Coupures d'électricité: entre alerter et alarmer, l'équilibre délicat de l'exécutif

Le coup de gueule d'Emmanuel Macron contre les «scénarios de la peur» est venu souligner la difficulté pour l'exécutif de se montrer prêt en cas de coupures d'électricité sans paniquer les Français. (AFP)
Le coup de gueule d'Emmanuel Macron contre les «scénarios de la peur» est venu souligner la difficulté pour l'exécutif de se montrer prêt en cas de coupures d'électricité sans paniquer les Français. (AFP)
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Publié le Mercredi 07 décembre 2022

Coupures d'électricité: entre alerter et alarmer, l'équilibre délicat de l'exécutif

  • «La difficulté, c'est que le message "on est prêt en cas de délestage" s'est transformé en "ça va arriver". Au lieu de rassurer, ça devient anxiogène», décrypte Christian Delporte
  • Ces derniers jours, le président Macron est monté au créneau pour distiller un message plus rassurant, semblant parfois prendre le contre-pied des avertissements de son propre gouvernement

PARIS: Le plan de communication se voulait bien huilé. Mais le coup de gueule d'Emmanuel Macron contre les "scénarios de la peur" est venu souligner la difficulté pour l'exécutif de se montrer prêt en cas de coupures d'électricité sans paniquer les Français.

"Les scénarios de la peur, pas pour moi!", a lancé mardi le chef de l'Etat. "Le rôle des autorités publiques, des établissements publics ça n'est pas (...) gouverner par la peur."

Face à la crise énergétique, provoquée par la guerre en Ukraine et aggravée par des problèmes de maintenance des réacteurs nucléaires, l'exécutif tente à la fois de préparer les esprits à de possibles délestages en janvier, et de montrer que, le cas échéant, ce ne sera pas le chaos.

Dès la mi-novembre, un ténor du gouvernement prédisait des "journées de grande responsabilisation des citoyens pour leur dire +si vous ne voulez pas de coupure, faut pas faire tourner le lave-linge à 19h+".

Pour un autre ministre influent, le message à faire passer est que "la coupure en soi n'est pas un drame dès lors qu'on a bien préparé", "qu'on dit aux gens d'éviter d'être dans les ascenseurs", "qu'on n'a pas quelqu'un en respirateur artificiel qui se retrouve en difficulté"...

Matignon a donc adressé la semaine dernière une circulaire aux préfets afin qu'ils sachent quoi faire en cas de "coupures d'électricité ciblées et programmées".

Mais ce débat a quelque peu échappé à l'exécutif.

"En matière de communication, il faut parler d'une seule voix", explique à l'AFP l'universitaire Christian Delporte. "Quand vous avez de multiples acteurs, le message risque d'être brouillé", ajoute ce spécialiste de la communication politique.

Or, de l'hôpital aux transports en passant par l'école, chaque secteur a décliné son plan B en cas de pénurie d'énergie.

Et divers opérateurs ont "ouvert le parapluie" pour ne pas endosser de responsabilité en cas de pépin, constate Christian Delporte.

La baisse de la consommation française d'électricité «s'amplifie», - 8,3% sur une semaine

La tendance à la baisse de la consommation d'électricité en France "s'amplifie", avec un recul de 8,3% la semaine dernière par rapport à la moyenne des années précédentes (2014-2019), une diminution qui concerne "désormais tous les secteurs", selon des données publiées mardi soir par RTE, le gestionnaire du réseau de transport d'électricité français.

Sur la tendance, "l’effet baissier s’amplifie" par rapport à la mise à jour précédente qui avait relevé une consommation d'électricité en recul de 6,7% sur une semaine, note RTE.

"Sur les 4 dernières semaines, la consommation d’électricité en France à température normale affiche une diminution structurelle (6,6%) par rapport au minimum des années précédentes (2014-2019) sur la même période", indique le gestionnaire du réseau de haute et très haute tension français dans son actualisation arrêtée à dimanche.

"Sur la dernière semaine, la tendance baissière s’est même accentuée (-8,3%)", toujours par rapport à ces années référence, "même si cela devra être confirmé", souligne RTE.

D'abord identifiée dans le secteur industriel, dès l'automne, en raison de la hausse des prix de l'énergie, "la baisse de la consommation apparaît désormais concerner tous les secteurs", et ce alors que sur la semaine passée, les températures sont descendues "significativement en-dessous des normales de saison", augmentant les besoins en chauffage.

"Les chiffres les plus récents – collectés durant la période de froid des derniers jours – montrent que la baisse de consommation concerne également le secteur résidentiel (majoritaire en volume) et tertiaire", soit un recul de 7% par rapport à 2021, selon RTE.

