En Chine, une solidarité encore limitée avec les Ouïghours

Les résidents chinois au Japon et leurs partisans organisent un rassemblement pour protester contre la politique chinoise zéro-Covid et le régime dictatorial du Parti communiste chinois à Tokyo, le 30 novembre 2022. (Photo, AFP)
Les résidents chinois au Japon et leurs partisans organisent un rassemblement pour protester contre la politique chinoise zéro-Covid et le régime dictatorial du Parti communiste chinois à Tokyo, le 30 novembre 2022. (Photo, AFP)
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Publié le Lundi 12 décembre 2022

En Chine, une solidarité encore limitée avec les Ouïghours

  • Le 24 novembre, dix personnes sont décédées quand leur immeuble a pris feu à Urumqi, capitale de cette région du Nord-Ouest du pays
  • Immédiatement, des internautes ont accusé les restrictions sanitaires anti-Covid d'avoir gêné les secours

SHANGHAI: Leur décès dans un incendie a provoqué une vague de mobilisations à travers la Chine, mais peu de manifestants savaient que les victimes étaient des familles ouïghoures séparées par la répression de Pékin dans la région du Xinjiang.

Le 24 novembre, dix personnes sont décédées quand leur immeuble a pris feu à Urumqi, capitale de cette région du Nord-Ouest du pays. Immédiatement, des internautes ont accusé les restrictions sanitaires anti-Covid d'avoir gêné les secours.

Le drame a fait déborder la colère populaire qui couvait depuis des mois: dans une dizaine de villes, les habitants sont descendus dans les rues, des manifestations d'une ampleur inhabituelle qui ont poussé les autorités à renoncer au "zéro Covid".

Pour les manifestants, les victimes étaient des martyrs de cette politique sanitaire.

Mais leurs proches, qui ont témoigné, voient cette tragédie comme un énième coup dur pour leur communauté musulmane, déjà durement réprimée.

Abdulhafiz Maimaitimin, un Ouïghour ayant quitté la Chine en 2016 et vivant en Suisse, a perdu sa tante, Qemernisahan Abdurahman, qui a péri avec quatre de ses enfants dans l'incendie.

Le mari de sa tante et son fils, ainsi que le père d'Adbulhafiz, ont tous été arrêtés par les autorités chinoises en 2016 et 2017.

Leur famille pense qu'ils ont été conduits dans l'un des camps où la Chine est accusée d'avoir interné plus d'un million d'Ouïghours et de membres d'autres groupes ethniques musulmans.

"Ma tante a attendu de longues années que (ses proches) soient libérés, mais elle est morte avant d'avoir pu les revoir", se désole Adbulhafiz, 27 ans.

Porte verrouillée de l'extérieur 

Un récent rapport des Nations Unies a estimé "crédibles" les accusations de torture dans ces camps et évoqué la possibilité de "crimes contre l'humanité" au Xinjiang.

Selon Pékin, ces "centres de formation" servent à former à un métier et à lutter contre l'extrémisme religieux, après des années d'attentats sanglants, attribués à des militants ouïghours, qui ont frappé la Chine et fait des dizaines de victimes civiles.

A Urumqi, le quartier ouïghour où a eu lieu l'incendie était apparemment sous strictes restrictions sanitaires depuis août.

"Peut-être que si le mari et le fils de ma tante avaient été là, ils auraient pu utiliser leur force pour sauver tout le monde", estime Abdulhafiz. "Mais peut-être pas, car la porte était verrouillée de l'extérieur".

Des habitants et des proches des victimes ont affirmé que des barrières de confinement avaient ralenti l'avancée des secours, des accusations rejetées par les autorités.

Memmetli Abbas, un Ouïghour installé en Turquie, a raconté que sa fille et sa petite-fille n'avaient pu en réchapper que parce qu'elles ont demandé à un agent de les laisser sortir.

Mais elles ont ensuite été "interrogées au sujet de l'incendie", dit-il. Maintenant, "je ne sais pas où elles sont".

