Kurdes tués à Paris: le mobile raciste retenu, pas la piste terroriste

Des manifestants réagissent en tenant des instruments de musique traditionnels kurdes alors qu'ils participent à une manifestation en hommage aux victimes de la fusillade de la rue d'Enghien à Paris, le 23 décembre 2022, et à celles des meurtres de la rue La Fayette en 2013, alors qu'ils défilent en solidarité avec la communauté kurde à Paris, le 26 décembre 2022. (AFP).
Des manifestants réagissent en tenant des instruments de musique traditionnels kurdes alors qu'ils participent à une manifestation en hommage aux victimes de la fusillade de la rue d'Enghien à Paris, le 23 décembre 2022, et à celles des meurtres de la rue La Fayette en 2013, alors qu'ils défilent en solidarité avec la communauté kurde à Paris, le 26 décembre 2022. (AFP).
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Publié le Mercredi 28 décembre 2022

Kurdes tués à Paris: le mobile raciste retenu, pas la piste terroriste

  • Devant les enquêteurs, William Malet, 69 ans, a reconnu sa «haine des étrangers pathologique» et son envie «d'assassiner des migrants»
  • Mais les motivations racistes de ce conducteur de train retraité n'ont pas été adossées à une idéologie suprémaciste et l'information judiciaire a été confiée à un juge d'instruction du pôle général du tribunal de Paris

PARIS: Faute d'éléments reliant le suspect à l'idéologie d'ultradroite, le parquet national antiterroriste français (Pnat) ne s'est pas saisi à ce stade de l'enquête sur l'assassinat des trois Kurdes vendredi à Paris, relançant le débat sur la frontière entre droit commun et acte terroriste.

Devant les enquêteurs, William Malet, 69 ans, a reconnu sa "haine des étrangers pathologique" et son envie "d'assassiner des migrants".

Mais les motivations racistes de ce conducteur de train retraité n'ont pas été adossées à une idéologie suprémaciste et l'information judiciaire a été confiée à un juge d'instruction du pôle général du tribunal de Paris.

De nombreux Kurdes refusent de croire à la version d'un tireur aux motivations racistes, dénoncent un acte "terroriste" et mettent en cause la Turquie.

"Il est inadmissible que le caractère terroriste ne soit pas retenu", a considéré dès vendredi Agit Polat, porte-parole du Conseil démocratique kurde en France (CDK-F).

"Le fait que nos associations soient prises pour cible relève d'un caractère terroriste et politique", a-t-il estimé.

La menace d'attaques commises par l'ultradroite "monte en puissance" ces dernières années et est "prise très au sérieux", selon un magistrat antiterroriste. Depuis 2017, une dizaine de procédures en lien avec cette idéologie sont ouvertes au pôle antiterroriste de Paris.

"Le code pénal définit les actes terroristes comme ceux commis intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur", rappelle auprès de l'AFP le parquet antiterroriste.

Pour que le Pnat se saisisse, il faut "caractériser chez l'auteur des faits une intention spécifique qui est celle d'adhérer à une entreprise terroriste", précise-t-il. "Ce ne sont donc pas les conséquences d'un acte qu'il faut analyser mais l'intention de son auteur, le but qu'il a poursuivi".

Evolution du «contour des infractions»

La perquisition du domicile de William Malet comme l'exploitation d'un téléphone et d'un ordinateur n'ont révélé aucun lien avec "une idéologie extrémiste", a rapporté la procureure de Paris Laure Beccuau.

Le suspect n'était ni connu des services de renseignement ni fiché comme appartenant à l'ultradroite, selon le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin.

"Je comprends que ça puisse choquer mais le Pnat est toujours prudent et préfère partir d'+en bas+, sur une infraction de droit commun et passer à une qualification terroriste si les avancées de l'enquête le justifient", explique Xavier Nogueras, avocat habitué des procédures terroristes.

Les investigations se poursuivent et il n'est pas exclu que les faits soient requalifiés en assassinats terroristes si des éléments accréditant cette piste apparaissent au fil de l'information judiciaire.

Cette attaque meurtrière fait écho pour la communauté kurde à l'assassinat de trois militantes du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) le 9 janvier 2013 à Paris.