Avant cette actualisation, RTE estimait en fin de semaine dernière que la baisse de consommation n'était pas encore visible dans les "bâtiments tertiaires" comme les bureaux et sièges sociaux d'entreprises et les commerces de distribution.

Dans un contexte de crise énergétique, le gestionnaire de réseau a mis en place ce suivi hebdomadaire de la consommation d'électricité en France métropolitaine.

Les données publiées ont été "alignées sur les températures normales pour la période" et sont indépendantes des valeurs exceptionnellement douces relevées dans l'Hexagone au mois de novembre.

Pour le gestionnaire, ces chiffres confirment "l’effet réel des actions de sobriété engagées par les particuliers et les entreprises".

Le plan de sobriété du gouvernement, présenté le 6 octobre, prévoit une réduction de la consommation d'énergie de 10% sur les deux prochaines années en France par rapport à 2019, et de 40% d'ici à 2050.

«Anxiogène»

Orange a ainsi mis en garde contre un possible impact sur l'accès aux numéros d'urgence. Tandis qu'un porte-parole du fournisseur d'électricité Enedis, Laurent Méric, a affirmé lundi sur BFMTV que "les patients à haut risque vital", comme ceux disposant d'un respirateur, n'étaient pas jugés prioritaires et pourraient donc subir des délestages.

Même s'il a aussitôt précisé que tout serait fait pour leur apporter une "garantie" de continuité des soins, ses propos ont été jugés "maladroits" par la Première ministre Elisabeth Borne, contrainte d'assurer que les malades seraient "toujours pris en charge".

Car une partie de l'opposition s'en est immédiatement saisie pour fustiger l'amateurisme gouvernemental, s'ajoutant aux critiques sur la possibilité de brèves fermetures d'écoles. Et, plus largement, aux accusations d'incurie venues de la droite et de l'extrême droite au sujet des réacteurs EDF à l'arrêt, et aux reproches de la gauche qui déplore le retard pris dans la transition énergétique.

Surtout, la multiplication des interventions a fini par avoir un effet contraire à celui qu'escomptaient les stratèges du gouvernement.

"La difficulté, c'est que le message +on est prêt en cas de délestage+ s'est transformé en +ça va arriver+. Au lieu de rassurer, ça devient anxiogène", décrypte Christian Delporte.

Certains ministres, encore traumatisés par les procès en impréparation au début de la pandémie de Covid, ont peut-être aussi un peu trop versé dans l'alarmisme, concède un représentant du camp présidentiel, tout en assurant que, jusque-là, cette "opération transparence" se "passait plutôt bien".

Ces derniers jours, le président Macron est monté au créneau pour distiller un message plus rassurant, semblant parfois prendre le contre-pied des avertissements de son propre gouvernement.

"Pas de panique!", a-t-il lancé samedi sur TF1.

Avant, donc, de hausser le ton mardi, visiblement agacé par un débat qui commence à porter aussi sur un certain déclin de la France -- le président du Rassemblement national Jordan Bardella a dénoncé vendredi sur France Inter une "situation de précarité énergétique" digne du "tiers-monde".

"Nous sommes un grand pays, nous avons un grand modèle énergétique, nous allons tenir cet hiver malgré la guerre", a martelé le chef de l'Etat, qui en a toutefois appelé "à la responsabilité" de "chacun" pour "qu'il y ait de la sobriété".


Tentative de putsch au Bénin: des forces spéciales françaises sont intervenues en appui 

Des forces spéciales françaises sont intervenues dimanche lors de la tentative déjouée de putsch au Bénin en appui de l'armée béninoise qui a "vaillamment" repoussé les mutins, a affirmé mercredi à l'AFP le chef de la Garde républicaine, le colonel Dieudonné Djimon Tévoédjrè. (AFP)
Des forces spéciales françaises sont intervenues dimanche lors de la tentative déjouée de putsch au Bénin en appui de l'armée béninoise qui a "vaillamment" repoussé les mutins, a affirmé mercredi à l'AFP le chef de la Garde républicaine, le colonel Dieudonné Djimon Tévoédjrè. (AFP)
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  • Mardi, la présidence française avait indiqué avoir appuyé "en termes de surveillance, d'observation et de soutien logistique" le pouvoir béninois, à sa demande, sans confirmer ni démentir la présence de ses forces
  • "L'armée béninoise a été vraiment vaillante et a fait face à l'ennemi toute la journée" dimanche, a expliqué à l'AFP le colonel Tevoédjrè, précisant que des "forces spéciales françaises ont été envoyées depuis Abidjan"

COTONOU: Des forces spéciales françaises sont intervenues dimanche lors de la tentative déjouée de putsch au Bénin en appui de l'armée béninoise qui a "vaillamment" repoussé les mutins, a affirmé mercredi à l'AFP le chef de la Garde républicaine, le colonel Dieudonné Djimon Tévoédjrè.

