Chine: Xi Jinping obtient un troisième mandat historique de président

Xi Jinping a obtenu vendredi un troisième mandat historique de président en Chine, après un vote à l'unanimité du Parlement, l'aboutissement d'une ascension qui l'a vu devenir le dirigeant le plus puissant du pays depuis des générations. (AFP)
Xi Jinping a obtenu vendredi un troisième mandat historique de président en Chine, après un vote à l'unanimité du Parlement, l'aboutissement d'une ascension qui l'a vu devenir le dirigeant le plus puissant du pays depuis des générations. (AFP)
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Publié le Vendredi 10 mars 2023

Chine: Xi Jinping obtient un troisième mandat historique de président

  • Le Parlement étant, dans la pratique, inféodé au Parti communiste (PCC) au pouvoir, l'issue du scrutin ne faisait aucun doute
  • Le dirigeant, âgé de 69 ans, avait déjà obtenu en octobre une prolongation de cinq ans au sommet du PCC et de la commission militaire du Parti, les deux postes de pouvoir les plus importants en Chine

PEKIN: Xi Jinping a obtenu vendredi un troisième mandat historique de président en Chine, après un vote à l'unanimité du Parlement, l'aboutissement d'une ascension qui l'a vu devenir le dirigeant le plus puissant du pays depuis des générations.

Le résultat du vote des députés, sans appel (2.952 votes pour, zéro contre, zéro abstention), a été accueilli par un tonnerre d'applaudissements des parlementaires réunis à Pékin, dans l'immense Palais du peuple bordant la place Tiananmen.

Le Parlement étant, dans la pratique, inféodé au Parti communiste (PCC) au pouvoir, l'issue du scrutin ne faisait aucun doute.

Le dirigeant, âgé de 69 ans, avait déjà obtenu en octobre une prolongation de cinq ans au sommet du PCC et de la commission militaire du Parti, les deux postes de pouvoir les plus importants en Chine.

Seul candidat, Xi Jinping a été reconduit pour la même durée comme chef de l'Etat.

Dès l'annonce du résultat, trois militaires en uniforme d'apparat ont descendu au pas de l'oie les escaliers de la monumentale salle où sont réunis les députés, avant de déposer un exemplaire de la Constitution sur un pupitre.

"Je jure d'être (...) loyal à la patrie et au peuple (...) et de travailler dur à l'édification d'un grand pays socialiste moderne qui soit prospère, fort, démocratique, plus civilisé et harmonieux", a promis Xi Jinping, poing droit levé et main gauche sur le document.

Les derniers mois ont toutefois été compliqués pour lui, avec de grandes manifestations fin novembre contre sa politique "zéro Covid" et une importante vague de décès qui a suivi l'abandon en décembre de cette stratégie sanitaire.

Qui est le président chinois Xi Jinping ?

A l'arrivée de Xi Jinping au pouvoir fin 2012, nombre d'observateurs prédisaient qu'il serait le plus progressiste des dirigeants communistes de l'histoire de Chine, en raison de son profil discret et de son passé familial.

Dix ans plus tard, ces prédictions se sont avérées erronées, ce qui prouve à quel point l'homme de 69 ans, qui vient d'obtenir vendredi un inédit troisième mandat de chef de l'Etat, était alors méconnu.

Dirigeant le plus puissant depuis le fondateur du régime Mao Tsé-toung, Xi Jinping s'est patiemment attelé à la consolidation de son pouvoir, bâillonnant toute dissidence, son désir de contrôle s'immisçant désormais dans nombre de sujets socio-économiques.

Séjour forcé à la campagne au contact de la rude vie paysanne, lente montée des échelons, travailleur acharné... Son parcours est inlassablement loué par l'historiographie officielle du Parti communiste chinois (PCC).

"Je conteste l'idée reçue selon laquelle Xi Jinping se bat pour le pouvoir dans le seul intérêt du pouvoir", déclare à l'AFP Alfred L. Chan, auteur d'un livre sur la vie du dirigeant chinois.

"Je dirais qu'il cherche le pouvoir (et en use) comme d'un instrument (...) pour réaliser sa vision" pour son pays, souligne-t-il.

Un autre biographe, Adrian Geiges, ne pense pas que Xi Jinping soit motivé par un désir d'enrichissement.

