Facebook et les comptes «super propagateurs» de désinformation aux Etats-Unis

La diffusion des publicités politiques a été restreinte, et même interrompue. Les sources d'information jugées fiables ont été mises en avant. Les campagnes de manipulation orchestrées depuis l'étranger ont été déjouées.(AFP)
La diffusion des publicités politiques a été restreinte, et même interrompue. Les sources d'information jugées fiables ont été mises en avant. Les campagnes de manipulation orchestrées depuis l'étranger ont été déjouées.(AFP)
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Publié le Mercredi 25 novembre 2020

Facebook et les comptes «super propagateurs» de désinformation aux Etats-Unis

  • L'ONG Avaaz en a identifié 25, dont les pages de Donald Trump Jr et Eric Trump
  • Le géant des réseaux sociaux avait pourtant multiplié les mesures de prévention pour lutter contre les tentatives de discréditer le processus démocratique

SAN-FRANSISCO : L'élection américaine est passée, la transition avec le nouveau président timidement amorcée, mais sur Facebook le problème de la désinformation reste entier, notamment à cause des «super propagateurs», ces comptes qui disséminent à grande échelle des rumeurs infondées sur des fraudes électorales organisées par les démocrates.

L'ONG Avaaz en a identifié 25, dont les pages de Donald Trump Jr et Eric Trump (les fils du président), Kayleigh McEnany (l'attachée de presse de la Maison Blanche), les animateurs et commentateurs politiques ultraconservateurs Dan Bongino, Lou Dobbs, Rush Limbaugh, ainsi que des organisations pro-Trump, comme Turning Point USA.

Autant de personnalités soutenant dans sa remise en cause spectaculaire des résultats l'actuel locataire de la Maison blanche, qui n'a cessé de tweeter des messages accusant ses adversaires de lui avoir «volé» la victoire.

Depuis le scrutin du 3 novembre, des contenus trompeurs sur des soi-disant fraudes électorales, provenant de ces 25 comptes, ont été «aimés», commentés et partagés plus de 77 millions de fois, selon les conclusions préliminaires d'une étude d'Avaaz.

Sans compter le «super propagateur» en chef, Donald Trump lui-même, ou les pages liées à son ancien conseiller Steve Bannon, récemment supprimées par Facebook.

Le géant des réseaux sociaux avait pourtant multiplié les mesures de prévention pour lutter contre les tentatives de discréditer le processus démocratique. 

La diffusion des publicités politiques a été restreinte, et même interrompue. Les sources d'information jugées fiables ont été mises en avant. Les campagnes de manipulation orchestrées depuis l'étranger ont été déjouées.

Viralité

Facebook a ainsi évité la répétition des scandales de 2016, quand la présidentielle, qui a porté le milliardaire républicain au pouvoir, avait été marquée par des opérations de désinformation.

Mais ces tactiques n'ont pas suffi à endiguer le fléau des fausses rumeurs relayées sans même avoir recours à des fermes de trolls étrangères.

«La désinformation ne devient pas virale juste comme ça. Les super propagateurs de cette liste, avec un coup de main de l'algorithme de Facebook, sont au coeur de ce flot de mensonges qui définissent désormais le débat politique pour des millions de personnes dans le pays», s'est indigné Fadi Quran, directeur de campagne chez Avaaz.

«Facebook connaît la solution au problème - assainir son algorithme - mais refuse de l'appliquer et met donc la démocratie en danger», a-t-il jugé.

Twitter et Facebook ont adossé des avertissements à un très grand nombre de messages du président, signalant que ses propos étaient disputés.

En vain, estime Avaaz. Même quand les plateformes freinent ou empêchent la circulation des contenus trompeurs, il reste toujours les captures d'écran.

L'association cite par exemple un post du chef d'Etat assurant que le logiciel électoral Dominion avait «supprimé 2,7 millions de votes pour Trump». Des images de cette publication ont été partagées plus de 67.000 fois, sur quelques 1.800 pages et groupes, et ont ainsi reçu près de 244.000 interactions supplémentaires, selon des calculs réalisés avec CrowdTangle, un outil d'analyse du réseau.

 Liste blanche 

Les groupes participent aussi à cette «viralité distribuée», explique Avaaz.

Dans la foulée de l'élection, les groupes privés de fans de Trump et de ses théories sur les fraudes ont poussé comme des champignons. Non publics, ils sont difficiles à analyser, mais Avaaz estime qu'ils jouent un rôle clé dans la propagation des divers contenus mensongers.

Facebook a été largement critiqué pour sa réticence perçue à intervenir de façon plus sévère, y compris par certains de ses employés, d'après le média américain The Information.

