France: vers une politique migratoire plus stricte?

Le 29 octobre dernier, dans cette basilique Notre-Dame-de-l’Assomption de Nice, un ressortissant tunisien de 21 ans a tué trois personnes à coups de couteau (Photo, AFP)
Le 29 octobre dernier, dans cette basilique Notre-Dame-de-l’Assomption de Nice, un ressortissant tunisien de 21 ans a tué trois personnes à coups de couteau (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 20 novembre 2020

France: vers une politique migratoire plus stricte?

  • Après les attentats terroristes commis sur son sol, la France s’engage dans une politique migratoire plus stricte en menant des actions en coordination avec ses partenaires en Europe et au Maghreb
  • «À un moment il faut être concret, efficace», indique Clément Beaune, le secrétaire d’État aux Affaires européennes, qui appelle à sortir de la naïveté

PARIS: Un ressortissant tunisien de 21 ans a tué trois personnes à coups de couteau, le 29 octobre dernier, dans la basilique Notre-Dame-de-l’Assomption de Nice. Il s’agit de la troisième attaque commise sur le territoire français, après celle de Paris et celle de Conflans-Sainte-Honorine, en Île-de-France, depuis la republication des caricatures du prophète Mahomet par Charlie Hebdo au mois de septembre.

Après cette série d’attentats, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, s’est rendu en Tunisie, au Maroc et en Algérie pour aborder, entre autres, la question des 231 étrangers en situation irrégulière, suivis pour radicalisation, et qui devraient être expulsés vers leurs pays d’origine. «Nous en avons expulsé quarante-huit, dont trente au cours de ces trois dernières semaines. Cinquante ont été placés en centre de rétention administrative et quarante assignés à résidence, en attente d’être expulsés», souligne le ministre.

Réduire les visas?

La France envisage-t-elle de réduire les visas pour les pays qui protestent ou hésitent à rapatrier leurs ressortissants expulsés de France, qui se trouvent en situation d’immigration illégale ou qui sont soupçonnés de radicalisation?

Dans une déclaration faite à la radio Europe 1, Clément Beaune, secrétaire d’État français aux Affaires européennes, indique que «ces pays doivent reprendre les personnes qui sont identifiées comme leurs ressortissants». Il affirme également que la France n’hésiterait pas à réduire les visas octroyés aux responsables politiques et aux opérateurs économiques des pays concernés.

«À un moment il faut être concret, efficace», martèle le secrétaire d’État aux Affaires européennes, qui appelle à sortir de la naïveté en procédant à la mise en place d’une coordination des actions au niveau européen car, poursuit-il, «nous sommes plus forts dans ces pressions».

Une politique d’immigration plus rigoureuse

Les questions sécuritaire et migratoire représentent des sujets de débat permanent en France. À chaque crise, l’opposition monte au créneau et réclame un durcissement des conditions d’entrée sur le territoire français.

Dans un entretien accordé à Paris Match, le ministre de l’Intérieur se défend et souligne que la politique migratoire menée par le gouvernement est plus ferme que celles menées par ses prédécesseurs. En prenant l’exemple des naturalisations, Gérald Darmanin rappelle que, entre 2005 et 2012, il y a eu 85 000 naturalisations. Or, explique-t-il, 55 000 naturalisations par an ont été faites lors du quinquennat.

Il en est de même pour le renouvellement des titres de séjour. Le ministre de l’Intérieur annonce que, dans le département de la Seine-Saint-Denis, un quart des demandes de renouvellement des titres de séjour a été rejeté. «J’ai pris des mesures justes. Toute personne qui commet une faute sur notre territoire se voit refuser sa demande de renouvellement », explique-t-il.

Défendant une politique migratoire plus ferme, le ministre de l’Intérieur indique que «sur 140 000 demandes d’asile, plus de 100 000 sont refusées» et rappelle, à ce titre, l’engagement pris par le président de la République, Emmanuel Macron, sur la tenue d’un débat sur l’immigration, qui aura lieu à l’Assemblée nationale au mois de décembre prochain.

«Nous sommes plus rigoureux sur l’accès au pays. Mais je ne veux pas parler d’immigration zéro», ajoute-t-il.

L’espace Schengen

Les Européens se concertent afin de trouver une solution commune permettant une maîtrise sécuritaire au niveau des frontières. À l’appel du président de la République française, Emmanuel Macron, les pays d’Europe devraient coordonner leurs actions pour lutter efficacement contre le terrorisme, en commençant par le renforcement des contrôles aux frontières de l’espace Schengen.