Mardi, la présidence française avait indiqué avoir appuyé "en termes de surveillance, d'observation et de soutien logistique" le pouvoir béninois, à sa demande, sans confirmer ni démentir la présence de ses forces.

"L'armée béninoise a été vraiment vaillante et a fait face à l'ennemi toute la journée" dimanche, a expliqué à l'AFP le colonel Tevoédjrè, précisant que des "forces spéciales françaises ont été envoyées depuis Abidjan, utilisées pour du ratissage après que l'armée béninoise ait fait le travail".

Le colonel Tevoédjrè - qui a personnellement dirigé sur place la riposte contre un assaut sur la résidence du chef de l'Etat Patrice Talon tôt dimanche matin - estime à une centaine le nombre de mutins, "avec beaucoup de moyens, des engins blindés".

Il note toutefois que les putschistes, qui ont compté sur "l'effet de surprise", n'ont pas reçu de soutien d'autres unités, saluant l'attitude "républicaine" de l'armée béninoise.

La Garde républicaine a "eu le soutien spontané d'autres unités qui ont été utilisées toute la journée pour reprendre possession de zones, de points stratégiques de Cotonou", détaille t-il.

C'est en fin de journée, alors que les mutins étaient retranchés dans un camp situé dans une zone résidentielle de la capitale économique, que des frappes aériennes du Nigeria voisin et des forces spéciales françaises ont aidé le Bénin, afin notamment "d'éviter des dommages collatéraux".

Le colonel n'a pas donné de bilan chiffré du nombre de victimes des évènements de dimanche, mais a précisé que les mutins étaient "repartis avec des corps et des blessés" de leur tentative d'assaut sur la résidence présidentielle, après un "rude combat".

Dimanche matin, huit militaires étaient apparus à la télévision béninoise, annonçant qu'ils avaient destitué Patrice Talon.

Après une journée d'incertitude à Cotonou, le chef de l'Etat avait déclaré que la situation était "totalement sous contrôle". Les autorités béninoises ont ensuite fait état de "plusieurs victimes", notamment dans des affrontements opposant mutins et forces loyales.


Procès libyen: la cour d'appel de Paris libère l'intermédiaire Djouhri sous contrôle judiciaire

 La cour d'appel de Paris a accepté mercredi de libérer sous contrôle judiciaire l'intermédiaire Alexandre Djouhri, qui était le dernier prévenu du procès libyen à être encore incarcéré.
La cour d'appel de Paris a accepté mercredi de libérer sous contrôle judiciaire l'intermédiaire Alexandre Djouhri, qui était le dernier prévenu du procès libyen à être encore incarcéré.
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  • L'homme d'affaires franco-algérien de 66 ans, condamné le 25 septembre à six ans d'emprisonnement dans l'affaire du financement libyen de la campagne de 2007 de Nicolas Sarkozy, aura notamment pour interdiction de sortir d'Île-de-France
  • Il a également l'interdiction de mener une activité d'intermédiation économique et il devra remettre à la justice ses passeports français et algérien et pointer une fois par semaine à la gendarmerie

PARIS: La cour d'appel de Paris a accepté mercredi de libérer sous contrôle judiciaire l'intermédiaire Alexandre Djouhri, qui était le dernier prévenu du procès libyen à être encore incarcéré.

L'homme d'affaires franco-algérien de 66 ans, condamné le 25 septembre à six ans d'emprisonnement dans l'affaire du financement libyen de la campagne de 2007 de Nicolas Sarkozy, aura notamment pour interdiction de sortir d'Île-de-France, de s'absenter de son domicile en région parisienne entre 8H00 et 20H00, d'entrer en contact avec ses coprévenus.

Il a également l'interdiction de mener une activité d'intermédiation économique et il devra remettre à la justice ses passeports français et algérien et pointer une fois par semaine à la gendarmerie.

Le parquet général s'était opposé à sa libération en pointant notamment sa double nationalité et le risque de départ en Algérie où la coopération judiciaire avec la France est compliquée.

Selon son avocat, Me Pierre-Henri Bovis, il devrait sortir de la prison parisienne de La Santé "dans les prochaines heures".

"La cour d'appel de Paris, par sa décision, a reconnu cette fois-ci qu'il y avait des garanties de représentation suffisantes, et a enfin admis qu'il n'y avait pas de risque de fuite ou de pression" sur les témoins, s'est-il félicité, soulignant que son client ne s'était "jamais dérobé à ses obligations".

