Message sans appel de Le Drian à Beyrouth : Sans réformes drastiques « il n’y aura rien »

Hier soir à Bkerké -  siège du patriarcat maronite au Liban -  Jean-Yves Le Drian a manifesté son soutien sans ambages à la position du patriarche Mgr Béchara Raï, lequel a appelé il y a deux semaines a la neutralité du Liban. (Photo AFP).
Hier soir à Bkerké - siège du patriarcat maronite au Liban - Jean-Yves Le Drian a manifesté son soutien sans ambages à la position du patriarche Mgr Béchara Raï, lequel a appelé il y a deux semaines a la neutralité du Liban. (Photo AFP).
Short Url
Publié le Vendredi 24 juillet 2020

Message sans appel de Le Drian à Beyrouth : Sans réformes drastiques « il n’y aura rien »

  • ll faut pour les Libanais accepter désormais que leur pays ne recevra aucun soutien si des réformes ne sont pas entreprises rapidement: Un message que le gouvernement libanais "ne semble pas comprendre", affirme Joseph Bahout
  • Pour le politologue libanais : « Le Liban devient un pays fatiguant même pour ses amis »

BEYROUTH: La solution espérée par les Libanais - qui sombrent de plus en plus dans la pauvreté - tardera à arriver. Le message de la communauté internationale est clair, et la France ne fait pas exception malgré les relations privilégiées entre les deux pays.

Il faut pour les Libanais désormais accepter le fait que leur pays ne recevra aucun soutien si des réformes ne sont pas entreprises rapidement. Et c’est précisément cela que le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian est venu marteler hier et aujourd’hui à Beyrouth.

bahout

Un message que le gouvernement Libanais ne semble pas vouloir comprendre, selon le politologue et chercheur à la Fondation Carnegie Joseph Bahout, interrogé par Arab News en français.  "Des actes concrets sont attendus depuis trop longtemps", a insisté le ministre français hier, devant les médias du monde entier, ne faisant preuve d'aucune indulgence à l'égard des responsables du pays.

« Les attentes que j'exprime ne sont pas simplement celles de la France, ce sont en premier lieu celles des Libanais et ce sont aussi celles de l'ensemble de la communauté internationale », a-t-il ainsi averti hier, alors que, quelque peu crédules, les Libanais avaient cru aux rumeurs véhiculées par des médias arabes ayant trait à « un plan global pour sauver le Liban » que le président français Emmanuel Macron aurait été sur le point d’annoncer.

"Fantasme libanais"

En guise de commentaire, Joseph Bahout se dit « étonné » de la rumeur, la qualifiant de pur « fantasme libanais ». 

Il s’explique : « La visite de M. Le Drian n’est pas axée sur le Liban car elle fait partie d’une tournée régionale qui englobe entre autre l’île de Malte. Il ne faut donc pas que les Libanais se disent que le chef de la diplomatie française est venu juste pour les voir et comme toujours, ils s’imaginent qu’ils sont le centre du monde et que le monde entier déploiera tous les moyens pour les empêcher de tomber, alors qu’eux-mêmes ne font rien pour ne pas chuter. Il faut que les Libanais arrêtent de vivre dans l’illusion », dit Joseph Bahout, tout en notant que  le but de cette visite  est de venir dire « de vive voix » ce que les Français répètent  depuis un moment, à savoir que « tout ce que les autorités libanaises font depuis le début de la crise n’est pas sérieux et que la France est le seul pays qui continue encore à avoir envie d’aider le Liban ».

Un pays « fatigant »

Evoquant le soutien accordé des années durant au Liban par la communauté internationale et qui avait commencé avec la conférence de Paris I en 2001, M. Bahout note que le plan dit ‘CEDRE’ parrainé par Paris - Conférence économique pour le développement, par les réformes et avec les entreprises, qui équivaut à la quatrième conférence de Paris -  « est sur la table depuis trois ans. Le gouvernement précédent savait exactement ce qu’il fallait faire pour enclencher le mécanisme de soutien et il n’a rien fait. Ce gouvernement, enfermé dans ses contradictions, ne fait rien non plus ».

Pour Joseph Bahout - qui sera à partir de septembre à la tête de l’Institut Issam Farès à l’Université américaine de Beyrouth -  il est clair que si les Libanais n’entament pas de réformes « ils n’auront rien et il faut qu’ils comprennent que le Liban devient un pays fatiguant même pour ses plus proches amis ».

