Kurdes tués à Paris: le discernement du tueur «altéré» selon une expertise psychiatrique

Les cercueils des trois personnes tuées rue d'Enghien à Paris lors d'une cérémonie à Villiers-le-Bel le 3 janvier 2023. (Photo, AFP)
Les cercueils des trois personnes tuées rue d'Enghien à Paris lors d'une cérémonie à Villiers-le-Bel le 3 janvier 2023. (Photo, AFP)
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Publié le Jeudi 02 mars 2023

Kurdes tués à Paris: le discernement du tueur «altéré» selon une expertise psychiatrique

  • Les deux médecins psychiatres qui l'ont examiné le 4 janvier considèrent que ces troubles de la personnalité justifient «dans une certaine mesure, que l'on considère son discernement comme ayant été altéré»
  • Le 23 décembre, William Malet, conducteur de train retraité de 69 ans, avait ouvert le feu près du centre culturel kurde rue d'Enghien (Xe), faisant trois morts et trois blessés

PARIS: Une expertise psychiatrique a conclu que "dans une certaine mesure" le discernement de William Malet était altéré lorsqu'il a tué par balles trois Kurdes en décembre à Paris, et que le sexagénaire était atteint de troubles de la personnalité. 

"Son examen psychiatrique ne met pas en évidence une maladie mentale évolutive ou constituée" mais "révèle des troubles de la personnalités dans un registre de paranoïa de caractère", selon les conclusions d'une expertise psychiatrique révélées jeudi par Le Parisien et consultées par l'AFP. 

Les deux médecins psychiatres qui l'ont examiné le 4 janvier considèrent que ces troubles de la personnalité justifient "dans une certaine mesure, que l'on considère son discernement comme ayant été altéré". 

"William Malet n'était pas atteint au moment des faits d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes", notent-ils toutefois. 

Le 23 décembre, William Malet, conducteur de train retraité de 69 ans, avait ouvert le feu près du centre culturel kurde rue d'Enghien (Xe), faisant trois morts et trois blessés. 

Mis en examen pour assassinats et tentatives d'assassinats à caractère raciste, il a été écroué. 

En garde à vue, il a reconnu sa haine "pathologique" des étrangers. Il était sorti de prison le 12 décembre après un an de détention provisoire pour avoir blessé avec un sabre des migrants dans un campement parisien en décembre 2021. 

Au moment des faits rue d'Enghien, il était dans "une impasse situationnelle, un vécu d'échec existentiel, après une bascule lors du cambriolage de son pavillon" en 2016, selon les conclusions de l'expertise psychiatrique remise aux juges d'instruction le 23 janvier. 

William Malet a été condamné à douze mois d'emprisonnement en juin 2022 pour violences avec armes pour avoir blessé ses cambrioleurs. Il a fait appel. 

"Se sentant démuni, impuissant, désarmé, il a conçu l'idée raciste d'une tuerie de masse suivie d'un suicide comme solution restauratrice, vengeresse, révélatrice à la face du monde de sa propre souffrance, dans un massacre perpétré contre ceux qui, selon lui, l'ont menacé et qui, dans sa vision, menacent le monde", écrivent les psychiatres. 

« Loup solitaire » 

Lorsqu'ils l'ont rencontré à la maison d'arrêt de la Santé où il est incarcéré, à Paris, "William Malet ne présentait pas d'état dangereux" nécessitant une hospitalisation en milieu psychiatrique. 

Les psychiatres considèrent que "sa dangerosité criminologique découle de sa détermination, de l'intensité de sa haine raciste vengeresse comme issue à son vécu de marasme existentiel". 

Selon Le Parisien, une expertise psychiatrique réalisée pour l'affaire de l'attaque au sabre n'avait retenu "aucune anomalie mentale". 

Contacté, l'avocat de M. Malet n'a pas donné suite. 

"On a essayé de nous dépeindre un individu déprimé qui n'avait pas toutes ses facultés" mais "il est responsable de ses actes" et il est pénalement responsable, a souligné Berivan Firat, porte-parole du Conseil démocratique kurde en France (CDK-F), partie civile, lors d'une conférence de presse jeudi. 

Me Christian Charrière-Bournazel, l'un des avocats du CDK-F, demande aux trois juges d'instruction d'explorer toutes les pistes "pour savoir de quelle manière il aurait pu être mandaté ou influencé de manière très décisive par des agents du gouvernement actuel turc qui n'a qu'une obsession, c'est de réduire les Kurdes". 