"Il a vraiment une vision de la Chine, il veut que la Chine devienne le pays le plus puissant du monde", assure-t-il à l'AFP.

«Mûrir plus tôt»

Au coeur de cette vision se trouve le Parti communiste, avec ce que Xi Jinping appelle le "rêve chinois" ou la "grande renaissance de la nation chinoise", victime pendant un siècle et demi d'invasions étrangères puis de troubles politiques intérieurs.

Son enfance ne laissait pas présager d'une telle ascension au sein du PCC.

Son père Xi Zhongxun, un héros révolutionnaire devenu vice-Premier ministre, a été pris pour cible par Mao Tsé-toung pendant la Révolution culturelle (1966-1976).

"Xi Jinping et sa famille ont été traumatisés", selon M. Chan.

L'adolescent perd son statut du jour au lendemain et l'une de ses demi-soeurs se serait suicidée à cause de ces persécutions. Il a lui-même déclaré avoir été ostracisé par ses camarades de classe.

A tout juste 15 ans, Xi Jinping est envoyé comme beaucoup de jeunes urbains de son âge à la campagne, participant aux durs travaux agricoles et dormant dans une habitation creusée à flanc de colline.

"L'intensité du travail m'a choqué", a-t-il déclaré plus tard.

Il a aussi raconté au journal américain Washington Post en 1992 les séances publiques de critiques au cours desquelles il devait dénoncer son père durant la Révolution culturelle.

"Même si vous ne comprenez pas (ce qui se passe), vous êtes forcés de comprendre", confiait-il alors. "Cela vous fait mûrir plus tôt".

Femme soprano 

Pour le biographe Alfred L. Chan, cette jeunesse à la dure lui a donné une certaine "solidité" mentale.

Aujourd'hui, la grotte dans laquelle il a séjourné à la campagne est devenue une attraction touristique, qui sert également à la propagande pour souligner sa préoccupation pour les plus pauvres.

Lors d'une visite de l'AFP en 2016, un habitant avait dressé le portrait d'un Xi Jinping quasi légendaire, lisant des livres lors de ses pauses entre les travaux agricoles.

Avant d'être acceptée, sa demande d'adhésion au PCC a été rejetée plusieurs fois, à cause de l'héritage paternel.

D'abord chef du PCC dans un village en 1974, Xi Jinping a commencé à un niveau très bas, gravissant progressivement les échelons.

Il devient gouverneur de la province du Fujian en 1999, puis chef du Parti pour le Zhejiang en 2002 et enfin pour Shanghai en 2007.

Son père a été réhabilité à la fin des années 1970 après la mort de Mao Tsé-toung, ce qui a très probablement facilité l'ascension politique de Xi Jinping.

Après avoir divorcé de sa première femme, il a épousé la soprano superstar Peng Liyuan en 1987, à une époque où elle était beaucoup plus connue que lui.

«Grand choc»

Cai Xia, une ancienne cadre du PCC qui vit en exil aux Etats-Unis, estime qu'"il souffre d'un complexe d'infériorité, sachant qu'il est peu éduqué par rapport aux autres hauts dirigeants du PCC".

Xi Jinping s'est par contre toujours considéré "comme un héritier de la révolution", selon M. Chan.

En 2007, il a été nommé au comité permanent du Bureau politique, la plus haute instance décisionnelle du parti.

Lorsqu'il a remplacé l'ex-dirigeant Hu Jintao cinq ans plus tard, rien ne laissait présager de ses actions en matière politique: réduction de la marge de manoeuvre des médias, baisse de la liberté académique dans les universités, mise au pas de l'opposition à Hong Kong...

Aidé par un discours patriotique voire parfois nationaliste, Xi Jinping a su tirer parti de ce récit d'une Chine ascendante, qui revient à sa juste place dans la communauté internationale, pour asseoir sa légitimité auprès de la population.

"La chute de l'Union soviétique et du socialisme en Europe de l'Est a été un grand choc" pour lui, estime M. Geiges, ajoutant que M. Xi attribue cet effondrement à l'ouverture politique.

"Il a donc décidé que cela ne devait pas arriver à la Chine (...) C'est pourquoi il veut une direction forte du Parti communiste, avec un dirigeant fort."