«Les attentats que la France a connus, que l’Autriche a connus il y a quelques jours à Vienne, nous montrent que le risque terroriste est partout», déclare le chef de l’État lors de son déplacement au Perthus, dans les Pyrénées-Orientales, à la frontière franco-espagnole.

Le président français fait également remarquer que les réseaux sont mondialisés. «Les terroristes s’organisent aujourd’hui de manière mondiale à travers Internet et les réseaux sociaux, mais également en envoyant des agents au travers des frontières», prévient le chef de l’État français.

Emmanuel Macron a annoncé le doublement des effectifs des forces de l’ordre qui seront chargées de la protection des frontières françaises. En effet, 4 800 gendarmes, militaires et CRS seront déployés pour lutter contre l’immigration clandestine et la menace terroriste.

Selon l’agence Reuters, le président français compte porter des propositions au Conseil européen au cours du mois de décembre prochain afin de repenser en profondeur l’organisation de l’espace Schengen. «Nous devons intensifier notre lutte contre l’immigration clandestine et les réseaux de trafiquants qui, de plus en plus, sont liés au terrorisme», indique Emmanuel Macron lors de son déplacement au Perthus.


    Dix passeurs présumés jugés pour un naufrage meurtrier dans la Manche

    Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
    Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
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    • Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés
    • La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche

    LILLE: Dix hommes, dont huit Afghans, sont jugés à partir de lundi à Lille pour leur rôle présumé de passeurs dans le naufrage d'une embarcation clandestine qui avait fait quatre morts et quatre disparus dans la Manche en décembre 2022.

    Parti entre 1H00 et 1H30 du matin dans la nuit du 13 au 14 décembre 2022, le canot, qui transportait en majorité des migrants afghans, avait fait naufrage à quelques kilomètres des côtes anglaises.

    Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés.

    La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche.

    Selon les éléments de l'enquête, alors que les migrants gonflaient le bateau avant le départ, plusieurs ont entendu une détonation, synonyme selon eux de crevaison. Les passeurs leur ont dit de ne pas s'en faire et qu'il s'agissait du seul bateau disponible pour eux.

    D'après les témoignages des rescapés, il n'y avait pas assez de gilets de sauvetage pour tout le monde et aucune des personnes décédées n'en portait un. La température était glaciale et la mer très agitée.

    Après une ou deux heures de traversée, un boudin a commencé à se dégonfler et l'eau à entrer dans l'embarcation, jusqu'à atteindre les genoux des passagers. Paniqués, ils se sont mis debout pour tenter de faire signe à un bateau. Mais le fond du canot, peu solide, a ployé sous leur poids et celui de l'eau, et tous se sont retrouvés à l'eau.

    Neuf des prévenus sont jugés, jusqu'à vendredi, pour homicide involontaire par violation d'une obligation de sécurité, deux d'entre eux le sont pour blanchiment, tous pour aide au séjour irrégulier. Huit sont afghans, un syrien, un irakien.

    Certains des prévenus sont soupçonnés d'avoir recruté des passeurs et assuré la logistique auprès des passagers, d'autres d'avoir géré l'organisation sur le camp de migrants de Loon-Plage (Nord), où vivaient les migrants avant leur tentative de traversée, toujours selon les éléments de l'enquête. D'autres encore sont jugés pour s'être occupés du transport des migrants vers la plage et de la mise à l'eau du canot, et deux pour avoir collecté une partie des paiements.

    Le mineur sénégalais qui pilotait le canot est, lui, inculpé dans le cadre d'une procédure au Royaume-Uni.

    Apparu en 2018, le phénomène des traversées de la Manche en petites embarcations est à l'origine de nombreux naufrages, le plus meurtrier ayant coûté la vie à 27 personnes en novembre 2021.

    Depuis le début de l'année, au moins 15 migrants sont morts dans la Manche, bras de mer parmi les plus fréquentés du monde et où les conditions météorologiques sont souvent difficiles, selon un décompte de l'AFP à partir de chiffres officiels. En 2024, 78 étaient morts ainsi, un record.


    Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

    La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
    La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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    • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
    • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

    PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

    « Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

    L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

    « La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

    Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

    « Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

    « Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

    « C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

    À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


    Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

     Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
    Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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    • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
    • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

    PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

    « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

    Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

    Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

    Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

    Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

    Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».