"Nous avons le sentiment qu'une seule piste est actuellement étudiée", celle "d'un loup solitaire qui commet une attaque isolée", a regretté Agit Polat, autre porte-parole du CDK-F. 

Le jour des faits, William Malet "vient précisément cibler le centre kurde, pas le restaurant kurde d'en face ou le salon de coiffeur kurde" à proximité, a rappelé M. Polat. 

Dans l'expertise psychiatrique, "il dit qu'il n'aime pas les Kurdes et le PKK", le Parti des travailleurs du Kurdistan qui "commettrait des actions en Turquie", a relaté le porte-parole qui y voit "une motivation politique" et demande à nouveau que le parquet antiterroriste se saisisse des investigations. 

"Son profil est inquiétant": il manie des armes, est détenteur d'un brevet de pilote, parle le Russe et l'Hébreu, a souligné M. Polat, "il va falloir nous apporter des explications plus concrètes". 


Le Premier ministre français va marquer ses 100 jours par un discours sur l'autorité

Pour son centième jour à Matignon, le Premier ministre français Gabriel Attal prononcera un "discours sur l'autorité au cœur de la République" jeudi à Viry-Châtillon. (AFP).
Pour son centième jour à Matignon, le Premier ministre français Gabriel Attal prononcera un "discours sur l'autorité au cœur de la République" jeudi à Viry-Châtillon. (AFP).
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  • M. Attal, qui sera accompagné notamment des ministres de l'Education Nicole Belloubet et de la Justice Éric Dupond-Moretti échangera auparavant avec les équipes et les bénéficiaires de la Maison des jeunes et de la culture de Viry, selon Matignon
  • Un peu plus de trois mois après sa nomination, l'ancien ministre de l'Éducation entend s'inscrire dans le droit fil de sa déclaration de politique générale

PARIS: Pour son centième jour à Matignon, le Premier ministre français Gabriel Attal prononcera un "discours sur l'autorité au cœur de la République" jeudi à Viry-Châtillon, dans la banlieue sud de Paris, une ville marquée par la mort d'un adolescent de 15 ans, passé à tabac près de son collège.

Dans cette affaire qui a suscité une vive émotion en France, quatre jeunes hommes, trois mineurs et un majeur, ont été mis en examen pour assassinat. Ils ont tous été placés en détention provisoire.

M. Attal, qui sera accompagné notamment des ministres de l'Education Nicole Belloubet et de la Justice Éric Dupond-Moretti échangera auparavant avec les équipes et les bénéficiaires de la Maison des jeunes et de la culture de Viry, selon Matignon.

Un peu plus de trois mois après sa nomination, l'ancien ministre de l'Éducation entend s'inscrire dans le droit fil de sa déclaration de politique générale.

Il était alors revenu sur les émeutes urbaines qui avaient embrasé le pays au début de l'été 2023 après la mort d'un jeune homme, tué par un policier en région parisienne lors d'un contrôle routier.

Alors que "les violences de juillet dernier ont profondément marqué notre pays", avec parmi les émeutiers "des jeunes, très jeunes parfois, qui semblaient avoir déjà coupé les ponts avec notre société", "nous devons faire respecter l'autorité partout: dans les classes, dans les familles, dans les rues", expliquait-il le 30 janvier devant l'Assemblée nationale.

Avant de lancer son mot d'ordre "tu casses, tu répares, tu salis, tu nettoies, tu défies l'autorité, on t'apprend à la respecter".

En Conseil des ministres mercredi, Emmanuel Macron a demandé à son gouvernement de se lancer dans une grande concertation pour trouver des solutions au "surgissement de l'ultraviolence", en particulier parmi les plus jeunes. Charge au Premier ministre de lancer cette concertation, avec les groupes parlementaires et différents acteurs, avec l'objectif d'aboutir à un projet de loi avant l'été.

Décisions « difficiles et radicales »

Jeudi soir, le Premier ministre sera ensuite longuement interviewé sur la chaîne de télévision BFMTV, toujours pour marquer ses 100 jours à la tête du gouvernement.

Comme il l'a expliqué lors de son récent déplacement au Canada, M. Attal devrait rappeler sa méthode: faire preuve de "lucidité" et même "reconnaître" ce qui a fonctionné ou pas depuis 2017 puis "prendre des décisions" potentiellement "difficiles et radicales" et "surtout les mettre en œuvre".