Félicitations de Poutine 

Le président russe Vladimir Poutine, dont le pays est un proche partenaire économique et diplomatique de la Chine, a rapidement adressé à Xi Jinping ses "sincères félicitations".

"La Russie apprécie grandement votre contribution personnelle au renforcement des relations (...) entre nos pays", a indiqué M. Poutine dans un message publié par le Kremlin.

La réélection vendredi de Xi Jinping couronne une ascension politique remarquable durant laquelle il est passé de responsable politique peu connu du grand public à dirigeant chinois le plus puissant depuis des décennies.

Auteur d'une biographie sur le président chinois, l'écrivain et journaliste suisse Adrian Geiges estime toutefois que l'enrichissement personnel n'est pas sa motivation première.

"Il a vraiment une vision pour la Chine, il veut que la Chine devienne le pays le plus puissant du monde", déclare-t-il.

Pendant des décennies, la République populaire de Chine, échaudée par le chaos politique et le culte de la personnalité durant le règne (1949-1976) de son dirigeant et fondateur Mao Tsé-toung, avait promu une gouvernance plus collégiale au sommet du pouvoir.

En vertu de ce modèle, les prédécesseurs de Xi Jinping, à savoir Jiang Zemin puis Hu Jintao, avaient chacun cédé leur place de président après dix années à ce poste.

Mais M. Xi a mis fin à cette règle en faisant abolir en 2018 dans la Constitution la limite de deux mandats présidentiels, tout en laissant se développer autour de lui un quasi-culte de la personnalité.

Chine: un 3e mandat pour Xi Jinping, quatre principaux défis

Xi Jinping, qui a obtenu vendredi un troisième mandat de président chinois jusqu'en 2028, fera face à quatre principaux défis: l'économie, les tensions avec les Etats-Unis, la question de Taïwan et les droits humains.

Economie au ralenti 

Le ralentissement économique de la Chine sera certainement un sujet central de son nouveau mandat de cinq ans.

Mais sa décision de s'entourer exclusivement de fidèles fait craindre qu'il ne privilégie l'idéologie au détriment de la croissance.

Vendredi à la mi-journée, la Bourse de Hong Kong chutait d'ailleurs de 2,46%.

La deuxième économie mondiale, longtemps habituée à des rythmes de croissance élevés, a vu son PIB progresser de seulement 3% en 2022, sous l'effet des restrictions sanitaires et de la crise immobilière.

Pour 2023, le gouvernement vise "environ 5%", un des objectifs les plus faibles depuis des décennies.

Et le profil de ceux que Xi Jinping a choisis aux postes les plus élevés du gouvernement laisse penser que l'ère des réformes libérales est révolue et que désormais, c'est essentiellement l'Etat qui mènera la danse.

S'il espérait faire de la consommation le nouveau moteur de l'économie, force est de constater que celle-ci n'est pas encore au rendez-vous. Quant à son concept de "prospérité commune", censé réduire les écarts de richesse dans la population, M. Xi semble plus discret sur le sujet ces derniers mois.

Tensions avec Washington 

Les relations bilatérales ont viré à l'aigre ces dernières années, sur fond de compétition technologique et commerciale, droits humains ou encore bataille sur l'origine du Covid-19.

Une visite prévue en février par le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken a été reportée in extremis après que l'administration Biden a abattu un ballon chinois qu'elle accusait d'espionnage sur son territoire. Des affirmations démenties par la Chine.

Depuis, le ton n'a cessé de monter sur le front diplomatique. Mardi, le ministre des Affaires étrangères Qin Gang a prévenu du risque de "conflit et confrontation" si Washington ne change pas de cap.

Xi Jinping lui-même a émis une rare critique directe des autorités américaines, en leur reprochant nommément d'entraîner les pays occidentaux dans "une politique d'endiguement, d'encerclement et de répression contre la Chine".

La question de Taïwan 

Fort de son nouveau mandat, Xi Jinping pourrait peut-être décider que le moment est venu pour Pékin de s'emparer de l'île, administrée par un gouvernement démocratique et que la Chine revendique comme faisant partie de son territoire.

Le sujet est devenu de plus en plus sensible ces dernières années, comme l'a illustré la visite en août dernier à Taïwan de Nancy Pelosi, alors présidente de la Chambre américaine des représentants.

