Les défis et les chantiers de la France en 2023

Au cours de son premier mandat, le président français, Emmanuel Macron, a voulu entreprendre des réformes qui ont été contrecarrées par une série inattendue de crises (Gilets jaunes, Covid-19, guerre en Ukraine). (Photo, AFP)
Au cours de son premier mandat, le président français, Emmanuel Macron, a voulu entreprendre des réformes qui ont été contrecarrées par une série inattendue de crises (Gilets jaunes, Covid-19, guerre en Ukraine). (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 25 janvier 2023

Les défis et les chantiers de la France en 2023

  • Au fil des années, les crises s’accumulent, en particulier dans le secteur de la santé (système public à bout de souffle) et dans celui de l’énergie
  • Sur le plan pratique, le président ne s’implique pas dans les détails de la démarche, laissant cette tâche à la Première ministre, Élisabeth Borne, et à ses principaux ministres

PARIS: En France, l’année 2023 serait-elle celle de tous les dangers? Les différents chantiers répondent-ils aux défis et aux bouleversements constatés en 2022 – systèmes sociaux et sanitaires à l’épreuve et dangers géopolitiques majeurs à l’extérieur? Il n’est pas simple de trouver à ces questions des réponses qui soient à la hauteur de leurs enjeux, avec un paysage politique français éclaté et un contexte plutôt instable, en Europe comme ailleurs.

Dossiers sociaux brûlants

Au fil des années, les crises s’accumulent, en particulier dans le secteur de la santé (système public à bout de souffle) et dans celui de l’énergie. L’inflation et les effets du changement climatique n’arrangent évidemment rien. Le 10 janvier, le gouvernement a ouvert le chantier de la réforme des retraites. Neuf jours plus tard, plus d’un million de Français ont manifesté contre le projet proposé par l’exécutif. Ce regain de contestation prouve que le chemin des réformes est semé d’embûches sociales et politiques.

Au cours de son premier mandat, le président français, Emmanuel Macron, a voulu entreprendre des réformes qui ont été contrecarrées par une série inattendue de crises (Gilets jaunes, Covid-19, guerre en Ukraine). Il est également probable que son désir de remporter un second mandat présidentiel l'ait poussé à reporter le traitement de certains dossiers.

Cette fois, le président semble déterminé à accomplir quelques réalisations, à commencer par la réforme des retraites. Il explique que le fait de repousser de deux ans l’âge du départ à la retraite est indispensable pour garder l'équilibre du Trésor public, de l'économie et du marché du travail. À cet égard, des sources de l’Élysée affirment : «Il n'y a pas d'autre option pour remettre le pays sur les rails.» C’est pourquoi Macron insiste sur le fait que cette réforme est nécessaire et juste. 

Sur le plan pratique, le président ne s’implique pas dans les détails de la démarche, laissant cette tâche à la Première ministre, Élisabeth Borne, et à ses principaux ministres. Il est envisagé de recourir à certains amendements constructifs du texte originel, surtout après la forte mobilisation de jeudi dernier. Ainsi, la vague de protestation qui s’exprime dans la rue par le biais des syndicats et la «guérilla» qui, au Parlement, est menée par une partie des opposants pourraient inciter le gouvernement à combler les lacunes de son texte et à faire miroiter certaines «tentations», comme l'augmentation de la pension minimum des retraités.

Dans le jeu de la répartition des rôles au sein de l'exécutif, Macron tient à faire passer les réformes malgré l'absence de majorité absolue de son camp au Parlement. Contrairement à ce qui s'est passé pour le budget, avec l’utilisation de l’article 49.3 de la Constitution, le gouvernement négocie avec le parti Les Républicains (la droite «classique») pour faire passer la réforme. Cela pourrait conduire à une recomposition des alliances au sein d’un paysage politique éclaté ou à de simples arrangements à la carte. La sensibilité d’Élisabeth Borne est proche du centre gauche; le gouvernement devrait donc composer entre des tendances contradictoires pour réaliser une percée sur le front de la législation.