Appelé à succéder à Élisabeth Borne le 9 janvier, le plus jeune chef de gouvernement de la Ve République a déjà connu plusieurs épreuves, à commencer par la crise des agriculteurs, pas encore totalement résolue en dépit de concessions inédites du gouvernement qui ont suscité en retour la colère des organisations écologistes.

La dégradation de la situation budgétaire, avec une première salve de dix milliards d'euros d'économies et un exercice à renouveler avant l'été, promet également de tendre le débat politique, y compris au sein de la majorité. Quant à la droite, elle menace le gouvernement d'une motion de censure sur ce dossier.

Gabriel Attal entend néanmoins poursuivre ses projets de réforme, tout à sa priorité accordée au "travail" et aux "classes moyennes", en projetant notamment de durcir à nouveau les conditions d'indemnisation du chômage.

Dans ce contexte, et à moins de deux mois des élections européennes du 9 juin, la liste du camp présidentiel conduite par Valérie Hayer continue d'être distancée dans les sondages par l'extrême droite. Elle voit même son avance se réduire fortement avec la liste PS-Place Publique conduite par Raphaël Glucksmann.

Gabriel Attal, présenté dans son camp comme une "arme anti-Bardella" doit-il s'impliquer davantage ? Difficile quand l'idée reste de faire "une campagne européenne, pas un référendum pour ou contre la politique du gouvernement", expliquait récemment une source au sein de l'exécutif.


France: couvre-feu pour les mineurs à Pointe-à-Pitre en Guadeloupe en raison de la délinquance

Ces derniers mois, la sous-préfecture de la Guadeloupe - 14.500 habitants en 2020 - a largement nourri la chronique des faits divers. En mars, une commerçante y a été tuée lors d'un braquage. Puis des touristes en croisière ont été blessés à l'arme blanche par une femme atteinte de troubles psychiatriques. (AFP).
Ces derniers mois, la sous-préfecture de la Guadeloupe - 14.500 habitants en 2020 - a largement nourri la chronique des faits divers. En mars, une commerçante y a été tuée lors d'un braquage. Puis des touristes en croisière ont été blessés à l'arme blanche par une femme atteinte de troubles psychiatriques. (AFP).
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  • Le ministre français de l'Intérieur a ordonné mercredi soir l'instauration pendant deux mois d'un couvre-feu pour les mineurs de moins de 18 ans à Point-à-Pitre, en Guadeloupe
  • Le ministre a précisé que cette mesure entrera en application "à partir du début de semaine prochaine" et sera effectif à partir de 20H00 locales

POINTE-A-PITRE: Le ministre français de l'Intérieur a ordonné mercredi soir l'instauration pendant deux mois d'un couvre-feu pour les mineurs de moins de 18 ans à Point-à-Pitre, en Guadeloupe, afin de lutter contre une flambée de la délinquance.

"Nous sommes très marqués par le fait que les mineurs sont extrêmement nombreux dans la délinquance malheureusement, en Guadeloupe en général et à Pointe-à-Pitre en particulier", a déclaré Gérald Darmanin.

Le ministre a précisé que cette mesure entrera en application "à partir du début de semaine prochaine" et sera effectif à partir de 20H00 locales.

M. Darmanin est arrivé mercredi soir pour une visite de deux jours dans ce territoire français des Antilles, où se déroule une opération dite "Place nette" de renforcement de la séurité.

Il a fait cette annonce après une réunion avec la ministre déléguée chargée des Outre-mer Marie Guévenoux, le Préfet et le maire de Point-à-Pitre.

Ces derniers mois, la sous-préfecture de la Guadeloupe - 14.500 habitants en 2020 - a largement nourri la chronique des faits divers. En mars, une commerçante y a été tuée lors d'un braquage. Puis des touristes en croisière ont été blessés à l'arme blanche par une femme atteinte de troubles psychiatriques.