« Le message du chef de la diplomatie française est clair et évident, il l’a dit de plusieurs façons selon ses interlocuteurs, ‘il n’y aura rien’, il n’y aura pas d’initiatives en dehors de petits adjuvants qui ont juste pour but de réduire des questions relatives aux crises humanitaires et éducatives ».

Jean-Yves Le Drian, qui s’est entretenu hier avec le président de la République Michel Aoun, le Premier ministre Hassan Diab et le chef du Parlement Nabih Berri, est venu tout simplement dire qu’il n’y a pas un plan de relance sans reformes drastiques.  Reste à savoir si le Liban est capable de les entreprendre.

« La preuve est faite par dix que non », de plus et sur le plan financier « nous sommes devant une situation insolvable et (les autorités libanaises) n’ont d’ailleurs même pas été capables de chiffrer les pertes » enregistrées par le pays, se désole M. Bahout. En effet, les chiffres déclarés au Fond Monétaire International (FMI) par le gouvernement en juin dernier ne correspondent pas à ceux avancés par la Banque du Liban à une délégation du FMI.  Beyrouth a entamé des négociations pour obtenir une aide du FMI alors que près de la moitié de la population libanaise vit dans la pauvreté et 35% de la population active est au chômage, selon des statistiques officielles. Le Liban espère obtenir environ 10 milliards de dollars du FMI. Cette aide est cruciale pour les autorités car elle pourrait aider à rétablir la confiance des créanciers. Et permettre de débloquer les 11 milliards de dollars promis par CEDRE en 2018.

« Dans l’impasse »

« Aujourd’hui nous sommes dans l’impasse. Il faut arrêter de se focaliser sur ce gouvernement ou sur un autre, toute cette classe politique a prouvé qu’elle n’a aucune volonté d’entreprendre des réformes car cela l’obligerait à mettre un terme à son système de clientélisme et donc à ce qui la fait vivre », a-t-il estimé.

Pessimiste quant à l’avenir du Liban, Joseph Bahout explique que « dans les mois à venir, il faut s’attendre malheureusement à ce que l’effondrement prenne forme, que la douleur de la population devienne plus forte et qu’à un moment donné la classe politique n’aie plus le choix. Aujourd’hui, elle croit encore qu’elle peut jouer avec les chiffres, qu’elle peut échapper à telle ou telle chose, qu’elle peut rester immobile en attendant des jours meilleurs. Le Liban pourrait continuer à descendre très, très bas. Il existe des descentes sans fond ».

M.Bahout met aussi en garde contre « les risques politiques et sécuritaires » que court le Liban, à cause de cette descente aux enfers qui ne fait que s’annoncer, selon lui.

« Il faudrait peut-être dores et déjà se dire qu’à la rentrée, le dollar  reprendra sa course vers le haut et atteindra des niveaux insoutenables pour la majorité des Libanais. Certaines personnes pourraient se mettre en colère, dont les soldats de l’armée, les agents de sécurité et les gardes de corps des hommes politiques, dont le salaire moyen pourrait atteindre les 40 dollars américains. Et à mon avis cela ne va pas beaucoup tarder à arriver », souligne-t-il.  

Hier soir à Bkerké, siège du patriarcat maronite au Liban - Jean-Yves Le Drian a rendu visite au patriarche maronite Monseigneur Béchara el-Raï. Depuis ce lieu symbolique pour les libanais – toutes communautés confondues - il a manifesté son soutien sans ambages à la position de Mgr Raï.  Il y a deux semaines, celui-ci avait en effet appelé à la neutralité du Liban, ce qui a immédiatement déclenché les foudres du Hezbollah.  La milice pro-iranienne est en effet très engagée, entre autres, dans la guerre en Syrie, voisine du Liban. Celle-ci est également officieusement opposée à un quelconque plan de restructuration du FMI.

Aujourd’hui, Jean-Yves Le Drian doit se rendre à l'hôpital Rafic Hariri à Beyrouth, principale ligne de défense au Liban contre le nouveau coronavirus. Les employés de cet établissement public ont récemment menacé de faire grève et de ne plus accepter de malades infectés par la Covid-19 si leurs demandes n’étaient pas rapidement satisfaites.

M. Le Drian tiendra également une réunion concernant l'éducation francophone au Liban avec les chefs d'établissements des écoles francophones. Celles-ci, touchées de plein fouet par la crise économique sont menacées pour certaines de fermeture. Le 3 juillet dernier, l’ambassadeur de France au Liban Bruno Foucher avait d’ailleurs déjà annoncé à cet égard un plan d’aide pour 52 établissements du réseau scolaire français dans le pays.


