La Turquie produit du gaz naturel dans un nouveau champ pour réduire sa dépendance vis-à-vis de l’étranger

Sakarya est le plus grand champ gazier découvert à ce jour en mer Noire et le plus grand de l’Histoire de la Turquie. (Turkish Petroleum)
Sakarya est le plus grand champ gazier découvert à ce jour en mer Noire et le plus grand de l’Histoire de la Turquie. (Turkish Petroleum)
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Publié le Mercredi 19 avril 2023

La Turquie produit du gaz naturel dans un nouveau champ pour réduire sa dépendance vis-à-vis de l’étranger

  • Le champ offshore de Sakarya, à partir duquel la Turquie produira du gaz naturel conjointement avec Turkish Petroleum, Schlumberger NV et Subsea 7 SA, fournira dix millions de m3 par jour dans un premier temps
  • Les fréquentes coupures de gaz de l’Iran dans le passé mettent en lumière l’insécurité énergétique de la Turquie et rappellent la nécessité de garantir des approvisionnements alternatifs

ANKARA: Avant les prochaines élections, la Turquie a annoncé le début de la production de gaz naturel provenant du plus grand gisement de la mer Noire à partir de 20 h 23 le 20 avril, marquant le centenaire de la république de Turquie cette année.

Cette décision devrait permettre de réduire la dépendance énergétique du pays vis-à-vis de l’étranger et de faire baisser les factures des ménages.

Pour un pays qui consomme quelque 53 milliards de m3 de gaz naturel par an, la production de ce nouveau gisement sera moins chère que le gaz importé, comme précédemment annoncé par le ministre de l’Énergie, Fatih Dönmez.

Le champ offshore de Sakarya, à partir duquel la Turquie produira du gaz naturel conjointement avec Turkish Petroleum, Schlumberger NV et Subsea 7 SA, fournira dix millions de m3 par jour dans un premier temps, avec une augmentation prévue à quarante millions de m3 d’ici à 2028, lors de la deuxième phase.

Le gisement contiendrait près de 710 milliards de m3 de réserves récupérables.

On ne sait toutefois pas encore dans quelle mesure la Turquie – qui a des liaisons par gazoduc avec la Bulgarie et la Grèce – pourrait exporter ce gaz non russe vers les marchés européens.

Madalina Sisu Vicari, experte indépendante en géopolitique énergétique, a récemment déclaré à Arab News que le champ gazier de Sakarya «a définitivement une valeur économique importante: c’est le plus grand champ gazier découvert à ce jour en mer Noire et le plus grand de l’Histoire de la Turquie».

«Le projet revêt une importance nationale considérable pour la Turquie, qui dépend presque totalement des importations d’énergie. La dépendance presque totale du pays vis-à-vis des importations de combustibles fossiles a toujours entraîné d’importantes vulnérabilités, tant sur le plan économique que géopolitique.»

En 2022, la facture des importations d’énergie de la Turquie, alimentée par la flambée des prix du pétrole et du gaz, a augmenté de 90% par rapport à l’année précédente, s’élevant à 96,55 milliards de dollars (1 dollar = 0,91 euro).

L’experte estime que la position de la Russie en tant que principal fournisseur de gaz pour la Turquie – bien qu’en baisse, mais totalisant toujours près de 40% de part de marché l’année dernière – pose des défis importants à la politique d’équilibre géopolitique de la Turquie, en particulier dans le contexte de la guerre en Ukraine.

«La production de gaz en provenance de Sakarya pourrait apporter une contribution significative au développement de l’industrie énergétique turque et à la croissance de l’économie, car elle peut fournir entre 25 et 30% de la demande intérieure du pays, ce qui pourrait soutenir la propre sécurité énergétique de la Turquie et son bien-être économique en réduisant la facture des importations d’énergie, le déficit et, finalement, les prix intérieurs de l’énergie», déclare-t-elle.

Selon Mme Vicari, la production nationale de gaz pourrait également donner à la Turquie plus de poids dans ses relations bilatérales avec la Russie, mais il reste à déterminer si la Turquie est disposée à le convertir en gains géopolitiques et géoéconomiques et comment ces derniers se traduiraient en mesures politiques.