Le plus grand squat de France évacué, des migrants déboussolés

Agrippés à leurs documents administratifs soigneusement mis sous pochette plastique, les migrants ont à peine quelques minutes pour expliquer leur situation, dans un français parfois approximatif ou un anglais balbutiant. (AFP)
Agrippés à leurs documents administratifs soigneusement mis sous pochette plastique, les migrants ont à peine quelques minutes pour expliquer leur situation, dans un français parfois approximatif ou un anglais balbutiant. (AFP)
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  • La plupart, demandeurs d'asile, sont fortement incités à rejoindre des «sas» --des structures d'accueil provisoires-- à Bordeaux (sud-ouest) et en Val de Loire (centre)
  • Depuis plusieurs mois, les associations dénoncent l'évacuation des squats de la région parisienne et campements de rue à un rythme plus soutenu

VITRY-SUR-SEINE: "Vous savez, en France, il n'y a pas que Paris. Bordeaux, c'est bien, il fait plus chaud qu'ici!": une employée de l'Office de l'immigration tente de convaincre un migrant évacué du plus grand squat de France, près de Paris, de partir dans le sud-ouest du pays. Sans grand succès.

Dans ce squat de Vitry-sur-Seine (sud de la capitale), une entreprise désaffectée occupée depuis presque trois ans, vivaient jusqu'à peu plusieurs centaines de migrants --jusqu'à 450--. Préparés depuis plusieurs jours par les associations à une évacuation imminente, les 300 personnes toujours présentes ont assisté mercredi, dans le calme, à l'arrivée des forces de l'ordre.

Des hommes seuls en majorité, des femmes et quelques enfants en bas-âge, en situation régulière en France pour beaucoup, sont sortis de cette ancienne entreprise de transport. En portant sacs et valise qui contiennent toutes leurs affaires d'une vie d'errance.

Dans le froid, visage fermé et inquiet, ils sont regroupés dans la cour. Derrière des tables, des personnels des préfectures et de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii) les orientent et proposent des relogements provisoires.

Agrippés à leurs documents administratifs soigneusement mis sous pochette plastique, les migrants ont à peine quelques minutes pour expliquer leur situation, dans un français parfois approximatif ou un anglais balbutiant.

Sous la surveillance des forces de l'ordre, les files d'attente s'étirent devant ces bureaux à ciel ouvert. A l'exception de celui dédié aux départs en province.

La plupart, demandeurs d'asile, sont fortement incités à rejoindre des "sas" --des structures d'accueil provisoires-- à Bordeaux (sud-ouest) et en Val de Loire (centre). Les cars en partance pour ces destinations attendent devant les grilles mais peinent à se remplir.

«Je veux rester ici»

"Vous voulez aller en région? Il y a plus de place là-bas, c'est dynamique!", explique une employée de l'Ofii à un jeune migrant à l'air dubitatif qui comprend difficilement la proposition.

"Il n'y pas que Paris comme ville en France", insiste-t-elle. Peine perdue, son interlocuteur explique suivre une formation en Ile-de-France. Il est orienté vers la table voisine pour trouver une place dans un "sas" plus proche de Paris.

Abakar, lui aussi réfugié soudanais, 29 ans, était à Nantes (ouest). Il a rejoint la région parisienne pour suivre une formation en logistique. Le jeune homme dit avoir décroché une promesse d'embauche dans un supermarché: "Je veux rester ici, je ne peux pas toujours partir ailleurs".

Depuis plusieurs mois, les associations dénoncent l'évacuation des squats de la région parisienne et campements de rue à un rythme plus soutenu, selon eux, pour faire place nette avant les Jeux olympiques et ses milliers de touristes.

"Il y a des places dans des structures d'accueil près de Paris, mais, clairement, la volonté est de les éloigner de la capitale. Surtout avant les JO", assure Paul Alauzy, représentant de l'ONG Médecins du monde.

Merci Daniel, demandeuse d'asile soudanaise, a confié ses enfants à une association du Val-de-Marne, au sud-est de la capitale. A l'intérieur du squat, explique-t-elle, "il y avait trop de violence". Mais elle ne veut pas quitter l'Ile-de-France. "J'ai peur de ne pas les revoir". Elle est finalement orientée dans un hôtel à Boissy-Saint-Léger, en région parisienne, pour quelques jours.

Assise sur sa valise, Ishia, enceinte de cinq mois, semble perdue. Comme son mari, Gamaral, rencontré il y a quelques années lors d'un long parcours d'exil, elle a fui le Soudan. Ils sont arrivés en France il y a trois semaines.

Ishia est envoyée dans un hôpital. Gamaral, lui, ne "sait pas quoi espérer".