Les investigations sur ces trois morts ont été qualifiées d'assassinats en relation avec une entreprise terroriste. La qualification terroriste avait été justifiée notamment par le profil des victimes, des militantes du PKK, et du suspect, Omer Güney.

Ce ressortissant turc, mort de maladie en 2016, était soupçonné d'être proche des milieux ultranationalistes turcs et d'avoir infiltré la communauté kurde en France depuis fin 2011.

"On ne comprend pas bien la logique du parquet: en 2013 l'enquête avait été ouverte pour infraction terroriste pour des faits similaires" à ceux survenus la semaine passée, s'étonne auprès de l'AFP Antoine Comte, avocat de parties civiles.

"Entre Güney et aujourd'hui, les contours des infractions terroristes ont été beaucoup mieux définis parce qu'on a eu beaucoup de jurisprudences avec les différents procès qui ont eu lieu depuis l'affaire Merah", -en référence à l'auteur des attentats jihadistes qui avaient fait sept morts il y a dix ans- estime Me Nogueras, qui a été l'avocat de M. Güney.

"Il n'est pas sûr que le Pnat se serait saisi immédiatement si les meurtres de 2013 avaient eu lieu aujourd'hui", considère-t-il.


Dix passeurs présumés jugés pour un naufrage meurtrier dans la Manche

Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
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  • Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés
  • La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche

LILLE: Dix hommes, dont huit Afghans, sont jugés à partir de lundi à Lille pour leur rôle présumé de passeurs dans le naufrage d'une embarcation clandestine qui avait fait quatre morts et quatre disparus dans la Manche en décembre 2022.

Parti entre 1H00 et 1H30 du matin dans la nuit du 13 au 14 décembre 2022, le canot, qui transportait en majorité des migrants afghans, avait fait naufrage à quelques kilomètres des côtes anglaises.

Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés.

La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche.

Selon les éléments de l'enquête, alors que les migrants gonflaient le bateau avant le départ, plusieurs ont entendu une détonation, synonyme selon eux de crevaison. Les passeurs leur ont dit de ne pas s'en faire et qu'il s'agissait du seul bateau disponible pour eux.

D'après les témoignages des rescapés, il n'y avait pas assez de gilets de sauvetage pour tout le monde et aucune des personnes décédées n'en portait un. La température était glaciale et la mer très agitée.

Après une ou deux heures de traversée, un boudin a commencé à se dégonfler et l'eau à entrer dans l'embarcation, jusqu'à atteindre les genoux des passagers. Paniqués, ils se sont mis debout pour tenter de faire signe à un bateau. Mais le fond du canot, peu solide, a ployé sous leur poids et celui de l'eau, et tous se sont retrouvés à l'eau.

Neuf des prévenus sont jugés, jusqu'à vendredi, pour homicide involontaire par violation d'une obligation de sécurité, deux d'entre eux le sont pour blanchiment, tous pour aide au séjour irrégulier. Huit sont afghans, un syrien, un irakien.

Certains des prévenus sont soupçonnés d'avoir recruté des passeurs et assuré la logistique auprès des passagers, d'autres d'avoir géré l'organisation sur le camp de migrants de Loon-Plage (Nord), où vivaient les migrants avant leur tentative de traversée, toujours selon les éléments de l'enquête. D'autres encore sont jugés pour s'être occupés du transport des migrants vers la plage et de la mise à l'eau du canot, et deux pour avoir collecté une partie des paiements.

Le mineur sénégalais qui pilotait le canot est, lui, inculpé dans le cadre d'une procédure au Royaume-Uni.

Apparu en 2018, le phénomène des traversées de la Manche en petites embarcations est à l'origine de nombreux naufrages, le plus meurtrier ayant coûté la vie à 27 personnes en novembre 2021.

Depuis le début de l'année, au moins 15 migrants sont morts dans la Manche, bras de mer parmi les plus fréquentés du monde et où les conditions météorologiques sont souvent difficiles, selon un décompte de l'AFP à partir de chiffres officiels. En 2024, 78 étaient morts ainsi, un record.


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».