Furieuse, la Chine avait répliqué en lançant les plus importantes manoeuvres militaires de son histoire autour de l'île.

En octobre, le Parti communiste a inclus pour la première fois dans sa constitution son opposition à l'indépendance du territoire insulaire.

Toute invasion chinoise de Taïwan aurait un effet dévastateur sur les chaînes mondiales d'approvisionnement, compte tenu du rôle crucial de l'île dans la production de semi-conducteurs, composants indispensables à une multitude d'appareils électroniques.

Elle provoquerait aussi l'indignation des Occidentaux, isolerait la Chine et rapprocherait plus que jamais Pékin et Washington d'une confrontation armée directe.

Pékin a annoncé dimanche une hausse de son budget de la Défense de 7,2%, son rythme le plus élevé depuis 2019.

Cette hausse "soutenue, d'année en année" du budget militaire fait "sonner creux" l'affirmation chinoise selon laquelle la modernisation de son armée ne menace pas ses voisins, estime Drew Thompson, chercheur invité à l'Ecole de politiques publiques Lee Kuan Yew de l'université nationale de Singapour.

Les dépenses militaires chinoises restent cependant aux alentours des 2% du PIB, un taux inférieur à celui des Etats-Unis.

Droits humains 

Depuis l'arrivée au pouvoir de Xi Jinping fin 2012, la société civile a quasiment disparu, l'opposition a été étouffée et des dizaines de militants sont en prison.

Au Xinjiang (nord-ouest), Pékin est accusé d'avoir interné dans des "camps" au moins un million de personnes, principalement de la minorité musulmane ouïghoure, en réponse à une vague d'attentats sanglants ayant frappé la région.

Certaines études occidentales évoquent un "génocide" en raison de cas de stérilisations et d'avortements présentés comme "forcés". La Chine réfute toutes ces allégations.

Un rapport de l'ONU évoque la possibilité de "crimes contre l'humanité" dans la région mais ne reprend pas le terme de "génocide", utilisé notamment par les Etats-Unis.

La situation en matière de droits humains a peu de chance de s'améliorer durant le troisième mandat de Xi Jinping, dont le pouvoir semble désormais inébranlable et insensible aux pressions internationales.

«Plus sûre d'elle»

Xi Jinping devient donc le dirigeant suprême à rester le plus longtemps au pouvoir dans l'histoire récente de la Chine.

Septuagénaire à l'issue de ce nouveau mandat, il pourrait même potentiellement prolonger pour un nouveau quinquennat si aucun dauphin crédible ne s'affirme dans l'intervalle.

Mais ses défis restent nombreux à la tête de la deuxième économie mondiale, entre le ralentissement de la croissance, la chute de la natalité ou encore l'image internationale de la Chine qui s'est fortement dégradée ces dernières années.

Les relations avec les États-Unis sont, elles, au plus bas, les contentieux étant nombreux, de Taïwan au traitement des musulmans ouïghours, en passant par la rivalité dans les technologies.

Xi Jinping a encore condamné cette semaine la "politique d'endiguement, d'encerclement et de répression contre la Chine" mise en place par "des pays occidentaux menés par les États-Unis".

"Nous allons voir une Chine plus sûre d'elle sur la scène internationale, qui va affirmer son discours de manière plus prononcée" tout en tentant "de réduire sa dépendance vis-à-vis du reste du monde", prédit Steve Tsang, de l'institut SOAS China à l'Université de Londres.

Le Parlement a également procédé vendredi à des élections formelles pour d'autres postes institutionnels.

Jusqu'ici vice-Premier ministre, Han Zheng (68 ans) a été élu vice-président en remplacement de Wang Qishan (74 ans).

La présidence du comité permanent du Parlement revient à Zhao Leji.


Washington cible l'Autorité palestinienne, en plein débat sur la reconnaissance d'un Etat de Palestine

Le président de l'Autorité palestinienne Mahmud Abbas. (File/AFP)
Le président de l'Autorité palestinienne Mahmud Abbas. (File/AFP)
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  • Les Etats-Unis ont annoncé jeudi des sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), en pleine offensive en faveur d'un Etat de Palestine

WASHINGTON: Les Etats-Unis ont annoncé jeudi des sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), en pleine offensive en faveur d'un Etat de Palestine.