Dans tous les cas, le président considère qu'il est nécessaire de s'engager sur la voie de la réforme, aussi difficile soit-elle, car elle permettra d'atteindre ses priorités: la reconstruction du modèle social, le renforcement des forces armées ainsi que la poursuite de la transformation environnementale et énergétique, malgré le poids des dossiers sociaux et le retour possible des mouvements contestataires, comme celui des Gilets jaunes. Toutefois, les défis internes sont profondément liés au contexte de «désordre international» et à ses conséquences.

Défis extérieurs

Parmi les principaux défis extérieurs qui attendent la France en 2023 figurent le danger géopolitique, avec la guerre en Ukraine qui se poursuit, et les nouveaux équilibres stratégiques qu’elle induit. Alors que le conflit a débuté il y a onze mois, aucun signe de négociation ne se profile. Au contraire, on assiste à une escalade de la violence. Dans cette guerre d’usure destructrice et coûteuse, les parties concernées ont entrepris une véritable course contre la montre pour obtenir des gains territoriaux.

Emmanuel Macron réitère une position ferme, confirmant que «le soutien européen à l’Ukraine sera indéfectible». Pour le moment, malgré les effets négatifs de la guerre, notamment en ce qui concerne la croissance économique et la sécurité énergétique, la France, partisane d’une «solution politique» et d’un «pragmatisme pour apaiser les craintes sécuritaires russes», se trouve impliquée dans les choix européen et atlantique aux côtés de Kiev. 

2022 fut une année charnière pour l’Europe et le monde. L’objectif français qui consiste à atteindre une «autonomie stratégique» de l’Union européenne ne semble pas à la portée de la main. La crise au sein du couple franco-allemand grippe la machine de la construction européenne. Toutefois, à l’occasion des noces de diamant (soixante ans) du traité franco-allemand de l’Élysée, Paris et Berlin ont décidé de relancer la reconstruction européenne et de renforcer le pilier européen de l’Otan.

Avec l’augmentation du budget militaire français (la nouvelle loi de la programmation militaire pour la période 2024-2030 alloue un budget de 400 milliards d'euros, soit un tiers de plus que l'enveloppe de la précédente loi). Cette «militarisation» répond au défi du «retour de la guerre en Europe» et aux risques d’ouverture de nouveaux fronts, au Moyen-Orient, en Indo-Pacifique et en Asie. Parmi les autres défis: les dangers liés à la cyberguerre et les menaces contre la démocratie, avec la montée de forces extrémistes en Europe et l’invasion des lieux du pouvoir au Brésil.

On le voit, les tensions internes et les défis extérieurs auxquels la France doit faire face laissent planer une certaine inquiétude.


L’histoire de Donia, arrivée de Gaza à Paris, le quotidien morbide des Gazaouis qui ne veulent que vivre

Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous. (AFP)
Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous. (AFP)
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  • Donia Al-Amal Ismail, poète, journaliste et mère de quatre enfants, habitante de Gaza, arrivée à Paris il y a presque trois mois. Elle raconte son histoire à Arab News en français.
  • Difficile de ne pas se sentir anéantie face à ce visage doux et tendre, à ces yeux verts empreints d’une tristesse insondable.

PARIS: Depuis le début de la guerre à Gaza, les récits qui parviennent à franchir les ruines et le silence imposé sont rares.
Derrière les chiffres et les bilans atones relayés par les médias, il y a des voix : celles de civils qui ont vu leur existence basculer en quelques heures.
Parmi elles, Donia Al-Amal Ismail, poète, journaliste et mère de quatre enfants, habitante de Gaza, arrivée à Paris il y a presque trois mois. Elle raconte son histoire à Arab News en français.
Difficile de ne pas se sentir anéantie face à ce visage doux et tendre, à ces yeux verts empreints d’une tristesse insondable. Donia témoigne de ce que signifie vivre la guerre : vivre avec la peur, la faim, fuir sous les bombes, errer d’un abri de fortune à un autre.
Marcher pour ne pas crever, marcher avec le seul souci de garder en vie ses deux enfants (une fille et un garçon) restés avec elle, les deux autres étant en Égypte.
Marcher la peur au ventre, occultant la faim et la fatigue, enjamber des gravats, des cadavres, marcher dans des égouts, tenir sans espoir aucun, se sachant, comme tous ses semblables, abandonnée par tous.
Son récit, émouvant par-dessus tout, saccadé par de longs silences et des larmes qui coulent spontanément sur les joues, n’en est pas moins ferme : pour elle, indéniablement, Gaza est le foyer des Gazaouis qui feront tout pour reconstruire.