Alexandre Djouhri avait déposé une première demande de mise en liberté qui avait été rejetée début novembre, la cour d'appel estimant qu'il présentait un risque de fuite et des garanties de représentation "particulièrement faibles".

Dans ce dossier, deux autres personnes ont été condamnées en première instance à des peines d'emprisonnement avec mandat de dépôt: l'ancien président de la République Nicolas Sarkozy, condamné à cinq ans de prison, et le banquier Wahib Nacer.

L'ex-chef de l'Etat a été incarcéré vingt jours à la prison de la Santé, avant d'obtenir sa libération auprès de la cour d'appel. M. Nacer, qui avait été condamné à une peine de quatre ans d'emprisonnement avec mandat de dépôt à exécution provisoire, a également été libéré de prison.

Alexandre Djouhri devrait donc comparaître libre, comme tous ses coprévenus, au procès en appel  prévu du 16 mars au 3 juin. Au total, 10 personnes, dont Nicolas Sarkozy et deux de ses proches, Claude Guéant et Brice Hortefeux, seront rejugées dans ce dossier.


Macron de retour sur le thème de la désinformation, après la polémique sur la labellisation

Le président français Emmanuel Macron attend avant d'accueillir le président roumain à l'Élysée, à Paris, le 9 décembre 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron attend avant d'accueillir le président roumain à l'Élysée, à Paris, le 9 décembre 2025. (AFP)
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  • Emmanuel Macron poursuit en Bretagne son tour de France consacré à la régulation des réseaux sociaux et à la lutte contre la désinformation, tout en répondant aux accusations de « dérive autoritaire » liées à son soutien à une labellisation des médias
  • Le président réaffirme qu’il ne s’agit pas d’un label d’État et dénonce les polémiques

PARIS: Emmanuel Macron reprend mercredi en Bretagne son tour de France sur la régulation des réseaux sociaux et la lutte contre la désinformation, l'occasion de répondre en personne aux accusations de dérive "autoritaire" provoquées par son soutien à une labellisation des médias.

Le chef de l'Etat est attendu dans l'après-midi à Saint-Malo, en Ille-et-Vilaine, pour un échange avec des lecteurs d'Ouest-France sur le thème de "la démocratie à l'épreuve des réseaux sociaux et des algorithmes".

Ses précédents débats organisés par la presse régionale l'ont mené depuis un mois à Toulouse, Arras (Pas-de-Calais) et Mirecourt (Vosges), et il devrait enchaîner avec Marseille la semaine prochaine.

Son idée directrice est de réfléchir à une adaptation de la législation pour réguler les réseaux sociaux, qui échappent largement à la loi de la presse de 1881 qui régit les médias traditionnels. Une réflexion censée déboucher sur des "décisions concrètes" début 2026, même si le président a déjà commencé à égrener des pistes.

Parmi elles, une mesure a déclenché une polémique à retardement.

Emmanuel Macron a en effet apporté un soutien très volontariste à des initiatives existantes de labellisation des médias "par des professionnels", pour distinguer les sites et réseaux qui font de l'information, selon les règles déontologiques, des autres.

"On va tout faire pour que soit mis en place un label", a-t-il lancé le 19 novembre à Arras, tout en assurant que ce n'était par à l'Etat de le faire.

- "Dérive totalitaire" -

Le 30 novembre, le Journal du dimanche s'est saisi de cette proposition pour lui reprocher une "dérive totalitaire", ironisant sur sa volonté présumée de mettre en place un "ministère de la Vérité", comme dans le roman dystopique "1984" de George Orwell.

L'accusation a été aussitôt relayée par les autres médias du milliardaire conservateur Vincent Bolloré puis par plusieurs dirigeants de la droite et de l'extrême droite, qui disent soupçonner le chef de l'Etat de vouloir "contrôler l'information" et museler la liberté d'expression à son profit.

En Conseil des ministres, il y a une semaine, Emmanuel Macron a répondu qu'il n'avait "jamais" envisagé de créer un "label d'Etat" pour les médias, et "encore moins" un "ministère de la Vérité", selon les propos rapportés par la porte-parole du gouvernement Maud Bregeon.

Le compte de l'Elysée s'est même fendu d'un message sur le réseau X pour déplorer que "parler de lutte contre la désinformation suscite la désinformation", visant ceux qui avaient attaqué le président, du patron des Républicains Bruno Retailleau au présentateur vedette de CNews Pascal Praud.

Une réaction officielle qui a déclenché une nouvelle cascade de commentaires enflammés y voyant la démonstration de velléités de contrôle macronistes.

A Saint-Malo, le président de la République doit aussi aborder "les conséquences de la désinformation en matière climatique", à l'occasion des dix ans de l'accord de Paris sur le climat, a fait savoir l'Elysée.