«La production du champ de Sakarya pourrait, en théorie, jouer un rôle dans l’objectif de la Turquie de devenir un hub gazier. Néanmoins, ce concept n’est pas encore clarifié: un hub pour différents fournisseurs qui négocient et achètent du gaz ou un projet de gazoduc comme TurkStream qui ne passe que par la Turquie», précise-t-elle.

Toujours selon l’experte, un autre élément du hub gazier n’est toujours pas clair, soit la possibilité que le gaz russe utilise le hub. «Il s’agit d’un élément essentiel, car il pourrait contribuer à la consolidation de la position régionale de Gazprom, dans le contexte des efforts de l’Union européenne (UE) de renoncer à l’énergie russe», ajoute-t-elle.

Pour Pinar Ipek, experte en sécurité énergétique à l’université d’économie et de technologie Tobb à Ankara, la dépendance énergétique de la Turquie vis-à-vis de la Russie reste un défi à la lumière de la géopolitique énergétique régionale.

«La Turquie consomme entre 50 et 58 milliards de m3 en fonction de son taux de croissance économique et de sa demande d’électricité. Les importations de gaz naturel de la Turquie en provenance de Russie en pourcentage des importations totales de gaz naturel ont culminé en 2011 à 58%, alors qu’elles étaient de 54% en moyenne entre 2011 et 2021. En 2021, le pourcentage est passé à 44,9%», explique-t-elle à Arab News.

Elle ajoute que la Turquie a une interdépendance asymétrique avec la Russie dans la géopolitique énergétique régionale, bien qu’elle tente de réduire la part des importations de gaz naturel par gazoduc.

«L’importance de la production de gaz naturel du champ offshore de Sakarya découle de sa contribution à la réduction des risques de coupures de gaz naturel dans les gazoducs existants en provenance de la Russie ou de l’Iran», soutient-elle.

Les fréquentes coupures de gaz de l’Iran dans le passé mettent en lumière l’insécurité énergétique de la Turquie et rappellent la nécessité de garantir des approvisionnements alternatifs.

«En janvier 2022, lorsque l’Iran a interrompu les flux de gaz naturel vers la Turquie pendant dix jours en raison de problèmes techniques, Botas, la société gazière publique turque, a dû ordonner aux centrales électriques alimentées au gaz naturel de réduire leur consommation de gaz, tandis que Teias, le gestionnaire du réseau de transport d’électricité, a dû imposer soixante-douze heures de coupure d’électricité dans les zones industrielles», poursuit Mme Ipek.

Néanmoins, elle estime que l’approvisionnement annuel en gaz de ce champ n’est pas suffisant pour satisfaire les besoins énergétiques actuels de la Turquie.

«C’est insuffisant pour la reprise économique ou la sécurité énergétique de la Turquie compte tenu de sa demande énergétique actuelle qui nécessite de plus grands volumes d’importations de gaz naturel à moins qu’il n’y ait des substituts, en particulier pour la production d’électricité», souligne-t-elle.

Mais Pinar Ipek suggère également que ce gisement est important en raison des besoins énergétiques européens en gaz naturel non russe à la suite de la guerre entre la Russie et l’Ukraine.

«En conséquence, la Turquie peut faciliter son aspiration de longue date à devenir un hub gazier si elle peut remplir les conditions. L’une des conditions est de satisfaire aux mécanismes du marché pour un lieu de tarification/échange, comme le prix au comptant et l’échange des volumes de gaz naturel alloués dans les gazoducs», explique-t-elle.

«Cependant, la Turquie n’a actuellement aucun droit de réexporter du gaz qui a été transporté via le Tanap (gazoduc transanatolien) ou TurkStream. De plus, les récentes propositions du gouvernement de restructurer Botas et de déléguer au président les droits de gestion des entreprises dégroupées, ainsi que ses relations plus étroites avec la Russie dans le domaine de la coopération énergétique, soulèvent des doutes quant aux mécanismes de marché requis pour un hub gazier», conclut-elle.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Espagne: la maison mère de Paco Rabanne et Jean Paul Gaultier se lance en Bourse