 


Lecornu recevra les socialistes mercredi, annonce Olivier Faure

Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure. (AFP)
Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure. (AFP)
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  • Depuis sa nomination mardi, Sébastien Lecornu a commencé ses consultations avec d'abord les partis de son "socle commun" (bloc central et LR), puis les syndicats et organisations patronales avec qui il a des entretiens encore lundi et mardi
  • Mais le rendez-vous le plus attendu est celui avec les socialistes. Déjà menacé de censure par LFI et le RN, c'est eux qui peuvent éviter à M. Lecornu de connaître le même sort que ses prédécesseurs

PARIS: Le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu recevra mercredi matin les responsables du Parti socialiste, avec qui il devra négocier à l'automne un accord sur le budget 2026 pour éviter une censure, a annoncé leur Premier secrétaire Olivier Faure.

"On a rendez-vous mercredi matin et donc nous le verrons pour la première fois", a déclaré M. Faure lundi sur France 2. Les Ecologistes de Marine Tondelier et le Parti communiste de Fabien Roussel ont également indiqué à l'AFP être reçus mercredi, respectivement à 14H et 18H.

Depuis sa nomination mardi, Sébastien Lecornu a commencé ses consultations avec d'abord les partis de son "socle commun" (bloc central et LR), puis les syndicats et organisations patronales avec qui il a des entretiens encore lundi et mardi.

Mais le rendez-vous le plus attendu est celui avec les socialistes. Déjà menacé de censure par LFI et le RN, c'est eux qui peuvent éviter à M. Lecornu de connaître le même sort que ses prédécesseurs.

Au coeur de ce rendez-vous le projet de budget 2026 que le nouveau gouvernement devra présenter avant la mi-octobre au Parlement.

Les socialistes posent notamment comme conditions un moindre effort d'économies l'année prochaine que ce qu'envisageait François Bayrou et une fiscalité plus forte des plus riches, à travers la taxe sur les très hauts patrimoines élaborée par l'économiste Gabriel Zucman (2% sur les patrimoines de plus de 100 millions d'euros).

Mais Sébastien Lecornu, s'il s'est dit prêt samedi à "travailler sans idéologie" sur les questions "de justice fiscale" et de "répartition de l'effort", a déjà fait comprendre son hostilité à cette taxe Zucman, et notamment au fait de taxer le patrimoine professionnel "car c'est ce qui permet de créer des emplois".

"Quand on parle patrimoine professionnel, vous pensez à la machine outil ou aux tracteurs mais pas du tout. On parle d'actions, la fortune des ultrariches, elle est essentiellement en actions", lui a répondu M. Faure.

"Si vous dites que, dans la base imposable, on retire ce qui est l'essentiel de leur richesse, en réalité, vous n'avez rien à imposer", a-t-il argumenté.

"C'était déjà le problème avec l'Impôt sur la fortune (ISF, supprimé par Emmanuel Macron) qui touchait les +petits riches+ et épargnaient les +ultrariches+ parce que les +ultrariches+ placent leur argent dans des holdings", a-t-il reconnu.

 


Pour Sébastien Lecornu, un premier déplacement consacré à la santé

Sébastien Lecornu assiste à la présentation du supercalculateur Asgard au Mont Valérien à Suresnes, près de Paris, le 4 septembre 2025. (AFP)
Sébastien Lecornu assiste à la présentation du supercalculateur Asgard au Mont Valérien à Suresnes, près de Paris, le 4 septembre 2025. (AFP)
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  • Déplacement symbolique à Mâcon : Pour son premier déplacement, Sébastien Lecornu met l'accent sur l'accès aux soins et le quotidien des Français
  • Conscient de l'absence de majorité, il consulte partis et syndicats, cherchant des terrains d'entente sur le budget, tout en laissant la porte ouverte à une fiscalité plus juste

PARIS: Sébastien Lecornu se rend samedi en province, à Mâcon, pour son premier déplacement en tant que Premier ministre consacré à la santé et à "la vie quotidienne" des Français, délaissant pendant quelques heures les concertations qu'il mène activement à Paris avant de former un gouvernement.

