Le Burkina acte le départ des troupes françaises, Paris rappelle son ambassadeur

Sur cette photo prise le 21 juillet 2022 Luc Hallade (à gauche), ambassadeur de France au Burkina Faso, et le général Laurent Michon, commandant de la force Barkhane, donnent une conférence de presse, à Ouagadougou. (Photo, AFP)
Sur cette photo prise le 21 juillet 2022 Luc Hallade (à gauche), ambassadeur de France au Burkina Faso, et le général Laurent Michon, commandant de la force Barkhane, donnent une conférence de presse, à Ouagadougou. (Photo, AFP)
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Publié le Jeudi 26 janvier 2023

Le Burkina acte le départ des troupes françaises, Paris rappelle son ambassadeur

  • Dans les usages diplomatiques, un tel rappel pour «consultations» signale un mécontentement avec le pays voire une crise diplomatique
  • Mais le rappel de Luc Hallade coïncide également avec une demande de la junte burkinabè de remplacer l'ambassadeur

PARIS: Le ministère français des Affaires étrangères a annoncé jeudi le rappel de son ambassadeur au Burkina Faso "pour mener des consultations" au lendemain de l'annonce du départ du pays des forces spéciales françaises d'ici "un mois".

"Dans le contexte des derniers développements intervenus au Burkina Faso, nous avons décidé de rappeler notre ambassadeur à Paris, pour mener des consultations sur l'état et les perspectives de notre coopération bilatérale", a expliqué à l'AFP le Quai d'Orsay.

Interrogée sur le rappel provisoire ou définitif de Luc Hallade, la porte-parole du Quai Anne-Claire Legendre a souligné que Paris était convenu avec les autorités burkinabè "de traiter de ce sujet en bonne entente et dans les formes diplomatiques qui sont habituelles".

Pour l'heure, le ministère "profite de sa présence" à Paris pour prendre le pouls de la situation actuelle et des perspectives de la relation bilatérale, a-t-elle ajouté lors d'un point presse.

Dans les usages diplomatiques, un tel rappel pour "consultations" signale un mécontentement avec le pays voire une crise diplomatique. Mais le rappel de Luc Hallade coïncide également avec une demande de la junte burkinabè de remplacer l'ambassadeur.

En décembre, une lettre avait en effet été envoyée à Paris pour réclamer son départ, les autorités lui reprochant d'avoir fait état publiquement de la dégradation de la situation sécuritaire dans le pays, en proie à des violences jihadistes.

L'ambassadeur, qui était arrivé à Ouagadougou à l'été 2019, était toutefois resté à son poste. Et la visite de la secrétaire d'Etat française Chrysoula Zacharopoulou le 10 janvier avait laissé entrevoir une possibilité d'apaisement.

Le tournant est intervenu il y a quelques jours quand le gouvernement burkinabè a décidé de dénoncer l'accord de 2018 relatif au statut des forces françaises présentes dans ce pays. Une dénonciation "formellement" reçue mardi par le ministère des Affaires étrangères.

"Conformément aux termes de l'accord, la dénonciation prend effet un mois après la réception de la notification écrite", a-t-il précisé à l'AFP. La France respectera "les termes de cet accord en donnant suite à cette demande", a ajouté le Quai d'Orsay.

Face à des relations franco-burkinabè dégradées et un sentiment anti-français grandissant à travers le pays, les responsables français martelaient ces derniers mois que les forces spéciales ne resteraient qu'à la demande des autorités burkinabè.

"La France n'impose rien, elle est disponible pour inventer un avenir ensemble", avait ainsi déclaré la secrétaire d'Etat à l'issue d'un entretien avec le capitaine Ibrahim Traoré au pouvoir à la faveur d'un coup d'Etat fin septembre.

L'aide bilatérale en question ?

Pourtant, peu après cette visite, le gouvernement burkinabè avait fait savoir qu'il affirmerait avec force la souveraineté du pays et entendait "diversifier ses partenaires" dans la lutte antijihadiste, longtemps menée principalement avec l'aide de la France, ancienne puissance coloniale.

Le Burkina héberge actuellement un contingent de près de 400 militaires des forces spéciales françaises, dans une opération baptisée Sabre. Ces militaires auront quitté le pays "d'ici fin février" et le retrait de tous les matériels devrait être achevé "fin avril", a affirmé mercredi à l'AFP une source proche du dossier.

Selon des sources concordantes, l'option privilégiée serait alors de redéployer ces militaires d'élite au Niger voisin, qui accueille déjà près de 2.000 personnels français.