 Les marques Nina Ricci, Paco Rabanne et Jean Paul Gaultier font vendredi leur entrée sur les marchés financiers avec l'introduction en Bourse à Madrid de leur maison mère, le groupe espagnol Puig, en pleine expansion dans le secteur du luxe. (AFP).
Les marques Nina Ricci, Paco Rabanne et Jean Paul Gaultier font vendredi leur entrée sur les marchés financiers avec l'introduction en Bourse à Madrid de leur maison mère, le groupe espagnol Puig, en pleine expansion dans le secteur du luxe. (AFP).
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  • Cent dix ans après sa création, la maison de beauté catalane va connaître une petite révolution avec cette opération, censée lui donner les moyens de concurrencer les grands noms du secteur
  • C'est "une étape décisive" qui "nous permettra d'être plus compétitifs sur le marché international de la beauté", soulignait dans un récent communiqué le PDG de l'entreprise, Marc Puig

MADRID: Les marques Nina Ricci, Paco Rabanne et Jean Paul Gaultier font vendredi leur entrée sur les marchés financiers avec l'introduction en Bourse à Madrid de leur maison mère, le groupe espagnol Puig, en pleine expansion dans le secteur du luxe.

Cent dix ans après sa création, la maison de beauté catalane va connaître une petite révolution avec cette opération, censée lui donner les moyens de concurrencer les grands noms du secteur comme Estée Lauder, Hermès, Kering et LVMH.

C'est "une étape décisive" qui "nous permettra d'être plus compétitifs sur le marché international de la beauté", soulignait dans un récent communiqué le PDG de l'entreprise, Marc Puig, en assurant viser une "approche de long terme".

Fondé en 1914 à Barcelone par l'entrepreneur Antonio Puig Castellò, le groupe de parfums et cosmétiques espagnol s'est fait une place ces dernières années parmi les géants du luxe et de la mode, en multipliant les acquisitions de marques de prestige.

La maison catalane contrôle ainsi les griffes Paco Rabanne, Nina Ricci, Charlotte Tilbury, Carolina Herrera, Dries Van Noten et Jean Paul Gaultier. Il a également noué des contrats de licence avec Prada, Christian Louboutin et Comme des Garçons.

Contrôle familial

L'introduction en Bourse de Puig se fera vendredi au prix de 24,50 euros par action. Elle est présentée par les analystes comme le plus gros lancement boursier de l'année en Espagne et comme l'un des principaux en Europe.

Le montant fixé pour l'action Puig valorise le groupe barcelonais à près de 14 milliards d'euros. Cela lui permettra d'intégrer directement l'Ibex 35, indice vedette regroupant les 35 plus grosses entreprises espagnoles.

Cette opération d'envergure se déclinera en deux phases: une émission de nouvelles actions, devant rapporter 1,25 milliard d'euros, et la vente de parts détenues par Exea, la holding de la famille Puig, pour près de 1,36 milliard d'euros.

Cette double opération pourrait être complétée par une vente de titres réservée à certains investisseurs pour un total de 390 millions d'euros, selon le groupe. De quoi lever au total quelque 3 milliards d'euros.

Malgré cette opération, la famille Puig assure qu'elle restera l'actionnaire majoritaire de l'entreprise avec 71,7% des parts. Elle conservera, en outre, une très large majorité des droits de vote (92,5%) au sein de son conseil d'administration.

« Muscle financier »

L'introduction en Bourse du groupe catalan avait été officialisée le 8 avril, après avoir été évoquée pour la première fois le 20 octobre par Marc Puig en personne dans un entretien au quotidien économique Financial Times.

Le PDG de 62 ans avait alors estimé qu'elle permettrait d'imposer une "discipline" de marché à l'entreprise et d'éviter les possibles "difficultés" auxquelles les sociétés familiales sont confrontées lors du passage de témoin entre générations.

Il arrive, en effet, "que les entreprises familiales perdent leur position sur le marché. Elles peuvent commencer à mourir lentement et personne au sein de l'entreprise n'en est conscient", avait insisté le petit-fils d'Antonio Puig, à la tête du groupe depuis 2004.

Selon Javier Cabrera, analyste chez XTB, ce lancement boursier devrait permettre à la maison de beauté catalane d'acquérir du "muscle financier", en profitant de la "bonne dynamique boursière du secteur".

De fait, le contexte est actuellement porteur pour le luxe, dont les poids lourds ont enregistré des niveaux de ventes record en 2023, malgré un léger ralentissement après deux années de croissance à deux chiffres.

Puig a, pour sa part, réalisé l'an dernier un chiffre d'affaires de 4,3 milliards d'euros et dégagé un bénéfice net de 465 millions d'euros, en hausse de 16% sur un an. Et cette dynamique pourrait s'accélérer.