L'annonce des sanctions américaines survient en effet au moment où de nombreux Etats, dont la France et le Canada, ont promis de reconnaître un Etat de Palestine en marge de l'Assemblée générale de l'ONU en septembre, provoquant la colère d'Israël et des Etats-Unis qui parlent d'une "récompense" faite au Hamas dans la bande de Gaza.

La France et l'Arabie saoudite ont co-présidé lundi et mardi à l'ONU une conférence internationale, plaidant ainsi pour la solution à deux Etats, israélien et palestinien, seul chemin pour parvenir à la paix au Proche-Orient.

Washington, qui rejette toute reconnaissance unilatérale d'un Etat palestinien, a décrit la conférence comme étant une "insulte" faite aux victimes de l'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023.

Dans un communiqué jeudi, le département d'Etat américain a fait part de sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'OLP, sans les identifier, accusés notamment d'"internationaliser le conflit avec Israël".

Washington reproche aux deux institutions de "soutenir des actions au sein d'organisations internationales qui sapent et contredisent les engagements antérieurs" notamment à travers la Cour internationale de justice (CIJ) et la Cour pénale internationale (CPI).

Washington avait sanctionné en juin quatre magistrates de la CPI, estimant que leurs procédures visant l'exécutif israélien étaient "illégitimes" et "politisées".

Washington, principal allié d'Israël, accuse aussi l'OLP et l'Autorité palestinienne de "continuer à soutenir le terrorisme, y compris par l'incitation et la glorification de la violence" dans les livres scolaires, une accusation de longue date.

Les sanctions consistent en un refus de visa pour des membres des deux institutions.

- "Distorsion morale" -

"Il est dans l'intérêt de notre sécurité nationale d'imposer des sanctions et de tenir l'OLP et l'Autorité palestinienne responsables du non-respect de leurs engagements et de la remise en cause des perspectives de paix", a indiqué le département d'Etat.

Le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar, s'est aussitôt félicité de cette décision, jugeant que "l'Autorité palestinienne doit payer le prix de sa politique actuelle consistant à verser des indemnités aux terroristes et à leurs familles pour les attentats commis et pour l'incitation à la haine contre Israël dans les écoles, les manuels scolaires, les mosquées et les médias palestiniens".

Il a également relevé, sur X, que cette mesure "met en évidence la distorsion morale de certains pays qui se sont empressés de reconnaître un Etat palestinien virtuel tout en fermant les yeux sur le soutien de l'Autorité palestinienne au terrorisme et à l'incitation à la haine".

L'Autorité palestinienne, dont le président est Mahmoud Abbas, administre la Cisjordanie occupée, tandis que l'OLP, créée en 1964, est le mouvement fondateur représentant les Palestiniens, longtemps dirigée par leur leader historique Yasser Arafat.

L'OLP rassemble la majorité des mouvements politiques palestiniens mais pas le mouvement islamiste Hamas, qui s'est emparé du pouvoir à Gaza en 2007.

Des pays arabes et occidentaux voudraient voir l'Autorité palestinienne, très affaiblie, jouer un rôle dans la gouvernance de la bande de Gaza après la guerre qui y fait rage depuis octobre 2023.

Depuis son retour au pouvoir en janvier, le président Donald Trump, qui a accueilli le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu par trois fois à la Maison Blanche, plus qu'aucun autre dirigeant étranger, a apporté un soutien inconditionnel à Israël, tout en oeuvrant sans succès pour un cessez-le-feu à Gaza.

Mais il s'est montré peu disert sur l'Autorité palestinienne, décriée pour le manque de réformes et la corruption.

Parmi ses premiers décrets, le président Trump avait levé des sanctions imposées sous son prédécesseur Joe Biden visant des colons israéliens extrémistes en Cisjordanie, en proie à une recrudescence des violences.