Vision 2030: le Cabinet remercie les agences impliquées

Le prince héritier d'Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, assiste à la session du Cabinet, mardi. (SPA)
Le prince héritier d'Arabie saoudite, Mohammed ben Salmane, assiste à la session du Cabinet, mardi. (SPA)
Short Url
  • Le Conseil des ministres a souligné que la sécurité du Moyen-Orient exigeait d'accélérer la recherche d'une solution juste et globale à la question palestinienne
  • Le Conseil a affirmé que le Royaume poursuivait ses efforts pour accélérer le redressement économique de la République arabe syrienne

RIYAD: Le Conseil des ministres a salué les efforts des agences gouvernementales ayant contribué aux avancées réalisées dans le cadre de la Vision saoudienne 2030, alors que le Royaume se rapproche de l’atteinte de ses objectifs clés, a rapporté mardi l’Agence de presse saoudienne (SPA).

D’après le rapport annuel 2024 de la Vision, 93% des principaux indicateurs de performance ont été entièrement ou partiellement atteints depuis le lancement de l’initiative il y a neuf ans.

Le ministre des Médias, Salman al-Dosari, a précisé que le cabinet avait discuté de la troisième et dernière phase de la Vision 2030, qui débutera en 2026. Cette phase visera à pérenniser l’impact des transformations déjà engagées tout en exploitant de nouvelles opportunités de croissance.

Le Conseil des ministres a également salué le don généreux d’un milliard de riyals saoudiens (266,6 millions de dollars; 1 dollar = 0,88 euro) effectué par le prince héritier Mohammed ben Salmane, destiné à soutenir des projets de logement pour les bénéficiaires saoudiens éligibles et les familles dans le besoin.

Le cabinet a souligné que ce don illustre l’engagement constant du prince héritier à améliorer la qualité de vie des citoyens, ainsi que son intérêt soutenu pour le secteur du logement et les initiatives visant à offrir des logements décents aux familles méritantes à travers le Royaume.

Le prince Mohammed a également informé le Conseil de sa rencontre avec le roi Abdallah II de Jordanie, ainsi que de ses échanges avec le Premier ministre indien Narendra Modi.

Le cabinet a salué les résultats de la deuxième réunion du Conseil de partenariat stratégique saoudo-indien, soulignant le développement continu des relations économiques, commerciales et d’investissement entre les deux pays.

Le Conseil des ministres a souligné que la sécurité du Moyen-Orient exigeait d'accélérer la recherche d'une solution juste et globale à la question palestinienne, conformément aux résolutions de la légitimité internationale, à l'initiative de paix arabe et à la création d'un État palestinien indépendant le long des frontières de 1967, avec Jérusalem-Est pour capitale.

Le Conseil a affirmé que le Royaume poursuivait ses efforts pour accélérer le redressement économique de la République arabe syrienne et a renouvelé son appel aux institutions financières régionales et internationales pour qu'elles reprennent et étendent leurs opérations dans le pays.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


L'Arabie saoudite condamne les actions d'Israël à Gaza devant la CIJ

 Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
Le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, s'exprime devant la Cour. (Capture d'écran)
Short Url
  • Tel-Aviv "continue d'ignorer" les décisions de la Cour internationale de justice, déclare le représentant du Royaume
  • M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

DUBAI : L'Arabie saoudite a condamné mardi devant la Cour internationale de justice la campagne militaire israélienne en cours à Gaza, l'accusant de défier les décisions internationales et de commettre de graves violations des droits de l'homme.

S'exprimant devant la Cour, le représentant du Royaume, Mohamed Saud Alnasser, a déclaré qu'Israël "continue d'ignorer les ordres de la Cour" et a insisté sur le fait que "rien ne justifie les violations commises par Israël à Gaza".

M. Alnasser a ajouté qu'"Israël a transformé Gaza en un tas de décombres", soulignant la dévastation généralisée et les souffrances infligées aux civils.

Ses remarques ont été formulées au deuxième jour des audiences de la CIJ sur les obligations humanitaires d'Israël à l'égard des Palestiniens, qui se déroulent dans le cadre d'un blocus israélien total de l'aide à la bande de Gaza, qui dure depuis plus de 50 jours.

Ces audiences s'inscrivent dans le cadre d'efforts plus larges visant à déterminer si Israël a respecté les responsabilités juridiques internationales dans sa conduite lors de la guerre contre Gaza.