Selon un article paru mardi, des voix se sont élevées en interne dès l'été 2019 pour demander que les personnalités politiques ne soient plus exemptées du programme de «fact-checking» (vérification des faits).

Les salariés s'appuyaient sur une étude interne montrant que les utilisateurs étaient plus susceptibles de croire à une fausse information si elle venait d'un homme ou d'une femme politique.

Mais selon le réseau social, l'étude en question a au contraire permis d'affiner son approche, qui consiste à signaler les publications des politiciens si elles contiennent des informations invalidées par des journalistes du programme.

L'AFP participe à un programme de vérification par des médias développé par Facebook, qui rémunère une soixantaine de médias à travers le monde, généralistes ou spécialisés, pour l'utilisation de leurs vérifications des faits sur sa plateforme et sur Instagram.

«Nous ne croyons pas qu'il soit approprié pour nous d'empêcher la parole des politiques d'être soumise à l'examen du public», a rappelé Joe Osborne, un porte-parole de Facebook.

Il n'a pas confirmé ou infirmé l'existence d'une liste d'environ 112.000 comptes appartenant à des responsables gouvernementaux et des candidats dont les publications ne doivent pas être vérifiées.

The Information assure que la plateforme a créé une telle liste en 2018, mais ne sait pas si elle est toujours d'actualité.


IA: Google investit 5 milliards de livres au Royaume-Uni avant la visite de Trump

Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
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  • Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat
  • Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres

LONDRES: Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays.

Cette somme financera "les dépenses d'investissement, de recherche et développement" de l'entreprise dans le pays, ce qui englobe Google DeepMind (le laboratoire d'IA du géant californien), a indiqué le groupe dans un communiqué.

Google ouvre mardi un centre de données à Waltham Cross, au nord de Londres, dans lequel il avait déjà annoncé l'an dernier injecter un milliard de dollars (850 millions d'euros). La somme annoncée mardi viendra aussi compléter ce financement, a précisé un porte-parole de l'entreprise à l'AFP.

Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat.

Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres.

Selon un responsable américain, qui s'exprimait auprès de journalistes, dont l'AFP, en amont de la visite, les annonces se porteront à "plus de dix milliards, peut-être des dizaines de milliards" de dollars.

Le gouvernement britannique avait déjà dévoilé dimanche plus d'un milliard de livres d'investissements de banques américaines dans le pays, là aussi en amont de la visite d'Etat du président Trump.

Et l'exécutif britannique a annoncé lundi que Londres et Washington allaient signer un accord pour accélérer les délais d'autorisation et de validation des projets nucléaires entre les deux pays.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités.

Le partenariat avec Washington, baptisé "Atlantic Partnership for Advanced Nuclear Energy", doit lui aussi être formellement signé lors de la visite d'État de Donald Trump.

 


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".


La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, alerte le Secours populaire

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
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  • "La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire
  • "La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg

PARIS: La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, touchant tous les aspects de la vie des plus fragiles, alerte jeudi le Secours Populaire, qui publie un baromètre témoignant de cette situation jugée préoccupante.

"La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire.

L'association publie un baromètre qui indique qu'un tiers des Français (31%) rencontrent des difficultés financières pour se procurer une alimentation saine permettant de faire trois repas par jour. De même 39% ont du mal à payer leurs dépenses d'électricité et 49% à partir en vacances au moins une fois par an, selon ce sondage réalisé par l'Institut Ipsos, auprès d'un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population nationale âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

"La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg.

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier.

Malgré un "léger mieux" constaté sur certains indicateurs lié au "ralentissement de l'inflation", ce baromètre révèle "une situation sociale toujours très préoccupante", selon le Secours populaire.

En début de semaine, la déléguée interministérielle à la prévention et la lutte contre la pauvreté, Anne Rubinstein, a évoqué des "difficultés" rencontrées par l'Etat pour résorber un taux de pauvreté qui a atteint un niveau record en 2023 en France métropolitaine.

Face à cette situation, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) a appelé mardi à une "mobilisation collective" pour "débloquer la lutte contre la précarité".

Au niveau européen, 28% de la population déclare se trouver en situation précaire, également selon ce baromètre du Secours Populaire, qui s'appuie aussi sur des échantillons de 1.000 personnes représentatifs de neuf autres pays (Allemagne, Grèce, Italie, Pologne, Royaume-Uni, Moldavie, Portugal, Roumanie, Serbie).

La part des personnes se considérant comme précaires demeure à un niveau "très alarmant" en Grèce (46%) et en Moldavie (45%), pointe le baromètre.

En 2024, le Secours populaire a soutenu 3,7 millions de personnes en France. L'association fournit notamment de l'aide alimentaire et organise des activités pour différents publics pour rompre l'isolement.