Ouagadougou souhaite le départ des forces militaires françaises sans pour autant rompre diplomatiquement avec Paris. Mais la France reste désormais dans l'attente des décisions de partenariats des autorités burkinabè, qui ont amorcé un rapprochement avec la Russie.

Le Premier ministre avait fait une visite discrète à Moscou en décembre avant de déclarer il y a deux semaines qu'un partenariat avec la Russie était "un choix de raison".

Lors de sa visite à Ouagadougou, Chrysoula Zacharopoulou "a été très claire sur les conséquences du choix que feront les autorités", avait récemment expliqué à l'AFP une source diplomatique. Et d'ajouter: "Chaque choix a des conséquences".

Parmi les questions, l'avenir de l'aide française au développement qui pourrait être suspendue, comme au Mali, si les Burkinabè se tournaient vers la société paramilitaire privée russe Wagner. Environ un milliard d'euros a été injecté au Burkina Faso entre 2011 et 2021 via l'Agence française de développement.


Grève nationale : les syndicats unis contre le budget du futur gouvernement

Des policiers attendent l'arrivée du ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau à la Porte d'Orléans à Paris, le 18 septembre 2025, avant une journée de grèves et de protestations à l'échelle nationale à l'appel des syndicats sur le budget national de la France. (AFP)
Des policiers attendent l'arrivée du ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau à la Porte d'Orléans à Paris, le 18 septembre 2025, avant une journée de grèves et de protestations à l'échelle nationale à l'appel des syndicats sur le budget national de la France. (AFP)
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  • Journée de grève nationale ce jeudi à l’appel des 8 principaux syndicats français, unis contre les mesures budgétaires jugées « brutales »
  • Les autorités redoutent des débordements à Paris, avec jusqu’à 100 000 manifestants attendus et la présence annoncée de casseurs. 900 000 personnes pourraient se mobiliser dans toute la France

Les syndicats français ont promis une "journée noire" de manifestations et de grèves jeudi pour peser sur les choix budgétaires du prochain gouvernement, en pleine crise politique dans la deuxième économie de l'UE.

A Paris, le préfet de police s'est dit "très inquiet" de la présence de nombreux casseurs venant pour "en découdre" dans la manifestation prévue dans la capitale, qui pourrait selon lui rassembler 50.000 à 100.000 personnes.

Les autorités s'attendent à une mobilisation massive, avec plus de 250 cortèges annoncés qui pourraient réunir jusqu'à 900.000 personnes à travers le pays, soit cinq fois plus que lors du mouvement "Bloquons tout" du 10 septembre lancé sur les réseaux sociaux, hors de tout cadre syndical.

Cette mobilisation lancée par les huit syndicats français, unis pour la première fois depuis le 6 juin 2023, vise les mesures budgétaires "brutales" préconisées cet été par le Premier ministre François Bayrou pour réduire le déficit de la France (coupes dans le service public, réforme de l'assurance chômage, gel des prestations sociales notamment).

Son gouvernement alliant le centre droit et la droite, minoritaire à l'Assemblée nationale, a été renversé par les députés le 8 septembre.

Nommé le lendemain, son successeur Sébastien Lecornu - troisième Premier ministre d'Emmanuel Macron depuis juin 2024, le cinquième depuis sa réélection en 2022 - s'est lui aussi engagé à réduire le déficit qui plombe les comptes de la nation (114% du PIB), tout en promettant des "ruptures sur le fond" en matière budgétaire.

Ce fidèle du président a entamé une série de consultations avec les partis politiques avant de composer un gouvernement et présenter son programme, en vue de boucler dès que possible un projet de budget pour 2026.

Il a également reçu quasiment tous les syndicats, qui n'en ont pas moins maintenu leur mot d'ordre, espérant une mobilisation similaire à celles de 2023 contre la réforme des retraites qui avaient régulièrement réuni un million de manifestants, dont un pic à 1,4 million.

- "Démonstration de force" -

"Aucune des mesures catastrophiques du musée des horreurs de M. Bayrou n'est enterrée !", s'est indignée lundi la leader de la CGT, Sophie Binet, après avoir rencontré le nouveau Premier ministre.

L'abandon par Sébastien Lecornu de la très controversée suppression de deux jours fériés voulue par François Bayrou est "une première victoire", qui "confirme que nous sommes en position de force", a-t-elle estimé.

Même la CFDT, syndicat réputé plus apte au compromis, est "plus que jamais motivée pour aller dans la rue", a fait savoir sa responsable Marylise Léon qui attend "des faits et des preuves" du nouveau chef de gouvernement, et notamment un "besoin d’efforts partagés".

