Airbus, en conformité avec l’OMC, attend de Washington une baisse des tarifs douaniers sur les produits européens

M01, le bâtiment iconique du constructeur Airbus à Toulouse, au sud-ouest de la France. (Lionel BONAVENTURE/AFP)
M01, le bâtiment iconique du constructeur Airbus à Toulouse, au sud-ouest de la France. (Lionel BONAVENTURE/AFP)
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Publié le Vendredi 24 juillet 2020

Airbus, en conformité avec l’OMC, attend de Washington une baisse des tarifs douaniers sur les produits européens

  • Au bout de 16 ans de contentieux, Airbus "en conformité totale" avec les règles de l'OMC, dans l'espoir d'obtenir la levée des droits de douanes punitifs imposés par Washington.
  • En contrepartie, l’UE appelle Washington à lever "immédiatement" ses droits de douane

PARIS : L'avionneur européen et son concurrent américain s'affrontent depuis octobre 2004 devant l'OMC par le biais de Bruxelles et Washington, qui ont déposé deux plaintes simultanées dénonçant les aides publiques accordées à chacun des deux groupes. C'est le conflit commercial le plus long et le plus compliqué traité par l'OMC.

"Après 16 ans de contentieux, il s'agit de la dernière étape afin de mettre fin à ce différend de longue date et supprimer toute justification aux droits de douane américains", affirme Airbus dans un communiqué.

Concrètement, l'avionneur européen s'est entendu avec les gouvernements espagnol et français pour revoir à la hausse les intérêts dus sur les avances remboursables consenties par Paris et Madrid lors du lancement du programme d'avion long-courrier A350.

Ce système d'avances remboursables permet de limiter les risques financiers pris par un industriel lors du lancement de projets d'envergure.

Les taux d'intérêt désormais "correspondent à ce que l'OMC considère comme les taux d'intérêt et les critères d'évaluation des risques appropriés", indique Airbus.

"Nous avons pleinement satisfait à toutes les exigences de l'OMC. Ces amendements supplémentaires aux RLI (avances remboursables, ndlr) de l'A350 démontrent qu'Airbus n'a négligé aucun détail pour trouver une solution", estime le président exécutif d'Airbus, Guillaume Faury, cité dans le communiqué. C'est selon lui "un signal clair de soutien à ceux qui souffrent de l'impact violent des tarifs douaniers imposés par l'USTR", le représentant américain au commerce, "surtout à un moment où les industries sont durement touchées par les conséquences de la crise du Covid-19".

Pas d'obligation

L'avionneur ne "voulait plus attendre" et souhaitait montrer qu'il était "sérieux" dans sa volonté de se mettre en conformité, a expliqué une source proche du dossier. Il n'y avait pas d'obligation juridique à le faire, a-t-elle ajouté, disant espérer que "les États-Unis réalisent que c'est un vrai geste". Les États-Unis ont été autorisés en octobre par l'OMC à imposer des taxes sur près de 7,5 milliards de dollars (6,8 milliards d'euros) de biens et services européens importés chaque année. Il s'agit de la sanction la plus lourde jamais imposée par l'OMC. Washington inflige depuis des tarifs douaniers punitifs sur certains produits importés de l'Union européenne (dont le vin, le fromage et les olives) à hauteur de 25%.

Des taxes douanières de 10% sur les avions Airbus ont été relevées à 15% en mars. Elles affectent aussi les compagnies aériennes américaines qui s'équipent auprès de l'avionneur européen, pointe Airbus.

Dans une procédure miroir, l'UE attend que l'OMC l'autorise à imposer elle aussi des droits de douane en réaction à des subventions indues versées cette fois par Washington au constructeur aéronautique américain. La décision devrait intervenir en septembre ou octobre, selon la source proche du dossier.

Au cours de cette guerre où les différents acteurs se rendent coup pour coup, Airbus comme Boeing ont par le passé déjà proclamé s'être mis en conformité.

En mai, l'administration Trump a ainsi déclaré l'être après avoir aboli un "impôt préférentiel pour l'industrie aéronautique" dans l'État fédéré de Washington, où se trouvent les plus importantes installations de Boeing, et considéré par l'OMC comme contrevenant à ses règles. En décembre, pour la troisième fois en quatre ans, l'OMC a jugé que l'UE et certains de ses États membres n'avaient toujours pas mis leurs aides à Airbus en conformité avec les règles de l'Organisation. La décision concernait des aides versées par Berlin et Londres pour les programmes A380 et A350. La Commission européenne, soutenue par Airbus, a fait appel, considérant que la position de l'OMC est entachée de "graves erreurs juridiques".