Les acquisitions réalisées ces dernières années permettent "une forte croissance" et une "diversification des revenus" du groupe, observe Javier Cabrera, qui insiste sur ses bons résultats en Chine, marché devenu incontournable pour le secteur du luxe.


Liban: l'Union européenne annonce une aide d'un milliard d'euros pour soutenir l'économie

Le Premier ministre libanais Najib Mikati (au centre) pose pour une photo avec la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et le président chypriote Nikos Christodoulides lors de leur rencontre au siège du gouvernement du Grand Sérail à Beyrouth (Photo, AFP).
Le Premier ministre libanais Najib Mikati (au centre) pose pour une photo avec la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen et le président chypriote Nikos Christodoulides lors de leur rencontre au siège du gouvernement du Grand Sérail à Beyrouth (Photo, AFP).
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  • Le président chypriote s'était déjà rendu au Liban le 8 avril pour discuter avec M. Mikati de la question des réfugiés
  • Le Liban, frappé par une crise économique depuis 2019 dit accueillir près de deux millions de réfugiés syriens

BEYROUTH: La cheffe de la Commission européenne a annoncé jeudi à Beyrouth une aide d'un milliard d'euros pour soutenir la "stabilité socio-économique" du Liban et appelé ce pays à bien coopérer dans la lutte contre l'immigration clandestine.

Les fonds seront "disponibles à partir de cette année jusqu’en 2027. Nous voulons contribuer à la stabilité socio-économique du Liban", a déclaré Ursula von der Leyen, ajoutant "compter sur une bonne coopération" des autorités libanaises dans la lutte contre l'immigration clandestine vers l'Europe.

Le Liban, frappé par une crise économique depuis 2019 dit accueillir près de deux millions de réfugiés syriens, soit le plus grand ratio par habitant au monde.

Le petit pays méditerranéen, frontalier de la Syrie, n'a de cesse d'exhorter la communauté internationale de les rapatrier, les armes s'étant tues dans plusieurs régions syriennes.

Les migrants, demandeurs d'asile et réfugiés qui quittent le Liban par bateau à la recherche d'une vie meilleure en Europe se dirigent souvent vers Chypre qui affirme être en première ligne face aux flux migratoires au sein de l'UE.

"La réalité actuelle de cette question est devenue plus grande que la capacité du Liban à la traiter", a déclaré le Premier ministre libanais Najib Mikati, lors d'une conférence de presse en présence de Mme. von der Leyen et du président chypriote Nikos Christodoulides.

Augmentation des ressortissants syriens à Chypre 

"Nous renouvelons notre demande à l'UE, (...) d’aider les personnes déplacées dans leur pays (d'origine et non au Liban), pour les encourager à rentrer volontairement", a-t-il poursuivi.

De son côté, Chypre, qui fait état d'une augmentation des arrivées de ressortissants syriens, estime que la guerre entre Israël et le Hamas à Gaza, qui a déclenché des violences à la frontière israélo-libanaise, a affaibli les efforts de Beyrouth pour empêcher les départs.

De janvier à avril 2024, plus de 40 bateaux transportant environ 2.500 personnes ont accosté à Chypre, a indiqué à l'AFP l'agence de l'ONU pour les réfugiés (HCR).

Chypre avait conclu il y a des années avec le Liban un accord pour le retour de migrants en situation irrégulière.

Le président chypriote s'était déjà rendu au Liban le 8 avril pour discuter avec M. Mikati de la question des réfugiés et de la manière de contrôler le flux migratoire vers son pays.


TotalEnergies: le gouvernement remonté contre un possible transfert de sa cotation à New York

Le ministre français de l'Économie Bruno Le Maire (Photo, AFP).
Le ministre français de l'Économie Bruno Le Maire (Photo, AFP).
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  • Aujourd'hui, TotalEnergies a déjà des titres inscrits à Londres et à New York, mais de manière secondaire
  • M. Pouyanné avait notamment évoqué la frilosité de l'Europe vis-à-vis de sa stratégie qui consiste à continuer d'investir dans les énergies fossiles

PARIS: Confronté à la réflexion de TotalEnergies quant au transfert de la cotation principale du groupe à New York, le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire a affirmé jeudi qu'il comptait se battre pour que ce déménagement de la Bourse de Paris "n'ait pas lieu".