L'envoyé de Trump rencontre Netanyahu, Israël face à des critiques accrues

L'envoyé du président américain Donald Trump pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, rencontre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu jeudi. (GPO)
L'envoyé du président américain Donald Trump pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, rencontre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu jeudi. (GPO)
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  • L'émissaire américain Steve Witkoff a discuté jeudi à Jérusalem avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu de la guerre à Gaza, à l'heure où de nombreux pays ont dit envisager de reconnaître un Etat palestinien au grand dam d'Israël
  • Les morts tombés sous les tirs et bombardements israéliens se comptent par dizaines chaque jour dans le territoire palestinien assiégé par Israël

Jérusalem, Non défini: L'émissaire américain Steve Witkoff a discuté jeudi à Jérusalem avec le Premier ministre Benjamin Netanyahu de la guerre à Gaza, à l'heure où de nombreux pays ont dit envisager de reconnaître un Etat palestinien au grand dam d'Israël.

Après 22 mois d'une guerre dévastatrice déclenchée par une attaque du Hamas sur le sol israélien le 7 octobre 2023, la bande de Gaza est menacée d'une "famine généralisée" selon l'ONU et est totalement dépendante de l'aide humanitaire distribuée par camions ou larguée depuis les airs.

Les morts tombés sous les tirs et bombardements israéliens se comptent par dizaines chaque jour dans le territoire palestinien assiégé par Israël, selon la Défense civile locale qui a fait état de 38 Palestiniens tués jeudi.

Plusieurs dizaines de corps gisaient empilés à la morgue de l'hôpital al-Chifa dans le nord de Gaza, dans l'attente d'être collectés par leurs proches, a constaté un correspondant de l'AFP.

"Le moyen le plus rapide de mettre fin à la crise humanitaire à Gaza est que le Hamas CAPITULE ET LIBÈRE LES OTAGES !!!", a déclaré le président américain Donald Trump sur X.

Rien n'a filtré de la rencontre entre MM. Witkoff et Netanyahu mais en début de semaine, M. Trump a semblé se distancer de son allié israélien en évoquant une "vraie famine" à Gaza.

Avant l'arrivée jeudi de l'émissaire de M. Trump, des dizaines de mères et proches d'otages encore aux mains du Hamas ont manifesté devant le bureau du Premier ministre à Jérusalem, exigeant un "accord global" qui garantirait la libération des 49 otages encore détenus à Gaza, dont 27 ont été déclarés morts par l'armée.

- "Position minoritaire" -

L'attaque du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023 a entraîné du côté israélien la mort de 1.219 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de données officielles.

En riposte, Israël a juré de détruire le Hamas et lancé une offensive dévastatrice à Gaza qui a fait au moins 60.249 morts, en majorité des civils, d'après les données du ministère de la Santé à Gaza jugées fiables par l'ONU. La campagne aérienne et terrestre a dévasté le territoire et provoqué un désastre humanitaire.

Le chef de la diplomatie allemande Johann Wadephul a lui rencontré à Jérusalem son homologue israélien Gideon Saar, avant de rencontrer M. Netanyahu.

Avant de décoller pour Israël, M. Wadephul a estimé qu'Israël était "de plus en plus en position minoritaire", alors qu'un "nombre croissant de pays, y compris européens, sont prêts à reconnaître un Etat palestinien sans processus de négociation préalable".

Ces visites interviennent après la multiplication des alertes d'organisations internationales sur une famine à Gaza et l'échec de négociations indirectes, sous médiation américaine, qatarie et égyptienne, entre Israël et le Hamas en vue d'un cessez-le-feu.

Le gouvernement israélien a annoncé dimanche une pause limitée dans l'offensive afin de permettre l'acheminement de l'aide dans le petit territoire pauvre où s'entassent plus de deux millions de Palestiniens.

Mais ces aides sont jugées insuffisantes par les organisations internationales face aux besoins immenses de la population.

- "Pression déformée"

Le Portugal a indiqué jeudi envisager de reconnaître l'Etat de Palestine, après que plusieurs pays dont le Canada, la France et le Royaume-Uni ont annoncé leur intention de faire de même en marge de l'Assemblée générale de l'ONU en septembre.

Une telle reconnaissance reste néanmoins largement symbolique en raison du refus d'Israël de la création d'un tel Etat auquel aspirent les Palestiniens.

Dans ce contexte, Israël a dénoncé une "campagne de pression internationale déformée" venant "récompenser le Hamas et nuire aux efforts visant à obtenir un cessez-le-feu à Gaza".