Le commissaire européen au Commerce Phil Hogan a appelé vendredi les Etats-Unis à lever "immédiatement" leurs "droits de douane injustifiés sur les produits européens", après la mise en conformité d'Airbus avec les règles de l'OMC dans le vieux conflit commercial qui l'oppose à Boeing. "Les droits de douane injustifiés sur les produits européens ne sont pas acceptables", a affirmé M. Hogan dans un communiqué, soulignant que l'UE avait "fait des propositions spécifiques pour parvenir à un résultat négocié" dans le cadre de ce différend. "En l'absence d'un règlement, l'UE sera prête à faire pleinement usage de ses propres droits de sanction", a-t-il prévenu.


Taxe Zucman : «truc absurde», «jalousie à la française», selon le patron de Bpifrance

Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française". (AFP)
Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française". (AFP)
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  • M. Dufourcq, qui était interrogé sur RMC, a estimé que la taxe, dont le principe est d'imposer chaque année les contribuables dont la fortune dépasse 100 millions d'euros à hauteur de 2% de celle-ci, était "un truc complètement absurde"
  • Notant qu'avec la taxe Zucman, ils "paieraient tous en papier (en actions, NDLR) leurs 2%", M. Dufourcq a observé : "C'est moi, c'est la Bpifrance qui va gérer ce papier"

PARIS: Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française".

M. Dufourcq, qui était interrogé sur RMC, a estimé que la taxe, dont le principe est d'imposer chaque année les contribuables dont la fortune dépasse 100 millions d'euros à hauteur de 2% de celle-ci, était "un truc complètement absurde", mais qui selon lui "n'arrivera pas".

Mais "ça panique les entrepreneurs : ils ont construit leur boîte et on vient leur expliquer qu'on va leur en prendre 2% tous les ans. Pourquoi pas 3? Pourquoi pas 4? C'est invraisemblable!", a-t-il déclaré.

Notant qu'avec la taxe Zucman, ils "paieraient tous en papier (en actions, NDLR) leurs 2%", M. Dufourcq a observé : "C'est moi, c'est la Bpifrance qui va gérer ce papier" : "Donc demain j'aurai 2% du capital de LVMH, dans 20 ans 20%, 20% du capital de Pinault-Printemps-Redoute (Kering, NDLR), 20% du capital de Free. C'est délirant, c'est communiste en réalité, comment est-ce qu'on peut encore sortir des énormités comme ça en France!?"

"Ces gens-là tirent la France. Il faut les aider (...) au lieu de leur dire qu'on va leur piquer 2% de leur fortune".

Il a observé que "si on pique la totalité de celle de Bernard Arnault, ça finance 10 mois d'assurance-maladie", mais qu'après "il n'y a plus d'Arnault".

"Il n'y a pas de trésor caché", a estimé M. Dufourcq, qui pense que cette taxe "n'arrivera jamais", et n'est évoquée que "pour hystériser le débat" politique.

Pour lui, il s'agit "d'une pure histoire de jalousie à la française, une haine du riche, qui est soi-disant le nouveau noble", rappelant les origines modestes de François Pinault ou Xavier Niel: "c'est la société française qui a réussi, on devrait leur dresser des statues".

"Il y a effectivement des fortunes qui passent dans leur holding des dépenses personnelles", a-t-il remarqué, "c'est ça qu'il faut traquer, et c'est ce sur quoi le ministère des Finances, je pense, travaille aujourd'hui".

Mais il y a aussi "beaucoup de Français qui passent en note de frais leurs dépenses personnelles", a-t-il observé. "Regardez le nombre qui demandent les tickets dans les restaus", pour se les faire rembourser.


IA: Google investit 5 milliards de livres au Royaume-Uni avant la visite de Trump

Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
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  • Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat
  • Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres

LONDRES: Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays.

Cette somme financera "les dépenses d'investissement, de recherche et développement" de l'entreprise dans le pays, ce qui englobe Google DeepMind (le laboratoire d'IA du géant californien), a indiqué le groupe dans un communiqué.

Google ouvre mardi un centre de données à Waltham Cross, au nord de Londres, dans lequel il avait déjà annoncé l'an dernier injecter un milliard de dollars (850 millions d'euros). La somme annoncée mardi viendra aussi compléter ce financement, a précisé un porte-parole de l'entreprise à l'AFP.

Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat.

Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres.

Selon un responsable américain, qui s'exprimait auprès de journalistes, dont l'AFP, en amont de la visite, les annonces se porteront à "plus de dix milliards, peut-être des dizaines de milliards" de dollars.

Le gouvernement britannique avait déjà dévoilé dimanche plus d'un milliard de livres d'investissements de banques américaines dans le pays, là aussi en amont de la visite d'Etat du président Trump.

Et l'exécutif britannique a annoncé lundi que Londres et Washington allaient signer un accord pour accélérer les délais d'autorisation et de validation des projets nucléaires entre les deux pays.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités.

Le partenariat avec Washington, baptisé "Atlantic Partnership for Advanced Nuclear Energy", doit lui aussi être formellement signé lors de la visite d'État de Donald Trump.

 


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".