne constitue pas un obstacle à la paix, mais un levier pour la relancer.

Le président Macron estime que cette reconnaissance, inscrite dans un cadre politique exigeant — avec une gouvernance palestinienne réformée et un désarmement du Hamas — peut rebâtir les conditions d’une solution durable.

Les ruptures des négociations avec le Hamas sont antérieures aux annonces de Paris, souligne-t-on à l’Élysée, et ne peuvent donc pas lui être imputées.

La reconnaissance collective envisagée en septembre serait également un signal fort en direction des modérés palestiniens, en particulier l’Autorité palestinienne, qui s’est engagée début juin à respecter une série d’exigences posées par la communauté internationale en matière de gouvernance et de lutte contre la corruption.

Un des apports majeurs de la conférence de New York est l’introduction formelle de la question du désarmement du Hamas dans un cadre diplomatique multilatéral.

Jusqu’ici marginalisée ou qualifiée d’irréaliste, cette exigence est clairement codifiée dans le plan d’action. Des discussions sont en cours, y compris sur l’exil éventuel de certains cadres du mouvement auprès d’États tiers.

Le Hamas n’a pas accepté ces conditions, mais le message politique est clair : son isolement au sein du monde arabe s’accentue et sa marge de manœuvre se rétrécit.

Face à cette dynamique, Israël et l’administration américaine ont haussé le ton, estimant qu’une reconnaissance unilatérale de la Palestine constituerait une « insulte » aux victimes israéliennes du 7 octobre.

Le président américain Donald Trump a même imposé des sanctions ciblées contre certains membres de l’Autorité palestinienne et de l’OLP, en contradiction avec les efforts en cours pour renforcer cette autorité.

La position américaine révèle un décalage croissant avec une partie de la communauté internationale, y compris des alliés traditionnels, en raison de son soutien inconditionnel à Israël, malgré l’ampleur des pertes civiles à Gaza et la persistance de la colonisation en Cisjordanie.

Cet état de fait suscite déjà des interrogations en Europe, où des pays comme la Suède exigent, par exemple, le gel de la partie commerciale de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël.

La France, de son côté, entend poursuivre cette dynamique au-delà de la conférence de New York. Un sommet est prévu les 21 et 22 septembre, juste avant l’Assemblée générale de l’ONU, pour réunir les États prêts à reconnaître collectivement la Palestine et à faire vivre ce nouveau cadre politique.

« Il s’agit d’une coalition inédite, qui repose sur un équilibre entre exigences sécuritaires et reconnaissance des droits politiques du peuple palestinien », souligne-t-on à Paris.

En réaffirmant l’exigence d’un cessez-le-feu immédiat, la levée du blocus humanitaire, la libération des otages, mais aussi le désarmement du Hamas et la mise en place d’un État palestinien souverain, la France, de concert avec l’Arabie saoudite, tente de reconstruire une architecture de paix.