Procès: Jonathan Geffroy un «jihadiste malgré lui»

Des femmes portant un niqab, marchent sous un panneau publicitaire érigé par le groupe État islamique (EI) dans le cadre d'une campagne dans la ville syrienne de Raqqa, contrôlée par l'EI, le 1er novembre 2014. (Photo par Raqa Media Center / AFP)
Des femmes portant un niqab, marchent sous un panneau publicitaire érigé par le groupe État islamique (EI) dans le cadre d'une campagne dans la ville syrienne de Raqqa, contrôlée par l'EI, le 1er novembre 2014. (Photo par Raqa Media Center / AFP)
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Publié le Samedi 21 janvier 2023

Procès: Jonathan Geffroy un «jihadiste malgré lui»

  • «J'ai choisi de partir en Syrie. Amener femme et enfant sur un théâtre de guerre, c'est immonde. A cette époque j'étais complètement borné», a-t-il déclaré à la cour
  • Jonathan Geffroy a choisi de collaborer avec les enquêteurs français - en les contactant depuis Raqqa dès novembre 2016 - révélant des projets d'attentats de l'EI ou donnant le nom de Français ayant rejoint l'organisation islamiste

PARIS : Jonathan Geffroy, ex-combattant de l'organisation Etat islamique (EI), a-t-il été un «jihadiste malgré lui» ? C'est la question soulevée vendredi par le président de la cour d'assises spéciale de Paris où est jugé le converti toulousain, parti en Syrie avec sa femme et leur bébé en février 2015.

Debout dans son box, en T-shirt vert et pantalon gris, Jonathan Geffroy, 40 ans, allure athlétique, refuse de s'apitoyer sur son sort ou de se poser en victime et assume pleinement sa responsabilité.

«J'ai choisi de partir en Syrie. Amener femme et enfant sur un théâtre de guerre, c'est immonde. A cette époque j'étais complètement borné», a-t-il déclaré à la cour.

Avant même sa fuite de Syrie avec sa famille en février 2017 et sa remise aux autorités françaises par la Turquie en septembre de la même année, Jonathan Geffroy a choisi de collaborer avec les enquêteurs français - en les contactant depuis Raqqa dès novembre 2016 - révélant des projets d'attentats de l'EI ou donnant le nom de Français ayant rejoint l'organisation islamiste.

Les enquêteurs de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) qui ont témoigné cette semaine devant la cour d'assises ont cherché à minimiser les «révélations» de l'ex-jihadiste mais tous les experts qui ont vu Jonathan Geffroy en prison ont relevé un réel travail d’introspection de l'accusé qui encourt 30 ans de réclusion criminelle.

Sa conversion à l'islam, par amour pour une femme musulmane, l'a conduit sur le chemin de la radicalisation.

«Je n'y connaissais rien. J'ai été aveuglé par des gens qui avaient une lecture littérale» du Coran.

A Toulouse d'où il est originaire, il fréquente la mosquée salafiste Basso Cambo. De nombreux futurs jihadistes de l'EI comme Quentin Lebrun, alias Abou Oussama, ou Chahid Tahiri, alias Abou Ishak, sont passés par cette mosquée. C'est «le copain toulousain» Chahid Tahiri qui l'incitera à se rendre en Syrie où se trouvent déjà les Toulousains Fabien et Jean-Michel Clain, deux responsables de la propagande de l'EI qui revendiqueront les attentats du 13 novembre 2015 à Paris et Saint-Denis.

- «Fier et content» -

C'est avec la foi du nouveau converti qu'il convainc sa femme marocaine, Latifa Chadli, de partir avec lui et leur enfant alors âgé de deux mois. Mme Chadli est réticente mais n'ose pas s'opposer à la volonté de son mari.

«S'il partait sans moi cela voulait dire revenir au Maroc en mère célibataire avec mon enfant. Je n'ai pas eu la force d'affronter les conséquences d'un tel choix», explique Mme Chadli, 40 ans, veste rose pâle et jupe imprimée, qui comparaît, libre sous contrôle judiciaire, pour association de malfaiteurs terroriste.

«J'aurais été une charge pour ma famille. J'ai eu peur. J'ai choisi mon mari», dit cette femme, longtemps soumise aux désidérata de son époux, selon des psychologues venues témoigner, mais qui, aujourd'hui ne porte plus le voile et se dit prête à divorcer d'avec lui si «nous ne sommes plus sur la même longueur d'ondes».

Dès son arrivée en Syrie, Latifa Chadli n'a qu'une obsession : en partir. Le cheminement est plus long pour Jonathan Geffroy qui reconnaît avoir d'abord été «fier et content» de porter l'uniforme de l'EI. Mais il déchante lui aussi après ses premiers combats près d'un aéroport dans la région d'Alep.