Pour la famille de Memmetli, les malheurs ont débuté bien avant ce drame.

Son fils aîné est en prison depuis 2017, incarcéré au retour d'un voyage à l'étranger, et son neveu a été envoyé dans un camp la même année.

"Je ne sais pas pourquoi il est détenu. Mais je pense que c'est parce qu'il est Ouïghour et musulman".

«Tous du Xinjiang!»

L'incendie meurtrier a provoqué l'ire de la population, non seulement à Urumqi mais en divers endroits du pays.

A Shanghai, les manifestants se sont réunis rue d'Urumqi.

"Nous sommes tous du Xinjiang!", ont crié ceux de Pékin.

Mais ces rassemblements sont surtout nés de la frustration autour du "zéro Covid", plus que par solidarité avec les Ouïghours.

"C'était une tentative pour éviter qu'(une catastrophe) leur arrive ensuite, plutôt qu'une preuve d'empathie ou de compréhension envers les Ouïghours", estime David Tobin, spécialiste du Xinjiang à l'université britannique de Sheffield.

Des années de répression ont également découragé la communauté de manifester, selon Jevlan Shirmemmet, militant ouïghour basé en Turquie.

"A votre avis, pourquoi aucun Ouïghour n'a participé aux manifestations à Urumqi? Parce qu'ils ne peuvent pas sortir. Soit ils ont trop peur, soit (ils savent) qu'ils seront considérés comme des terroristes s'ils le font", affirme-t-il.

«Impuissant»

Si des manifestations de soutien ont été organisées à l'étranger, la même méconnaissance de la réalité au Xinjiang y régnait.

Un participant à New York a confié ne pas savoir, au départ, que les victimes de l'incendie étaient des Ouïghours. En cause, selon lui: la censure des autorités chinoises sur l'information.

"J'ai entendu parler de leurs histoires et j'ai tendance à les croire. Mais je ne peux pas les vérifier", dit-il. "Et je me sens vraiment impuissant, car je ne pense pas qu'il y ait moyen de les aider."

Lors d'une manifestation à Londres, la militante Rahima Mahmut a déployé un drapeau demandant l'indépendance du Xinjiang.

Beaucoup des participants "ne savaient pas que les victimes étaient Ouïghoures (...), ni ce qui est en train d'arriver au peuple ouïghour", raconte-t-elle.

Ces manifestations sont arrivées "un peu trop tard", estime une Ouïghoure y ayant participé. Car "pour nous, tout a commencé en 2017", quand la répression de Pékin s'est accentuée au Xinjiang.

"J'ai écrit sur les réseaux sociaux 'Cela fait cinq ans' et un ami non-ouïghour a commenté +Pourquoi? La Covid n'est là que depuis trois ans+. J'étais tellement en colère".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.


Ouragan Melissa: près de 50 morts dans les Caraïbes, l'aide afflue

Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
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  • L’ouragan Melissa, le plus puissant à frapper la Jamaïque en près de 90 ans, a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque, laissant derrière lui des destructions massives et des centaines de milliers de sinistrés
  • L’aide internationale afflue vers les Caraïbes, avec des secours venus des États-Unis, du Venezuela, de la France et du Royaume-Uni, alors que les experts rappellent le rôle du réchauffement climatique dans l’intensification de ces catastrophes

CUBA: L'aide internationale afflue vendredi vers les Caraïbes dévastées par le passage de l'ouragan Melissa qui a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque.

Habitations en ruines, quartiers inondés et communications coupées... L'heure est à l'évaluation des dégâts causés par Melissa qui devrait désormais faiblir au dessus dans l'Atlantique nord après avoir passé les Bermudes.

Selon le Centre national américain des ouragans (NHC), les inondations devraient s'atténuer aux Bahamas, mais les crues pourraient demeurer à un niveau élevé à Cuba, en Jamaïque, en Haïti et en République dominicaine voisine.