Les Etats-Unis, qui ont dénoncé les annonces sur la reconnaissance d'un Etat palestinien, ont imposé des sanctions contre des responsables de l'Autorité palestinienne et de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP), accusant les deux organismes d'avoir pris des mesures pour "internationaliser leur conflit avec Israël" et de "continuer à soutenir le terrorisme".

Le gouvernement Netanyahu, qui veut chasser le Hamas de Gaza et a annoncé son intention de contrôler le territoire, semble peiner à trancher sur une solution politique d'après-guerre.

Dans ce contexte, la frange la plus radicale de sa coalition gouvernementale plaide pour un retour des colonies à Gaza, évacuées en 2005 avec le retrait unilatéral israélien du territoire après 38 ans d'occupation.

L'armée israélienne a par ailleurs annoncé le retrait du nord de Gaza de sa 98e Division, composée d'unités parachutistes et de commandos d'élite, qui a "se prépare désormais à de nouvelles missions".


Une experte de l’ONU : « La famine imposée à Gaza est une atteinte grave à la dignité humaine »

Des Palestiniens se rassemblent pour recevoir de la nourriture d'une cuisine caritative dans la ville de Gaza, le 28 juillet 2025. (Reuters)
Des Palestiniens se rassemblent pour recevoir de la nourriture d'une cuisine caritative dans la ville de Gaza, le 28 juillet 2025. (Reuters)
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  • Alice Jill Edwards dénonce une privation prolongée de nourriture entraînant malnutrition, défaillances d’organes et décès, notamment chez les nourrissons et femmes enceintes
  • « Des règles changeantes, une distribution militarisée et l’incertitude permanente sur l’accès aux besoins de base provoquent désespoir, stress et traumatismes », alerte-t-elle

NEW YORK: La rapporteuse spéciale de l’ONU sur la torture, Alice Jill Edwards, a exprimé mercredi sa vive inquiétude face à l’augmentation du nombre de décès liés à la famine parmi les Palestiniens de Gaza.

Elle a qualifié la famine infligée aux civils de « meurtrière, inhumaine et dégradante », appelant à une aide humanitaire rapide et sans entrave vers l’enclave dévastée.

« Priver des gens de nourriture, d’eau et de dignité constitue une violation grave et répétée dans ce conflit. Cela doit cesser », a-t-elle déclaré, citant des rapports « choquants » de civils tués en faisant la queue pour se nourrir, et des cas généralisés de faim et de malnutrition.

Elle a alerté sur un risque croissant de famine généralisée à Gaza, soulignant que toutes les parties au conflit ont des obligations juridiques, au regard du droit international, d’assurer un accès à l’eau et à la nourriture pour les civils sous leur contrôle, et de faciliter l’aide humanitaire.

« Ils ne doivent ni voler, ni détourner, ni bloquer délibérément l’acheminement de l’aide », a-t-elle averti.

Elle a décrit les « conséquences physiologiques catastrophiques » de la privation prolongée de calories : malnutrition, défaillance d’organes et décès, touchant particulièrement les groupes vulnérables comme les nourrissons et les femmes enceintes.

« L’impact psychologique d’un tel déni est d’une cruauté intrinsèque », a-t-elle poursuivi.

« Des règles constamment changeantes, des distributions militarisées, et une incertitude quotidienne sur l’accès aux besoins fondamentaux plongent les gens dans un désespoir et une détresse extrêmes. »

Elle a salué l’annonce par Israël de pauses humanitaires permettant au Programme alimentaire mondial d’opérer pendant trois mois, tout en soulignant que « davantage doit être fait » pour mettre fin aux hostilités et établir une paix durable fondée sur la solution à deux États.

« Personne ne devrait subir l’humiliation de devoir mendier pour se nourrir, surtout quand des stocks suffisants sont disponibles », a-t-elle déclaré.

Edwards a également renouvelé son appel à la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages, à la libération des Palestiniens détenus arbitrairement, et à la mise en place d’enquêtes indépendantes sur les allégations de torture, de mauvais traitements et d’éventuels crimes de guerre, de la part de toutes les parties.

Elle a indiqué avoir exprimé ses préoccupations à plusieurs reprises aux autorités concernées et continuer de réclamer une pleine reddition de comptes.

Les rapporteurs spéciaux font partie des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme de l’ONU. Ils sont indépendants, ne sont pas membres du personnel des Nations unies et travaillent bénévolement.