«Je ne voulais pas combattre», dit-il. «Comment osez-vous dire cela à la cour?», s'emporte l'avocate générale du parquet national antiterroriste. «Peut-être que vous n'aviez pas reçu les avantages que vous attendiez», lance-t-elle.

«Je suis parti pour aider les Syriens et je n'ai pu les aider», dit Jonathan Geffroy. «Je ne vous le fait pas dire», rebondit le président Christophe Petiteau.

«On a l'impression d'être face à un +jihadiste malgré lui+. On peut l'entendre mais peut-être est-ce une manière de se dédouaner», insiste le président.

Jonathan Geffroy n'a pas de mots assez durs pour qualifier son «aveuglement» et son «endoctrinement». Il raconte son dégoût face aux exactions dont il est témoin. «J'ai accepté des choses que naturellement je n'accepterais pas», reconnaît-il. L'attentat de Nice, le 14 juillet 2016, une «horreur», agit sur lui comme un révélateur et marque sa rupture avec l'EI.

«J'étais déshumanisé», affirme celui qui aspire à «retrouver (sa) vie».

Le verdict est attendu lundi.


Pandas et ping-pong: Macron achève sa visite en Chine sur une note plus légère

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  • Loin du monumental Palais du Peuple de Pékin où ils s'étaient rencontrés jeudi, le président Xi, accompagné de son épouse Peng Liyuan a joué le guide pour le couple présidentiel français
  • Les deux couples présidentiels ont ponctué ces retrouvailles par un déjeuner, avant qu'Emmanuel et Brigitte Macron ne poursuivent un programme plus personnel

CHENGDU: Visite patrimoniale, pandas et ping-pong: le président français Emmanuel Macron achève vendredi son déplacement en Chine sur une note plus intime et détendue avec son hôte Xi Jinping après les échanges ardus de la veille sur l'Ukraine et le commerce.

Loin du monumental Palais du Peuple de Pékin où ils s'étaient rencontrés jeudi, le président Xi, accompagné de son épouse Peng Liyuan, a joué le guide pour le couple présidentiel français arrivé main dans la main sur le site séculaire du barrage de Dujiangyan (sud-ouest), inscrit au patrimoine mondial, dans un décor verdoyant et montagneux de carte postale.

M. Macron, filmé plus tôt le matin en train de faire son jogging en short avec sa protection rapprochée dans la grande ville de Chengdu à environ une heure de route, s'est fait expliquer, par l'intermédiaire d'une interprète, l'ingéniosité d'un système d'irrigation qui remonte au IIIe siècle av. J.-C. et qui continue à irriguer la plaine du bassin du Sichuan.

Le président Xi a loué "la sagesse" des anciens appliquée aux éléments. "C'est un système d'ingénierie écologique et qui incarne l'harmonie entre l'homme et la nature, et cet esprit d'ingénierie rayonne dans tous les domaines, que ce soit pour la maîtrise de l'eau ou la gouvernance de l'Etat, nous pouvons toujours nous en inspirer", a-t-il dit.

"Impressionnant de voir que la nature a été ainsi maîtrisée par l'homme", s'est extasié M. Macron, en veste, col de chemise ouvert.

M. Macron s'est dit d'avance "très sensible" à cette fenêtre privée réservée par M. Xi, loin du protocole officiel, après l'avoir lui-même invité dans les Pyrénées de son enfance en mai 2024.

Autant de signes d'une "confiance" mutuelle et d'une volonté d'"agir ensemble" alors que les tensions internationales se multiplient et que les déséquilibres commerciaux se creusent au bénéfice de la Chine, a-t-il souligné jeudi.

Les deux couples présidentiels ont ponctué ces retrouvailles par un déjeuner, avant qu'Emmanuel et Brigitte Macron ne poursuivent un programme plus personnel.

Panda mania 

Comme en avril 2023 à Canton, M. Macron aura un échange avec des étudiants. Chengdu, quatrième ville de Chine avec 21 millions d'habitants, est considérée comme l'une des plus ouvertes sur les plans culturel et social.

Brigitte Macron se rendra de son côté au Centre de conservation des pandas géants de Chengdu, où deux plantigrades âgés de 17 ans, prêtés à la France en 2012, viennent tout juste de revenir.

Elle y retrouvera Yuan Meng, le premier des pandas géants nés en France en 2017, dont elle est la marraine et qui a rejoint la Chine en 2023.

La Chine a fait de ces ursidés des ambassadeurs emblématiques à travers des prêts à des zoos dans le monde.