 

"Je suis là pour faire en sorte que ça n'ait pas lieu, parce que je pense que c'est une décision qui est grave", a déclaré M. Le Maire sur BFMTV/RMC.

"Est-ce que l'intérêt suprême de la nation est de garder le siège social de Total en France et la cotation principale de Total en France? Oui, et donc je me battrai pour ça", a-t-il ajouté.

"Nous avons besoin de Total", a-t-il souligné, mentionnant le plafonnement à moins de 2 euros du litre du carburant dans ses stations françaises.

L'affaire est partie des déclarations surprises de Patrick Pouyanné à l'agence Bloomberg. Dans un entretien publié le 26 avril, Patrick Pouyanné avait dit réfléchir à une cotation principale à la Bourse de New York. Près de la moitié de l'actionnariat de TotalEnergies est désormais constituée d'actionnaires institutionnels (fonds de pension, gestionnaires d'actifs, assureurs...) nord-américains.

"Ce n'est pas une question d'émotion. C'est une question d'affaires", avait ajouté le dirigeant de l'entreprise, tout en assurant que le siège social de ce fleuron du CAC 40 resterait bien à Paris.

Son argument principal: "une base d'actionnaires américains qui grossit", ce qui amène l'entreprise à s'interroger sur la façon de "donner accès plus facilement aux actions pour les investisseurs américains", a-t-il expliqué aux analystes, le 26 avril.

Appétit américain pour les fossiles 

Las du manque d'appétit des investisseurs européens pour le secteur pétrogazier, alors que le groupe estime investir beaucoup dans les énergies vertes, le PDG chercherait à se rapprocher des investisseurs américains moins contraints par des règles d'investissement durable.

"Les politiques au sens large ESG (environnement, social et de gouvernance, NDLR) en Europe ont plus de poids", a ainsi justifié M. Pouyanné lundi devant des sénateurs français.

Le PDG observe que "la base d'actionnaires européens de TotalEnergies diminue, notamment la base française" qui a reculé de "7% au cours des quatre dernières années, largement à cause des réglementations, de la pression qui est faite sur eux".

En filigrane, le patron pointe du doigt le changement en France du label Investissement socialement responsable (ISR), qui exclut désormais les entreprises exploitant du charbon ou des hydrocarbures non conventionnels, une mesure décidée par Bercy lui-même fin 2023. Ahmed Ben Salem, analyste du groupe financier Oddo BHF, nuance ce point en indiquant que les fonds labellisés ISR représentaient 1,7% de l'actionnariat de TotalEnergies.

Pendant que l'UE muscle sa réglementation pour flécher les investissements vers la transition écologique, aux Etats-Unis la pression de certains Etats, comme le Texas, pour ne pas délaisser les entreprises d'énergies fossiles a poussé de grands gérants d'actifs à abaisser leurs ambitions climatiques.

"Nous observons clairement plus d'appétit pour les actions d'entreprises des secteurs énergétique, pétrole et gaz du côté de l'Amérique du Nord qu'en Europe", a dit M. Pouyanné aux analystes.

Conséquence de ce manque d'appétit: une valorisation moins importante. TotalEnergies avance "exactement les mêmes résultats trimestriels qu'une entreprise comme Chevron". Le groupe énergétique américain est valorisé 300 milliards de dollars en Bourse, contre 175 milliards pour TotalEnergies.

Le mirage d'un marché européen 

La faute au cloisonnement des marchés financiers en Europe, selon M. Le Maire, qui avait dans un premier temps estimé dimanche sur LCI qu'il fallait offrir à TotalEnergies "les moyens de se développer" en accélérant sur l'union des marchés de capitaux (UMC) dans l'UE.

L'UMC permettrait d'augmenter la taille du marché boursier européen pour que les entreprises s'y financent davantage. Ahmed Ben Salem n'est cependant pas convaincu des changements éventuels pour TotalEnergies: "Il faut des acheteurs sur le secteur, pas seulement des liquidités."

La moindre valorisation de TotalEnergies "est aussi subie par les autres majors européennes", explique-t-il à l'AFP, citant l'exemple du britannique Shell qui "est dans la même réflexion" concernant une cotation principale à New York.

Au Sénat, le patron n'a pas exclu de reconsidérer la question si "plus d'actionnaires européens (...) rachètent du TotalEnergies".