Quatre jours à peine après sa nomination, le nouveau et jeune (39 ans) locataire de Matignon va à la rencontre des Français, pour qui il reste encore un inconnu. Il échangera notamment avec des salariés d'un centre de santé de Saône-et-Loire dont le but est d'améliorer l'accès aux soins.

Lui-même élu local de l'Eure, où il a été maire, président de département et sénateur, ce fils d'une secrétaire médicale et d'un technicien de l'aéronautique avait assuré dès le soir de sa nomination "mesurer les attentes" de ses concitoyens et "les difficultés" qu'ils rencontraient.

Celles-ci sont souvent "insupportables" pour accéder à un médecin ou à un professionnel de santé, parfois "source d'angoisse", souligne son entourage. Le Premier ministre entend dans ce contexte "témoigner de la reconnaissance de la Nation à l’égard des personnels soignants" et "réaffirmer la volonté du gouvernement de faciliter l’accès aux soins".

Il s'agit aussi pour Sébastien Lecornu de convaincre l'opinion, autant que les forces politiques, du bien-fondé de sa méthode: trouver des terrains d'entente, en particulier sur le budget, permettant de gouverner sans majorité.

Sébastien Lecornu est très proche d'Emmanuel Macron, avec qui il a encore longuement déjeuné vendredi à l'Elysée.

- Mouvements sociaux -

Sa nomination coïncide avec plusieurs mouvements sociaux. Le jour de sa prise de fonction, une mobilisation lancée sur les réseaux sociaux pour "bloquer" le pays a réuni 200.000 manifestants, et une autre journée de manifestations à l'appel des syndicats est prévue jeudi.

"Il y a une grande colère" chez les salariés, a rapporté Marylise Léon, la secrétaire générale de la CFDT, premier syndicat de France, à l'issue d'une entrevue vendredi avec le nouveau Premier ministre, qui lui a dit travailler sur une "contribution des plus hauts revenus" dans le budget 2026.

C'est sur le budget que ses deux prédécesseurs, François Bayrou et Michel Barnier, sont tombés. Et Sébastien Lecornu cherche en priorité une forme d'entente avec les socialistes.

Mais il lui faut dans le même temps réduire les déficits, alors que l'agence de notation Fitch a dégradé vendredi soir la note de la dette française.

Le centre et la droite de la coalition gouvernementale se disent prêts à taxer plus fortement les ultra-riches sans pour autant aller jusqu'à l'instauration de la taxe Zucman sur les plus hauts patrimoines, mesure phare brandie par les socialistes et dont LR ne veut pas.

Une telle mesure marquerait en tout cas une des "ruptures" au fond prônées par Sébastien Lecornu à son arrivée, puisqu'elle briserait le tabou des hausses d'impôts de la macronie.

- Méthode -

Sébastien Lecornu veut aussi des changements de méthode.

Il a d'abord réuni jeudi --pour la première fois depuis longtemps-- les dirigeants des partis du "socle commun", Renaissance, Horizons, MoDem et Les Républicains, afin qu'ils s'entendent sur quelques priorités communes.

Un format "présidents de parti" qui "permet de travailler en confiance, de façon plus directe, pour échanger sur les idées politiques, sur les arbitrages", salue un participant.

Avant les oppositions et à quelques jours d'une deuxième journée de manifestations, il a consulté les partenaires sociaux, recevant vendredi la CFDT et Medef, avant la CGT lundi.

En quête d'un compromis pour faire passer le budget, le chef de gouvernement pourrait repartir du plan de son prédécesseur François Bayrou délesté de ses mesures les plus controversées. A l'instar de la suppression de deux jours fériés.

L'hypothèse d'une remise sur les rails du conclave sur les retraites semble aussi abandonnée. Les partenaires sociaux refusent de toute façon de le rouvrir.

Des gestes sont attendus à l'égard des socialistes alors qu'à l'Elysée, on estime que le Rassemblement national, premier groupe à l'Assemblée nationale, se range désormais comme la France insoumise du côté du "dégagisme".

Cultivant une parole sobre voire rare, Sébastien Lecornu ne s'exprimera qu'à l'issue de ces consultations "devant les Français", avant la traditionnelle déclaration de politique générale, devant le Parlement.