Les petits nés à l'étranger sont envoyés quelques années plus tard à Chengdu pour participer à des programmes de reproduction et de réadaptation en milieu naturel.

De son côté, le chef de l'Etat rencontrera les frères pongistes Alexis et Félix Lebrun, présents en Chine pour la coupe du monde de tennis de table par équipes mixtes.

Timides signaux 

L'occasion d'un nouvel échange de balles pour le président français, après celui à l'Elysée avec Alexis Lebrun en novembre 2024?

Jeudi à Pékin, le président français s'est livré à un échange autrement plus délicat, pressant son homologue chinois d'œuvrer à la fin de la guerre en Ukraine en usant de son "influence" sur la Russie et de corriger les déséquilibres commerciaux avec la France et l'Europe.

S'il s'est dit prêt à "soutenir tous les efforts de paix", M. Xi a haussé le ton face aux accusations récurrentes de soutien de la Chine à l'économie de guerre russe.

La Chine n'a jamais condamné l'invasion de l'Ukraine par la Russie, un partenaire primordial, et lui achète massivement du pétrole, alimentant ainsi sa machine de guerre.

M. Macron semble avoir été entendu en revanche dans son appel à plus d'investissements chinois en France, avec en corollaire un partage de technologies comparable à celui opéré par les Européens lors du décollage économique de Pékin.

Une lettre d'intention a été signée en ce sens, Xi Jinping se disant prêt à "accroître les investissements réciproques" pour un "environnement commercial équitable".


Budget de la Sécurité sociale: les députés votent sur les recettes, après un compromis sur la CSG du capital

Des députés français assistent à une séance consacrée à la deuxième lecture du projet de loi de finances de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2026 à l'Assemblée nationale, la chambre basse du Parlement français, à Paris, le 4 décembre 2025. (AFP)
Des députés français assistent à une séance consacrée à la deuxième lecture du projet de loi de finances de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2026 à l'Assemblée nationale, la chambre basse du Parlement français, à Paris, le 4 décembre 2025. (AFP)
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  • Après d’intenses négociations, l’Assemblée a adopté un amendement réduisant le rendement de la hausse de la CSG à 1,5 milliard€
  • Le gouvernement multiplie les concessions pour éviter le rejet du texte

PARIS: L'Assemblée se prononce vendredi sur la partie recettes du budget de la Sécurité sociale, au lendemain d'une journée marquée par d'intenses tractations entre le gouvernement et les députés, qui ont notamment abouti à l'adoption d'un compromis sur la question clé de la hausse de la CSG sur les revenus du capital.

L'adoption de cette partie recettes est cruciale, puisque son rejet vaudrait rejet de tout le texte, dans une nouvelle lecture elle-même décisive. Pour obtenir un vote favorable des députés, le gouvernement a multiplié les signes d'ouverture jeudi, que ce soit sur les franchises médicales ou le niveau des dépenses de l'Assurance maladie, avec un Sébastien Lecornu très présent au banc.

Cette hausse de la contribution sociale généralisée (CSG) visant spécifiquement les revenus du capital, supprimée au Sénat après avoir été approuvée en première lecture à l'Assemblée, était particulièrement attendue par la gauche, mais désapprouvée par la droite.

"Ne tapez pas l'épargne populaire des Français", a martelé Laurent Wauquiez, patron des députés LR.

Les séances de l'après-midi et du soir ont été entrecoupées de nombreuses suspensions permettant des discussions en coulisses entre les députés et le gouvernement.

Pour arracher un compromis, le gouvernement a déposé un amendement cherchant à la fois à "sécuriser des recettes" et "assurer que les classes moyennes ne soient pas impactées", avec un rendement attendu de 1,5 milliard d'euros, au lieu de 2,8 dans la version initiale.

Il a finalement été adopté par 177 voix contre 84 et 92 abstentions. Un vote vivement critiqué par le député RN Jean-Philippe Tanguy, qui a dénoncé une taxe "qui va frapper plus durement un artisan à 2.000 euros qu'un multimillionnaire".

- Moment "potentiellement critique" -

Signe de la bonne volonté du gouvernement, Mme de Montchalin a aussi dit prendre "acte" de l'absence de consensus concernant le doublement des franchises médicales, c'est à dire le reste à charge payé par les patients, par exemple sur les médicaments. "Cette proposition (...) ne peut être incluse dans nos projections financières", a-t-elle dit, sans pour autant fermement s'engager sur une absence totale de décret en ce sens.

Concernant l'objectif des dépenses de l'assurance maladie (l'Ondam), elle a précisé que le gouvernement envisageait de les augmenter "jusqu'à plus 2,5%" contre une hausse d'environ 2% prévue aujourd'hui.

