Sans surprise, le candidat américain Ajay Banga devient président de la Banque mondiale

Seul en lice, Ajay Banga est devenu sans surprise le nouveau président de la Banque mondiale (BM). (AFP)
Seul en lice, Ajay Banga est devenu sans surprise le nouveau président de la Banque mondiale (BM). (AFP)
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Publié le Mercredi 03 mai 2023

Sans surprise, le candidat américain Ajay Banga devient président de la Banque mondiale

  • Dans un contexte de montée des tensions géopolitiques, la décision américaine de proposer la candidature de M. Banga, qui est né et a grandi en Inde, était tout sauf anodine
  • Lors des réunions de printemps, les principaux contributeurs à la BM se sont entendus pour augmenter ses capacités de financement de 50 milliards de dollars sur les dix prochaines années

WASHINGTON: Seul en lice, Ajay Banga est devenu sans surprise le nouveau président de la Banque mondiale (BM), une institution sous le feu des critiques tant quant à sa gouvernance que concernant ses efforts en faveur de la lutte contre le réchauffement climatique.

Des thèmes sur lesquels le candidat des Etats-Unis, dirigeant d'entreprises de 63 ans qui est né et a grandi en Inde, se sait attendu, assurant vouloir en faire la priorité de son mandat.

Celui-ci, d'une durée de cinq ans, débutera le 2 juin, a précisé la BM dans son communiqué annonçant la décisions de son conseil d'administration.

Le président américain Joe Biden a aussitôt félicité M. Banga, assurant être prêt à "soutenir ses efforts de transformation de la Banque mondiale, qui reste une des institutions les plus essentielles pour lutter contre la pauvreté dans le monde".

Traditionnellement, la BM est chasse gardée des Etats-Unis, dont un citoyen a toujours dirigé la Banque depuis sa création, dans la foulée des accords de Bretton Woods en 1944.

Mais cette hégémonie était de plus en plus remise en cause, notamment par les grands pays émergents, Brésil, Chine, Inde et Russie en tête, qui souhaitent, depuis plusieurs années, voir leur place dans les institutions financières internationales se renforcer.

Dans un contexte de montée des tensions géopolitiques, la décision américaine de proposer la candidature de M. Banga, qui est né et a grandi en Inde, était tout sauf anodine, alors que les Etats-Unis tentent de se rapprocher de l'autre géant asiatique pour contrer l'influence chinoise dans la région.

Dès sa désignation, Ajay Banga s'est lancé dans une tournée mondiale, visant à promouvoir sa candidature et à obtenir le soutien d'un maximum de pays, en particulier émergents et en développement.

Il a ainsi pu compter sur l'Inde, le Kenya ou encore l'Afrique du Sud, qui ont soutenu sa candidature.

Mais pas seulement, puisque M. Banga a aussi pu compter sur le soutien d'un certain nombre de pays francophones, notamment, comme le rappelait mi-avril Abdoul Salam Bello, administrateur de la BM représentant 23 pays africains.

"Je pense que la campagne se passe très bien", estimait fin mars un responsable du Trésor américain, "son expérience est vue comme un point essentiel, tout comme sa connaissance du secteur privé et des partenariats entre privé et public, essentiels dans le cadre de la Banque mondiale".

Passer de la théorie à la pratique 

"Nous pensons que son expérience sera très importante afin d'aider la BM à renforcer la mobilisation du secteur privé. Lors de notre discussion, il a parlé de solutions pratiques très intéressantes pour renforcer cet engagement du privé", avait ajouté M. Bello.

"Quand on sait qu'on peut avoir besoin d'un financement, il est difficile de ne pas soutenir le candidat qui sera élu", confiait cependant à l'AFP un ministre africain présent à Washington durant les réunions de printemps de la BM et du Fonds monétaire international (FMI), début avril.

Dans un contexte où plus d'une soixantaine de pays pauvres et émergents est au bord ou frappé par une crise de la dette, les financements en provenance des deux institutions sont encore plus essentiels pour éviter un effondrement de leurs économies nationales.

D'autant que la hausse des taux des principales banques centrales affecte l'accès de ces pays aux financements, tout en renchérissant fortement les coûts, venant compliquer un peu plus la situation budgétaire de ces pays.

Le plus dur reste cependant désormais à faire pour Ajay Banga, qui devra répondre aux attentes sur deux dossiers brûlants et liés: la réforme des institutions financières internationales, à commencer par la BM, et une montée en puissance du financement de la lutte contre le réchauffement climatique.

D'autant que les besoins sont énormes, comme l'a rappelé à plusieurs reprises le FMI: un minimum de 1.000 milliards de dollars par an sera nécessaire, sur les prochaines années, pour aider les pays émergents et en développement à y faire face.

Lors des réunions de printemps, les principaux contributeurs à la BM se sont entendus pour augmenter ses capacités de financement de 50 milliards de dollars sur les dix prochaines années, un effort important mais notoirement insuffisant comparé aux besoins.

Afin d'y répondre, Ajay Banga n'a pas caché sa volonté d'embarquer le secteur privé.

"Il n'y a pas assez d'argent, que ce soit dans les banques multilatérales de développement, dans les grands gouvernements du monde développé, dans la société civile, même avec les intentions les plus philanthropiques", insistait-il début mars.

Parmi les solutions préconisées, M. Banga envisageait notamment de repenser l'approche de financement par projets précis, de manière à être plus incitatif à l'égard du secteur privé. Il aura désormais la possibilité de passer de la théorie à la pratique.