Rendu plus destructeur par le réchauffement climatique, l'ouragan a été le plus puissant à toucher terre en 90 ans lorsqu'il a frappé la Jamaïque mardi en catégorie 5, la plus élevée sur l'échelle Saffir-Simpson, avec des vents d'environ 300 km/h.

"Le bilan confirmé est désormais de 19 morts" dont neuf à l'extrémité ouest de l'île, a déclaré jeudi soir la ministre jamaïcaine de l'Information Dana Morris Dixon, citée par les médias locaux.

De nombreux habitants n'ont toujours pas pu contacter leurs proches, ont expliqué les autorités. L'armée jamaïcaine s'emploie à dégager les routes bloquées, selon le gouvernement.

"Il y a eu une destruction immense, sans précédent, des infrastructures, des propriétés, des routes, des réseaux de communication et d'énergie", a déclaré depuis Kingston Dennis Zulu, coordinateur pour l'ONU dans plusieurs pays des Caraïbes. "Nos évaluations préliminaires montrent que le pays a été dévasté à des niveaux jamais vus auparavant".

- Melissa "nous a tués" -

A Haïti, pas directement touché par l'ouragan mais victime de fortes pluies, au moins 30 personnes, dont dix enfants, sont mortes, et 20 portées disparues, selon le dernier bilan des autorités communiqué jeudi. Vingt-trois de ces décès sont dus à la crue d'une rivière dans le sud-ouest du pays.

A Cuba, les communications téléphoniques et routières restent largement erratiques.

A El Cobre, dans le sud-ouest de l'île communiste, le son des marteaux résonne sous le soleil revenu: ceux dont le toit s'est envolé s'efforcent de réparer avec l'aide d'amis et de voisins, a constaté l'AFP.

Melissa "nous a tués, en nous laissant ainsi dévastés", a déclaré à l'AFP Felicia Correa, qui vit dans le sud de Cuba, près d'El Cobre. "Nous traversions déjà d'énormes difficultés. Maintenant, évidement, notre situation est bien pire."

Quelques 735.000 personnes avaient été évacuées, selon les autorités cubaines.

- Secouristes -

L'aide promise à l'internationale s'achemine dans la zone dévastée.

Les États-Unis ont mobilisé des équipes de secours en République dominicaine, en Jamaïque et aux Bahamas, selon un responsable du département d'État. Des équipes étaient également en route vers Haïti.

Le secrétaire d'État Marco Rubio a également indiqué que Cuba, ennemi idéologique, est inclus dans le dispositif américain.

Le Venezuela a envoyé 26.000 tonnes d'aide humanitaire à son allié cubain.

Le président du Salvador Nayib Bukele a annoncé sur X envoyer vendredi "trois avions d'aide humanitaire en Jamaïque" avec "plus de 300 secouristes" et "50 tonnes" de produits vitaux.

Kits de première nécessité, unités de traitement de l'eau: la France prévoit de livrer "dans les prochains jours" par voie maritime une cargaison d'aide humanitaire d'urgence en Jamaïque, selon le ministère des Affaires étrangères.

Le Royaume-Uni a débloqué une aide financière d'urgence de 2,5 millions de livres (2,8 millions d'euros) pour les pays touchés.

Le changement climatique causé par les activités humaines a rendu l'ouragan plus puissant et destructeur, selon une étude publiée mardi par des climatologues de l'Imperial College de Londres.

"Chaque désastre climatique est un rappel tragique de l'urgence de limiter chaque fraction de degré de réchauffement, principalement causé par la combustion de quantités excessives de charbon, de pétrole et de gaz", a déclaré Simon Stiell, secrétaire exécutif de l'ONU chargé du changement climatique, alors que la grande conférence climatique des Nations unies COP30 s'ouvre dans quelques jours au Brésil.

Avec le réchauffement de la surface des océans, la fréquence des cyclones (ou ouragans ou typhons), les plus intenses augmente, mais pas leur nombre total, selon le groupe d'experts du climat mandatés par l'ONU, le Giec.