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com


Syrie: neuf morts dans des affrontements entre forces de sécurité et combattants druzes près de Damas

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants. (AFP)
Short Url
  • Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité "
  • "La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué

DAMAS: Neuf personnes ont été tuées dans des affrontements entre les forces de sécurité syriennes et des combattants de la minorité druze à Jaramana, dans la banlieue de Damas, sur fond de tension confessionnelle, selon un nouveau bilan mardi d'une ONG.

Ces violences interviennent un mois après des massacres qui ont visé la minorité alaouite, faisant des centaines de morts, dans le pays où la coalition islamiste qui a pris le pouvoir en décembre est scrutée par la communauté internationale.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), "les forces de sécurité ont lancé un assaut" contre la banlieue à majorité druze de Jaramana, après la publication sur les réseaux sociaux d'un message vocal attribué à un druze et jugé blasphématoire envers l'islam.

L'OSDH, basée au Royaume-Uni mais qui dispose d'un solide réseau de sources en Syrie, a précisé que six combattants locaux de Jaramana et trois "assaillants" avaient été tués.

Plusieurs habitants de Jaramana joints au téléphone par l'AFP ont indiqué avoir entendu des échanges de tirs dans la nuit.

"Nous ne savons pas ce qui se passe, nous avons peur que Jaramana devienne un théâtre de guerre", a affirmé Riham Waqaf, une employée d'une ONG terrée à la maison avec son mari et ses enfants.

"On devait emmener ma mère à l'hôpital pour un traitement, mais nous n'avons pas pu" sortir, a ajouté cette femme de 33 ans.

Des combattants locaux se sont déployés dans les rues et aux entrées de la localité, demandant aux habitants de rester chez eux, a dit à l'AFP l'un de ces hommes armés, Jamal, qui n'a pas donné son nom de famille.

"Jaramana n'a rien connu de tel depuis des années". La ville est d'habitude bondée, mais elle est morte aujourd'hui, tout le monde est à la maison", a-t-il ajouté.

Mardi matin, quelques commerces ont ouvert leurs portes mais les rues de Jaramana, au sud-est de Damas, à majorité druze mais compte également des familles chrétiennes, étaient quasiment désertes, ont rapporté des habitants.

 "Respecter l'ordre public" 

Dans un communiqué, les autorités religieuses druzes locales ont "vivement dénoncé l'attaque armée injustifiée contre Jaramana (...) qui a visé les civils innocents", faisant assumer aux autorités syriennes "l'entière responsabilité de ce qui s'est produit et de toute aggravation de la situation".

"La protection de la vie, de la dignité et des biens des citoyens est l'une des responsabilités les plus fondamentales de l'Etat et des organismes de sécurité", a ajouté le communiqué.

Il a dénoncé dans le même temps "toute atteinte au prophète Mahomet" et assuré que le message vocal était fabriqué "pour provoquer la sédition".

Le ministère de l'Intérieur a souligné mardi "l'importance de respecter l'ordre public et de ne pas se laisser entraîner dans des actions qui perturberaient l'ordre public".

Il a ajouté qu'il enquêtait sur le message "blasphématoire à l'égard du prophète" Mahomet pour identifier l'auteur et le traduire en justice.

Les druzes, une minorité ésotérique issue de l'islam, sont répartis notamment entre le Liban, la Syrie et Israël.

Dès la chute du pouvoir de Bachar al-Assad le 8 décembre en Syrie, après plus de 13 ans de guerre civile, Israël multiplié les gestes d'ouverture envers cette communauté.

Début mars, à la suite d'escarmouches à Jaramana, Israël avait menacé d'une intervention militaire si les nouvelles autorités syriennes s'en prenaient aux druzes.

Ces propos ont été immédiatement rejetés par les dignitaires druzes, qui ont réaffirmé leur attachement à l'unité de la Syrie. Leurs représentants sont en négociation avec le pouvoir central à Damas pour parvenir à un accord qui permettrait l'intégration de leurs groupes armés dans la future armée nationale.

Depuis que la coalition islamiste dirigée par Ahmad al-Chareh, qui a été proclamé président intérimaire, a pris le pouvoir, la communauté internationale multiplie les appels à protéger les minorités.

Début mars, les régions du littoral dans l'ouest de la Syrie ont été le théâtre de massacres qui ont fait plus de 1.700 tués civils, en grande majorité des alaouites, selon l'OSDH.