Elle s'est par ailleurs engagée à "accompagner un compromis" sur "l'année blanche" concernant les retraites et les minima sociaux, c'est-à-dire leur non indexation sur l'inflation.

Dans un moment "potentiellement critique", le Premier ministre a consacré sa journée aux débats parlementaires, reportant ses rendez-vous prévus.

Il a fait monter la pression dans l'hémicycle, martelant que l'absence de texte conduirait à "29 ou 30 milliards" d'euros de déficit pour la Sécu l'an prochain, alors que le gouvernement souhaite le contenir autour de 20 milliards d'euros.

Une note du ministère de la Santé a été distribuée aux députés, faisant état d'un "risque très élevé sur le financement du système de protection sociale", faute de budget. Elle a suscité des réactions houleuses du côté de LFI ou du RN accusant le gouvernement de jouer sur les "peurs".

Pressé par ailleurs par plusieurs ténors de son camp, chez Horizons, Les Républicains ou par le président LR du Sénat Gérard Larcher, d'activer l'article 49.3 de la Constitution, M. Lecornu l'a de nouveau exclu.

"Vous avez critiqué le 49.3 pendant des années et, au moment où nous le laissons tomber, vous continuez de critiquer", a-t-il tancé.

- Camp gouvernemental divisé -

Le scrutin sur l'ensemble du projet de loi n'est prévu que le 9 décembre. Son rejet hypothèquerait grandement l'adoption du budget de la Sécu au Parlement avant le 31 décembre.

Le texte est réécrit par les députés depuis mardi dans l'hémicycle en nouvelle lecture, après que le Sénat a supprimé plusieurs concessions du gouvernement au PS, dont l'emblématique suspension de la réforme des retraites.

Des concessions que désapprouvent le groupe Horizons et Les Républicains. En l'état, "on ne peut pas voter pour", a asséné Edouard Philippe, chef des députés Horizons qui oscillent à ce stade entre abstention et vote contre.

De quoi faire peser une sérieuse menace sur l'adoption du texte. Car face au rejet attendu du RN, de son allié l'UDR et de LFI, l'absence de soutien des deux groupes à la droite du camp gouvernemental pourrait concourir à faire tomber le texte, même avec des votes "pour" du PS.

Marque de son ouverture au compromis, celui-ci a approuvé une taxe sur les mutuelles censée rapporter un milliard d'euros, qu'il avait rejetée en première lecture.

Pendant ce temps, le Sénat a adopté la partie dédiée aux recettes du projet de budget de l'Etat pour 2026, après l'avoir largement remaniée par rapport à la copie initiale du gouvernement, supprimant notamment plusieurs milliards d'euros de hausses de prélèvements.


Condamnation de Christophe Gleizes en Algérie: «profonde inquiétude» de Macron qui promet d'agir pour «sa libération»

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  • La justice algérienne a confirmé mercredi la condamnation à sept ans de prison pour "apologie du terrorisme" de Christophe Gleizes, emprisonné depuis juin
  • Ses proches, présents à l'audience, ont exprimé leur consternation, tout comme l'ONG Reporters sans frontières et la classe politique française

PARIS: Emmanuel Macron a "appris avec une profonde inquiétude la condamnation en appel" à sept ans de prison du journaliste français Christophe Gleizes en Algérie, a déclaré jeudi l'Elysée.

"Il lui adresse ses pensées ainsi qu'à sa famille. Nous continuerons d'agir auprès des autorités algériennes pour obtenir sa libération et son retour en France dans les plus brefs délais", a ajouté la présidence française.

La justice algérienne a confirmé mercredi la condamnation à sept ans de prison pour "apologie du terrorisme" de Christophe Gleizes, emprisonné depuis juin.

Collaborateur des magazines français So Foot et Society, le journaliste de 36 ans s'était rendu en Algérie en mai 2024 pour un article sur le club de football le plus titré du pays, la Jeunesse Sportive de Kabylie (JSK), basé à Tizi Ouzou, à 100 km à l'est d'Alger.

Ses proches, présents à l'audience, ont exprimé leur consternation, tout comme l'ONG Reporters sans frontières et la classe politique française.

Le ministre français de l'Intéreur Laurent Nuñez a affirmé jeudi que sa libération était "un élément majeur" des discussions en cours "entre Paris et Alger", relancées depuis la grâce présidentielle octroyée mi-novembre à l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal par l'Algérie.

Emmanuel Macron s'était ensuite dit "disponible" pour échanger avec le président algérien Abdelmadjid Tebboune si cela permet d'"obtenir des résultats" et d'"avancer" dans les relations tendues entre les deux pays, mais cet échange n'a pas encore eu lieu.