Elle a apprécié à cet égard que le successeur de François Bayrou se dise selon elle conscient de la nécessité de "faire quelque chose" au sujet de la taxation des hauts patrimoines, revenue au cœur du débat.

"Le budget va se décider dans la rue", estime Mme Binet, qui évoque une "démonstration de force" et laisse entrevoir une mobilisation dans la durée.

Côté transports, le trafic sera "perturbé" voire "très perturbé" dans la capitale, ainsi que pour les trains interurbains.

Ce sera moins le cas pour les trains régionaux et les TGV. Un service proche de la normale est attendu dans les aéroports, le principal syndicat de contrôleurs aériens ayant reporté sa grève.

A l'école, un tiers des enseignants du premier degré (écoles maternelles et élémentaires) seront grévistes. L'ampleur du mouvement dans la fonction publique en générale reste encore à préciser.


Le PDG de CMA CGM assure «ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale» des médias qu'il possède

Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
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  • "Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media
  • Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique"

PARIS: Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC.

"Les journaux ou chaînes de télévision qu'on a rachetés ont une indépendance, ce sont des journaux qui sont nuancés, qui offrent le pluralisme. Je ne m'immisce pas dans la ligne éditoriale de ces journaux", a-t-il déclaré lors d'une audition devant la commission des affaires économiques de l'Assemblée.

Il répondait au député France insoumise René Pilato qui suggérait une "grande loi de séparation des entreprises et des médias".

"Si des investisseurs comme le groupe CMA CGM ne viennent pas, ces médias malheureusement tombent", a ajouté M. Saadé, rappelant que le secteur des médias est "très sinistré".

"Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media.

Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique".

"Dans un monde traversé par les +fake news+, je crois que les industriels ont un rôle à jouer pour défendre le pluralisme, l'indépendance et la qualité de l'information. Si nous voulons continuer à produire de l'information en France et résister à la domination des grandes plateformes, nous devons garantir des groupes de médias solides capables de créer des contenus de qualité et de les diffuser sur tous les supports", a-t-il défendu.

Outre BFMTV, RMC, et désormais Brut, CMA Media possède les journaux La Tribune et La Tribune Dimanche, La Provence et Corse Matin. Le groupe vient également de racheter la chaîne télé Chérie 25 (NRJ Group).

Vendredi, les Sociétés des journalistes (SDJ) de BFMTV, RMC et La Tribune avaient déploré qu'"une prise de position de Rodolphe Saadé sur l'actualité politique et sociale du pays (ait) été diffusée à l'antenne de BFMTV" jeudi.

Il s'agissait d'extraits écrits tirés d'une tribune publiée dans La Provence après le mouvement "Bloquons tout" du 10 septembre. "Les entreprises ne sont pas des adversaires, elles sont des partenaires de la Nation", y écrivait notamment M. Saadé.

 


Faure «sur sa faim» après son entretien avec Lecornu, resté «très flou» sur ses intentions

Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
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  • Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu
  • Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland

PARIS: Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions".

"Pour l'instant, nous sommes restés sur notre faim et nous verrons bien ce qu'il a à nous dire dans les prochains jours", a déclaré le premier secrétaire du PS, à l'issue de sa première rencontre à Matignon, qui a duré près de deux heures.

Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu à la veille d'une importante journée de mobilisation syndicale.

Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland.

A propos de la journée d'actions de jeudi, il a expliqué que ces manifestations seraient "aussi un élément du rapport de force que nous devons installer avec un exécutif qui, jusqu'ici, n'a pas fait la démonstration de sa capacité à comprendre la colère et même l'exaspération des Français".

Olivier Faure a également dit qu'il ne souhaitait pas "voir revenir sur la table une loi immigration", estimant que le Premier ministre macroniste était "tiraillé par une droite qui lorgne de plus en plus vers l'extrême droite" et avait  "beaucoup de problèmes dans son propre socle commun".

"Nous ne cherchons pas la censure, nous ne cherchons pas la dissolution, nous ne cherchons pas la destitution. Nous cherchons à ce que les Français soient entendus", a-t-il plaidé, en citant un sondage Ifop commandé par le parti montrant que les Français, quelles que soient leurs sensibilités, plébiscitent les mesures poussées par le PS.

"Il y a des mesures qui sont très majoritaires dans le pays, pour la taxe Zucman" sur les hauts patrimoines, "pour en finir" avec la réforme des retraites, pour "rendre du pouvoir d'achat", notamment à travers "un taux différentiel de CSG", a-t-il détaillé.