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".


La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, alerte le Secours populaire

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier. (AFP)
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  • "La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire
  • "La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg

PARIS: La précarité s'ancre dans le quotidien des Français, touchant tous les aspects de la vie des plus fragiles, alerte jeudi le Secours Populaire, qui publie un baromètre témoignant de cette situation jugée préoccupante.

"La précarité est toujours plus ancrée en France, elle interfère dans tous les aspects de la vie, que ce soit la santé, les loisirs, la vie familiale", estime auprès de l'AFP Henriette Steinberg, secrétaire générale du Secours populaire.

L'association publie un baromètre qui indique qu'un tiers des Français (31%) rencontrent des difficultés financières pour se procurer une alimentation saine permettant de faire trois repas par jour. De même 39% ont du mal à payer leurs dépenses d'électricité et 49% à partir en vacances au moins une fois par an, selon ce sondage réalisé par l'Institut Ipsos, auprès d'un échantillon de 1.000 personnes, représentatif de la population nationale âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas.

"La situation en France s'est détériorée" depuis une quinzaine d'années et dernièrement "on observe une stabilisation", précise Henriette Steinberg.

Revenus insuffisants, dépense imprévue, endettement excessif: au final, un Français sur cinq s'estime précaire pour différentes raisons, soit 20% de la population, contre 24% l'an dernier.

Malgré un "léger mieux" constaté sur certains indicateurs lié au "ralentissement de l'inflation", ce baromètre révèle "une situation sociale toujours très préoccupante", selon le Secours populaire.

En début de semaine, la déléguée interministérielle à la prévention et la lutte contre la pauvreté, Anne Rubinstein, a évoqué des "difficultés" rencontrées par l'Etat pour résorber un taux de pauvreté qui a atteint un niveau record en 2023 en France métropolitaine.

Face à cette situation, la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS) a appelé mardi à une "mobilisation collective" pour "débloquer la lutte contre la précarité".

Au niveau européen, 28% de la population déclare se trouver en situation précaire, également selon ce baromètre du Secours Populaire, qui s'appuie aussi sur des échantillons de 1.000 personnes représentatifs de neuf autres pays (Allemagne, Grèce, Italie, Pologne, Royaume-Uni, Moldavie, Portugal, Roumanie, Serbie).

La part des personnes se considérant comme précaires demeure à un niveau "très alarmant" en Grèce (46%) et en Moldavie (45%), pointe le baromètre.

En 2024, le Secours populaire a soutenu 3,7 millions de personnes en France. L'association fournit notamment de l'aide alimentaire et organise des activités pour différents publics pour rompre l'isolement.


Face à l'explosion des dépenses militaires, l'ONU appelle à «repenser les priorités»

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté. (AFP)
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté. (AFP)
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  • "Aujourd'hui, nous publions un rapport qui révèle une réalité saisissante: le monde dépense bien plus à faire la guerre qu'à construire la paix", a-t-il déclaré Antonio Guterres
  • Selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), les dépenses militaires mondiales ont atteint en 2024 près de 2.700 milliards de dollars, en hausse de plus de 9% sur un an

NATIONS-UNIES: Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a appelé mardi le monde à "repenser les priorités" en redirigeant une partie des dépenses militaires record vers le développement de l'humanité et la lutte contre la pauvreté.

"Aujourd'hui, nous publions un rapport qui révèle une réalité saisissante: le monde dépense bien plus à faire la guerre qu'à construire la paix", a-t-il déclaré Antonio Guterres.

Selon l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri), les dépenses militaires mondiales ont atteint en 2024 près de 2.700 milliards de dollars, en hausse de plus de 9% sur un an.

C'est "l'équivalent de 334 dollars par habitant de la planète", "près de 13 fois le montant de l'aide publique au développement des pays les plus riches et 750 fois le budget ordinaire de l'ONU", a noté Antonio Guterres.

Et en parallèle, la majorité des Objectifs de développement durables (ODD) visant à améliorer le sort de l'humanité d'ici 2030 (éradication de l'extrême pauvreté, égalité hommes-femmes, éducation...) ne sont pas sur la bonne voie.

Pourtant, mettre un terme à la faim dans le monde d'ici 2030 nécessiterait seulement 93 milliards de dollars par an, soit 4% des dépenses militaires de 2024, et faire en sorte que chaque enfant soit totalement vacciné coûterait entre 100 et 285 milliards par an, note le rapport demandé par les Etats membres.

Au total, l'ONU estime aujourd'hui à 4.000 milliards de dollars les investissements supplémentaires nécessaires chaque année pour atteindre l'ensemble des ODD, un montant qui pourrait grimper à 6.400 milliards dans les prochaines années.

Alors le secrétaire général de l'ONU a lancé un "appel à l'action, un appel à repenser les priorités, un appel à rééquilibrer les investissements mondiaux vers la sécurité dont le monde a vraiment besoin".

"Des dépenses militaires excessives ne garantissent pas la paix, souvent elles la sapent, encourageant la course aux armements, renforçant la méfiance et détournant des ressources de ce qui représentent les bases de la stabilité", a-t-il ajouté. "Un monde plus sûr commence par investir au moins autant pour lutter contre la pauvreté que nous le faisons pour faire la guerre".

"Rediriger même une fraction des dépenses militaires actuelles pourraient combler des écarts vitaux, envoyer des enfants à l'école, renforcer les soins de santé de base, développer les énergies propres et des infrastructures résistantes, et protéger les plus vulnérables", a-t-il plaidé.